Interventions de M. Dominique Galouzeau de Villepin, ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie, sur la crise irakienne, à l'Assemblée nationale le 8 octobre et au Sénat le 9 octobre 2002.

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Circonstance : Débats parlementaires sur l'Irak à l'Assemblée nationale le 8 octobre et au Sénat le 9 octobre 2002

Texte intégral

(Intervention à l'Assemblée nationale le 8 octobre 2002) :
Face au péril majeur que connaît le monde, la France sait rester unie et dépasser les clivages traditionnels.
Ce fut le cas au lendemain du 11 septembre ; c'est aujourd'hui le cas face à la crise iraquienne. La France a une responsabilité particulière et des devoirs vis-à-vis de la communauté internationale, des solidarités, des amitiés, un rôle éminent au Conseil de sécurité.
Aujourd'hui, la menace existe en Iraq - Alain Juppé l'a bien montré -, on peut s'interroger sur ses degrés, non sur sa réalité. Elle est d'autant plus grande que les armes prohibées seraient à la disposition d'un dictateur - et Saddam Hussein a déjà montré de quoi il était capable.
Certes, des incertitudes demeurent, et il appartient à la communauté internationale de faire en sorte que les inspections interrompues en 1998 puissent reprendre afin que la menace soit aussi définie que possible. Selon Hans Blix, en tout cas, le président de la commission de contrôle, "s'il n'y a pas de preuves irréfutables, il y a bien une menace".
Evitons l'amalgame, évitons d'assimiler la menace d'aujourd'hui au terrorisme ; nous devons prendre en considération la situation de l'Iraq, pays fragile dont l'unité peut être facilement menacée - au nord, avec les Kurdes, au sud, avec les Chiites. Vous connaissez le contexte régional, éminemment dangereux : tensions au Proche-Orient, tensions entre l'Inde et le Pakistan. Nous devons inscrire notre action dans la durée, comme Mme Buffet l'a justement observé. Un problème humanitaire se pose avec acuité et nous ne pouvons rester indifférents à la détérioration de l'état des populations iraquiennes - et c'est pourquoi nous avions soutenu la formule "pétrole contre biens de consommation".
Alors, que faire ? M. Ayrault l'a souligné, des tentations existent : considérer que la sécurité seule résoudra toutes les questions. Or tel n'est pas le cas, même si le recours à la force peut se révéler quelquefois nécessaire comme en Afghanistan. Autre tentation, l'action unilatérale préventive. Le danger est alors grand de modifier en profondeur l'équilibre de la communauté internationale, d'y introduire une rupture.
Existe aussi la tentation du changement de régime. Mais quels critères retenir ? Qui peut dire qu'un régime est satisfaisant ou non ? Le risque serait grand d'ouvrir ainsi une brèche dans l'ordre international, ce qui conduirait à bien des aventures.
Face à ces tentations, il n'y a pas de fatalité. Mme Buffet l'a dit. Au contraire, s'ouvre pour chaque Etat l'exercice éminent de la responsabilité et de la volonté. Il appartient donc à notre pays de jouer tout son rôle.
Dans cette entreprise difficile, il convient de partir de nos liens privilégiés avec les Etats-Unis, de ces liens d'unité évoqués par Alain Juppé et François Bayrou et qui nous ont permis de comprendre le choc ressenti par les Américains le 11 septembre. Mais ce n'est pas sous le coup de l'émotion qu'il faut décider de l'action internationale. Il nous revient maintenant de définir une ligne diplomatique propre à maintenir un ordre, en répondant à un certain nombre d'exigences qu'ont précisées MM. Balladur et Juppé. D'abord, la détermination qui consiste à se concentrer sur un objectif simple : le retour des inspecteurs et l'élimination des armes de destruction massive. Cette détermination est au coeur de l'action du Conseil de sécurité et des préoccupations des Nations unies, elle est contenue aussi dans le message délivré par le président Bush à la tribune de l'Assemblée générale des Nations unies.
Ensuite, la justice : en nous concentrant sur l'objectif iraquien, nous ne devons pas oublier les autres crises, à commencer par celle du Proche-Orient, dans laquelle nous exerçons une responsabilité particulière. Nous avons en effet joué tout notre rôle dans l'adoption de la résolution 1435 destinée à obtenir la levée du siège de la Moqatta et à rouvrir une perspective politique, sous l'impulsion du "Quartette" au sein duquel l'Union européenne est particulièrement active.
