Texte intégral
Monsieur le Président,
Messieurs les Rapporteurs,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Après Luc Ferry, je veux à mon tour féliciter les rapporteurs de l'excellent travail qu'ils ont accompli et saluer aussi les orateurs inscrits. Même si nous avons entendu des avis divergents, tous montrent en tous cas une véritable passion pour la chose scolaire. Beaucoup de ceux qui sont intervenus sont d'ailleurs des professionnels de notre grande maison.
Comme l'a dit Luc Ferry, nous ne sommes pas des pessimistes, nous ne sommes pas des inquiets. Et notre politique est une politique optimiste, et donc volontaire. Cependant elle s'inscrit dans la solidarité gouvernementale. Il serait non seulement imprudent de notre part de vouloir continuer à affirmer une logique de dépenses sans fin, mais surtout, comme l'a dit Luc Ferry, cela est contraire à l'intérêt des générations futures. Je rappelle que si nous nous engagions imprudemment dans un projet de recrutement sans cesse élargi, nous nous heurterions à une grande difficulté, et dont les générations futures souffriraient : la qualité des personnels que nous recruterions. Il faut donc entrer dans une autre logique, celle des objectifs, des résultats, du refus des scepticismes : une logique volontariste.
Pour ma part, j'insisterai plus particulièrement sur trois dossiers, après que Luc Ferry a exprimé les grandes orientations de son ministère : la prévention de la violence à l'Ecole, la vie scolaire et la décentralisation.
D'abord pour atteindre les objectifs que nous poursuivons, il faut que l'école puisse mener à bien sa mission dans un climat de paix et de sérénité. Tant qu'un tel climat de paix et de sérénité ne sera pas rétabli, nous courrons en vain vers des objectifs purement pédagogiques et scolaires. Je remercie Pierre-André Périssol, ainsi que les autres orateurs qui en ont souligné l'importance, d'avoir évoqué cette question. Elle est essentielle, parce qu'elle conditionne toutes les autres. Il faut combattre, et surtout prévenir, toute forme de dérive à l'intérieur de l'Ecole. Il faut combattre la violence scolaire, parce que c'est la condition de la réussite, et en particulier pour ceux de nos élèves vivant dans des environnements sociaux défavorisés.
Nous savons bien que la violence à l'Ecole n'est pas la violence de l'Ecole, qu'elle est importée de l'extérieur. Nous devons néanmoins rappeler cette évidence : la loi de la rue n'est pas la loi de l'Ecole. Il faut garantir la sécurité des personnes et des biens. Il faut rétablir la discipline. Il faut, comme plusieurs orateurs l'ont souligné tout à l'heure, que les professeurs puissent enseigner et que les élèves puissent apprendre. Il faut rappeler que l'Ecole a pour première mission de transmettre le savoir et la culture, et non pas de lutter sans cesse contre les difficultés sociales dont elle n'est pas la seule responsable.
Notre effort de prévention, comme cela a été demandé tout à l'heure par Bernard Perrut et Yves Durand, doit se faire dès l'école primaire. Celle-ci en effet, on ne le sait peut-être pas assez, n'est pas épargnée par les phénomènes de violence. Or les professeurs du premier degré sont peut être moins préparés encore que les professeurs du second degré pour y faire face. Il faut les aider. Il faut leur apprendre à construire le dialogue avec les familles, avec le milieu. De ce point de vue là, il faut renforcer le rôle des directeurs, sujet qui avait été abandonné par nos prédécesseurs.
Nous présenterons la semaine prochaine les orientations de notre politique de prévention de la violence à l'Ecole. Il ne s'agira pas d'un énième plan d'urgence, je le dis tout de suite, car l'action à mener, comme l'a rappelé Luc Ferry, s'inscrit dans la durée. Cette politique de prévention aura pour ambition de bâtir une école qui soit à la fois celle du savoir et de la responsabilité, car nous croyons que pour restaurer la discipline, il faut restaurer les disciplines. Ce débat mérite d'être mené au-delà de la communauté scolaire, il concerne toute la Nation. C'est pourquoi je me réjouis que les deux rapporteurs aient fortement exprimé le souhait, pour fonder la politique que nous entendons conduire en matière d'éducation, qu'un grand débat puisse être organisé au Parlement sur les missions de notre école.
