Texte intégral
(Déclaration au Caire, le 23 juin 2002) :
(...)
Merci Monsieur le Ministre. Je suis évidemment très sensible et très touché par cet accueil et cette première étape d'un voyage au Proche-Orient. Je suis très heureux qu'elle se passe au Caire. La relation entre nos deux présidents, entre nos deux pays et entre nos deux peuples est une relation d'amitié. Je suis fier et très heureux de pouvoir dire que la France et l'Egypte sont au rendez-vous de l'amitié.
La relation entre la France et l'Egypte est une relation forte, une relation ancrée dans l'histoire mais fondée aussi sur la conscience d'intérêts communs très forts. Intérêts dans le domaine politique : la concertation entre nos deux diplomaties est évidemment très étroite et nos vues très largement convergentes comme on a pu le constater à l'instant. Dans le domaine économique, la présence des grands groupes français et l'importance des investissements réalisés en Egypte en témoigne - j'ai eu l'occasion tout à l'heure de rencontrer la communauté française - et je ne pouvais avoir meilleur signe de la vitalité des relations entre nos deux pays. Sur le plan culturel aussi puisqu'il y a là un passé prestigieux mais aussi un dynamisme actuel très fort dans tous les secteurs et je suis très fier que le fleuron aujourd'hui de notre coopération soit l'université française en Egypte qui doit débuter son activité à la prochaine rentrée académique.
Monsieur le Ministre, vous avez évoqué la situation très grave qui est celle actuellement du Proche-Orient. C'est, et j'ai eu l'occasion d'exprimer le sentiment de la France, une situation tragique qui rend on ne peut plus urgente la relance des efforts de paix. Le conflit du Proche-Orient n'a que trop duré et l'expérience des deux dernières années a démontré que la poursuite de la confrontation ne pouvait mener nulle part. Nous partageons la conviction qu'il faut une solution politique qui puisse aboutir à une solution juste. Solution juste fondée sur le respect des droits de chacun et qui puisse tenir compte de la mémoire des peuples pour permettre une paix durable.
Les Palestiniens savent qu'ils n'obtiendront pas la réalisation de leurs aspirations si le droit d'Israël à vivre en sécurité n'est pas définitivement établi. Les Israéliens savent que leur exigence légitime et fondamentale à la reconnaissance et à la sécurité ne pourra se réaliser que par le respect des droits et des aspirations également légitimes et fondamentales de leurs voisins palestiniens. La communauté internationale dans ce contexte doit se mobiliser. Nous étions à Séville hier où a été adoptée une déclaration qui favorise l'idée d'une solution de paix, qui insiste sur la nécessité de relancer un espoir de paix et qui entrevoit le rôle que peut jouer dans ce contexte une conférence internationale dûment préparée et affirmant des objectifs clairs.
Aujourd'hui il existe un large consensus au sein de la communauté internationale sur le point d'aboutissement souhaitable d'un tel processus de paix. La création aux côtés de l'Etat d'Israël reconnu par tous et pleinement intégré dans son environnement régional d'un Etat palestinien viable et démocratique. Il faut aujourd'hui plus que jamais, dans cette situation dramatique, saisir, à nouveau, cette chance et c'est aux parties et à personne d'autre qu'il appartient de se mettre d'accord sur les termes d'un règlement. Mais ce que peut faire et doit faire la communauté internationale c'est aider les parties à assumer aujourd'hui ce risque de paix, ce risque indispensable pour les encourager à renouer le dialogue en définissant un cadre qui assure à chacune des parties et donne à chacune de ces parties les garanties nécessaires que ses préoccupations seront prises en compte.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez dans le dossier de presse qui a été distribué aux journalistes évoqué les attentes quant à un rôle américain et à un plan américain annoncé. Mais on peut se poser des questions parce que les Américains ont innové en matière de droit international et de politique internationale en parlant d'Etat provisoire, chose qui n'existait pas auparavant à notre connaissance. Alors que vous-même avez tout à l'heure indiqué votre souhait de voir un Etat palestinien viable. Avez-vous le même concept que les Américains ? Les Américains par ailleurs ont parlé d'un Etat sur 40% des territoires palestiniens. Or la conférence de Séville a bien spécifié que c'était un Etat palestinien sur les frontières de 1967, qui rencontre d'ailleurs la conception que les Arabes ont de cet Etat palestinien ? Quelle est en réalité votre position ?