Dans ce sens, nous continuons à défendre le projet d'une conférence internationale qui redonnerait espoir aux peuples de la région.
Dans ces conditions, il importe de ne nous priver d'aucun de nos atouts. M. Ayrault invite à brandir notre veto, qui est effet une prérogative de chaque membre permanent du Conseil de sécurité. Mais la France, ce faisant, se priverait de sa capacité de peser sur le jeu international, de défendre une ambition et une initiative. Evitons aujourd'hui de nous lier les mains. M. Balladur l'a rappelé, la France a besoin de s'adapter aux circonstances pour faire prévaloir sa vision de l'ordre international.
François Bayrou l'a dit, l'enjeu dépasse le cas de l'Iraq. Il s'agit de l'ordre mondial, de l'unilatéralisme ou du multilatéralisme, de la force ou du droit. La France, Edouard Balladur l'a rappelé, est dans le camp du droit.
Nous y agissons avec nos alliés traditionnels. L'Union européenne a aujourd'hui pour objectif commun le retour les inspecteurs et l'élimination des armes de destruction massive.
Au-delà nous travaillons à garder le contact avec nos solidarités traditionnelles, le tiers-monde, les pays arabes.
Il est important de maintenir un trait d'union et de ne pas céder à la tentation de rompre avec ces gouvernements et avec ces peuples. C'est ce que nous faisons en permanence.
Notre vision s'appuie sur la réalité d'un monde marqué par l'interdépendance. Des urgences nous pressent : l'Iraq en fait partie, mais il en existe d'autres : le Proche-Orient, l'Afghanistan, l'Afrique. Il faut faire le lien entre elles.
Nous avons aussi le souci de préserver l'unité de la communauté internationale et celle du Conseil de sécurité qui garantit la légitimité de l'action.
Voilà pourquoi nous soutenons une démarche en deux temps. D'abord, une résolution destinée à préciser les arrangements pratiques qui permettront le retour des inspecteurs. Cette première démarche doit recueillir le consensus du Conseil de sécurité car c'est la seule façon d'adresser un message clair et fort à Saddam Hussein. On l'a vu, quant la communauté internationale est unie, ce message est bien reçu. Si Saddam Hussein n'obtempère pas, si l'action des inspecteurs est entravée, nous aurions alors, dans une deuxième résolution, à en tirer toutes les conclusions. Le Conseil de sécurité examinera alors toutes les options et chaque membre prendra ses responsabilités.
Dans ce processus d'une résolution à l'autre, le Gouvernement, les opinions publiques pourront prendre la mesure de la situation telle qu'elle est. Il y a là une démarche de pédagogie et de responsabilité. L'efficacité de l'action diplomatique dépend de la qualité de ce processus. Aussi convient-il que la première résolution ne contienne pas de clause de recours automatique à la force. Les inspecteurs pourront ainsi jouer tout leur rôle et nous pourrons nous appuyer sur la qualité des équipes de MM. Hans Blix et El Baradeï. Leur compétence est éprouvée. Entre 1991 et 1998, les inspecteurs des Nations unies ont permis d'éliminer un grand nombre d'armes de destruction massive, davantage que pendant la guerre du Golfe. Entre le Conseil de sécurité et les inspecteurs doivent se nouer des rapports confiants et réguliers. Le Conseil de sécurité pourra ainsi prendre ses responsabilités en connaissance de cause.
Il importe grandement à la diplomatie française de conserver sa capacité de décision à chaque étape. Evitons de brandir un veto quand nous pouvons contribuer à définir une position commune vis-à-vis de l'Iraq.
La France se réjouit des progrès réalisés ces dernières semaines, grâce aux conversations au sein du Conseil de sécurité. Nous voulons croire que la détermination de la communauté internationale, que la conviction partagée par l'ensemble des membres du Conseil de sécurité, nous permettront de trouver dans les prochains jours les voies et moyens d'un message fort adressé à Saddam Hussein.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 octobre 2002)
(Intervention au Sénat le 9 octobre 2002) :
Je salue la présence de chacun et chacune d'entre vous, qui témoigne de la gravité de la question iraquienne et de ses enjeux pour notre pays comme pour le monde.
Il est aussi essentiel que la France, face à chaque crise majeure, sache se montrer unie. Hier, à l'Assemblée nationale, la dignité et la qualité du débat l'ont encore prouvé. Je me réjouis aujourd'hui d'ouvrir cette discussion dans l'enceinte de votre Haute Assemblée.
