Texte intégral
Vous n'avez pas voté la censure ; pourtant, vous êtes apparu comme le plus virulent sur la réforme des modes de scrutin. Que faut-il pour que vous quittiez la majorité ?
La majorité, ce sont les millions de Français qui ont voulu le changement. Je suis dans cette majorité. Voter la censure, c'est vouloir renverser le gouvernement et provoquer une crise majeure. Cela n'aurait pas été responsable. Mais cela m'a donné plus de liberté pour dire au gouvernement quelle faute il avait commise en se mettant au service d'un seul parti. Une partie de l'image du Premier ministre a été abîmée.
Vous prenez de plus en plus vos distances avec le gouvernement
Je ne peux pas m'empêcher de voir la gravité de la situation. J'aurais voulu qu'il n'y ait pas un jour de perdu pour que les Français voient un vrai changement ; qu'ils aient le sentiment d'une vie publique honnête, dans laquelle on s'attaque aux véritables difficultés ; que l'économie et les entreprises aient toutes leurs chances, et qu'un nouveau projet social rassemble les Français. C'était cela que l'on attendait après le 21 avril. Pas seulement des formules, et pas des magouilles de parti.
Vous projetez-vous déjà dans la présidentielle de 2007 ?
La seule chose qui m'intéresse aujourd'hui, c'est de comprendre la profondeur de la crise et de mobiliser notre pays autour des réponses à apporter. Il faut aller bien plus profond qu'un changement de majorité, il faut changer le système. C'est cela que veut l'UDF nouvelle, qui est aujourd'hui le courant émergeant de la vie politique française. L'UMP est un ensemble disparate de gens qui ne sont là que pour le pouvoir, et qui commencent à se disputer. Quant au PS, il est plongé dans une crise profonde. Les années qui viennent vont servir à construire un vrai engagement. La présidentielle viendra après : elle n'est que le sommet de la construction.
L'UDF a beaucoup changé avec le départ de cadres à l'UMP et l'arrivée de nouveaux militants. Quel est le visage de votre parti aujourd'hui ?
Jusqu'alors, l'UDF était un parti de notables dans lequel chacun jouait pour son compte. Aujourd'hui, elle apparaît comme déterminée et rassemblée. Depuis un an, certains n'ont qu'une idée, c'est que nous disparaissions, et n avec nous, le pluralisme en France. Pour ne plus laisser que deux partis indifférenciés, dominés par la pensée unique. Or les Français ne veulent pas être privés de leur liberté de parole et de choix véritable. C'est le combat que nous menons, et nous le gagnerons.
C'est un discours très rassembleur
Le rassemblement est une condition du changement. Dans les temps ordinaires, il y a les clivages ordinaires, la répétition d'une alternances droite-gauche. Et puis il y a les temps exceptionnels où les clivages ne sont plus les mêmes. En 58, de Gaulle sait rassembler les forces politiques du pays au-delà des frontières classiques. Je pense que nous nous apprêtons à vivre un temps comme celui-là.
Quelle position allez-vous défendre mercredi à l'Assemblée lors du débat sur l'Irak ?
La position de fermeté : face à Saddam Hussein, dictateur pour son peuple, qu'il faut désarmer ; et fermeté face aux Etats-Unis qui ne peuvent pas s'instaurer, tout seuls, les gendarmes de la planète. C'est pourquoi j'ai approuvé la position de la France dans sa défense et l'ONU et de l'ordre international.
Les Etats-Unis sont-ils dangereux ?
Non, je pense qu'on aurait grand tort de diaboliser les Etats-Unis. Mais on n'a jamais raison tout seul. Le Proche et le Moyen-Orient sont aujourd'hui une poudrière. Décider d'y craquer une allumette dans le but d'y voir plus clair, cela présente des dangers considérables. Il y a beaucoup à craindre de cette crise, car il n'y a plus guère le choix qu'entre de mauvaises solutions. Et nous avons négligé un chapitre essentiel : c'est de faire entendre dans ce conflit la voix de l'Europe. Cette Europe en miettes, c'est, aujourd'hui, notre plus grand échec.
Que faut-il pour que l'Europe parle d'une seule voix ?
Il va falloir que des forces politiques et des hommes d'Etat proposent une vision forte de l'Europe, des institutions capables de décider : autre chose que cette idée dérisoire de deux présidents, avancée par Jacques Chirac et Gerhard Schröder. L'Europe, s'il elle existait, offrirait au monde deux choses uniques : un équilibre à la puissance américaine et une vision désintéressée. Car l'Europe a fait dans son histoire l'expérience de ce que l'esprit de domination a de tragique.
Que vous inspire la situation économique actuelle ?
Nous sommes d'ores et déjà dans la crise. Je ressens la situation de la France comme très périlleuse aujourd'hui. Aucune des réformes n'est faite, ni même entamée ; or les temps de crise sont les plus difficiles pour faire des réformes. Ce qui m'inquiète, c'est qu'il y a plusieurs phénomènes qui n'ont pas encore produit leurs effets : la crise irakienne, la récession allemande et l'absence de réformes en France. La situation qui s'annonce est bien plus grave qu'on nous le dit.
Le gouvernement en a-t-il pris conscience ?
Il ne l'ignore pas. Mais il préfère la stratégie des tout petits pas et le " ne vous inquiétez pas ". Le gouvernement a disposé d'une longue période d'état de grâce. Ce temps aurait dû servir à la mobilisation du pays. Notre démocratie ne marche pas, la démocratie locale est illisible, l'économie est plus que fragile, le projet social est absent. Et, dans cette situation, le gouvernement en trouve rien de mieux que de tripatouiller les modes de scrutin. C'est tragique et dérisoire. A quoi a servi le 21 avril ?
