Interview de Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes, à BFM le 13 mars 2003, sur l'ouverture à la concurrence du fret ferroviaire.

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Média : BFM - Europe 1

Texte intégral

Q - Après soixante-dix ans de monopole, le secteur du fret ferroviaire s'ouvre en partie demain à la concurrence. Les entreprises ferroviaires européennes pourront emprunter le réseau ferré national, moyennant certaines conditions. C'est ainsi que la Compagnie allemande Deutschebahn, ou l'opérateur de chemin de fer Connex, filiale de Vivendi environnement, pourront théoriquement faire circuler sur des voies françaises leur trains internationaux au côté des convois de la régie nationale SNCF. La libéralisation du rail est une uvre de longue haleine de l'Union entamée en 1991 pour enrayer le déclin du transport ferroviaire, 8 % des marchandises est aujourd'hui transporté par rail en Europe, contre 21 % en 70.
Noëlle Lenoir est ce matin l'invitée de BFM.
R - Nous pensons que l'ouverture du fret pour les grands axes européens, les trains qui passent sur les grands axes est une bonne affaire pour la SNCF, pour le rééquilibrage entre le rail et la route, au profit du rail ; et aussi pour les agents de la SNCF.
Q - Alors vous dites Noëlle Lenoir que cette libéralisation va relancer le trafic, si je vous comprends bien, mais selon le rapport de deux sénateurs cette semaine, l'arrivée de nouveaux entrants a conduit seulement dans les pays où elle a déjà eu lieu, à un partage des trafics, mais ni à une augmentation du volume global transporté, ni à une augmentation de la part du marché de fer. Alors c'est un peu contradictoire.
R - Vous savez qu'en Allemagne, il y a une centaine de compagnies ferroviaires de fret, sur 160 au total pour toute l'Union européenne et que ce pays connaît une croissance très importante de son fret, qui évidemment est très profitable économiquement.
Q - C'est dire le retard accumulé par la France quand on écoute tous ces chiffres
R - C'est à dire que nous avions une option qui était davantage celle de la route, et nous sommes très heureux que par le biais de ce texte il y ait non seulement une opportunité économique, mais aussi une chance de ménager à la fois plus de sécurité et plus de protection de l'environnement. Donc sur tous ces plans, c'est une bonne chose.
Q - Donc vous pensez que la libre concurrence va améliorer la qualité du service ?
R - La libre concurrence va surtout doper le service, elle va permettre de faire naître après ce qui existe depuis fort longtemps, depuis l'abolition des frontières, l'Europe de la route, l'Europe du fret ferroviaire, ce qui est une grande chance ; cela va permettre d'améliorer les échanges. Je ne crois pas que les analyses économiques que l'on peut faire ici ou là soient aussi défavorables que ce que vous mentionnez. J'indique toutefois que la France a demandé de faire une évaluation de cette première étape de libéralisation, pour voir si réellement les conséquences économiques sont à la hauteur de ce que nous attendons.
Q - Alors Noëlle Lenoir, maintenant jusqu'où aller ? Bruxelles propose d'accélérer encore le mouvement, et a déposé un nouveau projet de directive qui libéralise totalement le transport de fret, y compris pour le transport intérieur des Etats membres à partir du 1er janvier 2006. Et puis le Parlement européen est même partisan d'aller encore plus loin que la Commission, puisque le 14 janvier, elle s'est prononcée pour une ouverture totale du rail européen à la concurrence en 2008, les passagers compris.
R - Pour ce qui est des passagers, c'est un sujet qui n'est pas du tout à l'ordre du jour, nous sommes opposés à cela, il n'en est pas question pour nous et nous l'avons fait savoir.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 mars 2003)