Il n'est pas normal que le Parlement ait consacré l'an dernier plus de temps à parler de la chasse à la tourterelle que de l'Education Nationale.
En effet, mesdames et messieurs les députés, discuter des valeurs qui fondent notre école, c'est discuter des valeurs de la République ! C'est faire en sorte qu'elles y soient transmises qu'elles soient admises, respectées, comprises. Et l'apprentissage précoce des comportements sociaux responsables suppose une détermination qui devrait être celle de toute la Nation. Une détermination qui ne devrait, à mon avis, faire l'objet d'aucune polémique.
Les directeurs d'école sont en grève depuis plusieurs années sans qu'une solution n'ait été trouvée. Nous avons considéré que ce sujet était crucial, et nous avons décidé, pour revaloriser cette fonction, une mesure nouvelle de 12 millions d'euros, qui permettra d'obtenir, par rapport à la situation de 2001, un doublement du taux moyen d'indemnité de sujétion spéciale. Pour éviter toute polémique, cette indemnité sera la même pour tous les directeurs, c'est à dire 925 euros, quelle que soit la taille de leur école.
Des modifications au règlement départemental - type, qui sert de modèle pour le règlement de chaque école, sont sans doute également nécessaires. Nous croyons que le contrat qui s'établit entre l'élève et la classe doit faire l'objet d'une certaine solennité. L'élève doit s'engager à adhérer, au sein de sa famille, et au sein de la communauté scolaire, aux règles de l'établissement scolaire tout entier. Mais, pour que ce contrat soit respecté, il importe, comme l'ont souligné les rapporteurs, que l'autorité républicaine se manifeste à tous les niveaux de l'Ecole, en particulier dans les établissements du second degré. Nous souhaitons que les chefs d'établissement, qui sont détenteurs de l'autorité, voient leur rôle conforté. Il faut qu'ils puissent prendre des sanctions plus diversifiées et immédiates, sans avoir à négocier avec je ne sais qui des décisions qui leur paraissent servir les intérêts de la communauté éducative.
Bien entendu, cette priorité doit être associée à une action de prévention. C'est pourquoi, nous avons décidé de développer tous les dispositifs qui permettent aux jeunes qui sont en rupture plus ou moins forte avec l'institution de s'y réintégrer. C'est ainsi que nous voulons augmenter le nombre des établissements qui accueillent les élèves en dehors du temps scolaire. Il n'est, en effet, pas normal que les établissements scolaires qui disposent d'équipements informatiques, d'installations sportives, qui sont des services publics, soient fermés quatre mois par an.
Les crédits affectés à ces opérations sont majorés de 10,1 millions d'euros, afin de viser au doublement en deux ans des semaines d'ouverture de ces établissements, et de revaloriser aussi la rémunération des personnels qui souhaitent y intervenir.
Je le répète, il s'agit de doubler ce qui existait jusqu'à présent. De même, nous voulons doubler en deux ans le nombre des classes - relais qui, pour un temps donné, prennent en charge les enfants au sein des collèges, afin de les amener à renoncer à des comportements perturbateurs. Sur ce même principe, nous allons créer des ateliers-relais, où l'élève, tout en restant sous statut scolaire, sera pris en charge en dehors de l'établissement par le réseau complexe et riche des associations complémentaires de l'enseignement public.
De même l'internat sera développé, notamment au collège. Il constitue en effet, pour nous, un mode d'accueil privilégié qui offre une véritable chance à certains élèves. 5 700 nouvelles bourses d'internat seront financées, pour un montant total de 1,3 millions d'euros.
Par ailleurs, je pense ainsi apaiser les craintes de certains orateurs, comme l'a fait avant moi Luc Ferry, le plan " Handiscol " est conforté. Plus de 10 millions d'euros sont consacrés aux mesures nouvelles en faveur de l'accueil des élèves handicapés, et nous porterons une attention toute particulière au maintien et au développement du dispositif des auxiliaires de vie scolaire.
