Texte intégral
1er novembre 2002 - La sale guerre contre la Tchétchénie fait des victimes à Moscou
Cent dix-sept morts parmi les otages, mais peut-être bien plus avec ceux qui sont en train de mourir dans les hôpitaux, voilà le bilan de l'intervention des forces de l'ordre russes pour mettre fin à la prise d'otages. Quant aux preneurs d'otages, ils sont presque tous morts, froidement exécutés pour nombre d'entre eux.
Bien sûr, l'action du commando tchétchène qui a pris en otage tout le public d'un théâtre est humainement inacceptable et politiquement injustifiable. Le commando a pris consciemment le risque que son acte se termine en tragédie, non seulement pour lui-même mais aussi pour tous les otages. Les méthodes terroristes, même lorsqu'elles sont pratiquées au nom d'un peuple opprimé, ne servent pas mais desservent ce dernier.
Mais on ne peut qu'être écoeuré par les méthodes utilisées par les forces de l'ordre russes qui ont délibérément choisi de sacrifier la vie des otages en utilisant une arme chimique de destruction massive, comme dirait Bush, manifestement faite pour tuer. Personne ne peut savoir si les otages allaient être exécutés par les preneurs d'otages mais ceux qui sont morts ont été tués par les forces d'intervention russes.
En choisissant de mettre fin à la prise d'otages de cette façon horrible, Poutine a renforcé son image d'homme fort. Il a surtout montré la barbarie de son État qui transforme une salle de théâtre en chambre à gaz.
Mais ce qui est plus barbare encore, c'est la guerre que le gouvernement russe mène là-bas, dans cette région du Caucase appelée Tchétchénie. Une sale guerre qui s'apparente à une guerre coloniale menée contre tout un peuple pour préserver les intérêts de l'État russe dans une région stratégique. Une guerre féroce où les généraux russes ont les mains libres pour terroriser la population en jouant avec la peau de leurs propres soldats.
Les quelques images qui parviennent de cette guerre et qui passent de temps à autre à la télévision montrent la capitale tchétchène, Grozny, transformée en champ de ruines, avec des femmes, des hommes et des enfants qui tentent de survivre au milieu des bombardements et de la répression. Mais ce terrorisme-là, le terrorisme d'État, ne soulève pas l'indignation des grands de ce monde. Si tous les chefs d'État ont assuré à Poutine leur solidarité pendant l'action des terroristes à Moscou, aucun d'entre eux ne fait à Poutine le procès pour le terrorisme qu'il exerce en Tchétchénie.
C'est que, pour les grandes puissances, la " lutte contre le terrorisme " a toujours été le prétexte pour utiliser elles-mêmes, mais à une grande échelle, les méthodes terroristes pour préserver leurs propres intérêts. Apprenant la mort du général Massu, Chirac a tenu à rendre hommage à " ce très grand soldat ". Mais combien d'Algériens ont été torturés et sommairement exécutés, sous l'autorité de ce dernier, au nom de la " lutte contre le terrorisme ", alors qu'il s'agissait de perpétuer la domination coloniale sur l'Algérie ?
C'est en invoquant la " lutte contre le terrorisme " que Bush a fait bombarder l'Afghanistan pendant des semaines, en massacrant des milliers d'Afghans qui n'étaient pas les responsables mais les victimes de la dictature des talibans.
Et c'est encore au nom de la lutte contre le terrorisme que les États-Unis préparent la guerre contre l'Irak, avec la complicité de toutes les grandes puissances, y compris la France, malgré quelques minauderies de Chirac à l'ONU ou ailleurs. Mais combien de civils innocents mourront dans une guerre que les États-Unis prétendent mener contre le seul Saddam Hussein ?
Tous ces gens, de Poutine à Bush, en passant par Chirac, ne dénoncent le terrorisme des petits groupes que pour mieux justifier le terrorisme d'État. Mais le terrorisme d'État n'est pas plus justifiable que celui des preneurs d'otages de Moscou, ni dans ses méthodes, ni dans ses objectifs. Car la méthode, de la Tchétchénie à l'Irak, en passant par l'Algérie ou l'Afghanistan, c'est de tuer des innocents pour terroriser tout un peuple. Et l'objectif, c'est maintenir un ordre mondial basé sur le pouvoir des puissants sur les opprimés, des riches sur les pauvres, et des grandes nations impérialistes sur les petits peuples.
Arlette LAGUILLER
(Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 4 novembre 2002)
8 novembre 2002 " Il faut combattre l'insécurité sociale "
L'offensive du gouvernement Chirac-Raffarin contre les salariés ne connaît pas de trêve. Il y a quelques semaines, le ministre du Travail Fillon présentait son projet d'assouplissement des procédures de licenciements collectifs, au moment même où était rendue publique une véritable déferlante de plans sociaux. Preuve que, même avec la législation en place, les patrons ne rencontrent guère d'entrave pour licencier.
Dans la foulée, les mesures envisagées pour réformer la Sécurité Sociale sont aussi inquiétantes. Jacques Barrot, ancien ministre de la Santé, porte-parole du parti de Chirac à l'Assemblée nationale, expliquait qu'il était souhaitable qu'il y ait "une concentration de l'assurance maladie obligatoire sur toutes les maladies graves", ajoutant que "pour le maintien en santé, il faut que chaque Français puisse être en mesure d'avoir une assurance complémentaire pour le faire". Il eut beau, après coup, déclarer qu'on avait caricaturé ses propos, l'orientation est pourtant claire, et sans surprise. Elle est dans la logique de tous les choix du gouvernement et de ceux du gouvernement de la "gauche plurielle" précédent.
