Déclaration de M. Yves Cochet, député des Verts, sur la position des Verts après le sommet de Cancun sur la libéralisation du commerce mondial, à l'Assemblée nationale le 9 octobre 2003.

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M. Yves Cochet - Quand on regarde le paragraphe 31 de l'ancien accord de Doha qui concerne les relations entre commerce et environnement, on voit que deux logiques s'affrontent. Selon la première, celle de l'OMC, la libéralisation du commerce mondial apportera la croissance, qui engendrera une hausse des revenus, laquelle favorisera la protection de l'environnement. Cette logique n'est pas la mienne et l'histoire a déjà démontré sa fausseté. Les tenants de la seconde approche estiment que le développement de type productiviste, qui est actuellement engendré par la mondialisation libérale, est générateur d'inégalités sociales et de destruction de l'environnement. Les faits le confirment malheureusement tous les jours.
Si l'on se situe dans cette seconde démarche, plus interventionniste et plus normative, on pense que les accords multilatéraux sur l'environnement, la santé, les conditions de travail, les droits humains, doivent primer sur les règles de l'OMC et du commerce. Par exemple, on préconise le renforcement des secrétariats et des accords multilatéraux sur l'environnement et leur regroupement au sein du Programme des Nations unies pour l'environnement, celui-ci devenant bientôt, comme le Président de la République a dit le souhaiter, l'Organisation mondiale de l'environnement, capable de tenir tête à l'OMC. Nous n'en sommes hélas pas là, mais c'est une première piste.
La philosophie de l'OMC repose sur deux principes. Le premier est que pour tirer le meilleur parti des ressources de la planète, chaque pays doit se spécialiser dans les activités pour lesquelles la nature l'a le plus favorisé ; le deuxième, que pour ne pas fausser la concurrence, il faut abattre les barrières douanières et tarifaires.
Les conséquences de cette doctrine ont été extrêmement néfastes pour les économies " extractives ", notamment en matière écologique, où l'on peut parler d'" échange écologiquement inégal " ou de dumping écologique. La monoculture du café au Costa Rica a entraîné la déforestation et l'érosion des sols, l'économie de la crevette a détruit les mangroves.
Le coût écologique de la spécialisation, qui s'ajoute à la paupérisation qu'elle entraîne, a également une composante liée aux transports, qui va nous toucher de plus en plus en termes de changements climatiques - dont la canicule de cet été n'est qu'un signal encore faible.
Pour enrayer cette marche vers la barbarie sociale et la dévastation environnementale, il faut donc s'abstenir de lever les dernières barrières au commerce international et même réduire les échanges mondiaux, reterritorialiser les économies en les diversifiant, " démondialiser ". Le capital et le commerce ne doivent pas seulement être régulés, ils doivent être contenus.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 14/10/2003)