Nous avons commencé à mettre en oeuvre une politique dynamique de santé en faveur des jeunes, qui mettra fortement l'accent sur l'éducation à la santé, la prévention des conduites à risques. S'agissant de la santé scolaire, je voudrais rappeler au docteur Claude Leteurtre, que les médecins scolaires n'ont pas à examiner chaque année l'ensemble des élèves. Ils seront en revanche encouragés à suivre plus attentivement la vie des établissements sur le plan de la santé. Nous annoncerons bientôt des mesures dans ce domaine. A cet égard, comme l'a souligné Luc Ferry, le budget prévoit d'ores et déjà la création de 260 emplois dans la filière médico-sociale. C'est un effort important, qui s'accompagne d'un effort tout aussi important pour la revalorisation des carrières des infirmiers et des infirmières.
Parallèlement, puisque nous savons que c'est une catégorie de personnels qui est inquiète, 900 emplois d'ATOSS seront créés - c'est un effort budgétaire très important - dans la filière administrative et technique, en même temps qu'est opérée une amélioration de plus d'un tiers de leur régime indemnitaire. Ainsi, les personnels de direction pourront s'appuyer sur une équipe remobilisée. L'autonomie des établissements qu'ils dirigent sera accrue par le développement de la concertation, par la simplification des procédures administratives, par la capacité à prendre des décisions rapides. Nous souhaitons que les chefs d'établissements, sur lesquels se fonde souvent l'échec ou la réussite de l'équipe éducative, puissent engager, au plus près des besoins de leur établissement, une politique dynamique et contractualisée avec les autorités administratives et les collectivités.
La politique de vie scolaire que nous voulons mener est marquée par le souci d'offrir à chaque élève les meilleures conditions de sa réussite, ce qui suppose la confiance, en particulier dans les acteurs de terrain. Je suis convaincu, et c'est le dernier point que je voudrais évoquer, que, dans ce domaine comme dans bien d'autres, la décentralisation ne doit pas nous faire peur. Elle ne se fera pas sans concertation ni discussion préalable, contrairement à ce que croyait ou craignait Yves Durand. Elle se fera au plus près du terrain, en fonction des réalités locales et nous permettra d'être efficaces, réactifs. L'Education nationale ne se dérobera pas à cette ambition qui est celle de tout le Gouvernement. Partout où cela est possible, ses acteurs doivent même en prendre l'initiative. Pourquoi ne le feraient-ils pas, d'ailleurs, puisque, contrairement aux idées reçues, l'Education nationale est déjà l'administration la plus déconcentrée de toutes. C'est l'une des administrations les plus rôdées aux partenariats de terrain. Depuis plus de cent ans, notre système éducatif vit sur les règles du partage des compétences. Quant aux élus, n'ont ils pas déjà reçu la charge de la construction et de l'entretien des collèges et des lycées ? N'ont-ils pas montré leur capacité - je pense en particulier aux maires - à mettre sur pied une administration, à mobiliser des crédits, à créer des contrats locaux ?
Contrairement à ce que pense Monsieur Liberti, les personnels de l'Education nationale, les partenaires de l'Ecole n'ont aucune raison d'avoir peur, en particulier de la décentralisation.
Je suis au contraire convaincu que celle-ci ne peut être qu'un gage de succès, que ce soit en matière de vie scolaire, de conditions d'études ou d'utilisation plus rationnelle des ressources, je pense en particulier aux écoles rurales.
Bien entendu, l'Etat continuera d'assurer sa mission régalienne en matière d'éducation. La détermination des programmes et des cursus, la définition des diplômes, la collation des grades, l'évaluation, la régulation de l'ensemble du système éducatif et bien sûr la péréquation. Tout cela restera de sa seule et entière responsabilité.
Tels sont les principaux points que, en complément des priorités présentées par Luc Ferry, je tenais à souligner. Ils témoignent de notre volonté commune de nous doter d'un système éducatif qui soit lié à un pilotage efficace, qui ait une ligne d'action et qui ne se limite pas à des effets d'annonce.
