Texte intégral
On ne saura jamais sans doute le nombre exact de morts causés par la canicule d'août 2003 en France. Retenons celui, officieux, avancé par le Ministre de la Santé, Monsieur Mattei : cinq mille. Mais, notons, tout de même celui avancé par les pompes Funèbres Générales : treize mille six cents !
Aux yeux de ceux pour qui le respect de la vie n'est pas seulement une formule virtuelle, il s'agit d'une catastrophe sans précédent.
Or, il semble que l'opinion, conduite en cela, comme en tant d'autres domaines, par les médias, l'ait acceptée sans indignation.
Parce qu'elle a touché des personnes âgées, voire très âgées, souvent retirées du monde dans des maisons de retraite ou dans leurs logements solitaires donc sans attaches proches, leur départ prématuré, bien qu'accidentel, a été accepté comme une fatalité.
Ceux qui préconisent plus ou moins ouvertement l'élimination de ces vieillards " à charge de la société " ont pu même considérer qu'il s'agissait là d'une forme d'euthanasie échappant aux rigueurs de la loi.
Celle-ci, en effet, interdit dans ce domaine toute complaisance et, à ce titre, engage la responsabilité pénale de ceux qui ont fonctionnellement et politiquement en charge de préserver leur santé et leur vie.
Les responsabilités écrasantes du gouvernement et de l'Etat
Le directeur général de la Santé, publiquement mis en cause par son ministre, lui a présenté sa démission qu'il a acceptée. Ce geste de simple honnêteté ne dégage pas pour autant le gouvernement et l'Etat de leurs responsabilités, écrasantes en l'occurrence.
Et d'abord celle du Premier ministre qui n'avait pas, à Combloux, pris la dimension de la menace, plus sensible, il est vrai, dans les villes qu'à la montagne.
Celle du ministre de la Santé, qui connaissait l'état désastreux de notre système hospitalier, celle, enfin, de l'obscur ministre, chargé des Personnes âgées dont le public a ainsi pu connaître le nom.
Car enfin, cet excès de chaleur estivale était-il, comme l'affirment les responsables, imprévisible ?
Evidemment non ! Les fortes chaleurs de juillet, l'arrimage de l'anticyclone des Açores sur l'Europe et les prévisions à 8 jours de la météo, qui n'ont pas été démenties par les faits, laissaient prévoir à ceux qui le devaient (gouverner n'est-ce pas prévoir ?), un risque d'aggravation des températures et de leurs effets.
On sait que notre continent connaît un réchauffement progressif et que depuis un demi-siècle, ce que l'on appelle la barrière de chaleur remonte, chez nous, vers le nord d'un kilomètre par an. En Afrique du nord aussi comme en témoigne, à la même vitesse, l'extension du désert saharien tant vers le nord que vers le sud.
N'entend-on pas d'ailleurs rabâcher sur tous les tons qu'il faut combattre le réchauffement de la planète ? Ce réchauffement, et la sécheresse qu'il implique, aurait dû aussi attirer l'attention des "prévoyeurs" professionnels, qui sont aussi responsables, au premier chef, des insuffisances dans la lutte contre les incendies qui ont ravagé les forêts de notre midi.
Trois ministres provençaux, qui connaissent la canicule
La Provence et la Côte d'Azur comptent trois ministres au gouvernement, je ne parle pas du petit-fils Muselier, obscur secrétaire d'Etat à des affaires qui lui sont, au reste, parfaitement étrangères. Mais Falco, chargé des personnes âgées, Mattei chargé de la Santé Publique sont des élus provençaux de longue date, et donc habitués des canicules méditerranéennes.
Et pourtant, ils n'ont rien prévu, rien imaginé, rien anticipé, comptant sans doute sur la technicité supposée de leurs hauts fonctionnaires, à moins que ce ne soit sur l'état de grâce du 5 mai !
Les uns et les autres auraient dû, par simple décence, présenter leur démission. Hélas ! Nous sommes en Ve République où aucun scandale, de quelque magnitude qu'il fût, n'a jamais poussé aucun ministre dans cette voie vertueuse.
Ni le Président de la République, caracolant en tête des plus beaux scores électoraux jamais atteints, tandis que s'entrechoquent bruyamment autour de lui, les casseroles de ses affaires, en toute impunité ; ni les assassins responsables de la mort par transfusion consciente de sang contaminé à de centaines d'hémophiles ; ni ceux qui ont pillé le Crédit Lyonnais, Elf et tant d'autres entreprises.
L'impunité et l'arbitraire
L'impunité est la règle que s'applique l'Etablissement. Tapie est devenu une vedette de la télé, Carignon a fait son retour, Bové parade sur les estrades, et pendant que les vieux meurent, le ministre de l'Intérieur arbitre l'organisation des rave parties !
L'arbitraire règne partout, les seigneurs de la France d'en haut paradent et ceux de la France d'en bas, de plus en plus pauvres, s'apprêtent à trinquer.
Dans ces conditions, je ne puis qu'être très fier du sondage opéré auprès de 400 "faiseurs d'opinion" par Le Figaro (80 chefs d'entreprise, 83 maires, 160 journalistes politiques et économiques, 80 députés sénateurs et élus divers - plus 20 syndicalistes). Cette France d'en haut a, à 75 %, une bonne opinion de Chirac, à 62 % de Raffarin, à 63 % de Fabius, à 44 % de Madame Buffet, et à 2 % de Jean-Marie Le Pen !
Ces faiseurs d'opinion, comme jadis les faiseuses d'anges, sont des avorteurs, des avorteurs de la vérité.
Restent quelques questions essentielles :
Notre politique sociale et sanitaire ne manque-t-elle pas de cet "égoïsme vital" qui veut que "charité bien ordonnée commence par soi-même", et la ruineuse Couverture maladie universelle (CMU) n'a-t-elle pas détourné les crédits qui ont manqué à nos "séniors" ?
Pourquoi les responsables de la santé des personnes âgées n'ont-ils pas fait équiper les hôpitaux et les maisons de retraite de cette climatisation déjà en place dans les hôtels depuis de nombreuses années ?
Pourquoi les régions menacées par les incendies n'ont elles pas été dotées de moyens suffisants en personnel et en matériels ? La montée des insécurités, climatiques, sociales, ne devrait elle pas conduire à imaginer des formules originales impliquant civils et militaires ?
Bonnes questions qui doivent être posées aux élections de 2004 car il est temps que le peuple choisisse des hommes et des femmes qui pensent aux Français d'abord. Il est temps que de véritables responsables viennent aux affaires et remettent de l'ordre dans la maison.
Jean-Marie LE PEN
(Source http://www.frontnational.com, le 03 septembre 2003)