Déclaration de Mme Margie Sudre, secrétaire d'Etat chargé de la francophonie, sur l'état de la Francophonie dans le monde, notamment en matière d'utilisation et d'enseignement du français, sur la réforme des institutions de la Francophonie et sur la préparation du sommet de Hanoï, Paris le 31 janvier 1997.

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  • Margie Sudre - Secrétaire d'Etat chargé de la francophonie

Circonstance : Conférence de presse du Haut Conseil de la Francophonie à Paris le 31 janvier 1997

Texte intégral


Le Haut Conseil de la Francophonie a réuni la presse pour lui présenter son état annuel de la Francophonie dans le monde. Après une brève introduction de Maurice Schumann, la parole vous sera donnée. Vous pourrez alors présenter le bilan de votre action et votre programme pour l'année 1997.

1996 a été une bonne année pour la langue française et pour la Francophonie. J'en prendrai pour illustration l'utilisation de notre langue aux Jeux olympiques d'Atlanta. Un travail de fond conduit par notre ambassade à Washington et notre consulat à Atlanta, en liaison avec le ministère de la Jeunesse et des Sports, a permis ce succès. Je veillerai d'ailleurs personnellement à ce qu'il en soit de même aux Jeux d'hiver de Nagano en 1998 et aux prochains Jeux d'été de Sydney. Avec le même souci de souligner à l'attention de l'opinion internationale le rôle du français comme grande langue de communication, je signale que le ministère des Affaires étrangères vient de lancer, en liaison avec le comité d'organisation de la Coupe du monde de football de 1998, un concours mondial destiné à renforcer la motivation des jeunes pour l'apprentissage de notre langue.

Parmi d'autres bonnes nouvelles, je voudrais insister sur l'effort qu'a su mener la France, sous l'impulsion personnelle du président de la République, en faveur du Liban, avec l'aide apportée à l'Université Saint-Joseph et l'ouverture de l'Ecole supérieure des Affaires de Beyrouth. Le projet d'une chaîne de télévision libanaise émettant principalement en français est également à l'étude et je reste particulièrement attentive à l'aboutissement de ce dossier.

Je me félicite enfin de l'état de l'apprentissage des langues en France. Une très récente enquête commandée par les organisateurs d'Expolangues, que j'ai eu le plaisir d'inaugurer avant-hier, a révélé que les Français étaient les Européens les plus capables de parler une langue étrangère et que, surtout, leurs connaissances étaient très variées et n'étaient pas limitées à une seule langue étrangère. Cela illustre parfaitement ce que nous souhaitons faire avec la Francophonie : en nous battant pour le français, nous avons la conviction de lutter pour la vitalité et la diversité de toutes les langues. Ce combat, nous le menons d'abord en Europe. La connaissance de plusieurs langues étrangères est indispensable si nous voulons continuer à construire l'Europe en conservant l'assentiment des peuples. La France tente de donner l'exemple en développant avec le succès que révèle cette enquête sur l'apprentissage de deux langues étrangères et en encourageant l'enseignement de langues plus rares. Elle tente de convaincre ses partenaires européens d'agir de cette façon. On peut ainsi souligner que l'Espagne vient de réintroduire dans certaines régions l'apprentissage d'une deuxième langue étrangère et que cette mesure a bénéficié de façon spectaculaire au français. Le français en Europe, le français langue de l'Europe, sera l'une de mes priorités en 1997.

  • 1) L'achèvement de la réforme des institutions de la Francophonie Le Sommet de Cotonou avait, à l'initiative de la France, approuvé une réforme fondamentale des institutions francophones. L'essentiel consiste en l'institution d'un poste de Secrétaire général de la Francophonie, élu pour quatre ans par les chefs d'Etat et de gouvernement. Doté d'une légitimité incontestable, clairement perçu par la communauté internationale comme le porte-parole et l'autorité de la Francophonie, il disposera d'une véritable capacité d'initiative en matière politique. Il lui reviendra également d'être le pilote de la coopération francophone multilatérale dont la richesse vient de sa diversité mais dont le développement exigerait un effort de coordination. La Charte de la Francophonie, qui a été adoptée les 17 et 18 décembre dernier par les ministres des 49 Etats et gouvernement membres de la Francophonie réunis à Marrakech, constitue désormais la constitution de la communauté francophone. La volonté d'établir une Francophonie politique n'est pas nouvelle. Depuis 1986, les sommets de chefs d'Etat et de gouvernement débordaient largement les aspects culturels et linguistiques de la coopération francophone, mais dotée d'institutions "bancales", la Francophonie n'avait pu donner toute sa mesure. Or nous disposons avec cette communauté de près de cinquante Etats (plus du quart des membres de l'ONU, plus de 400 millions d'habitants) d'un véritable instrument de politique étrangère, qui a vocation à jouer un rôle à part entière dans l'équilibre du monde. Sachons maintenant l'utiliser pour mieux faire valoir nos positions sur la scène internationale. Désormais dotée d'institutions appropriées, la Francophonie pourra être un vrai lieu de concertations politiques. Le choix du premier Secrétaire général sera naturellement décisif car de sa capacité à remplir pleinement son rôle dépendra naturellement en grande partie la crédibilité nouvelle de la Francophonie.