Il nous semble essentiel de rappeler qu'il ne saurait être question de réduire la problématique de l'Education nationale à la question arithmétique de l'addition des moyens et de la multiplication des mesures.
Si l'on veut malgré tout en rester à l'arithmétique, considérons les lignes et les graphiques. Si Monsieur le Président me permet, je vais vous montrer trois graphiques simples.
Sur le premier, on voit deux courbes : en haut, celle qui monte représente le nombre des enseignants du premier degré. En dessous, celle qui baisse marque l'évolution des effectifs scolarisés. C'est parlant me semble-t-il. Je ne dis pas qu'il faille renoncer à ce qui se fait aujourd'hui, nous avons - ce sera mon deuxième graphique - le meilleur taux d'encadrement de tous les pays développés du monde, derrière l'Italie. Simplement je m'interroge : la seule solution consiste-t-elle à prolonger ces deux courbes et donc à accroître l'écart ? En quels autres termes voudriez-vous interpréter ce graphique ?
Je suis un littéraire qui n'a pas peur des chiffres !
Ce troisième graphique est celui qui m'inquiète le plus, non pas tant qu'il démontre la même évolution concernant le second degré, mais parce que la ligne qui descend est celle des futurs bacheliers, donc de ceux qui, demain, seront étudiants, en particulier dans les filières scientifiques ou les filières générales. C'est là que se trouvent les viviers d'enseignants pour demain, et se pencher sur la question de la qualité de nos enseignants de demain, de leur formation, est bien plus utile que de simplement descendre dans la rue pour réclamer : "toujours plus".
Nous voulons former les enseignants dont nous avons besoin. Cela exige, je suis d'accord avec les rapporteurs, d'organiser un vrai débat sur ces questions, d'engager un audit sur nos besoins en termes de départs à la retraite, de fixer des objectifs et de définir des intentions. Ensuite nous recruterons les professeurs dont nous avons besoin. Je crois que nous devons cette lucidité à la Nation.
(source http://www.education.gouv.fr, le 18 novembre 2002)
Messieurs les Rapporteurs,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Après Luc Ferry, je veux à mon tour féliciter les rapporteurs de l'excellent travail qu'ils ont accompli et saluer aussi les orateurs inscrits. Même si nous avons entendu des avis divergents, tous montrent en tous cas une véritable passion pour la chose scolaire. Beaucoup de ceux qui sont intervenus sont d'ailleurs des professionnels de notre grande maison.
Comme l'a dit Luc Ferry, nous ne sommes pas des pessimistes, nous ne sommes pas des inquiets. Et notre politique est une politique optimiste, et donc volontaire. Cependant elle s'inscrit dans la solidarité gouvernementale. Il serait non seulement imprudent de notre part de vouloir continuer à affirmer une logique de dépenses sans fin, mais surtout, comme l'a dit Luc Ferry, cela est contraire à l'intérêt des générations futures. Je rappelle que si nous nous engagions imprudemment dans un projet de recrutement sans cesse élargi, nous nous heurterions à une grande difficulté, et dont les générations futures souffriraient : la qualité des personnels que nous recruterions. Il faut donc entrer dans une autre logique, celle des objectifs, des résultats, du refus des scepticismes : une logique volontariste.
Pour ma part, j'insisterai plus particulièrement sur trois dossiers, après que Luc Ferry a exprimé les grandes orientations de son ministère : la prévention de la violence à l'Ecole, la vie scolaire et la décentralisation.
D'abord pour atteindre les objectifs que nous poursuivons, il faut que l'école puisse mener à bien sa mission dans un climat de paix et de sérénité. Tant qu'un tel climat de paix et de sérénité ne sera pas rétabli, nous courrons en vain vers des objectifs purement pédagogiques et scolaires. Je remercie Pierre-André Périssol, ainsi que les autres orateurs qui en ont souligné l'importance, d'avoir évoqué cette question. Elle est essentielle, parce qu'elle conditionne toutes les autres. Il faut combattre, et surtout prévenir, toute forme de dérive à l'intérieur de l'Ecole. Il faut combattre la violence scolaire, parce que c'est la condition de la réussite, et en particulier pour ceux de nos élèves vivant dans des environnements sociaux défavorisés.