R - Je crois qu'il ne faut pas anticiper sur ce que seront les propositions américaines qui devraient être faites au cours des prochains jours. Un certain nombre d'hypothèses de travail ont été faites, et je crois qu'il faut attendre que ces propositions soient formulées et formalisées par le président américain. Notre souhait aujourd'hui c'est évidemment de faire en sorte que le processus politique, que l'espoir de paix puisse reprendre dans la région. Il y a là un élément qui pour nous est essentiel il ne peut pas y avoir de véritable sécurité sans perspective de paix.
Et accroître ces perspectives, travailler dans le sens de la paix est évidemment central si l'on veut essayer de réduire l'incertitude, de réduire l'humiliation, la frustration qui aujourd'hui sont évidemment vivement ressenties dans cette région du monde. Les diplomaties sont là pour essayer de peser, de travailler dans le même sens. Nous attendons donc avec beaucoup d'impatience les propositions américaines. Les Européens ont dit à Séville quel était leur sentiment sur ce que devrait être la vision pour cette région, une vision équilibrée et une vision qui permette d'avancer dans le sens de la paix et nourrisse un espoir pour tout le monde, sécurité pour Israël, perspective de création d'un Etat de Palestine du coté palestinien.
Il y a là je crois une approche qui peut permettre de sortir de cette situation dramatique et tragique dans laquelle nous sommes où, à défaut de pouvoir véritablement enclencher un processus de paix, le terrorisme joue tout son rôle et pèse de tout son poids. Il est essentiel de redonner un espoir pour sortir de cette spirale infernale qui a gagné aujourd'hui la région.
Q - Sur le plan concret, qu'est ce qu'il y a derrière pour faire sortir les parties de cette situation tragique au plan sécuritaire, y a-t-il des garanties, quelles sont ces garanties ?
R - Il s'agit, vous l'avez compris, de ma première visite en tant que ministre des Affaires étrangères français dans cette région et c'est donc d'abord une visite qui vise à prendre contact avec l'ensemble des parties, à écouter l'ensemble des parties. Cette visite se situe à un moment dramatique de l'histoire de cette région et il est évident que l'objectif aujourd'hui, le principal, celui de toutes les diplomaties - c'était le cas des diplomaties européennes réunies à Séville -, est de permettre d'ouvrir une perspective de paix, de sortir de cette logique de chaos qui gagne aujourd'hui et qui menace la région. Dans ce contexte là, il y a un certain nombre d'idées que nous entretenons évidemment avec nos amis arabes, comme je m'en suis entretenu avec le ministre des Affaires étrangères égyptien. Le but principal est bien d'essayer de relancer cette base de négociations. Il y a là un moment tout à fait important pour sortir de cette situation de crise, que nous devons saisir.
Q - Au moment même où on rend hommage à la résistance française contre l'occupation nazie lors de la deuxième guerre mondiale, on entend par ailleurs qualifier ou accuser la résistance palestinienne de terrorisme. Pensez-vous que dans cette dichotomie il y a l'une des raisons de non-règlement de cette question ?
R - Je crois qu'il faut garder très fort en mémoire et en tête quel est l'objectif que nous poursuivons les uns et les autres pour cette région. L'objectif c'est clairement celui de la paix et je crois qu'il ne sert à rien de rentrer dans des explications, de jeter les anathèmes sur tel ou tel. L'objectif c'est bien de viser la réconciliation dans cette région plutôt que de faire un point d'histoire même si le devoir de mémoire doit nous conduire aujourd'hui à être soucieux de ne pas nous caler sur le seul rapport de force pour penser à la paix. La paix c'est une volonté c'est une énergie, c'est une vision qui doit nous animer. Et c'est bien cela que j'ai en tête en arrivant aujourd'hui au Proche-Orient, c'est l'ambition de faire en sorte que cette paix puisse réunir des peuples qui s'affrontent aujourd'hui, des peuples inquiets, des peuples qui souffrent. Je pense que cet objectif de paix doit être le seul impératif des diplomaties si l'on veut véritablement sortir de la spirale qui gagne la région.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 juin 2002)
(Déclaration au Caire, le 24 juin 2002)
(...)
Merci Monsieur le Ministre.
