Texte intégral
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,
Un mot d'abord pour vous remercier de votre invitation et remercier le professeur DEBOUT pour le travail réalisé à la tête de l'UNPS. Vous savez que j'apprécie ceux qui travaillent près du terrain, qui restent proches des gens, et je sais que votre mouvement, composés de nombreux bénévoles ici présents, est soucieux de cette proximité, de cette écoute sur un sujet qui se prête pourtant volontiers aux discussions de salons.
Le suicide, et j'évoquerai plus particulièrement ce matin le suicide chez les jeunes, reste en effet pour beaucoup un sujet tantôt virtuel, tantôt tabou. Combien de nos concitoyens ont conscience en effet que le suicide est la deuxième cause de mortalité des jeunes, immédiatement après les accidents de la route ? Comment ne pas être frappé par les réactions des parents d'enfants, d'ados, qui se sont donnés la mort et qui paraissent ne s'être doutés de rien, n'avoir rien vu venir ?
Les chiffres sont pourtant là et devraient être connus: 7 % de jeunes de 11 à 19 ans auraient fait une tentative de suicide. C'est trois fois plus qu'il y a 30 ans. Au delà de ces chiffres, et des passages à l'acte malheureusement réussis, si l'on peut dire, ) a-t-on idée du nombre de comportements qui sont dictés par les mêmes sentiments : la conduite insensée sur route, l'anorexie (je viens d'en voir les ravages à BORDEAUX), ou, à l'inverse, la boulimie, certaines formes de délinquance, la drogue bien sûr, je pourrais multiplier les exemples.
Comme pour tout fléau, toute maladie, avant de tenter d'en guérir les conséquences ou d'en atténuer les effets, il faut en connaître les causes.
Je ne vais pas reprendre devant vous les innombrables études ou les enquêtes sociologiques qui tentent d'analyser le phénomène. Simplement, quelques réflexions de bon sens.
L'adolescence, car c'est la période de la vie principalement concernée par ce fléau, est une période de transformation, de remise en cause, et parfois d'angoisse pour une bonne partie de nos enfants. Ceux-ci vivent parfois mal, je le constate, le décalage entre les mondes dans lesquels ils sont immergés au quotidien, cette société de "l'apparence et de l'opulence" pour reprendre l'expression du Docteur POMMEREAU. Pour des enfants victimes d'anorexie, cette forme de suicide à petit feu, l'apparence c'est la vedette de cinéma, le mannequin de haute couture, filiforme, et l'opulence c'est ce qui lui est offert chaque jour qui le déforme, les hamburgers ou les plateaux-télé. Pour un adolescent qui exprime sa douleur dans une violence contre lui-même, on retrouve le même déchirement entre des modèles de vie, des modèles de consommation idéalisés, et une réalité qui en est très éloignée, trop éloignée. Certains s'en prennent à leurs parents, d'autres à la Société, d'autres enfin à eux-mêmes.
Je ne veux pas m'étendre sur ces aspects qui vous sont bien connus, mais qu'il me paraissait nécessaire de souligner, pour mettre en valeur qu'un ministre, et au-delà un gouvernement puisque Jean-François MATTEI en a sa part, ne sauraient lutter seuls contre ce fléau, que la responsabilité est collective, et largement partagée par tous ceux qui modèlent, qui forgent l'esprit, la représentation du monde des enfants.
A ce stade quel peut être l'action d'un ministre, quels objectifs puis-je me fixer ?
Il est évident pour moi que l'axe principal de l'effort doit porter sur la cellule familiale.
Quels que soient les motifs extérieurs qui poussent l'enfant ou l'adolescent à tenter de mettre un terme à sa vie, j'en ai parlé, c'est quand même au sein de sa famille que tout peut se jouer.