La Sécu ne rembourserait donc que les maladies graves ; mais où cela commence-t-il donc ? Et comment savoir si l'évolution d'une maladie "non grave" ne conduirait pas à une détérioration plus grave de la santé ? Un tel système conduirait, plus encore qu'actuellement, à une médecine à deux niveaux, l'une pour ceux qui pourraient se payer une bonne assurance complémentaire, et l'autre pour ceux qui n'en auraient pas les moyens.
C'est pain bénit pour les compagnies d'assurances, qui depuis longtemps lorgnent sur le coquet magot que cela représente. Mais pour les salariés, la perspective est moins réjouissante, même pour ceux qui pourraient s'offrir, si l'on ose dire, une assurance complémentaire. Celle-ci risque d'ailleurs de devenir, à terme, l'assurance principale.
Une mainmise encore plus grande des assurances privées sur la couverture maladie n'est pas la garantie que cette couverture sera meilleure, ni même qu'elle soit garantie. Car ces fonds, à la disposition des compagnies d'assurances privées, serviront à la spéculation, à l'exemple des fonds de pension. On se souvient des conséquences catastrophiques de telles pratiques aux USA lors de la faillite d'Enron, et d'autres grosses sociétés financières.
Mais, explique-t-on, il faut bien combler le "trou" de la Sécu, qui ne cesserait de s'approfondir. Mais pourquoi ne commence-t-on pas par supprimer les charges indues que les gouvernements successifs ont fait peser sur le budget de la Sécu, et en premier lieu celles qui servent à financer le patronat, soit sous forme de subventions directes, soit sous forme d'exonérations de cotisations ? Il ne faudrait pas oublier non plus que si le déficit de la Sécurité sociale se creuse, c'est à la fois dû à l'accroissement du chômage, qui réduit le nombre des cotisants, et à la faiblesse des salaires. Et puis, pourquoi ne prendrait-on pas sur les profits actuels et passés des richissimes sociétés pharmaceutiques ?
Au lieu de se tourner vers le patronat, qui a pourtant une grosse part de responsabilité dans les difficultés de la Sécu, le gouvernement choisit de s'en prendre aux salariés et montre du doigt les malades qu'il faudrait, dit-il, comble du ridicule, responsabiliser. Comme si les malades étaient responsables de leurs maladies et des médicaments qu'on leur prescrit. Comme si, au 21ème siècle, pouvoir accéder à de meilleurs soins, même pour des maladies ordinaires, était un luxe quand on est salarié !
Ce n'est pas acceptable.
Il faudra montrer à ce gouvernement que s'il touche à la Sécu, et plus tard, s'il tente d'aggraver les attaques contre les retraites, comme il en a le projet, il se heurtera à la riposte de tous les salariés.
Les amis de Juppé auraient tort d'oublier la leçon de 1995.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 8 novembre 2002)
15 novembre 2002 - Contre la guerre de brigandage en Irak
La radio et la télévision le répètent, le compte à rebours de la guerre contre l'Irak a commencé. 250 000 militaires américains seraient déjà déployés autour de ce pays, équipés d'engins meurtriers de haute technologie, soutenus par une armada de navires de guerre. Quant à l'aviation américaine, elle n'a même pas à se mobiliser car elle n'a jamais cessé de bombarder ce pays, dans l'indifférence générale.
Avant même d'être officiellement déclenchée, la guerre contre l'Irak a fait déjà des milliers de morts. A ceux, victimes de la guerre aérienne, s'ajoutent ceux, bien plus nombreux, morts de privations, conséquence de l'embargo imposé depuis dix ans qui frappe surtout les classes pauvres de la société.
Mais pourquoi donc cette pression militaire sur l'Irak ? L'intérêt personnel de Bush à entretenir un climat guerrier aux États-Unis même n'est que trop évident. Ce président, élu il y a deux ans avec moins de voix que son adversaire à la suite de manoeuvres et de tricheries grossières, a profité de l'émotion légitime soulevée dans le peuple américain par les attentats du 11 septembre pour se poser en chef de guerre défendant la démocratie contre le terrorisme. C'est déjà au nom du combat contre le terrorisme qu'une coalition occidentale, dont, rappelons-le, la France a fait partie, a noyé sous les bombes l'Afghanistan dont le peuple n'était en rien responsable des agissements de Ben Laden.
Au-delà de la personne même de Bush cependant, le milieu dirigeant américain a trouvé dans l'émotion suscitée par le 11 septembre une occasion pour tenter d'embrigader le peuple américain derrière la politique impérialiste que mène sa classe dirigeante à l'échelle de la planète.
Une vaste campagne de mensonges, relayée par les médias, est menée pour prolonger et amplifier la crainte de menaces venant de l'extérieur et pour transformer en agressé qui se défend un impérialisme agresseur.