Les enjeux et les conséquences de cette crise sont d'une importance historique. La gravité des choix que nous aurons à faire, la complexité de la situation régionale, les incertitudes qu'elle engendre, alimentent les inquiétudes légitimes de nos opinions. Nous nous devons d'y répondre ensemble.
La France a des responsabilités particulières dans la gestion de cette crise. En premier lieu, elle occupe une place particulière dans le monde. Notre statut de membre permanent au Conseil de sécurité, notre rôle moteur au sein de l'Union européenne, notre amitié ancienne et profonde avec les Etats-Unis, dont nous avons été le premier allié, et dont nous avons partagé l'émotion après le choc du 11 septembre ; nos relations fortes, enfin, avec le monde arabe et méditerranéen nous confèrent des responsabilités particulières dans la gestion de cette crise.
La première d'entre elles est de répondre à la menace potentielle que représente l'Iraq, avec le risque de prolifération des armes de destruction massive. Le régime de Bagdad a utilisé, par le passé, contre l'Iran, mais aussi contre sa propre population, de telles armes. Aujourd'hui, tout indique que, depuis près de quatre ans, en l'absence des inspecteurs internationaux, ce pays a poursuivi des programmes d'armement et qu'il dispose désormais d'une capacité chimique et biologique, et souhaite se doter d'armements nucléaires.
La prolifération des armes de destruction massive constitue une menace pour l'ensemble de la planète. Notre sécurité dépend de notre capacité à traiter collectivement ce danger majeur.
Nous ne pouvons donc transiger avec cet objectif prioritaire de notre action diplomatique. C'est pourquoi l'Iraq doit désarmer et se soumettre aux contrôles les plus stricts. C'est pourquoi aussi nous continuerons de faire preuve de la plus grande fermeté à l'égard du régime qui, au cours des années, a menti à la communauté internationale, en jouant souvent de ses divisions ou de son manque de détermination.
Notre deuxième responsabilité est de veiller à la stabilité au Moyen-Orient. Avec la crise iraquienne, c'est la région tout entière qui est menacée. Le Moyen-Orient est au coeur de l'arc de crise qui s'étend de la Méditerranée orientale à l'Asie du Sud-Ouest : zone dans laquelle les fractures politiques, économiques et sociales sont multiples. Nous avons tous en mémoire les guerres israélo-arabes de 1967 et 1973, ainsi que les deux guerres du Golfe : la première entre l'Iran et l'Iraq et la seconde pour libérer le Koweït envahi par l'Iraq. Nous gardons aussi le souvenir de considérables bouleversements internes : la guerre civile au Liban, la révolution iranienne. Enfin, aux marges de cette région, le cas de l'Afghanistan, envahi par l'Union soviétique, puis en proie à la guerre civile, ensuite soumis au joug des Taliban, et, aujourd'hui, en voie de stabilisation.
C'est donc là une zone stratégique essentielle, au coeur des grandes voies de communication entre les continents, et qui recèle des ressources pétrolières indispensables au développement du reste du monde.
Au moment où l'impasse du conflit israélo-palestinien alimente les sentiments de frustration et d'injustice parmi les peuples de la région, nous devons être vigilants. En effet, ces pays, fragilisés par la répétition des conflits, sont en proie à des forces centrifuges. La diversité ethnique et confessionnelle, qui est une richesse, a été aussi la cause d'affrontements graves.
L'Iraq concentre ces tensions : Arabes et Kurdes, Sunnites et Chiites, Musulmans et Chrétiens, cohabitent dans un Etat laïc de création récente. Pays fragile dans une région fragilisée, son effondrement aurait des conséquences incalculables sur son environnement. Beaucoup des pays de la région ont le souci de se trouver, le moment venu, dans le camp des vainqueurs, mais ils redoutent aussi d'être déstabilisés par une guerre qui enflammerait leurs opinions publiques.
L'Europe et la France, puissance méditerranéenne, sont intimement liées, par l'histoire et la géographie, à cette région.
Leur cohésion interne serait affectée si une gestion illégitime et non-acceptée par nos opinions de la crise iraquienne devait provoquer une déstabilisation majeure du Moyen-Orient. À l'heure de l'interdépendance, de nouveaux liens se tissent entre politique étrangère et politique intérieure.
