Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de vous retrouver pour installer aujourd'hui le Haut Conseil de la Coopération internationale. L'idée d'une telle instance est ancienne. Ce projet fut en effet plus d'une fois mis en chantier : par M. Pierre Mauroy, à l'instigation de Jean-Pierre Cot, puis par M. Michel Rocard, à l'initiative de Stéphane Hessel - que je salue chaleureusement. Jusqu'à présent, il n'avait pu être mené à son terme. Dès la formation du gouvernement, j'ai pris l'engagement de donner corps à ce projet.
Grâce à vous tous, c'est aujourd'hui chose faite.
L'installation de votre Haut Conseil marque une nouvelle étape dans la réforme de la coopération.
Avec cette réforme, nous avons voulu adapter les moyens de la France aux dimensions nouvelles de l'action internationale, qu'il s'agisse de sécurité, de commerce mondial, de développement, de réduction des inégalités, de coopération scientifique ou d'échanges culturels. L'intégration de l'ancien ministère de la Coopération au ministère des Affaires étrangères a permis de consolider deux pôles d'action, le pôle diplomatique et le pôle économique et financier. Ces pôles disposent d'opérateurs comme l'Agence française de développement dont les missions ont été précisées.
Cette réforme fait de l'aide au développement une composante majeure de la politique extérieure de la France. Une zone, de solidarité prioritaire a été définie pour favoriser l'aide, aux pays les plus pauvres et le soutien aux pays qui nous sont les plus proches par l'Histoire - au Maghreb, au Moyen-Orient comme en Asie, La mise en place du CICID dote l'État d'une instance interministérielle propre à arbitrer et à orienter les initiatives de chaque ministère. La coopération a ainsi gagné une cohérence nouvelle.
Depuis deux ans, ces réformes institutionnelles ont fait évoluer bien des pratiques et des comportements, dans nos services comme chez nos interlocuteurs. Nous n'avons pas hésité à innover lorsque des problèmes particuliers appelaient la création d'instruments spécifiques : je pense à la délégation interministérielle pour le co-développement - dirigée désormais par P. Guidoni et qui m'est directement rattachée -, à la mission confiée à Roger Fauroux pour la reconstruction des Balkans, ou encore aux initiatives en cours pour donner un souffle nouveau aux instruments de la francophonie.
Vous allez inventer un nouveau partenariat avec la société civile.
La préparation du traité d'Ottawa sur les mines antipersonnel, la négociation de la convention de Rome sur la Cour pénale internationale le démontrent : il est de l'intérêt de tous de mieux associer la société civile aux grandes négociations internationales auxquelles notre pays participe. Le même esprit doit guider la coopération.
Votre Haut Conseil offre aux acteurs non gouvernementaux de la coopération un lieu de réflexion commune. Près de vingt ans se sont écoulés entre l'apparition de l'idée et sa réalisation. Débattre de notre politique internationale avec des acteurs privés a longtemps paru à certains attentatoire à la mission régalienne de l'État. Pourtant, la contribution des organisations non gouvernementales est remarquable, comme en témoignent, en particulier, les Prix Nobel décernés à Handicap International et à Médecins sans Frontières - dont je salue l'un des anciens présidents, M. Charhon. De même, les collectivités locales participent de plus en plus à des programmes d'appui à l'État de droit. Elles voient leur action reconnue à l'étranger sans pouvoir émettre leur opinion sur nos coopérations entre Etats dans des domaines qui les intéressent directement. De même alors que l'action des fédérations syndicales internationales a contribué à la démocratisation de nombreux pays, en particulier en Europe centrale et orientale, nous n'offrions d'accès à la réflexion collective ni aux syndicats de salariés ou aux représentants des entrepreneurs, ni aux organismes mutualistes et coopératifs.