C'est pourtant l'évidence que l'Irak n'a pas les moyens d'agresser les États-Unis. Et Saddam Hussein n'a rien à voir avec l'activité des groupes terroristes. Saddam Hussein est un dictateur sanglant. Mais cela n'a pas gêné les grandes puissances pour le soutenir et pour l'armer lorsqu'il a mené, à partir de 1980, une longue guerre contre l'Iran, qui a fait un million de morts, ou lorsqu'il a noyé dans le sang des insurrections des composantes kurde ou chiite de son peuple. C'est encore le peuple irakien qui payera, en sang et en souffrances, la guerre que prépare l'Occident.
Chirac a prétendu oeuvrer contre la guerre. Mais, en votant comme les autres l'ultimatum américain, rédigé sous l'égide de l'ONU, la France a participé à la manoeuvre consistant à en rendre l'Irak lui-même responsable.
Personne ne peut dire pour le moment quand et comment se déclencheront les opérations militaires. Mais quelle que soit sa forme, c'est une sale guerre, dont les motivations fondamentales sont les intérêts impérialistes qui sont énormes aussi bien en raison de la situation géostratégique de la région qu'en raison des richesses pétrolières qu'elle recèle. Ces richesses ont enrichi quelques centaines de grands bourgeois ou d'émirs locaux et, surtout, les grands trusts du pétrole. Elles n'ont rien rapporté aux peuples qui paient par contre toutes les conséquences de la mainmise des trusts occidentaux sur la région : les dictatures, la pauvreté et, périodiquement, les guerres.
Et rappelons le rôle infâme de notre propre impérialisme dans la région. Pas seulement parce qu'il s'aligne aujourd'hui derrière les États-Unis, mais plus encore parce qu'il avait lui-même participé au découpage de cette région en fonction des intérêts de ses propres trusts pétroliers et parce que ces trusts, comme Total, ont participé et participent encore au pillage.
Même si l'Irak est loin, la guerre qui se prépare nous concerne. Alors, qu'il soit au moins dit que ce n'est pas en notre nom, " au nom du peuple français ", que nos dirigeants participent à la préparation de cette guerre de brigandage. A bas la guerre contre l'Irak, à bas la domination impérialiste sur le monde !
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 15 novembre 2002)
22 novembre 2002 - Faire du 26 novembre une étape dans l'organisation de la riposte
Le gouvernement Chirac-Raffarin enchaîne les mesures contre la protection sociale des salariés. Il y a quelques semaines, il annonçait des réductions de remboursement des soins par la Sécurité sociale. Et on n'a pas eu à attendre bien longtemps pour en voir les premiers effets, avec la mise en application de la limitation du remboursement des visites à domicile. Le prochain " chantier " du gouvernement doit être celui des retraites. Il s'agit, là encore, d'un véritable chantier de démolition.
Raffarin-Chirac prévoient, dans un premier temps, de s'attaquer aux retraites des salariés du secteur public, à qui ils voudraient imposer, à leur tour, de cotiser 40 années, comme dans le secteur privé. Ce serait pour rétablir l'égalité, a le culot de prétendre le gouvernement. Sauf que cette égalité existait il y a quelques années encore, quand les salariés du privé comme ceux du public prenaient leur retraite à 60 ans, après avoir cotisé durant 37 ans et demi. La disparité actuelle n'existe que depuis que le gouvernement Balladur a décidé de reculer l'âge du départ à la retraite pour les salariés du privé. Alors, le moyen le plus simple et le plus juste de rétablir l'égalité ne serait-il pas qu'on en revienne à ce qui existait avant ?
Mais des hommes politiques, toutes tendances confondues, prétendus économistes, journalistes auxquels se mêlent aussi des syndicalistes, répètent en choeur qu'un tel retour ne serait pas possible, parce que, prétendent-ils, d'ici 2012, les caisses de retraites ne disposeraient plus d'argent pour financer les retraites.
C'est un bluff. Il suffirait par exemple de réduire le chômage à zéro pour que, le nombre de cotisants aux retraites augmentant, cela permette de financer les retraites de tous à taux plein, en restant aux 37 années et demie de cotisations. Et si cela ne suffisait pas, pourquoi ne pas prendre l'argent là où il se trouve, en puisant dans la fortune des gros actionnaires ? Ces richesses ont été créées par le travail des salariés et ce ne serait qu'un juste retour des choses. Curieusement, ceux qui crient à la catastrophe et à la faillite des caisses de retraite n'évoquent jamais cette solution-là.
Il ne faut pas que les travailleurs se laissent abuser par ceux qui essayent de dresser les salariés du secteur privé contre ceux du secteur public. D'ailleurs, le gouvernement se prépare à mettre tout le monde d'accord puisqu'il envisage, s'il réussit dans le service public, de s'en prendre à la retraite de tous les salariés. Fillon, le ministre du Travail, a récemment évoqué l'hypothèse d'un recul de l'âge de la retraite à 62 ans, voire au-delà.
Le 26 novembre, dans différentes branches du secteur public, à la SNCF, à La Poste, dans l'Éducation nationale, la plupart des syndicats au niveau confédéral ou au niveau local ont décidé d'organiser une journée d'action, avec des appels, ici ou là, à la grève et à des manifestations. Certes, l'attitude des dirigeants syndicaux n'est pas aussi claire et déterminée qu'il aurait été souhaitable, face à l'attitude d'un gouvernement qui montre, lui, sa détermination. Mais cette journée, après celle largement suivie du 3 octobre dernier des salariés d'EDF et Gaz de France, constitue une nouvelle occasion de montrer à ce gouvernement qu'il aurait tort de croire qu'il peut tout se permettre.