Notre troisième responsabilité s'exerce à l'égard de la communauté internationale tout entière. Les décisions qui sont prises à New York, au Conseil de sécurité, et dans les grandes capitales entraînent des conséquences majeures pour l'ordre international. À travers la crise iraquienne, le fonctionnement et la crédibilité des Nations unies sont mis à l'épreuve. Nous nous sommes félicités que le président des Etats-Unis ait fait le choix d'un traitement multilatéral de la crise, le 12 septembre dernier, à l'assemblée générale des Nations unies. Nous souhaitons poursuivre dans cette voie. Nous soutiendrons pleinement, par notre action, le rôle primordial de l'ONU.
Que chacun en ait conscience : l'enjeu de cette crise dépasse de beaucoup l'Iraq. Il y va de l'ordre international pour les prochaines années, des relations entre les peuples, et de la fracture toujours possible entre le Nord et le Sud.
La France est convaincue qu'une politique de sécurité ne suffira pas à assurer la stabilité du monde. Elle récuse toute action unilatérale et préventive, persuadée qu'un nouvel ordre international doit reposer sur le dialogue et la coopération. Si le monde, aujourd'hui, a besoin d'une Amérique forte, il a besoin aussi d'une Europe forte, capable de faire entendre sa voix et de défendre les valeurs qui sont les siennes.
La France entend assumer l'ensemble de ses responsabilités sans transiger sur aucune d'elles. C'est pourquoi elle est déterminée à faire respecter le droit et l'unité de la communauté internationale.
Cette vision du monde guide notre stratégie. Notre souci est celui de l'efficacité et nos exigences sont claires : les inspecteurs des Nations unies doivent retourner en Iraq constater les faits et assurer le désarmement, puis le contrôle continu de ses activités militaires comme l'exigent les résolutions du Conseil de sécurité.
Nous sommes efficaces lorsque nous sommes unis. Les dernières semaines ont montré que la communauté internationale obtient des résultats lorsqu'elle se montre rassemblée. Les débats à l'assemblée générale des Nations unies ont atteint le but qui leur était assigné : ne laisser aucune place à Bagdad pour s'obstiner à braver le droit international. Saddam Hussein a reculé. Le 16 septembre, sous la pression d'une communauté internationale unie, il a fait savoir, dans une lettre de son ministre des Affaires étrangères, qu'il acceptait le retour inconditionnel des inspecteurs internationaux.
Les conversations entre les autorités iraquiennes, le président de la commission de contrôle des Nations unies et le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique ont permis de préciser certaines modalités pratiques de la reprise des inspections et de définir les ajustements nécessaires au système existant sur la foi des recommandations de MM. Blix et El Baradeï.
Quelles sont les prochaines étapes ? Il est impératif que les inspecteurs commencent leur travail rapidement. Il y va de la crédibilité des Nations unies, et de l'efficacité de leur action. Une fois les inspecteurs sur le terrain, l'ONU pourra apprécier la réalité de la coopération de l'Iraq.
Pour cela, nous voulons que le Conseil de sécurité adopte très rapidement la résolution nécessaire. Si elle n'est pas juridiquement indispensable, elle peut être politiquement importante pour marquer le consensus de la communauté internationale et adresser un message de fermeté à l'Iraq. Elle doit préciser les modalités pratiques des inspections afin de garantir leur entière efficacité. Notre objectif est d'aider M. Blix à exercer sa mission et non de compliquer sa tâche.
Notre approche reste celle en deux temps définie par le président de la République. Elle préserve l'unité du Conseil de sécurité. Parce qu'elle s'inscrit dans le strict respect du droit international, elle rassemble un large consensus, de la part de nos partenaires européens, mais aussi de la Russie, de la Chine et des pays voisins de l'Iraq. L'adhésion du monde arabe à nos thèses montre combien nos exigences de légalité et d'équité sont reçues par les peuples de la région.
Cette démarche assure en outre la légitimité, à chaque étape, des décisions prises. La France ne donnera pas son accord à une formule qui, d'avance, équivaudrait à un blanc-seing sur l'action à entreprendre en cas de manquement par l'Iraq à ses obligations. Nous refusons l'automaticité du recours à l'usage de la force.
Le Conseil de sécurité doit conserver l'entier contrôle politique de la situation. Il doit pouvoir, à chaque étape, l'évaluer sur la base des éléments fournis, entre autres par la Commission de contrôle, et décider souverainement des mesures à prendre.
Nous n'accepterons pas que son autorité soit déléguée à qui que ce soit. Cette approche permet de ne pas brûler les étapes, de ne pas confondre les objectifs et d'exercer tout au long de la crise l'ensemble de nos responsabilités.
