Texte intégral
J.-J. Bourdin.- Commençons avec Johannesburg : savez-vous combien coûte ce Sommet de la terre ?
- "Très cher effectivement."
80 millions d'euros !
- "Et au niveau de la délégation française, évidemment, il y a évidemment aussi un certain nombre de millions d'euros que cela nous coûte. Mais je crois que l'enjeu est très important et que cela mérite d'y consacrer quelque argent."
80 millions d'euros, c'est 67 % du budget Santé du Mali. A quoi sert ce Sommet ?
- "Ce Sommet est très utile. D'abord, parce qu'il permet un diagnostic. Et ce diagnostic est évidemment affligeant sur l'état de pauvreté de la planète, du gaspillage de ses ressources naturelles, de l'écart de plus en plus grand entre les pays riches et les pays pauvres. Je dois dire que ce Sommet a été l'occasion dans la presse française, qu'elle soit la presse écrite, qu'elle la presse radio, comme vous, la télévision, de faire une fantastique campagne de communication et de mobilisation de l'opinion publique."
De sensibilisation...
- "J'ai trouvé que vraiment les dossiers qui avaient été faits à ce sujet ont été extrêmement bien faits et peuvent constituer une base de réflexion. Parce que Johannesburg, ce n'est pas seulement se lancer dans une opération d'aide publique au développement, importante certes, mais c'est aussi l'occasion de réfléchir ensemble à nos modes de production et de consommation. J'entendais à l'instant qu'on accusait des gens de bétonner leur jardin et d'empêcher ainsi l'écoulement des eaux ! Bien sûr, oui, nous avons des comportements qui ne sont pas des comportements de développement durable. Et avant même d'aller aider les pays en voie de développement, il faut réfléchir à ce que nous faisons."
Mais par exemple, vous triez vos déchets ?
- "Bien sûr que je les trie, évidemment. Et je les trie depuis très longtemps."
Sommet pour le développement durable ou pour "la destruction accélérée", pour reprendre la formule d'O. Besancenot ?
- "Il faut dans ce domaine de Johannesburg..."
Il faut se réunir pour quoi ?
- "Il faut surtout éviter les extrémismes de tous bords. D'un côté, ceux qui disent que cela ne sert à rien et qui en profitent pour remettre en cause des vieilles lunes idéologiques, et puis ceux qui disent qu'évidemment, il faut continuer, j'allais dire, à tout va, un certain nombre de destructions - je pense en particulier à l'attitude peut-être regrettable de l'administration américaine ..."
G. Bush n'y va pas...
- "G. Bush n'y va pas, mais ça ne changera pas grand chose, parce qu'effectivement, il y a d'abord une délégation américaine importante..."
Il a peur d'être mis en cause ?
- "Sans doute. Est-ce pour cela qu'il n'y va pas ? Mais ce qui est important, c'est l'action qu'il y aura sur l'opinion publique américaine. Nous sommes, nous, au Nord, dans des démocraties, et ce sont les opinions publiques à la fin qui influencent le gouvernement américain, le gouvernement français ou le gouvernement européen. Donc, cette prise de conscience est absolument capitale."
Que va dire la France ?
- "Par l'intermédiaire de son président de la République qui, comme vous le savez, est très attaché au concept de développement durable, la France va dire des choses très fortes. D'abord, elle va adhérer au diagnostic très pessimiste qui a été fait, elle va le redire, elle va redire que c'est inacceptable. Ensuite, elle va s'impliquer de façon forte, à travers son action gouvernementale, à travers ses entreprises qui sont présentes à Johannesburg, à travers ses associations, à travers aussi ses collectivités territoriales. Nous sommes passés d'une coopération complètement étatique à une coopération décentralisée. Elle va aussi dire qu'il faut respecter la diversité culturelle. C'est quelque chose à quoi le président de la République est très attaché ; il ne manque jamais de dire que le développement durable, c'est non seulement une dimension écologique, une dimension économique, une dimension sociale mais aussi une dimension culturelle. Et à terme, nous allons plaider pour une gouvernance environnementale mondiale, parce que demain, si nous voulons que la dimension environnementale soit prise en compte dans le développement, il faudra bien qu'une organisation sur le modèle de l'OMC puisse dire ce qu'il convient de faire et puisse aussi prendre des sanctions."