Juppé, qu'on a ressorti du placard pour en faire le chef du parti de Chirac, avait tenté en 1995 d'imposer aux salariés du service public les mesures que Raffarin voudrait de nouveau leur imposer. Il s'était cassé les dents. La leçon que les cheminots ont su donner alors à Chirac-Juppé doit resservir pour Chirac-Raffarin aujourd'hui. Mais en mieux, cette fois.
Une riposte à l'offensive programmée et concertée du gouvernement et du patronat ne s'improvise pas. Une seule journée ne suffira pas pour les faire reculer. Même si elle est largement suivie, il faudra d'autres journées, mobilisant, à chaque fois, de plus en plus de travailleurs.
Alors, il faut que le 26 novembre soit un succès qui aide à préparer la suite.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 21 novembre 2002)
29 novembre 2002 - Après le 26 novembre : Pour une riposte d'ensemble des travailleurs !
Les manifestations du 26 novembre des cheminots, rejoints par un grand nombre de travailleurs d'autres secteurs publics, ont mobilisé des dizaines de milliers de travailleurs à Paris et en province. Là où les fédérations syndicales avaient appelé à la grève, comme à France Télécom ou à La Poste, la grève a été largement suivie. Après la manifestation d'EDF et de GDF le 3 octobre, la journée d'hier a témoigné des inquiétudes et du mécontentement des travailleurs du service public face aux menaces qui pèsent sur leurs retraites, sur leurs salaires et sur l'emploi.
Même si l'action des chauffeurs routiers a tourné court, elle témoigne du même mécontentement. Les routiers en ont assez des journées de travail longues et harassantes pour un salaire voisin du Smic. Le gouvernement a fait donner contre eux les CRS et la gendarmerie, dont la menace de retirer les permis de conduire s'est ajoutée à la dérobade de certains syndicats.
Oui, les deux journées qui se sont succédé ont montré que, travailleurs du public et du privé, nous avons les mêmes raisons de nous défendre. Mais elles ont montré aussi que nous avons intérêt à le faire ensemble.
Une véritable campagne de mensonges est menée pour tenter d'opposer les travailleurs du service public à ceux du privé et, à l'intérieur, les corporations les unes aux autres. Mais c'est un mensonge intéressé parce que le patronat comme le gouvernement savent que le rapport des forces leur est d'autant plus favorable que les travailleurs se défendent séparément.
Le gouvernement et le patronat, eux, mènent une offensive concertée contre les intérêts du monde du travail.
Ils s'en prennent à l'emploi. Dans les entreprises privées, se multiplient les plans de licenciements collectifs. Dans les services publics, on supprime des emplois alors même que les hôpitaux, comme La Poste et l'Education nationale, manquent cruellement de personnel.
Dans le public comme dans le privé, les salaires sont insuffisants et les contrats précaires mal payés se multiplient.
Ils s'en prennent à la retraite de tous. Les travailleurs du privé ne doivent pas se faire d'illusions : si le gouvernement parvient à aligner la durée de cotisation sur les 40 ans imposés au privé par Balladur, il ne s'arrêtera pas là. Il cherchera à faire cotiser tout le monde et plus longtemps - 42 ans, voire 45 - pour une retraite de plus en plus misérable. Pas plus de 37 ans et demi de cotisation, ni dans le public, ni dans le privé ! Voilà ce qu'il faut pour rétablir l'égalité et voilà ce qui doit être l'objectif commun !
Ils veulent rétablir, au détriment des salariés, l'équilibre de la Sécurité sociale, mis à mal par les exonérations consenties aux patrons, en diminuant les remboursements.
A ce plan de combat au profit du grand patronat, il est indispensable d'opposer un plan de mobilisation du monde du travail.
Bien sûr, la riposte généralisée du monde du travail ne se décrète pas. Mais elle devrait se préparer au grand jour. Chaque action, chaque journée de grève ou de manifestation, devrait annoncer les suivantes. Mais aussi bien la journée de mobilisation dans le service public que l'action des routiers montrent que ce n'est pas cette préoccupation qui guide les centrales syndicales. Lorsqu'elles se divisent entre elles, ce n'est pas sur la meilleure façon de préparer les luttes futures mais en fonction des élections prud'homales qui viennent. Et lorsqu'elles sont unies, c'est sur les positions des plus inertes.
Comme bien souvent dans le passé, c'est l'action des travailleurs eux-mêmes qui devra les mettre d'accord. La journée du 26 novembre, après celle du 3 octobre, aura montré que les travailleurs répondent " présent " lorsqu'on les appelle à l'action.
Alors, malgré l'attitude timorée des centrales syndicales, malgré la dispersion, il faudra se saisir de toutes les propositions d'action à venir pour qu'elles marchent et s'élargissent. Le gouvernement se vante de sa détermination face aux travailleurs. Il faut que les travailleurs montrent une détermination supérieure pour bloquer l'offensive.
C'est de nos conditions d'existence, de nos vies, qu'il s'agit.