Nous savons bien que la violence à l'Ecole n'est pas la violence de l'Ecole, qu'elle est importée de l'extérieur. Nous devons néanmoins rappeler cette évidence : la loi de la rue n'est pas la loi de l'Ecole. Il faut garantir la sécurité des personnes et des biens. Il faut rétablir la discipline. Il faut, comme plusieurs orateurs l'ont souligné tout à l'heure, que les professeurs puissent enseigner et que les élèves puissent apprendre. Il faut rappeler que l'Ecole a pour première mission de transmettre le savoir et la culture, et non pas de lutter sans cesse contre les difficultés sociales dont elle n'est pas la seule responsable.
Notre effort de prévention, comme cela a été demandé tout à l'heure par Bernard Perrut et Yves Durand, doit se faire dès l'école primaire. Celle-ci en effet, on ne le sait peut-être pas assez, n'est pas épargnée par les phénomènes de violence. Or les professeurs du premier degré sont peut être moins préparés encore que les professeurs du second degré pour y faire face. Il faut les aider. Il faut leur apprendre à construire le dialogue avec les familles, avec le milieu. De ce point de vue là, il faut renforcer le rôle des directeurs, sujet qui avait été abandonné par nos prédécesseurs.
Nous présenterons la semaine prochaine les orientations de notre politique de prévention de la violence à l'Ecole. Il ne s'agira pas d'un énième plan d'urgence, je le dis tout de suite, car l'action à mener, comme l'a rappelé Luc Ferry, s'inscrit dans la durée. Cette politique de prévention aura pour ambition de bâtir une école qui soit à la fois celle du savoir et de la responsabilité, car nous croyons que pour restaurer la discipline, il faut restaurer les disciplines. Ce débat mérite d'être mené au-delà de la communauté scolaire, il concerne toute la Nation. C'est pourquoi je me réjouis que les deux rapporteurs aient fortement exprimé le souhait, pour fonder la politique que nous entendons conduire en matière d'éducation, qu'un grand débat puisse être organisé au Parlement sur les missions de notre école.
Il n'est pas normal que le Parlement ait consacré l'an dernier plus de temps à parler de la chasse à la tourterelle que de l'Education Nationale.
En effet, mesdames et messieurs les députés, discuter des valeurs qui fondent notre école, c'est discuter des valeurs de la République ! C'est faire en sorte qu'elles y soient transmises qu'elles soient admises, respectées, comprises. Et l'apprentissage précoce des comportements sociaux responsables suppose une détermination qui devrait être celle de toute la Nation. Une détermination qui ne devrait, à mon avis, faire l'objet d'aucune polémique.
Les directeurs d'école sont en grève depuis plusieurs années sans qu'une solution n'ait été trouvée. Nous avons considéré que ce sujet était crucial, et nous avons décidé, pour revaloriser cette fonction, une mesure nouvelle de 12 millions d'euros, qui permettra d'obtenir, par rapport à la situation de 2001, un doublement du taux moyen d'indemnité de sujétion spéciale. Pour éviter toute polémique, cette indemnité sera la même pour tous les directeurs, c'est à dire 925 euros, quelle que soit la taille de leur école.
Des modifications au règlement départemental - type, qui sert de modèle pour le règlement de chaque école, sont sans doute également nécessaires. Nous croyons que le contrat qui s'établit entre l'élève et la classe doit faire l'objet d'une certaine solennité. L'élève doit s'engager à adhérer, au sein de sa famille, et au sein de la communauté scolaire, aux règles de l'établissement scolaire tout entier. Mais, pour que ce contrat soit respecté, il importe, comme l'ont souligné les rapporteurs, que l'autorité républicaine se manifeste à tous les niveaux de l'Ecole, en particulier dans les établissements du second degré. Nous souhaitons que les chefs d'établissement, qui sont détenteurs de l'autorité, voient leur rôle conforté. Il faut qu'ils puissent prendre des sanctions plus diversifiées et immédiates, sans avoir à négocier avec je ne sais qui des décisions qui leur paraissent servir les intérêts de la communauté éducative.