Sur les énergies renouvelables, une question précise : qu'allez-vous faire pour encourager l'énergie renouvelable ? Les éoliennes, la géothermie, le soleil, etc...
- "La caractéristique de ces énergies renouvelables, c'est que ce sont pour l'instant des énergies coûteuses à mettre en oeuvre. Donc, nous avons, nous les pays, un rôle majeur dans la recherche et dans la mise en oeuvre de ces énergies renouvelables. C'est la raison pour laquelle je souhaite les développer, aussi bien dans mes responsabilités de ministre que dans mes responsabilités de présidente de la Commission d'environnement de la région, par exemple sur l'éolien, afin que nous puissions développer, nous, dans nos pays développés, des technologies qui permettent d'apporter à ces pays ces énergies renouvelables. Donc, nous avons un rôle extrêmement important dans la recherche : trouver les technologies qui marchent et qui mettent donc ces énergies à disposition. Et puis, bien sûr, aider les pays concernés à développer des champs d'éoliens ou des piles solaires."
A propos du nucléaire, vous avez dit que "c'est une énergie propre". Est-ce que vous rediriez la même chose aujourd'hui ?
- "Bien entendu. C'est une énergie absolument indispensable. Vous savez qu'actuellement, le principal danger écologique qui menace la planète, c'est l'effet de serre. Il n'y a rien de plus important au point de vue écologique que le réchauffement climatique dû à l'effet de serre. Actuellement, 80 % de l'énergie sont produits par des énergies fossiles - provenant du pétrole, gaz, charbon -, extrêmement destructrices au niveau du développement durable, puisque dans un siècle, il n'y aura plus ces matières premières, et extrêmement productrices de gaz à effet de serre. Donc, je ne suis pas pour "le tout nucléaire" bien entendu, mais il faut savoir reconnaître l'apport du nucléaire dans la protection de la planète."
Est-ce que vous allez autoriser la COGEMA à améliorer ses capacités de retraitement de déchets ?
- "La question est évidemment en ce moment en étude en interministériel..."
Mais est-ce que vous allez autoriser la COGEMA à améliorer ses capacités de retraitement, oui ou non ?
- "C'est une décision qui sera prise conjointement par moi-même et par monsieur le Premier ministre."
Les usines à risques : L. Jospin avait promis 150 inspecteurs supplémentaires. Les crédits ont été annulés ?
- "Les crédits n'ont pas été annulés. Je vais présenter dans quelques semaines un projet de loi sur les risques industriels, auquel je souhaite adjoindre un autre chapitre sur les risques naturels. Les inondations que nous venons de vivre en Europe centrale montrent à quel point il est important d'avoir ce chapitre sur les risques naturels. Dans quelques semaines, dans quelques jours même, le 21 septembre, nous allons fêter - nous allons "fêter" ! - un bien triste anniversaire : celui de l'explosion d'AZF à Toulouse. Effectivement, je vais présenter un texte substantiel sur les risques industriels. Ce texte sera suivi par un renforcement des inspecteurs des installations classées. Et nous allons le faire sur les deux ans à venir."
La mesure la plus importante dans ce texte ?
- "Il n'y a pas une mesure plus importante. Il y a une chose qui m'a frappée dans ce qui s'est passé à Toulouse : c'est à quel point on n'a pas pris assez en compte le facteur humain dans les risques industriels. Si on met des inspecteurs des installations classées uniquement à contrôler la dimension des valves, ou tel ou tel circuit technologique, et que pendant ce temps-là, on laisse des salariés non qualifiés, intérimaires, qui ne connaissent pas l'entreprise, se déployer dans des industries extrêmement dangereuses, cela ne sert à rien."
Nous vivons dans un drôle de monde. Je vais vous raconter quelque chose. En 2001, on a dépensé dans le monde cinq fois plus d'argent en implants de poitrine et en Viagra que pour la recherche sur la maladie d'Alzheimer. Drôle de monde dans lequel nous vivons !
- "Drôle de monde, mais très significatif finalement. L'information que vous donnez montre bien qu'on ne peut pas non plus, sur ces histoires de développement durable, uniquement interpeller les gouvernements, les responsables socio-économiques, sans que chacun se pose un certain nombre de questions."
Mais à vous aussi, les gouvernements, d'initier et de donner l'exemple !
- "On n'arrête pas. Pourquoi croyez-vous que je suis là ce matin ?!"