(source http://lutteouvriere.presse.online.fr, le 29 novembre 2002)
Cent dix-sept morts parmi les otages, mais peut-être bien plus avec ceux qui sont en train de mourir dans les hôpitaux, voilà le bilan de l'intervention des forces de l'ordre russes pour mettre fin à la prise d'otages. Quant aux preneurs d'otages, ils sont presque tous morts, froidement exécutés pour nombre d'entre eux.
Bien sûr, l'action du commando tchétchène qui a pris en otage tout le public d'un théâtre est humainement inacceptable et politiquement injustifiable. Le commando a pris consciemment le risque que son acte se termine en tragédie, non seulement pour lui-même mais aussi pour tous les otages. Les méthodes terroristes, même lorsqu'elles sont pratiquées au nom d'un peuple opprimé, ne servent pas mais desservent ce dernier.
Mais on ne peut qu'être écoeuré par les méthodes utilisées par les forces de l'ordre russes qui ont délibérément choisi de sacrifier la vie des otages en utilisant une arme chimique de destruction massive, comme dirait Bush, manifestement faite pour tuer. Personne ne peut savoir si les otages allaient être exécutés par les preneurs d'otages mais ceux qui sont morts ont été tués par les forces d'intervention russes.
En choisissant de mettre fin à la prise d'otages de cette façon horrible, Poutine a renforcé son image d'homme fort. Il a surtout montré la barbarie de son État qui transforme une salle de théâtre en chambre à gaz.
Mais ce qui est plus barbare encore, c'est la guerre que le gouvernement russe mène là-bas, dans cette région du Caucase appelée Tchétchénie. Une sale guerre qui s'apparente à une guerre coloniale menée contre tout un peuple pour préserver les intérêts de l'État russe dans une région stratégique. Une guerre féroce où les généraux russes ont les mains libres pour terroriser la population en jouant avec la peau de leurs propres soldats.
Les quelques images qui parviennent de cette guerre et qui passent de temps à autre à la télévision montrent la capitale tchétchène, Grozny, transformée en champ de ruines, avec des femmes, des hommes et des enfants qui tentent de survivre au milieu des bombardements et de la répression. Mais ce terrorisme-là, le terrorisme d'État, ne soulève pas l'indignation des grands de ce monde. Si tous les chefs d'État ont assuré à Poutine leur solidarité pendant l'action des terroristes à Moscou, aucun d'entre eux ne fait à Poutine le procès pour le terrorisme qu'il exerce en Tchétchénie.
C'est que, pour les grandes puissances, la " lutte contre le terrorisme " a toujours été le prétexte pour utiliser elles-mêmes, mais à une grande échelle, les méthodes terroristes pour préserver leurs propres intérêts. Apprenant la mort du général Massu, Chirac a tenu à rendre hommage à " ce très grand soldat ". Mais combien d'Algériens ont été torturés et sommairement exécutés, sous l'autorité de ce dernier, au nom de la " lutte contre le terrorisme ", alors qu'il s'agissait de perpétuer la domination coloniale sur l'Algérie ?
C'est en invoquant la " lutte contre le terrorisme " que Bush a fait bombarder l'Afghanistan pendant des semaines, en massacrant des milliers d'Afghans qui n'étaient pas les responsables mais les victimes de la dictature des talibans.
Et c'est encore au nom de la lutte contre le terrorisme que les États-Unis préparent la guerre contre l'Irak, avec la complicité de toutes les grandes puissances, y compris la France, malgré quelques minauderies de Chirac à l'ONU ou ailleurs. Mais combien de civils innocents mourront dans une guerre que les États-Unis prétendent mener contre le seul Saddam Hussein ?
Tous ces gens, de Poutine à Bush, en passant par Chirac, ne dénoncent le terrorisme des petits groupes que pour mieux justifier le terrorisme d'État. Mais le terrorisme d'État n'est pas plus justifiable que celui des preneurs d'otages de Moscou, ni dans ses méthodes, ni dans ses objectifs. Car la méthode, de la Tchétchénie à l'Irak, en passant par l'Algérie ou l'Afghanistan, c'est de tuer des innocents pour terroriser tout un peuple. Et l'objectif, c'est maintenir un ordre mondial basé sur le pouvoir des puissants sur les opprimés, des riches sur les pauvres, et des grandes nations impérialistes sur les petits peuples.
Arlette LAGUILLER
(Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 4 novembre 2002)
8 novembre 2002 " Il faut combattre l'insécurité sociale "
L'offensive du gouvernement Chirac-Raffarin contre les salariés ne connaît pas de trêve. Il y a quelques semaines, le ministre du Travail Fillon présentait son projet d'assouplissement des procédures de licenciements collectifs, au moment même où était rendue publique une véritable déferlante de plans sociaux. Preuve que, même avec la législation en place, les patrons ne rencontrent guère d'entrave pour licencier.
Dans la foulée, les mesures envisagées pour réformer la Sécurité Sociale sont aussi inquiétantes. Jacques Barrot, ancien ministre de la Santé, porte-parole du parti de Chirac à l'Assemblée nationale, expliquait qu'il était souhaitable qu'il y ait "une concentration de l'assurance maladie obligatoire sur toutes les maladies graves", ajoutant que "pour le maintien en santé, il faut que chaque Français puisse être en mesure d'avoir une assurance complémentaire pour le faire". Il eut beau, après coup, déclarer qu'on avait caricaturé ses propos, l'orientation est pourtant claire, et sans surprise. Elle est dans la logique de tous les choix du gouvernement et de ceux du gouvernement de la "gauche plurielle" précédent.