L'entretien avec le président Moubarak a permis, comme l'a indiqué le ministre, de faire un très large tour d'horizon sur la situation dans la région, de souligner aussi l'excellence de nos relations bilatérales et notre souhait d'approfondir toujours ce dialogue et la coopération entre nos deux pays. J'arrive dans la région à un moment qui est dramatique et c'est naturellement d'abord sur cette situation qu'a porté l'entretien avec le président Moubarak. Les événements des dernières heures ne font que renforcer cette préoccupation, la nôtre, mais aussi, comme vous l'avez vu avec le Conseil européen de Séville, celle de tous les Européens. Dans ce moment où tout peut basculer, la communauté internationale a un devoir d'inquiétude, elle doit assumer ses responsabilités. Depuis les événements du 11 septembre nous savons à quel point nous vivons dans un monde fragile et incertain. Dans un tel contexte nous ne pouvons pas laisser les crises régionales comme celle du Proche-Orient se développer, au risque de dégénérer et de menacer la stabilité de la région et au-delà. C'est ce message qu'après Séville je viens porter aux responsables de la région. La raison doit à nouveau prévaloir sur la haine et la peur, et ce des deux côtés.
Les solutions à la crise sont connues. Pour les mettre en uvre nous devons fixer des objectifs clairs et mener une action déterminée. Aujourd'hui la conviction de la France est la suivante : seule une action politique, une solution politique, peut ramener la paix. Les objectifs doivent être clairs, tout d'abord vous le savez, un Etat palestinien, indépendant et viable, vivant côte à côte avec l'Etat d'Israël, dans des frontières sures et reconnues ; une solution juste par la négociation aux autres différents régionaux y compris avec la Syrie et le Liban ; de même une normalisation indispensable des relations avec l'ensemble des pays de la région. L'action doit, elle aussi, être déterminée et ce grâce à la mobilisation de la communauté internationale, les Etats-Unis, l'Europe, la Russie, les Nations unies - l'ensemble du quartet - mais aussi bien sûr de tous les Etats de la région. Des moyens diplomatiques existent. A court terme la conférence internationale peut être l'instrument, si elle est bien préparée, pour engager et nourrir le dialogue. Les moyens économiques sont eux aussi, enfin, indispensables, l'aide à la Palestine en premier lieu, comme la France et l'Union européenne la pratiquent déjà.
Q - Le président Moubarak effectuera prochainement une visite en France, quels sujets seront abordés pendant cette visite ? Quelle est la position de la France vis à vis de l'intention israélienne d'expulser les familles des Palestiniens qui ont participé à des opérations commandos et son intention d'expulser le président Arafat ?
R - Le président de la République française sera très heureux d'accueillir dans les prochaines semaines le président Moubarak. C'est ce que j'ai indiqué au président Moubarak. La date n'a pas encore été fixée, nous allons avec le ministre essayer de trouver très prochainement une date. Bien évidemment au cur des conversations, il y aura les problèmes de la région, de la situation dans la région et nous aborderons l'ensemble des problèmes du monde et les relations bilatérales entre la France et l'Egypte.
En ce qui concerne l'attitude d'Israël vis-à-vis des familles, que vous venez d'évoquer, il est bien évident que pour la France il n'y a pas de remède par des solutions punitives. Il y a au contraire la nécessité de faire en sorte que le dialogue politique puisse l'emporter. Le fait de recourir à des actes de punition ne peut qu'aggraver les choses et créer une situation sur le plan humain difficilement acceptable.
Concernant le président Arafat, le Conseil européen de Séville a indiqué et a insisté sur la nécessité de mettre fin au plus vite à l'occupation des villes palestiniennes et bien évidemment nous souhaitons que le président Arafat puisse garder et avoir toute sa liberté de manuvre.
Q - (Question inaudible)
R - Vous l'avez indiqué et je l'ai dit au début de ce propos, la situation aujourd'hui, on le voit bien à nouveau, est dramatique et elle peut se dégrader encore bien d'avantage. C'est bien là l'inquiétude de la France, l'inquiétude de l'Europe, l'inquiétude de la communauté internationale. Dans ce contexte, c'est une raison supplémentaire pour moi d'être présent dans la région et je vais donc tout à l'heure me rendre en Israël pour rencontrer les responsables israéliens. J'ai l'intention bien évidemment de rencontrer l'ensemble des responsables palestiniens et Yasser Arafat demain. Tout ceci est une incitation supplémentaire pour mettre au cur de notre action la solution politique. On le voit bien la diplomatie doit retrouver ses droits, et le courage je crois, aujourd'hui, est de mettre la diplomatie, de mettre l'action politique au cur des choses. La politique seule, le retour de la politique, le retour de la volonté et de l'exigence politique peut seul permettre de renouer le dialogue et sortir de la spirale de la violence qui, aujourd'hui, frappe à nouveau cette région.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 juin 2002)
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Merci Monsieur le Ministre. Je suis évidemment très sensible et très touché par cet accueil et cette première étape d'un voyage au Proche-Orient. Je suis très heureux qu'elle se passe au Caire. La relation entre nos deux présidents, entre nos deux pays et entre nos deux peuples est une relation d'amitié. Je suis fier et très heureux de pouvoir dire que la France et l'Egypte sont au rendez-vous de l'amitié.