Deux principes forts, évidents pour moi et qui orientent mon action: ne pas accabler l'enfant, ne pas stigmatiser les parents. Ne pas punir les enfants, les ados, c'est avant tout les écouter, les comprendre. Des réseaux d'écoute existent, des centres d'appel fonctionnent en permanence, des maisons de l'adolescence se développent. Un mot sur celles-ci. J'ai rencontré récemment les responsables de la maison du Havre. Il y a 8 jours, j'inaugurais le pôle aquitain de l'adolescence à BORDEAUX. On a là l'exemple de structures partenariales, proches du terrain, fonctionnant avec des passionnés et pas des idéologues, qui montrent chaque jour qu'un dialogue est possible, qu'une reconstruction est possible
Ne pas stigmatiser les parents, c'est aussi privilégier le dialogue. C'est leur apprendre à percevoir le risque, les clignotants qui s'allument ; l'enfant qui se drogue, boit, qui s'enferme sur soi et tant d'autres exemples parfois moins facilement décelables.
Là aussi, le développement de lieux d'écoute, d'apprentissage doit être encouragé et c'est l'une des priorités de mon ministère, s'inscrivant en cela d'ailleurs parfaitement dans le cadre des priorités fixées par le Président de la République.
A ce titre, j'organise à l'automne une rencontre de l'adolescence pour qu'enfin puisse être lancées les premières pistes de réflexion d'une réelle politique en direction de cet âge charnière de la vie, trop délaissé par les politiques familiales. J'entends mener cette réflexion avec des structures comme les vôtres encore une fois, des structures proches du terrain, des structures de praticiens.
Je veux que la conférence de la famille de l'année prochaine ait pour thème l'adolescence. L'un des groupes de travail que j'envisage de mettre en place portera précisément sur ce thème du mal-être des ados. A l'instar des groupes mis en place à l'automne dernier pour la conférence de la famille, je souhaite que ces groupes proposent des mesures concrètes, pratiques et que cela ne soit pas qu'un ensemble d'analyses, aussi brillantes soient-elles, d'un phénomène, mais qu'elles démontrent à nos concitoyens que nous avons tous ensemble pris la mesure de ce fléau, et que nous sommes résolus à faire en sorte que pour l'immense majorité des adolescents, cette période reste pour reprendre l'expression du Chef de l'Etat, "l'âge de toutes les espérances".
Je vous remercie.
(source http://www.sante.gouv.fr, le 13 février 2003)
Un mot d'abord pour vous remercier de votre invitation et remercier le professeur DEBOUT pour le travail réalisé à la tête de l'UNPS. Vous savez que j'apprécie ceux qui travaillent près du terrain, qui restent proches des gens, et je sais que votre mouvement, composés de nombreux bénévoles ici présents, est soucieux de cette proximité, de cette écoute sur un sujet qui se prête pourtant volontiers aux discussions de salons.
Le suicide, et j'évoquerai plus particulièrement ce matin le suicide chez les jeunes, reste en effet pour beaucoup un sujet tantôt virtuel, tantôt tabou. Combien de nos concitoyens ont conscience en effet que le suicide est la deuxième cause de mortalité des jeunes, immédiatement après les accidents de la route ? Comment ne pas être frappé par les réactions des parents d'enfants, d'ados, qui se sont donnés la mort et qui paraissent ne s'être doutés de rien, n'avoir rien vu venir ?
Les chiffres sont pourtant là et devraient être connus: 7 % de jeunes de 11 à 19 ans auraient fait une tentative de suicide. C'est trois fois plus qu'il y a 30 ans. Au delà de ces chiffres, et des passages à l'acte malheureusement réussis, si l'on peut dire, ) a-t-on idée du nombre de comportements qui sont dictés par les mêmes sentiments : la conduite insensée sur route, l'anorexie (je viens d'en voir les ravages à BORDEAUX), ou, à l'inverse, la boulimie, certaines formes de délinquance, la drogue bien sûr, je pourrais multiplier les exemples.
Comme pour tout fléau, toute maladie, avant de tenter d'en guérir les conséquences ou d'en atténuer les effets, il faut en connaître les causes.
Je ne vais pas reprendre devant vous les innombrables études ou les enquêtes sociologiques qui tentent d'analyser le phénomène. Simplement, quelques réflexions de bon sens.