La Sécu ne rembourserait donc que les maladies graves ; mais où cela commence-t-il donc ? Et comment savoir si l'évolution d'une maladie "non grave" ne conduirait pas à une détérioration plus grave de la santé ? Un tel système conduirait, plus encore qu'actuellement, à une médecine à deux niveaux, l'une pour ceux qui pourraient se payer une bonne assurance complémentaire, et l'autre pour ceux qui n'en auraient pas les moyens.
C'est pain bénit pour les compagnies d'assurances, qui depuis longtemps lorgnent sur le coquet magot que cela représente. Mais pour les salariés, la perspective est moins réjouissante, même pour ceux qui pourraient s'offrir, si l'on ose dire, une assurance complémentaire. Celle-ci risque d'ailleurs de devenir, à terme, l'assurance principale.
Une mainmise encore plus grande des assurances privées sur la couverture maladie n'est pas la garantie que cette couverture sera meilleure, ni même qu'elle soit garantie. Car ces fonds, à la disposition des compagnies d'assurances privées, serviront à la spéculation, à l'exemple des fonds de pension. On se souvient des conséquences catastrophiques de telles pratiques aux USA lors de la faillite d'Enron, et d'autres grosses sociétés financières.
Mais, explique-t-on, il faut bien combler le "trou" de la Sécu, qui ne cesserait de s'approfondir. Mais pourquoi ne commence-t-on pas par supprimer les charges indues que les gouvernements successifs ont fait peser sur le budget de la Sécu, et en premier lieu celles qui servent à financer le patronat, soit sous forme de subventions directes, soit sous forme d'exonérations de cotisations ? Il ne faudrait pas oublier non plus que si le déficit de la Sécurité sociale se creuse, c'est à la fois dû à l'accroissement du chômage, qui réduit le nombre des cotisants, et à la faiblesse des salaires. Et puis, pourquoi ne prendrait-on pas sur les profits actuels et passés des richissimes sociétés pharmaceutiques ?
Au lieu de se tourner vers le patronat, qui a pourtant une grosse part de responsabilité dans les difficultés de la Sécu, le gouvernement choisit de s'en prendre aux salariés et montre du doigt les malades qu'il faudrait, dit-il, comble du ridicule, responsabiliser. Comme si les malades étaient responsables de leurs maladies et des médicaments qu'on leur prescrit. Comme si, au 21ème siècle, pouvoir accéder à de meilleurs soins, même pour des maladies ordinaires, était un luxe quand on est salarié !
Ce n'est pas acceptable.
Il faudra montrer à ce gouvernement que s'il touche à la Sécu, et plus tard, s'il tente d'aggraver les attaques contre les retraites, comme il en a le projet, il se heurtera à la riposte de tous les salariés.
Les amis de Juppé auraient tort d'oublier la leçon de 1995.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 8 novembre 2002)
15 novembre 2002 - Contre la guerre de brigandage en Irak
La radio et la télévision le répètent, le compte à rebours de la guerre contre l'Irak a commencé. 250 000 militaires américains seraient déjà déployés autour de ce pays, équipés d'engins meurtriers de haute technologie, soutenus par une armada de navires de guerre. Quant à l'aviation américaine, elle n'a même pas à se mobiliser car elle n'a jamais cessé de bombarder ce pays, dans l'indifférence générale.
Avant même d'être officiellement déclenchée, la guerre contre l'Irak a fait déjà des milliers de morts. A ceux, victimes de la guerre aérienne, s'ajoutent ceux, bien plus nombreux, morts de privations, conséquence de l'embargo imposé depuis dix ans qui frappe surtout les classes pauvres de la société.
Mais pourquoi donc cette pression militaire sur l'Irak ? L'intérêt personnel de Bush à entretenir un climat guerrier aux États-Unis même n'est que trop évident. Ce président, élu il y a deux ans avec moins de voix que son adversaire à la suite de manoeuvres et de tricheries grossières, a profité de l'émotion légitime soulevée dans le peuple américain par les attentats du 11 septembre pour se poser en chef de guerre défendant la démocratie contre le terrorisme. C'est déjà au nom du combat contre le terrorisme qu'une coalition occidentale, dont, rappelons-le, la France a fait partie, a noyé sous les bombes l'Afghanistan dont le peuple n'était en rien responsable des agissements de Ben Laden.
Au-delà de la personne même de Bush cependant, le milieu dirigeant américain a trouvé dans l'émotion suscitée par le 11 septembre une occasion pour tenter d'embrigader le peuple américain derrière la politique impérialiste que mène sa classe dirigeante à l'échelle de la planète.
Une vaste campagne de mensonges, relayée par les médias, est menée pour prolonger et amplifier la crainte de menaces venant de l'extérieur et pour transformer en agressé qui se défend un impérialisme agresseur.