Bien entendu, cette priorité doit être associée à une action de prévention. C'est pourquoi, nous avons décidé de développer tous les dispositifs qui permettent aux jeunes qui sont en rupture plus ou moins forte avec l'institution de s'y réintégrer. C'est ainsi que nous voulons augmenter le nombre des établissements qui accueillent les élèves en dehors du temps scolaire. Il n'est, en effet, pas normal que les établissements scolaires qui disposent d'équipements informatiques, d'installations sportives, qui sont des services publics, soient fermés quatre mois par an.
Les crédits affectés à ces opérations sont majorés de 10,1 millions d'euros, afin de viser au doublement en deux ans des semaines d'ouverture de ces établissements, et de revaloriser aussi la rémunération des personnels qui souhaitent y intervenir.
Je le répète, il s'agit de doubler ce qui existait jusqu'à présent. De même, nous voulons doubler en deux ans le nombre des classes - relais qui, pour un temps donné, prennent en charge les enfants au sein des collèges, afin de les amener à renoncer à des comportements perturbateurs. Sur ce même principe, nous allons créer des ateliers-relais, où l'élève, tout en restant sous statut scolaire, sera pris en charge en dehors de l'établissement par le réseau complexe et riche des associations complémentaires de l'enseignement public.
De même l'internat sera développé, notamment au collège. Il constitue en effet, pour nous, un mode d'accueil privilégié qui offre une véritable chance à certains élèves. 5 700 nouvelles bourses d'internat seront financées, pour un montant total de 1,3 millions d'euros.
Par ailleurs, je pense ainsi apaiser les craintes de certains orateurs, comme l'a fait avant moi Luc Ferry, le plan " Handiscol " est conforté. Plus de 10 millions d'euros sont consacrés aux mesures nouvelles en faveur de l'accueil des élèves handicapés, et nous porterons une attention toute particulière au maintien et au développement du dispositif des auxiliaires de vie scolaire.
Nous avons commencé à mettre en oeuvre une politique dynamique de santé en faveur des jeunes, qui mettra fortement l'accent sur l'éducation à la santé, la prévention des conduites à risques. S'agissant de la santé scolaire, je voudrais rappeler au docteur Claude Leteurtre, que les médecins scolaires n'ont pas à examiner chaque année l'ensemble des élèves. Ils seront en revanche encouragés à suivre plus attentivement la vie des établissements sur le plan de la santé. Nous annoncerons bientôt des mesures dans ce domaine. A cet égard, comme l'a souligné Luc Ferry, le budget prévoit d'ores et déjà la création de 260 emplois dans la filière médico-sociale. C'est un effort important, qui s'accompagne d'un effort tout aussi important pour la revalorisation des carrières des infirmiers et des infirmières.
Parallèlement, puisque nous savons que c'est une catégorie de personnels qui est inquiète, 900 emplois d'ATOSS seront créés - c'est un effort budgétaire très important - dans la filière administrative et technique, en même temps qu'est opérée une amélioration de plus d'un tiers de leur régime indemnitaire. Ainsi, les personnels de direction pourront s'appuyer sur une équipe remobilisée. L'autonomie des établissements qu'ils dirigent sera accrue par le développement de la concertation, par la simplification des procédures administratives, par la capacité à prendre des décisions rapides. Nous souhaitons que les chefs d'établissements, sur lesquels se fonde souvent l'échec ou la réussite de l'équipe éducative, puissent engager, au plus près des besoins de leur établissement, une politique dynamique et contractualisée avec les autorités administratives et les collectivités.