L'apport des ONG qui se consacrent au développement est évalué à plus de trois milliards de francs par an. Celui des associations de migrants atteint un montant voisin. Celui des collectivités locales frôle le milliard. Le total de ces fonds représente plus du cinquième des 34 milliards de francs de notre aide publique au développement. Des milliers de femmes et d'hommes d'une exceptionnelle qualité se dévouent chaque année sans compter dans vos organisations de solidarité, vos associations de migrants et dans les collectivités locales. Créer ce Haut Conseil, c'est aussi reconnaître - et saluer - leur contribution.
La société civile est diverse : vous vous en ferez les porte-parole. C'est d'ailleurs le souhait qui avait été formulé lors des Assises nationales de la solidarité en octobre 1997 portées par M. Jacques Pelletier, alors médiateur de la République et présidées par M. Charles Josselin. Ce Haut Conseil réunit donc de nombreux acteurs associatifs et des organismes socioprofessionnels, ainsi que des personnalités dont l'engagement intellectuel et l'expérience du terrain enrichissent les approches.
Il vous faudra naturellement favoriser l'adhésion du public aux actions de coopération internationale. Votre site Internet, inauguré ce soir, y contribuera. Il a été réalisé dans une collaboration originale avec le centre de formation aux métiers des nouveaux média qu'Handicap International a créé à Lyon pour des personnes handicapées. On y trouvera les premières informations sur la création d'un Prix de la Coopération internationale. Je remettrai ce prix à un ensemble d'organisations ayant réalité des initiatives exemplaires. Vous les sélectionnerez, dès l'année prochaine, dans le cadre de la semaine de la solidarité internationale.
Votre indépendance garantit la liberté de vos réflexions.
Pour assurer cette indépendance, la composition de votre Haut Conseil exclut les fonctionnaires d'État en activité. Si vous dépendez administrativement du Premier ministre, c'est là, dans mon esprit, une garantie supplémentaire d'autonomie.
Vous pourrez vous saisir de toute question relevant du champ de vos compétences. Quelques échéances importantes appelleront bientôt votre attention. En avril prochain, le Parlement organisera un débat sur la politique de coopération de la France. En juillet prochain commencera la présidence française de l'Union européenne. Elle traitera de sujets importants, comme la renégociation des accords de Lomé et le dialogue euroméditerranéen. A l'automne 2000 se tiendra la conférence internationale du millénaire, dans le cadre de l'ONU. La France entend nourrir de ses idées la réflexion sur la réforme du système des Nations unies. A tous ces sujets, vous pourrez être conduits naturellement à vous intéresser.
Vous serez également libres dans l'organisation de vos travaux. Vous pourrez former des commissions ouvertes à des collaborateurs extérieurs, Je me félicite que vous ayez déjà entrepris d'y réfléchir. Bien sûr, l'ensemble des services de l'État vous aideront dans votre tâche. Je demanderai à chaque administration de s'organiser en conséquence, et de veiller, en particulier, au niveau de sa représentation dans les commissions de travail où elle serait invitée à siéger. Un secrétariat général réunissant des hauts fonctionnaires issus de différentes administrations est en outre mis à votre disposition.
Mesdames et Messieurs,
Le Haut Conseil de la Coopération internationale n'a pas de précédent. Nos ambassades n'ont identifié qu'un seul organisme comparable, dont les missions sont moins étendues, le Conseil de Coopération au développement du royaume d'Espagne. Ensemble, dans le dialogue entre l'État et la société civile, nous ferons vivre le Haut Conseil. Jean-Louis Bianco, que ses qualités d'écoute et de dialogue, comme ses expériences de militant du développement économique et social, puis de haut responsable d'État, désignaient tout particulièrement pour cette tâche, dirigera vos débats avec le talent et l'efficacité que nous lui connaissons. Je ne doute pas que vous saurez, à force de travail, de réflexion et d'imagination, aider l'ensemble des acteurs - publics et privés - de la coopération à mieux servir le but qui les réunit : contribuer au développement équilibré d'un monde plus juste et plus humain.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 novembre 1999)
Je suis heureux de vous retrouver pour installer aujourd'hui le Haut Conseil de la Coopération internationale. L'idée d'une telle instance est ancienne. Ce projet fut en effet plus d'une fois mis en chantier : par M. Pierre Mauroy, à l'instigation de Jean-Pierre Cot, puis par M. Michel Rocard, à l'initiative de Stéphane Hessel - que je salue chaleureusement. Jusqu'à présent, il n'avait pu être mené à son terme. Dès la formation du gouvernement, j'ai pris l'engagement de donner corps à ce projet.