C'est pourtant l'évidence que l'Irak n'a pas les moyens d'agresser les États-Unis. Et Saddam Hussein n'a rien à voir avec l'activité des groupes terroristes. Saddam Hussein est un dictateur sanglant. Mais cela n'a pas gêné les grandes puissances pour le soutenir et pour l'armer lorsqu'il a mené, à partir de 1980, une longue guerre contre l'Iran, qui a fait un million de morts, ou lorsqu'il a noyé dans le sang des insurrections des composantes kurde ou chiite de son peuple. C'est encore le peuple irakien qui payera, en sang et en souffrances, la guerre que prépare l'Occident.
Chirac a prétendu oeuvrer contre la guerre. Mais, en votant comme les autres l'ultimatum américain, rédigé sous l'égide de l'ONU, la France a participé à la manoeuvre consistant à en rendre l'Irak lui-même responsable.
Personne ne peut dire pour le moment quand et comment se déclencheront les opérations militaires. Mais quelle que soit sa forme, c'est une sale guerre, dont les motivations fondamentales sont les intérêts impérialistes qui sont énormes aussi bien en raison de la situation géostratégique de la région qu'en raison des richesses pétrolières qu'elle recèle. Ces richesses ont enrichi quelques centaines de grands bourgeois ou d'émirs locaux et, surtout, les grands trusts du pétrole. Elles n'ont rien rapporté aux peuples qui paient par contre toutes les conséquences de la mainmise des trusts occidentaux sur la région : les dictatures, la pauvreté et, périodiquement, les guerres.
Et rappelons le rôle infâme de notre propre impérialisme dans la région. Pas seulement parce qu'il s'aligne aujourd'hui derrière les États-Unis, mais plus encore parce qu'il avait lui-même participé au découpage de cette région en fonction des intérêts de ses propres trusts pétroliers et parce que ces trusts, comme Total, ont participé et participent encore au pillage.
Même si l'Irak est loin, la guerre qui se prépare nous concerne. Alors, qu'il soit au moins dit que ce n'est pas en notre nom, " au nom du peuple français ", que nos dirigeants participent à la préparation de cette guerre de brigandage. A bas la guerre contre l'Irak, à bas la domination impérialiste sur le monde !
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 15 novembre 2002)
22 novembre 2002 - Faire du 26 novembre une étape dans l'organisation de la riposte
Le gouvernement Chirac-Raffarin enchaîne les mesures contre la protection sociale des salariés. Il y a quelques semaines, il annonçait des réductions de remboursement des soins par la Sécurité sociale. Et on n'a pas eu à attendre bien longtemps pour en voir les premiers effets, avec la mise en application de la limitation du remboursement des visites à domicile. Le prochain " chantier " du gouvernement doit être celui des retraites. Il s'agit, là encore, d'un véritable chantier de démolition.
Raffarin-Chirac prévoient, dans un premier temps, de s'attaquer aux retraites des salariés du secteur public, à qui ils voudraient imposer, à leur tour, de cotiser 40 années, comme dans le secteur privé. Ce serait pour rétablir l'égalité, a le culot de prétendre le gouvernement. Sauf que cette égalité existait il y a quelques années encore, quand les salariés du privé comme ceux du public prenaient leur retraite à 60 ans, après avoir cotisé durant 37 ans et demi. La disparité actuelle n'existe que depuis que le gouvernement Balladur a décidé de reculer l'âge du départ à la retraite pour les salariés du privé. Alors, le moyen le plus simple et le plus juste de rétablir l'égalité ne serait-il pas qu'on en revienne à ce qui existait avant ?
Mais des hommes politiques, toutes tendances confondues, prétendus économistes, journalistes auxquels se mêlent aussi des syndicalistes, répètent en choeur qu'un tel retour ne serait pas possible, parce que, prétendent-ils, d'ici 2012, les caisses de retraites ne disposeraient plus d'argent pour financer les retraites.
C'est un bluff. Il suffirait par exemple de réduire le chômage à zéro pour que, le nombre de cotisants aux retraites augmentant, cela permette de financer les retraites de tous à taux plein, en restant aux 37 années et demie de cotisations. Et si cela ne suffisait pas, pourquoi ne pas prendre l'argent là où il se trouve, en puisant dans la fortune des gros actionnaires ? Ces richesses ont été créées par le travail des salariés et ce ne serait qu'un juste retour des choses. Curieusement, ceux qui crient à la catastrophe et à la faillite des caisses de retraite n'évoquent jamais cette solution-là.
Il ne faut pas que les travailleurs se laissent abuser par ceux qui essayent de dresser les salariés du secteur privé contre ceux du secteur public. D'ailleurs, le gouvernement se prépare à mettre tout le monde d'accord puisqu'il envisage, s'il réussit dans le service public, de s'en prendre à la retraite de tous les salariés. Fillon, le ministre du Travail, a récemment évoqué l'hypothèse d'un recul de l'âge de la retraite à 62 ans, voire au-delà.
Le 26 novembre, dans différentes branches du secteur public, à la SNCF, à La Poste, dans l'Éducation nationale, la plupart des syndicats au niveau confédéral ou au niveau local ont décidé d'organiser une journée d'action, avec des appels, ici ou là, à la grève et à des manifestations. Certes, l'attitude des dirigeants syndicaux n'est pas aussi claire et déterminée qu'il aurait été souhaitable, face à l'attitude d'un gouvernement qui montre, lui, sa détermination. Mais cette journée, après celle largement suivie du 3 octobre dernier des salariés d'EDF et Gaz de France, constitue une nouvelle occasion de montrer à ce gouvernement qu'il aurait tort de croire qu'il peut tout se permettre.
