Déclaration de M. Alain Richard, ministre de la défense, rendant hommage à la participation des forces navales et plus particulièrement à l'engagement du porte-avions "Foch" dans les opérations du Kosovo, Toulon le 14 juillet 1999.

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Circonstance : Déplacement de M. Alain Richard, à bord du porte-avions Foch, à l'occasion de la fête nationale, à Toulon le 14 juillet 1999

Texte intégral

Amiral,
Mesdames, Messieurs,
J'ai tenu à m'adresser à vous personnellement à bord du FOCH en ce jour de fête nationale qui est, pour la nation toute entière, l'occasion d'honorer ses forces armées et de leur exprimer sa reconnaissance pour leur engagement dans la crise que nous venons de vivre au Kosovo.
Ce jour est marqué par l'hommage solennel que le pays adresse aux forces qui ont été engagées sur le terrain, celles qui ont pris part avec succès à la phase aérienne des opérations et celles qui sont aujourd'hui présentes au sol.
Ma présence sur le FOCH, qui a été pendant toute la crise le pivot de notre dispositif naval, marque la reconnaissance de la nation pour l'action menée dans l'Adriatique. La participation d'une compagnie du FOCH, ce matin au défilé sur les Champs-Elysées, vous a permis d'être associés de manière toute particulière à l'hommage du pays aux forces armées.
Je veux également adresser à cette occasion un message d'encouragement et de confiance à la communauté de la marine qui ressent une fierté légitime au terme de votre participation aux opérations.
Je veux associer à cet hommage nos aviateurs, qui ont permis à la France de figurer en bonne place aux côtés de ses alliés durant la phase aérienne de notre engagement militaire, et nos forces maintenant engagées à terre pour rétablir la paix et la sécurité au Kosovo. Je salue leur dévouement, leur sens du devoir et leur grand professionnalisme au service de la défense de nos valeurs sur notre continent.
Vous avez choisi de servir les armes de la France. Néanmoins, certains d'entre-vous n'imaginaient sans doute pas qu'ils auraient aussi vite à faire usage de la force. Les démocraties ne s'y résolvent pas naturellement. Elles ne le font qu'à contrecur et une fois épuisés tous les recours pacifiques, toutes les négociations, dont le principe et la pratique permanente sont au cur de leur manière d'agir.
Elles savent aussi qu'on ne peut transiger perpétuellement avec des forces opposées à leurs valeurs fondatrices. Les démocraties savent se dresser, lorsque les limites de l'intolérable sont franchies, contre ceux qui engagent les peuples sur la voie de la haine et de la tragédie.
Elles le font alors avec une détermination d'autant plus forte que tout autre comportement serait la marque de l'abandon de leurs valeurs alors qu'elles sont menacées au cur de l'Europe.
En ce jour de fête nationale, il est bon de rappeler que notre engagement au Kosovo a marqué avec force la volonté de la France de ne pas accepter la remise en cause des valeurs qui fondent notre République et qui constituent le fondement de l'Europe de la paix et de la démocratie que nous construisons.
Le recours à la force n'est cependant pas un but en soi.
Nos compatriotes ont compris à l'occasion des événements que nous venons de vivre, que nos forces, et en particulier nos forces navales, étaient préparées à relever ces défis. J'avais tenu à exprimer le soutien de la nation à votre engagement lors de ma visite parmi vous à la mer.
Je veux rendre un hommage appuyé aux hommes et aux femmes qui ont servi avec dévouement à bord du FOCH et au sein du groupe naval en Adriatique.
Je salue les 2 500 marins qui ont travaillé de jour comme de nuit pendant toute la mission à bord du porte-avions, du sous-marin AMETHYSTE, de la frégate CASSARD et du ravitailleur MEUSE.
Votre présence opérationnelle n'a pas débuté lors du commencement effectif des opérations le 24 mars dernier ; le FOCH était présent sur place depuis deux mois déjà et le groupe naval avait été peu à peu constitué au fil des semaines. Votre mission a duré un peu plus de quatre mois et a été marquée par une mobilisation opérationnelle de tous les instants.
La part de temps passé à la mer a, en effet, été exceptionnelle, de l'ordre de 92 %, et les périodes continues sous les feux ont été particulièrement longues. Vous avez démontré la capacité des forces navales françaises à inscrire leur action dans la durée tout en disposant de forces opérationnelles importantes.
Vous avez fait preuve d'une grande cohésion et vous avez su conserver votre excellent moral dans les moments les plus difficiles. Malgré la longueur des périodes passées en mer, l'incertitude qui pesait sur la durée de l'opération militaire, les équipages n'ont cessé de dédier leurs efforts à la réussite de leurs missions.
Je salue le grand professionnalisme des pilotes de l'aéronaval et des équipes techniques. La réussite de la mission sans pertes humaines au combat et sans incident sont pour chacun la première des récompenses. L'aboutissement de l'action entreprise aux côtés de nos alliés alors que vous étiez de retour ici à Toulon le 3 juin dernier est venu couronner la fin de l'engagement opérationnel du FOCH.
Je tiens à souligner l'exceptionnelle disponibilité dont ont fait preuve les bâtiments tout au long de l'opération militaire conduite avec nos alliés. Elle est le résultat de la mobilisation de tous les équipages pour qui ce résultat est un motif légitime de fierté. Je sais que pour un grand nombre d'entre-vous, les deux escales à TRIESTE n'ont pas été l'occasion d'un long temps de repos, l'entretien du matériel demeurant une priorité.
Cette capacité de mobilisation a également été le résultat de l'appui efficace apporté par le JULES VERNE et les organismes de soutien à terre dont je tiens à souligner le rôle.
Ma présence à bord du FOCH est pour moi l'occasion de saluer la participation de la frégate britannique SOMERSET (puis de la frégate GRAFTON) au sein du groupe naval. Elle a été le signe, tout au long des opérations en mer, de la capacité des alliés européens à coopérer au plan opérationnel. Ce premier exemple de " juxtaposition " de moyens militaires français et britanniques est venu démontrer notre capacité à tisser des liens étroits entre nos deux marines.
Les équipages ont pris un repos bien mérité au terme des opérations en mer. Je salue néanmoins les efforts déployés depuis le retour du FOCH, ici à Toulon, pour assurer la mobilisation du groupe naval. Le porte-avions sera prêt à repartir dès le début du mois d'août si les circonstances devaient l'exiger.
Le succès de la mission entreprise dans l'Adriatique et la capacité opérationnelle des forces navales viennent démontrer que la marine sait aujourd'hui s'adapter aux évolutions du monde. En même temps, elle sait rester fidèle aux valeurs qui font sa force : l'esprit d'équipage, la disponibilité et l'excellence dans l'action, le calme et la détermination quand les vents sont contraires.
Les opérations au Kosovo ont prouvé que c'est avec confiance que la marine peut envisager son avenir.
Au-delà des nouveaux moyens dont elle disposera bientôt - je pense au porte-avions CHARLES DE GAULLE dont les premiers essais aviation ont été un succès la semaine dernière - elle peut compter sur la qualité de ses équipages et leur sens du devoir.
Elle reçoit aujourd'hui la reconnaissance du pays tout entier que j'ai tenu à exprimer.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 03 janvier 2000).