Grâce à vous tous, c'est aujourd'hui chose faite.
L'installation de votre Haut Conseil marque une nouvelle étape dans la réforme de la coopération.
Avec cette réforme, nous avons voulu adapter les moyens de la France aux dimensions nouvelles de l'action internationale, qu'il s'agisse de sécurité, de commerce mondial, de développement, de réduction des inégalités, de coopération scientifique ou d'échanges culturels. L'intégration de l'ancien ministère de la Coopération au ministère des Affaires étrangères a permis de consolider deux pôles d'action, le pôle diplomatique et le pôle économique et financier. Ces pôles disposent d'opérateurs comme l'Agence française de développement dont les missions ont été précisées.
Cette réforme fait de l'aide au développement une composante majeure de la politique extérieure de la France. Une zone, de solidarité prioritaire a été définie pour favoriser l'aide, aux pays les plus pauvres et le soutien aux pays qui nous sont les plus proches par l'Histoire - au Maghreb, au Moyen-Orient comme en Asie, La mise en place du CICID dote l'État d'une instance interministérielle propre à arbitrer et à orienter les initiatives de chaque ministère. La coopération a ainsi gagné une cohérence nouvelle.
Depuis deux ans, ces réformes institutionnelles ont fait évoluer bien des pratiques et des comportements, dans nos services comme chez nos interlocuteurs. Nous n'avons pas hésité à innover lorsque des problèmes particuliers appelaient la création d'instruments spécifiques : je pense à la délégation interministérielle pour le co-développement - dirigée désormais par P. Guidoni et qui m'est directement rattachée -, à la mission confiée à Roger Fauroux pour la reconstruction des Balkans, ou encore aux initiatives en cours pour donner un souffle nouveau aux instruments de la francophonie.
Vous allez inventer un nouveau partenariat avec la société civile.
La préparation du traité d'Ottawa sur les mines antipersonnel, la négociation de la convention de Rome sur la Cour pénale internationale le démontrent : il est de l'intérêt de tous de mieux associer la société civile aux grandes négociations internationales auxquelles notre pays participe. Le même esprit doit guider la coopération.
Votre Haut Conseil offre aux acteurs non gouvernementaux de la coopération un lieu de réflexion commune. Près de vingt ans se sont écoulés entre l'apparition de l'idée et sa réalisation. Débattre de notre politique internationale avec des acteurs privés a longtemps paru à certains attentatoire à la mission régalienne de l'État. Pourtant, la contribution des organisations non gouvernementales est remarquable, comme en témoignent, en particulier, les Prix Nobel décernés à Handicap International et à Médecins sans Frontières - dont je salue l'un des anciens présidents, M. Charhon. De même, les collectivités locales participent de plus en plus à des programmes d'appui à l'État de droit. Elles voient leur action reconnue à l'étranger sans pouvoir émettre leur opinion sur nos coopérations entre Etats dans des domaines qui les intéressent directement. De même alors que l'action des fédérations syndicales internationales a contribué à la démocratisation de nombreux pays, en particulier en Europe centrale et orientale, nous n'offrions d'accès à la réflexion collective ni aux syndicats de salariés ou aux représentants des entrepreneurs, ni aux organismes mutualistes et coopératifs.