La France défend la primauté du droit international. Notre but n'est pas la guerre : l'emploi de la force doit rester un dernier recours. Les principes fondateurs de l'ordre élaboré après la Seconde guerre mondiale sont en jeu dans le règlement de la crise iraquienne. En 1991, la guerre du Golfe, premier conflit de l'après-guerre froide, répondait au principe de légitime défense, après l'invasion du Koweït par l'Iraq. Aujourd'hui, une action militaire devrait, de la même façon, être subordonnée au respect du droit international.
Cette vision du monde nous impose également de répondre aux besoins et aux aspirations des peuples de la région. La France n'oublie pas la dimension humanitaire de la question iraquienne. La situation actuelle entraîne pour la population iraquienne des souffrances qui heurtent la conscience. Les conditions de vie se sont effroyablement dégradées. La mortalité infantile a doublé en dix ans. Le tissu social s'est décomposé. Une génération entière a été sacrifiée. Si le peuple iraquien est privé de toute raison d'espérer, cela ne fera que renforcer un régime tenté par l'obstination.
La France s'emploie, au sein du Conseil de sécurité, à ne pas faire oublier cette dimension fondamentale du problème et à définir des formules permettant d'alléger l'impact des sanctions sur le peuple iraquien. Elle a été à l'origine du programme dit "pétrole contre biens humanitaires", qui autorise l'Iraq à exporter du pétrole pour financer, sous contrôle des Nations unies, l'achat de biens humanitaires. Elle a agi avec constance pour que les modalités de ce contrôle, tout en restant efficaces, deviennent plus rapides. Avec la résolution 1 409 de mai 2002, nous sommes passés à un régime plus libéral qui facilite les importations de biens courants.
La crise iraquienne ne doit pas faire oublier le conflit israélo-palestinien, qui nourrit l'instabilité du Moyen-Orient. Notre diplomatie se mobilise, avec nos partenaires européens, avec la Russie, l'Amérique et les Nations unies, pour interrompre le cycle infernal de la violence et de la répression, d'où nul ne peut sortir vainqueur. La tentation de la surenchère doit céder le pas à la responsabilité régionale.
Avec le "Quartette", la communauté internationale doit tout mettre en oeuvre pour parvenir à une paix durable et juste pour les deux parties, c'est-à-dire une paix fondée sur le respect égal du droit d'Israël à exister dans des frontières sûres et reconnues et du droit des Palestiniens à un Etat viable et sûr, leur permettant de réaliser leurs aspirations nationales.
En adoptant la résolution 1435 prescrivant la levée du siège de l'Autorité palestinienne et exigeant le repli des troupes israéliennes sur leurs positions de septembre 2000, le Conseil de sécurité a adressé un signal fort à la région. Aujourd'hui, l'ensemble de la communauté internationale est d'accord sur les objectifs du processus de paix au Proche-Orient, comme sur les termes de référence d'une paix possible. Là encore, il faut agir !
Avec l'Iraq, comme dans les autres situations d'urgence, nous voulons faire le pari de la volonté et de l'action au service de la paix. Déterminés à lutter contre toute menace pour notre sécurité et la stabilité internationale, nous n'excluons, dans le cadre des Nations unies, aucune option pour les faire reculer. Lucides quant aux enjeux de la crise, nous ne voulons pas sacrifier les principes et les règles internationales qui permettront de bâtir un monde plus sûr.
Avec une détermination forte et une vision claire, nous pouvons avancer avec confiance. Comprendre les évolutions en cours et agir ensemble pour dissiper peurs et inquiétudes, tel est le meilleur gage de la stabilité internationale que nous voulons obtenir. La France est décidée à prendre toute sa part dans cet effort.
Nous avons connu des crises et nous avons su les aborder unis et solidaires, comme après le 11 septembre dans la lutte contre le terrorisme. Nous devons continuer à l'être aujourd'hui face aux risques de prolifération des armes de destruction massive. Des crises, nous en connaîtrons d'autres, car c'est ainsi que va le monde. Mais à travers ces difficultés, notre action devra toujours veiller à ce que la communauté internationale soit plus forte, plus juste, plus efficace. Fidèles à nos valeurs communes et respectueux de la règle de droit, nous pourrons ainsi donner l'élan nécessaire à l'émergence d'un nouvel ordre du monde.
Aujourd'hui, nous en appelons à la responsabilité collective pour parvenir au règlement de la crise. La loi internationale doit être respectée. Le temps presse. Nous devons agir vite pour réussir ensemble. C'est cela qui inspire l'action exigeante de notre diplomatie. Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 octobre 2002)