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 27 août 2002)
- "Très cher effectivement."
80 millions d'euros !
- "Et au niveau de la délégation française, évidemment, il y a évidemment aussi un certain nombre de millions d'euros que cela nous coûte. Mais je crois que l'enjeu est très important et que cela mérite d'y consacrer quelque argent."
80 millions d'euros, c'est 67 % du budget Santé du Mali. A quoi sert ce Sommet ?
- "Ce Sommet est très utile. D'abord, parce qu'il permet un diagnostic. Et ce diagnostic est évidemment affligeant sur l'état de pauvreté de la planète, du gaspillage de ses ressources naturelles, de l'écart de plus en plus grand entre les pays riches et les pays pauvres. Je dois dire que ce Sommet a été l'occasion dans la presse française, qu'elle soit la presse écrite, qu'elle la presse radio, comme vous, la télévision, de faire une fantastique campagne de communication et de mobilisation de l'opinion publique."
De sensibilisation...
- "J'ai trouvé que vraiment les dossiers qui avaient été faits à ce sujet ont été extrêmement bien faits et peuvent constituer une base de réflexion. Parce que Johannesburg, ce n'est pas seulement se lancer dans une opération d'aide publique au développement, importante certes, mais c'est aussi l'occasion de réfléchir ensemble à nos modes de production et de consommation. J'entendais à l'instant qu'on accusait des gens de bétonner leur jardin et d'empêcher ainsi l'écoulement des eaux ! Bien sûr, oui, nous avons des comportements qui ne sont pas des comportements de développement durable. Et avant même d'aller aider les pays en voie de développement, il faut réfléchir à ce que nous faisons."
Mais par exemple, vous triez vos déchets ?
- "Bien sûr que je les trie, évidemment. Et je les trie depuis très longtemps."
Sommet pour le développement durable ou pour "la destruction accélérée", pour reprendre la formule d'O. Besancenot ?
- "Il faut dans ce domaine de Johannesburg..."
Il faut se réunir pour quoi ?
- "Il faut surtout éviter les extrémismes de tous bords. D'un côté, ceux qui disent que cela ne sert à rien et qui en profitent pour remettre en cause des vieilles lunes idéologiques, et puis ceux qui disent qu'évidemment, il faut continuer, j'allais dire, à tout va, un certain nombre de destructions - je pense en particulier à l'attitude peut-être regrettable de l'administration américaine ..."
G. Bush n'y va pas...
- "G. Bush n'y va pas, mais ça ne changera pas grand chose, parce qu'effectivement, il y a d'abord une délégation américaine importante..."
Il a peur d'être mis en cause ?
- "Sans doute. Est-ce pour cela qu'il n'y va pas ? Mais ce qui est important, c'est l'action qu'il y aura sur l'opinion publique américaine. Nous sommes, nous, au Nord, dans des démocraties, et ce sont les opinions publiques à la fin qui influencent le gouvernement américain, le gouvernement français ou le gouvernement européen. Donc, cette prise de conscience est absolument capitale."
Que va dire la France ?
- "Par l'intermédiaire de son président de la République qui, comme vous le savez, est très attaché au concept de développement durable, la France va dire des choses très fortes. D'abord, elle va adhérer au diagnostic très pessimiste qui a été fait, elle va le redire, elle va redire que c'est inacceptable. Ensuite, elle va s'impliquer de façon forte, à travers son action gouvernementale, à travers ses entreprises qui sont présentes à Johannesburg, à travers ses associations, à travers aussi ses collectivités territoriales. Nous sommes passés d'une coopération complètement étatique à une coopération décentralisée. Elle va aussi dire qu'il faut respecter la diversité culturelle. C'est quelque chose à quoi le président de la République est très attaché ; il ne manque jamais de dire que le développement durable, c'est non seulement une dimension écologique, une dimension économique, une dimension sociale mais aussi une dimension culturelle. Et à terme, nous allons plaider pour une gouvernance environnementale mondiale, parce que demain, si nous voulons que la dimension environnementale soit prise en compte dans le développement, il faudra bien qu'une organisation sur le modèle de l'OMC puisse dire ce qu'il convient de faire et puisse aussi prendre des sanctions."
Sur les énergies renouvelables, une question précise : qu'allez-vous faire pour encourager l'énergie renouvelable ? Les éoliennes, la géothermie, le soleil, etc...