La relation entre la France et l'Egypte est une relation forte, une relation ancrée dans l'histoire mais fondée aussi sur la conscience d'intérêts communs très forts. Intérêts dans le domaine politique : la concertation entre nos deux diplomaties est évidemment très étroite et nos vues très largement convergentes comme on a pu le constater à l'instant. Dans le domaine économique, la présence des grands groupes français et l'importance des investissements réalisés en Egypte en témoigne - j'ai eu l'occasion tout à l'heure de rencontrer la communauté française - et je ne pouvais avoir meilleur signe de la vitalité des relations entre nos deux pays. Sur le plan culturel aussi puisqu'il y a là un passé prestigieux mais aussi un dynamisme actuel très fort dans tous les secteurs et je suis très fier que le fleuron aujourd'hui de notre coopération soit l'université française en Egypte qui doit débuter son activité à la prochaine rentrée académique.
Monsieur le Ministre, vous avez évoqué la situation très grave qui est celle actuellement du Proche-Orient. C'est, et j'ai eu l'occasion d'exprimer le sentiment de la France, une situation tragique qui rend on ne peut plus urgente la relance des efforts de paix. Le conflit du Proche-Orient n'a que trop duré et l'expérience des deux dernières années a démontré que la poursuite de la confrontation ne pouvait mener nulle part. Nous partageons la conviction qu'il faut une solution politique qui puisse aboutir à une solution juste. Solution juste fondée sur le respect des droits de chacun et qui puisse tenir compte de la mémoire des peuples pour permettre une paix durable.
Les Palestiniens savent qu'ils n'obtiendront pas la réalisation de leurs aspirations si le droit d'Israël à vivre en sécurité n'est pas définitivement établi. Les Israéliens savent que leur exigence légitime et fondamentale à la reconnaissance et à la sécurité ne pourra se réaliser que par le respect des droits et des aspirations également légitimes et fondamentales de leurs voisins palestiniens. La communauté internationale dans ce contexte doit se mobiliser. Nous étions à Séville hier où a été adoptée une déclaration qui favorise l'idée d'une solution de paix, qui insiste sur la nécessité de relancer un espoir de paix et qui entrevoit le rôle que peut jouer dans ce contexte une conférence internationale dûment préparée et affirmant des objectifs clairs.
Aujourd'hui il existe un large consensus au sein de la communauté internationale sur le point d'aboutissement souhaitable d'un tel processus de paix. La création aux côtés de l'Etat d'Israël reconnu par tous et pleinement intégré dans son environnement régional d'un Etat palestinien viable et démocratique. Il faut aujourd'hui plus que jamais, dans cette situation dramatique, saisir, à nouveau, cette chance et c'est aux parties et à personne d'autre qu'il appartient de se mettre d'accord sur les termes d'un règlement. Mais ce que peut faire et doit faire la communauté internationale c'est aider les parties à assumer aujourd'hui ce risque de paix, ce risque indispensable pour les encourager à renouer le dialogue en définissant un cadre qui assure à chacune des parties et donne à chacune de ces parties les garanties nécessaires que ses préoccupations seront prises en compte.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez dans le dossier de presse qui a été distribué aux journalistes évoqué les attentes quant à un rôle américain et à un plan américain annoncé. Mais on peut se poser des questions parce que les Américains ont innové en matière de droit international et de politique internationale en parlant d'Etat provisoire, chose qui n'existait pas auparavant à notre connaissance. Alors que vous-même avez tout à l'heure indiqué votre souhait de voir un Etat palestinien viable. Avez-vous le même concept que les Américains ? Les Américains par ailleurs ont parlé d'un Etat sur 40% des territoires palestiniens. Or la conférence de Séville a bien spécifié que c'était un Etat palestinien sur les frontières de 1967, qui rencontre d'ailleurs la conception que les Arabes ont de cet Etat palestinien ? Quelle est en réalité votre position ?