L'apport des ONG qui se consacrent au développement est évalué à plus de trois milliards de francs par an. Celui des associations de migrants atteint un montant voisin. Celui des collectivités locales frôle le milliard. Le total de ces fonds représente plus du cinquième des 34 milliards de francs de notre aide publique au développement. Des milliers de femmes et d'hommes d'une exceptionnelle qualité se dévouent chaque année sans compter dans vos organisations de solidarité, vos associations de migrants et dans les collectivités locales. Créer ce Haut Conseil, c'est aussi reconnaître - et saluer - leur contribution.
La société civile est diverse : vous vous en ferez les porte-parole. C'est d'ailleurs le souhait qui avait été formulé lors des Assises nationales de la solidarité en octobre 1997 portées par M. Jacques Pelletier, alors médiateur de la République et présidées par M. Charles Josselin. Ce Haut Conseil réunit donc de nombreux acteurs associatifs et des organismes socioprofessionnels, ainsi que des personnalités dont l'engagement intellectuel et l'expérience du terrain enrichissent les approches.
Il vous faudra naturellement favoriser l'adhésion du public aux actions de coopération internationale. Votre site Internet, inauguré ce soir, y contribuera. Il a été réalisé dans une collaboration originale avec le centre de formation aux métiers des nouveaux média qu'Handicap International a créé à Lyon pour des personnes handicapées. On y trouvera les premières informations sur la création d'un Prix de la Coopération internationale. Je remettrai ce prix à un ensemble d'organisations ayant réalité des initiatives exemplaires. Vous les sélectionnerez, dès l'année prochaine, dans le cadre de la semaine de la solidarité internationale.
Votre indépendance garantit la liberté de vos réflexions.
Pour assurer cette indépendance, la composition de votre Haut Conseil exclut les fonctionnaires d'État en activité. Si vous dépendez administrativement du Premier ministre, c'est là, dans mon esprit, une garantie supplémentaire d'autonomie.
Vous pourrez vous saisir de toute question relevant du champ de vos compétences. Quelques échéances importantes appelleront bientôt votre attention. En avril prochain, le Parlement organisera un débat sur la politique de coopération de la France. En juillet prochain commencera la présidence française de l'Union européenne. Elle traitera de sujets importants, comme la renégociation des accords de Lomé et le dialogue euroméditerranéen. A l'automne 2000 se tiendra la conférence internationale du millénaire, dans le cadre de l'ONU. La France entend nourrir de ses idées la réflexion sur la réforme du système des Nations unies. A tous ces sujets, vous pourrez être conduits naturellement à vous intéresser.
Vous serez également libres dans l'organisation de vos travaux. Vous pourrez former des commissions ouvertes à des collaborateurs extérieurs, Je me félicite que vous ayez déjà entrepris d'y réfléchir. Bien sûr, l'ensemble des services de l'État vous aideront dans votre tâche. Je demanderai à chaque administration de s'organiser en conséquence, et de veiller, en particulier, au niveau de sa représentation dans les commissions de travail où elle serait invitée à siéger. Un secrétariat général réunissant des hauts fonctionnaires issus de différentes administrations est en outre mis à votre disposition.
Mesdames et Messieurs,
Le Haut Conseil de la Coopération internationale n'a pas de précédent. Nos ambassades n'ont identifié qu'un seul organisme comparable, dont les missions sont moins étendues, le Conseil de Coopération au développement du royaume d'Espagne. Ensemble, dans le dialogue entre l'État et la société civile, nous ferons vivre le Haut Conseil. Jean-Louis Bianco, que ses qualités d'écoute et de dialogue, comme ses expériences de militant du développement économique et social, puis de haut responsable d'État, désignaient tout particulièrement pour cette tâche, dirigera vos débats avec le talent et l'efficacité que nous lui connaissons. Je ne doute pas que vous saurez, à force de travail, de réflexion et d'imagination, aider l'ensemble des acteurs - publics et privés - de la coopération à mieux servir le but qui les réunit : contribuer au développement équilibré d'un monde plus juste et plus humain.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 novembre 1999)