(Source http://www.udf.org, le 25 février 2003)
La majorité, ce sont les millions de Français qui ont voulu le changement. Je suis dans cette majorité. Voter la censure, c'est vouloir renverser le gouvernement et provoquer une crise majeure. Cela n'aurait pas été responsable. Mais cela m'a donné plus de liberté pour dire au gouvernement quelle faute il avait commise en se mettant au service d'un seul parti. Une partie de l'image du Premier ministre a été abîmée.
Vous prenez de plus en plus vos distances avec le gouvernement
Je ne peux pas m'empêcher de voir la gravité de la situation. J'aurais voulu qu'il n'y ait pas un jour de perdu pour que les Français voient un vrai changement ; qu'ils aient le sentiment d'une vie publique honnête, dans laquelle on s'attaque aux véritables difficultés ; que l'économie et les entreprises aient toutes leurs chances, et qu'un nouveau projet social rassemble les Français. C'était cela que l'on attendait après le 21 avril. Pas seulement des formules, et pas des magouilles de parti.
Vous projetez-vous déjà dans la présidentielle de 2007 ?
La seule chose qui m'intéresse aujourd'hui, c'est de comprendre la profondeur de la crise et de mobiliser notre pays autour des réponses à apporter. Il faut aller bien plus profond qu'un changement de majorité, il faut changer le système. C'est cela que veut l'UDF nouvelle, qui est aujourd'hui le courant émergeant de la vie politique française. L'UMP est un ensemble disparate de gens qui ne sont là que pour le pouvoir, et qui commencent à se disputer. Quant au PS, il est plongé dans une crise profonde. Les années qui viennent vont servir à construire un vrai engagement. La présidentielle viendra après : elle n'est que le sommet de la construction.
L'UDF a beaucoup changé avec le départ de cadres à l'UMP et l'arrivée de nouveaux militants. Quel est le visage de votre parti aujourd'hui ?
Jusqu'alors, l'UDF était un parti de notables dans lequel chacun jouait pour son compte. Aujourd'hui, elle apparaît comme déterminée et rassemblée. Depuis un an, certains n'ont qu'une idée, c'est que nous disparaissions, et n avec nous, le pluralisme en France. Pour ne plus laisser que deux partis indifférenciés, dominés par la pensée unique. Or les Français ne veulent pas être privés de leur liberté de parole et de choix véritable. C'est le combat que nous menons, et nous le gagnerons.
C'est un discours très rassembleur
Le rassemblement est une condition du changement. Dans les temps ordinaires, il y a les clivages ordinaires, la répétition d'une alternances droite-gauche. Et puis il y a les temps exceptionnels où les clivages ne sont plus les mêmes. En 58, de Gaulle sait rassembler les forces politiques du pays au-delà des frontières classiques. Je pense que nous nous apprêtons à vivre un temps comme celui-là.
Quelle position allez-vous défendre mercredi à l'Assemblée lors du débat sur l'Irak ?
La position de fermeté : face à Saddam Hussein, dictateur pour son peuple, qu'il faut désarmer ; et fermeté face aux Etats-Unis qui ne peuvent pas s'instaurer, tout seuls, les gendarmes de la planète. C'est pourquoi j'ai approuvé la position de la France dans sa défense et l'ONU et de l'ordre international.
Les Etats-Unis sont-ils dangereux ?
Non, je pense qu'on aurait grand tort de diaboliser les Etats-Unis. Mais on n'a jamais raison tout seul. Le Proche et le Moyen-Orient sont aujourd'hui une poudrière. Décider d'y craquer une allumette dans le but d'y voir plus clair, cela présente des dangers considérables. Il y a beaucoup à craindre de cette crise, car il n'y a plus guère le choix qu'entre de mauvaises solutions. Et nous avons négligé un chapitre essentiel : c'est de faire entendre dans ce conflit la voix de l'Europe. Cette Europe en miettes, c'est, aujourd'hui, notre plus grand échec.
Que faut-il pour que l'Europe parle d'une seule voix ?
Il va falloir que des forces politiques et des hommes d'Etat proposent une vision forte de l'Europe, des institutions capables de décider : autre chose que cette idée dérisoire de deux présidents, avancée par Jacques Chirac et Gerhard Schröder. L'Europe, s'il elle existait, offrirait au monde deux choses uniques : un équilibre à la puissance américaine et une vision désintéressée. Car l'Europe a fait dans son histoire l'expérience de ce que l'esprit de domination a de tragique.
Que vous inspire la situation économique actuelle ?
Nous sommes d'ores et déjà dans la crise. Je ressens la situation de la France comme très périlleuse aujourd'hui. Aucune des réformes n'est faite, ni même entamée ; or les temps de crise sont les plus difficiles pour faire des réformes. Ce qui m'inquiète, c'est qu'il y a plusieurs phénomènes qui n'ont pas encore produit leurs effets : la crise irakienne, la récession allemande et l'absence de réformes en France. La situation qui s'annonce est bien plus grave qu'on nous le dit.
Le gouvernement en a-t-il pris conscience ?
Il ne l'ignore pas. Mais il préfère la stratégie des tout petits pas et le " ne vous inquiétez pas ". Le gouvernement a disposé d'une longue période d'état de grâce. Ce temps aurait dû servir à la mobilisation du pays. Notre démocratie ne marche pas, la démocratie locale est illisible, l'économie est plus que fragile, le projet social est absent. Et, dans cette situation, le gouvernement en trouve rien de mieux que de tripatouiller les modes de scrutin. C'est tragique et dérisoire. A quoi a servi le 21 avril ?
(Source http://www.udf.org, le 25 février 2003)