La politique de vie scolaire que nous voulons mener est marquée par le souci d'offrir à chaque élève les meilleures conditions de sa réussite, ce qui suppose la confiance, en particulier dans les acteurs de terrain. Je suis convaincu, et c'est le dernier point que je voudrais évoquer, que, dans ce domaine comme dans bien d'autres, la décentralisation ne doit pas nous faire peur. Elle ne se fera pas sans concertation ni discussion préalable, contrairement à ce que croyait ou craignait Yves Durand. Elle se fera au plus près du terrain, en fonction des réalités locales et nous permettra d'être efficaces, réactifs. L'Education nationale ne se dérobera pas à cette ambition qui est celle de tout le Gouvernement. Partout où cela est possible, ses acteurs doivent même en prendre l'initiative. Pourquoi ne le feraient-ils pas, d'ailleurs, puisque, contrairement aux idées reçues, l'Education nationale est déjà l'administration la plus déconcentrée de toutes. C'est l'une des administrations les plus rôdées aux partenariats de terrain. Depuis plus de cent ans, notre système éducatif vit sur les règles du partage des compétences. Quant aux élus, n'ont ils pas déjà reçu la charge de la construction et de l'entretien des collèges et des lycées ? N'ont-ils pas montré leur capacité - je pense en particulier aux maires - à mettre sur pied une administration, à mobiliser des crédits, à créer des contrats locaux ?
Contrairement à ce que pense Monsieur Liberti, les personnels de l'Education nationale, les partenaires de l'Ecole n'ont aucune raison d'avoir peur, en particulier de la décentralisation.
Je suis au contraire convaincu que celle-ci ne peut être qu'un gage de succès, que ce soit en matière de vie scolaire, de conditions d'études ou d'utilisation plus rationnelle des ressources, je pense en particulier aux écoles rurales.
Bien entendu, l'Etat continuera d'assurer sa mission régalienne en matière d'éducation. La détermination des programmes et des cursus, la définition des diplômes, la collation des grades, l'évaluation, la régulation de l'ensemble du système éducatif et bien sûr la péréquation. Tout cela restera de sa seule et entière responsabilité.
Tels sont les principaux points que, en complément des priorités présentées par Luc Ferry, je tenais à souligner. Ils témoignent de notre volonté commune de nous doter d'un système éducatif qui soit lié à un pilotage efficace, qui ait une ligne d'action et qui ne se limite pas à des effets d'annonce.
Il nous semble essentiel de rappeler qu'il ne saurait être question de réduire la problématique de l'Education nationale à la question arithmétique de l'addition des moyens et de la multiplication des mesures.
Si l'on veut malgré tout en rester à l'arithmétique, considérons les lignes et les graphiques. Si Monsieur le Président me permet, je vais vous montrer trois graphiques simples.
Sur le premier, on voit deux courbes : en haut, celle qui monte représente le nombre des enseignants du premier degré. En dessous, celle qui baisse marque l'évolution des effectifs scolarisés. C'est parlant me semble-t-il. Je ne dis pas qu'il faille renoncer à ce qui se fait aujourd'hui, nous avons - ce sera mon deuxième graphique - le meilleur taux d'encadrement de tous les pays développés du monde, derrière l'Italie. Simplement je m'interroge : la seule solution consiste-t-elle à prolonger ces deux courbes et donc à accroître l'écart ? En quels autres termes voudriez-vous interpréter ce graphique ?
Je suis un littéraire qui n'a pas peur des chiffres !
Ce troisième graphique est celui qui m'inquiète le plus, non pas tant qu'il démontre la même évolution concernant le second degré, mais parce que la ligne qui descend est celle des futurs bacheliers, donc de ceux qui, demain, seront étudiants, en particulier dans les filières scientifiques ou les filières générales. C'est là que se trouvent les viviers d'enseignants pour demain, et se pencher sur la question de la qualité de nos enseignants de demain, de leur formation, est bien plus utile que de simplement descendre dans la rue pour réclamer : "toujours plus".
Nous voulons former les enseignants dont nous avons besoin. Cela exige, je suis d'accord avec les rapporteurs, d'organiser un vrai débat sur ces questions, d'engager un audit sur nos besoins en termes de départs à la retraite, de fixer des objectifs et de définir des intentions. Ensuite nous recruterons les professeurs dont nous avons besoin. Je crois que nous devons cette lucidité à la Nation.
(source http://www.education.gouv.fr, le 18 novembre 2002)