Juppé, qu'on a ressorti du placard pour en faire le chef du parti de Chirac, avait tenté en 1995 d'imposer aux salariés du service public les mesures que Raffarin voudrait de nouveau leur imposer. Il s'était cassé les dents. La leçon que les cheminots ont su donner alors à Chirac-Juppé doit resservir pour Chirac-Raffarin aujourd'hui. Mais en mieux, cette fois.
Une riposte à l'offensive programmée et concertée du gouvernement et du patronat ne s'improvise pas. Une seule journée ne suffira pas pour les faire reculer. Même si elle est largement suivie, il faudra d'autres journées, mobilisant, à chaque fois, de plus en plus de travailleurs.
Alors, il faut que le 26 novembre soit un succès qui aide à préparer la suite.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 21 novembre 2002)
29 novembre 2002 - Après le 26 novembre : Pour une riposte d'ensemble des travailleurs !
Les manifestations du 26 novembre des cheminots, rejoints par un grand nombre de travailleurs d'autres secteurs publics, ont mobilisé des dizaines de milliers de travailleurs à Paris et en province. Là où les fédérations syndicales avaient appelé à la grève, comme à France Télécom ou à La Poste, la grève a été largement suivie. Après la manifestation d'EDF et de GDF le 3 octobre, la journée d'hier a témoigné des inquiétudes et du mécontentement des travailleurs du service public face aux menaces qui pèsent sur leurs retraites, sur leurs salaires et sur l'emploi.
Même si l'action des chauffeurs routiers a tourné court, elle témoigne du même mécontentement. Les routiers en ont assez des journées de travail longues et harassantes pour un salaire voisin du Smic. Le gouvernement a fait donner contre eux les CRS et la gendarmerie, dont la menace de retirer les permis de conduire s'est ajoutée à la dérobade de certains syndicats.
Oui, les deux journées qui se sont succédé ont montré que, travailleurs du public et du privé, nous avons les mêmes raisons de nous défendre. Mais elles ont montré aussi que nous avons intérêt à le faire ensemble.
Une véritable campagne de mensonges est menée pour tenter d'opposer les travailleurs du service public à ceux du privé et, à l'intérieur, les corporations les unes aux autres. Mais c'est un mensonge intéressé parce que le patronat comme le gouvernement savent que le rapport des forces leur est d'autant plus favorable que les travailleurs se défendent séparément.
Le gouvernement et le patronat, eux, mènent une offensive concertée contre les intérêts du monde du travail.
Ils s'en prennent à l'emploi. Dans les entreprises privées, se multiplient les plans de licenciements collectifs. Dans les services publics, on supprime des emplois alors même que les hôpitaux, comme La Poste et l'Education nationale, manquent cruellement de personnel.
Dans le public comme dans le privé, les salaires sont insuffisants et les contrats précaires mal payés se multiplient.
Ils s'en prennent à la retraite de tous. Les travailleurs du privé ne doivent pas se faire d'illusions : si le gouvernement parvient à aligner la durée de cotisation sur les 40 ans imposés au privé par Balladur, il ne s'arrêtera pas là. Il cherchera à faire cotiser tout le monde et plus longtemps - 42 ans, voire 45 - pour une retraite de plus en plus misérable. Pas plus de 37 ans et demi de cotisation, ni dans le public, ni dans le privé ! Voilà ce qu'il faut pour rétablir l'égalité et voilà ce qui doit être l'objectif commun !
Ils veulent rétablir, au détriment des salariés, l'équilibre de la Sécurité sociale, mis à mal par les exonérations consenties aux patrons, en diminuant les remboursements.
A ce plan de combat au profit du grand patronat, il est indispensable d'opposer un plan de mobilisation du monde du travail.
Bien sûr, la riposte généralisée du monde du travail ne se décrète pas. Mais elle devrait se préparer au grand jour. Chaque action, chaque journée de grève ou de manifestation, devrait annoncer les suivantes. Mais aussi bien la journée de mobilisation dans le service public que l'action des routiers montrent que ce n'est pas cette préoccupation qui guide les centrales syndicales. Lorsqu'elles se divisent entre elles, ce n'est pas sur la meilleure façon de préparer les luttes futures mais en fonction des élections prud'homales qui viennent. Et lorsqu'elles sont unies, c'est sur les positions des plus inertes.
Comme bien souvent dans le passé, c'est l'action des travailleurs eux-mêmes qui devra les mettre d'accord. La journée du 26 novembre, après celle du 3 octobre, aura montré que les travailleurs répondent " présent " lorsqu'on les appelle à l'action.
Alors, malgré l'attitude timorée des centrales syndicales, malgré la dispersion, il faudra se saisir de toutes les propositions d'action à venir pour qu'elles marchent et s'élargissent. Le gouvernement se vante de sa détermination face aux travailleurs. Il faut que les travailleurs montrent une détermination supérieure pour bloquer l'offensive.
C'est de nos conditions d'existence, de nos vies, qu'il s'agit.
(source http://lutteouvriere.presse.online.fr, le 29 novembre 2002)