R - Je crois qu'il ne faut pas anticiper sur ce que seront les propositions américaines qui devraient être faites au cours des prochains jours. Un certain nombre d'hypothèses de travail ont été faites, et je crois qu'il faut attendre que ces propositions soient formulées et formalisées par le président américain. Notre souhait aujourd'hui c'est évidemment de faire en sorte que le processus politique, que l'espoir de paix puisse reprendre dans la région. Il y a là un élément qui pour nous est essentiel il ne peut pas y avoir de véritable sécurité sans perspective de paix.
Et accroître ces perspectives, travailler dans le sens de la paix est évidemment central si l'on veut essayer de réduire l'incertitude, de réduire l'humiliation, la frustration qui aujourd'hui sont évidemment vivement ressenties dans cette région du monde. Les diplomaties sont là pour essayer de peser, de travailler dans le même sens. Nous attendons donc avec beaucoup d'impatience les propositions américaines. Les Européens ont dit à Séville quel était leur sentiment sur ce que devrait être la vision pour cette région, une vision équilibrée et une vision qui permette d'avancer dans le sens de la paix et nourrisse un espoir pour tout le monde, sécurité pour Israël, perspective de création d'un Etat de Palestine du coté palestinien.
Il y a là je crois une approche qui peut permettre de sortir de cette situation dramatique et tragique dans laquelle nous sommes où, à défaut de pouvoir véritablement enclencher un processus de paix, le terrorisme joue tout son rôle et pèse de tout son poids. Il est essentiel de redonner un espoir pour sortir de cette spirale infernale qui a gagné aujourd'hui la région.
Q - Sur le plan concret, qu'est ce qu'il y a derrière pour faire sortir les parties de cette situation tragique au plan sécuritaire, y a-t-il des garanties, quelles sont ces garanties ?
R - Il s'agit, vous l'avez compris, de ma première visite en tant que ministre des Affaires étrangères français dans cette région et c'est donc d'abord une visite qui vise à prendre contact avec l'ensemble des parties, à écouter l'ensemble des parties. Cette visite se situe à un moment dramatique de l'histoire de cette région et il est évident que l'objectif aujourd'hui, le principal, celui de toutes les diplomaties - c'était le cas des diplomaties européennes réunies à Séville -, est de permettre d'ouvrir une perspective de paix, de sortir de cette logique de chaos qui gagne aujourd'hui et qui menace la région. Dans ce contexte là, il y a un certain nombre d'idées que nous entretenons évidemment avec nos amis arabes, comme je m'en suis entretenu avec le ministre des Affaires étrangères égyptien. Le but principal est bien d'essayer de relancer cette base de négociations. Il y a là un moment tout à fait important pour sortir de cette situation de crise, que nous devons saisir.
Q - Au moment même où on rend hommage à la résistance française contre l'occupation nazie lors de la deuxième guerre mondiale, on entend par ailleurs qualifier ou accuser la résistance palestinienne de terrorisme. Pensez-vous que dans cette dichotomie il y a l'une des raisons de non-règlement de cette question ?
R - Je crois qu'il faut garder très fort en mémoire et en tête quel est l'objectif que nous poursuivons les uns et les autres pour cette région. L'objectif c'est clairement celui de la paix et je crois qu'il ne sert à rien de rentrer dans des explications, de jeter les anathèmes sur tel ou tel. L'objectif c'est bien de viser la réconciliation dans cette région plutôt que de faire un point d'histoire même si le devoir de mémoire doit nous conduire aujourd'hui à être soucieux de ne pas nous caler sur le seul rapport de force pour penser à la paix. La paix c'est une volonté c'est une énergie, c'est une vision qui doit nous animer. Et c'est bien cela que j'ai en tête en arrivant aujourd'hui au Proche-Orient, c'est l'ambition de faire en sorte que cette paix puisse réunir des peuples qui s'affrontent aujourd'hui, des peuples inquiets, des peuples qui souffrent. Je pense que cet objectif de paix doit être le seul impératif des diplomaties si l'on veut véritablement sortir de la spirale qui gagne la région.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 juin 2002)
(Déclaration au Caire, le 24 juin 2002)
(...)
Merci Monsieur le Ministre.