- "La caractéristique de ces énergies renouvelables, c'est que ce sont pour l'instant des énergies coûteuses à mettre en oeuvre. Donc, nous avons, nous les pays, un rôle majeur dans la recherche et dans la mise en oeuvre de ces énergies renouvelables. C'est la raison pour laquelle je souhaite les développer, aussi bien dans mes responsabilités de ministre que dans mes responsabilités de présidente de la Commission d'environnement de la région, par exemple sur l'éolien, afin que nous puissions développer, nous, dans nos pays développés, des technologies qui permettent d'apporter à ces pays ces énergies renouvelables. Donc, nous avons un rôle extrêmement important dans la recherche : trouver les technologies qui marchent et qui mettent donc ces énergies à disposition. Et puis, bien sûr, aider les pays concernés à développer des champs d'éoliens ou des piles solaires."
A propos du nucléaire, vous avez dit que "c'est une énergie propre". Est-ce que vous rediriez la même chose aujourd'hui ?
- "Bien entendu. C'est une énergie absolument indispensable. Vous savez qu'actuellement, le principal danger écologique qui menace la planète, c'est l'effet de serre. Il n'y a rien de plus important au point de vue écologique que le réchauffement climatique dû à l'effet de serre. Actuellement, 80 % de l'énergie sont produits par des énergies fossiles - provenant du pétrole, gaz, charbon -, extrêmement destructrices au niveau du développement durable, puisque dans un siècle, il n'y aura plus ces matières premières, et extrêmement productrices de gaz à effet de serre. Donc, je ne suis pas pour "le tout nucléaire" bien entendu, mais il faut savoir reconnaître l'apport du nucléaire dans la protection de la planète."
Est-ce que vous allez autoriser la COGEMA à améliorer ses capacités de retraitement de déchets ?
- "La question est évidemment en ce moment en étude en interministériel..."
Mais est-ce que vous allez autoriser la COGEMA à améliorer ses capacités de retraitement, oui ou non ?
- "C'est une décision qui sera prise conjointement par moi-même et par monsieur le Premier ministre."
Les usines à risques : L. Jospin avait promis 150 inspecteurs supplémentaires. Les crédits ont été annulés ?
- "Les crédits n'ont pas été annulés. Je vais présenter dans quelques semaines un projet de loi sur les risques industriels, auquel je souhaite adjoindre un autre chapitre sur les risques naturels. Les inondations que nous venons de vivre en Europe centrale montrent à quel point il est important d'avoir ce chapitre sur les risques naturels. Dans quelques semaines, dans quelques jours même, le 21 septembre, nous allons fêter - nous allons "fêter" ! - un bien triste anniversaire : celui de l'explosion d'AZF à Toulouse. Effectivement, je vais présenter un texte substantiel sur les risques industriels. Ce texte sera suivi par un renforcement des inspecteurs des installations classées. Et nous allons le faire sur les deux ans à venir."
La mesure la plus importante dans ce texte ?
- "Il n'y a pas une mesure plus importante. Il y a une chose qui m'a frappée dans ce qui s'est passé à Toulouse : c'est à quel point on n'a pas pris assez en compte le facteur humain dans les risques industriels. Si on met des inspecteurs des installations classées uniquement à contrôler la dimension des valves, ou tel ou tel circuit technologique, et que pendant ce temps-là, on laisse des salariés non qualifiés, intérimaires, qui ne connaissent pas l'entreprise, se déployer dans des industries extrêmement dangereuses, cela ne sert à rien."
Nous vivons dans un drôle de monde. Je vais vous raconter quelque chose. En 2001, on a dépensé dans le monde cinq fois plus d'argent en implants de poitrine et en Viagra que pour la recherche sur la maladie d'Alzheimer. Drôle de monde dans lequel nous vivons !
- "Drôle de monde, mais très significatif finalement. L'information que vous donnez montre bien qu'on ne peut pas non plus, sur ces histoires de développement durable, uniquement interpeller les gouvernements, les responsables socio-économiques, sans que chacun se pose un certain nombre de questions."
Mais à vous aussi, les gouvernements, d'initier et de donner l'exemple !
- "On n'arrête pas. Pourquoi croyez-vous que je suis là ce matin ?!"
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 27 août 2002)