Cet événement interviendra lors du Sommet de Hanoï, qui se tiendra du 14 au 16 novembre prochains.

  • 2) Réussir le Sommet d'Hanoï

Ce Sommet aura un éclat et un retentissement qu'aucun sans doute n'avait eu avant lui. Tout d'abord, parce qu'il verra l'élection du premier Secrétaire général de la Francophonie, ensuite parce que c'est le premier Sommet francophone à se tenir en Asie. Vous savez l'importance que la France et le président de la République attachent au développement de nos liens avec cette région du monde dont la croissance et le développement bouleversent les équilibres internationaux. Le sommet permettra de mettre en valeur l'effort qu'a consenti la France en faveur du Vietnam et de l'ex Indochine pour que le français y retrouve sa place. Je souhaiterais rappeler que les pays de l'ancienne Indochine reçoivent l'une des principales enveloppes de coopération avec le Maghreb et l'Europe centrale. 500 classes bilingues fonctionneront au Vietnam d'ici la fin de l'année, le premier lycée franco-vietnamien a été ouvert à Saïgon, les deux autres le seront prochainement à Hanoï et Hué.

Nos compatriotes, dont beaucoup ont des liens avec ce pays, découvriront à l'occasion de ce Sommet la force et l'universalité de la Francophonie. C'est la troisième de mes ambitions pour l'année 1997.
 

  • 3) Mieux faire connaître la Francophonie en France

La "journée" de la Francophonie, qui en fait s'élargira à une semaine ou 10 jours, aura lieu le 20 mars. De nombreux événements sont en préparation en France et à l'étranger à l'initiative des partenaires les plus divers : la nuit du WEB permettra par exemple aux étudiants de dialoguer et de visiter les sites en français sur le réseau Internet. Les enseignants prépareront des animations de tous ordres (jeux, débats, exposés) autour de la Francophonie. Je souhaite également associer les hommes d'affaires à cette journée pour leur présenter les enjeux de la Francophonie en 1997 (Sommet de Hanoï, Jeux de Madagascar...). Le succès de cette journée dépendra bien entendu largement de l'écho que la presse lui accordera.

  • 4) Mener une politique audiovisuelle ambitieuse

J'ai souvent exprimé ma conviction selon laquelle il n'y aurait pas de politique francophone efficace sans une politique audiovisuelle ambitieuse. Notre réseau de radio et de télévision continue de se développer : TV5 diffuse sur toute l'Asie et l'Océanie depuis son installation sur ASIASAT. RFI multiplie les émissions en modulation de fréquence en Europe, en Amérique, au Moyen-Orient. Il reste à offrir des programmes télévisés en français dignes de ce nom aux Etats-Unis. Les ministres de TV5 ont décidé à la fin de l'année dernière d'élargir la diffusion du signal TV5 Amérique latine au territoire des Etats-Unis. Je suis déterminée à agir pour que ce projet puisse être lancé dès la fin de l'année.

Encore trop souvent, le mot Francophonie évoque pour nos compatriotes la nostalgie de temps révolus ou l'envahissement inéluctable de notre culture par une langue unique.

Il serait temps de découvrir que la Francophonie représente le plus moderne des combats, et que les complexes d'infériorité ne sont vraiment pas de mise.

Le monde change. De nouveaux équilibres s'esquissent. Les valeurs qui sous-tendent chaque langue, et par excellence la nôtre, n'ont jamais été si nécessaires au progrès et à la paix. Les francophones ont donc un message irremplaçable à faire entendre. Il faut que les Français ne soient pas les moins ardents des militants francophones !

Le rapport du Haut Conseil de la Francophonie nous fournit, à cet égard, des éléments précieux d'information, qui sont autant de raisons supplémentaires d'aller de l'avant.

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 octobre 2001)