L'adolescence, car c'est la période de la vie principalement concernée par ce fléau, est une période de transformation, de remise en cause, et parfois d'angoisse pour une bonne partie de nos enfants. Ceux-ci vivent parfois mal, je le constate, le décalage entre les mondes dans lesquels ils sont immergés au quotidien, cette société de "l'apparence et de l'opulence" pour reprendre l'expression du Docteur POMMEREAU. Pour des enfants victimes d'anorexie, cette forme de suicide à petit feu, l'apparence c'est la vedette de cinéma, le mannequin de haute couture, filiforme, et l'opulence c'est ce qui lui est offert chaque jour qui le déforme, les hamburgers ou les plateaux-télé. Pour un adolescent qui exprime sa douleur dans une violence contre lui-même, on retrouve le même déchirement entre des modèles de vie, des modèles de consommation idéalisés, et une réalité qui en est très éloignée, trop éloignée. Certains s'en prennent à leurs parents, d'autres à la Société, d'autres enfin à eux-mêmes.
Je ne veux pas m'étendre sur ces aspects qui vous sont bien connus, mais qu'il me paraissait nécessaire de souligner, pour mettre en valeur qu'un ministre, et au-delà un gouvernement puisque Jean-François MATTEI en a sa part, ne sauraient lutter seuls contre ce fléau, que la responsabilité est collective, et largement partagée par tous ceux qui modèlent, qui forgent l'esprit, la représentation du monde des enfants.
A ce stade quel peut être l'action d'un ministre, quels objectifs puis-je me fixer ?
Il est évident pour moi que l'axe principal de l'effort doit porter sur la cellule familiale.
Quels que soient les motifs extérieurs qui poussent l'enfant ou l'adolescent à tenter de mettre un terme à sa vie, j'en ai parlé, c'est quand même au sein de sa famille que tout peut se jouer.
Deux principes forts, évidents pour moi et qui orientent mon action: ne pas accabler l'enfant, ne pas stigmatiser les parents. Ne pas punir les enfants, les ados, c'est avant tout les écouter, les comprendre. Des réseaux d'écoute existent, des centres d'appel fonctionnent en permanence, des maisons de l'adolescence se développent. Un mot sur celles-ci. J'ai rencontré récemment les responsables de la maison du Havre. Il y a 8 jours, j'inaugurais le pôle aquitain de l'adolescence à BORDEAUX. On a là l'exemple de structures partenariales, proches du terrain, fonctionnant avec des passionnés et pas des idéologues, qui montrent chaque jour qu'un dialogue est possible, qu'une reconstruction est possible
Ne pas stigmatiser les parents, c'est aussi privilégier le dialogue. C'est leur apprendre à percevoir le risque, les clignotants qui s'allument ; l'enfant qui se drogue, boit, qui s'enferme sur soi et tant d'autres exemples parfois moins facilement décelables.
Là aussi, le développement de lieux d'écoute, d'apprentissage doit être encouragé et c'est l'une des priorités de mon ministère, s'inscrivant en cela d'ailleurs parfaitement dans le cadre des priorités fixées par le Président de la République.
A ce titre, j'organise à l'automne une rencontre de l'adolescence pour qu'enfin puisse être lancées les premières pistes de réflexion d'une réelle politique en direction de cet âge charnière de la vie, trop délaissé par les politiques familiales. J'entends mener cette réflexion avec des structures comme les vôtres encore une fois, des structures proches du terrain, des structures de praticiens.
Je veux que la conférence de la famille de l'année prochaine ait pour thème l'adolescence. L'un des groupes de travail que j'envisage de mettre en place portera précisément sur ce thème du mal-être des ados. A l'instar des groupes mis en place à l'automne dernier pour la conférence de la famille, je souhaite que ces groupes proposent des mesures concrètes, pratiques et que cela ne soit pas qu'un ensemble d'analyses, aussi brillantes soient-elles, d'un phénomène, mais qu'elles démontrent à nos concitoyens que nous avons tous ensemble pris la mesure de ce fléau, et que nous sommes résolus à faire en sorte que pour l'immense majorité des adolescents, cette période reste pour reprendre l'expression du Chef de l'Etat, "l'âge de toutes les espérances".
Je vous remercie.
(source http://www.sante.gouv.fr, le 13 février 2003)