L'entretien avec le président Moubarak a permis, comme l'a indiqué le ministre, de faire un très large tour d'horizon sur la situation dans la région, de souligner aussi l'excellence de nos relations bilatérales et notre souhait d'approfondir toujours ce dialogue et la coopération entre nos deux pays. J'arrive dans la région à un moment qui est dramatique et c'est naturellement d'abord sur cette situation qu'a porté l'entretien avec le président Moubarak. Les événements des dernières heures ne font que renforcer cette préoccupation, la nôtre, mais aussi, comme vous l'avez vu avec le Conseil européen de Séville, celle de tous les Européens. Dans ce moment où tout peut basculer, la communauté internationale a un devoir d'inquiétude, elle doit assumer ses responsabilités. Depuis les événements du 11 septembre nous savons à quel point nous vivons dans un monde fragile et incertain. Dans un tel contexte nous ne pouvons pas laisser les crises régionales comme celle du Proche-Orient se développer, au risque de dégénérer et de menacer la stabilité de la région et au-delà. C'est ce message qu'après Séville je viens porter aux responsables de la région. La raison doit à nouveau prévaloir sur la haine et la peur, et ce des deux côtés.
Les solutions à la crise sont connues. Pour les mettre en uvre nous devons fixer des objectifs clairs et mener une action déterminée. Aujourd'hui la conviction de la France est la suivante : seule une action politique, une solution politique, peut ramener la paix. Les objectifs doivent être clairs, tout d'abord vous le savez, un Etat palestinien, indépendant et viable, vivant côte à côte avec l'Etat d'Israël, dans des frontières sures et reconnues ; une solution juste par la négociation aux autres différents régionaux y compris avec la Syrie et le Liban ; de même une normalisation indispensable des relations avec l'ensemble des pays de la région. L'action doit, elle aussi, être déterminée et ce grâce à la mobilisation de la communauté internationale, les Etats-Unis, l'Europe, la Russie, les Nations unies - l'ensemble du quartet - mais aussi bien sûr de tous les Etats de la région. Des moyens diplomatiques existent. A court terme la conférence internationale peut être l'instrument, si elle est bien préparée, pour engager et nourrir le dialogue. Les moyens économiques sont eux aussi, enfin, indispensables, l'aide à la Palestine en premier lieu, comme la France et l'Union européenne la pratiquent déjà.
Q - Le président Moubarak effectuera prochainement une visite en France, quels sujets seront abordés pendant cette visite ? Quelle est la position de la France vis à vis de l'intention israélienne d'expulser les familles des Palestiniens qui ont participé à des opérations commandos et son intention d'expulser le président Arafat ?
R - Le président de la République française sera très heureux d'accueillir dans les prochaines semaines le président Moubarak. C'est ce que j'ai indiqué au président Moubarak. La date n'a pas encore été fixée, nous allons avec le ministre essayer de trouver très prochainement une date. Bien évidemment au cur des conversations, il y aura les problèmes de la région, de la situation dans la région et nous aborderons l'ensemble des problèmes du monde et les relations bilatérales entre la France et l'Egypte.
En ce qui concerne l'attitude d'Israël vis-à-vis des familles, que vous venez d'évoquer, il est bien évident que pour la France il n'y a pas de remède par des solutions punitives. Il y a au contraire la nécessité de faire en sorte que le dialogue politique puisse l'emporter. Le fait de recourir à des actes de punition ne peut qu'aggraver les choses et créer une situation sur le plan humain difficilement acceptable.
Concernant le président Arafat, le Conseil européen de Séville a indiqué et a insisté sur la nécessité de mettre fin au plus vite à l'occupation des villes palestiniennes et bien évidemment nous souhaitons que le président Arafat puisse garder et avoir toute sa liberté de manuvre.
Q - (Question inaudible)
R - Vous l'avez indiqué et je l'ai dit au début de ce propos, la situation aujourd'hui, on le voit bien à nouveau, est dramatique et elle peut se dégrader encore bien d'avantage. C'est bien là l'inquiétude de la France, l'inquiétude de l'Europe, l'inquiétude de la communauté internationale. Dans ce contexte, c'est une raison supplémentaire pour moi d'être présent dans la région et je vais donc tout à l'heure me rendre en Israël pour rencontrer les responsables israéliens. J'ai l'intention bien évidemment de rencontrer l'ensemble des responsables palestiniens et Yasser Arafat demain. Tout ceci est une incitation supplémentaire pour mettre au cur de notre action la solution politique. On le voit bien la diplomatie doit retrouver ses droits, et le courage je crois, aujourd'hui, est de mettre la diplomatie, de mettre l'action politique au cur des choses. La politique seule, le retour de la politique, le retour de la volonté et de l'exigence politique peut seul permettre de renouer le dialogue et sortir de la spirale de la violence qui, aujourd'hui, frappe à nouveau cette région.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 juin 2002)