Texte intégral
R. Elkrief-.Bonjour N. Ameline. Le 8 mars dernier, s'achevait la marche des filles des quartiers. Nous-mêmes, nous avions reçu ici même Fadela Amara, la présidente du mouvement "Ni putes ni soumises" et vous aviez dit à l'époque : "Je partage leur révolte". Vous avez concrétisé cette sympathie depuis ?
- " Oui. C'est un dossier qui me tient formidablement à coeur et qui tient au coeur du Gouvernement. Nous sommes résolument engagés aux côtés de ces jeunes femmes, qui ont, avec un esprit de responsabilité et beaucoup de courage, porté ce combat, qui est le combat de la dignité, qui est le combat de la citoyenneté. "
Alors, concrètement, qu'est-ce que vous avez fait ? Qu'est-ce que vous allez faire pour les aider ? Qu'est-ce qu'elles demandent ?
- " Alors, engagement tenu pour le Gouvernement qui, avec J.-P. Raffarin, s'était engagé non seulement à les écouter, mais à les accompagner dans leurs démarches. D'abord sur l'urgence : urgence sociale car, vous le savez, un certain nombre de ces jeunes femmes sont victimes souvent d'une oppression, d'une souffrance réelle. Et nous avons, avec J.-L. Borloo, identifié par exemple une cinquantaine de logements qui permettront de répondre en direct à leurs attentes et à leurs besoins. "
Concrètement, ça veut dire que des femmes qui peuvent être battues ou maltraitées peuvent, dans ces quartiers, se réfugier dans ces logements ?
- " Absolument. Nous avons un premier exemple : il y a quelques jours à peine, une jeune femme et sa famille a souhaité être hébergée dans ces conditions pour fuir un agresseur qui venait d'être libéré, mais dont elle redoutait effectivement des représailles. Donc, nous avons répondu à son appel. Çà, ça fait partie de la première réaction. Il y en a d'autres, puisque ces jeunes femmes nous ont demandé - et j'insiste sur la méthode, il n'y a pas de prêt-à-penser dans ce domaine, mais plutôt une démarche très contractuelle, une démarche de confiance - de les aider aussi à ce que, dans les commissariats de police, elles soient accueillies d'une manière très sensible, très particulière, et ça c'est tout à fait en cours. Ce sera fait systématiquement. Nous avons, là, un appui formidable du ministre de l'Intérieur. Mais plus encore, Fadela Amara et un certain nombre d'autres associations nous avaient demandé des actions précises. Je reviens à cette marche "Ni putes ni soumises". Les actions sur lesquelles le Premier Ministre s'est engagé sont claires. Elles concernent l'édition notamment d'un guide : "De l'éducation au respect". C'est un très beau sujet. "
Je souris. C'est un très beau sujet certainement et il suffit d'écrire des mots pour que cela entre dans les esprits, dans les mentalités et dans le concret ?
- " C'est beaucoup plus que des mots. C'est aussi un appel à la conscience. Et c'est aussi l'expression d'une véritable espérance, celle d'une citoyenneté à part entière. Que demandent ces jeunes femmes ? Elles ne demandent pas l'assistance, elles demandent à être reconnues pour ce qu'elles sont : des jeunes femmes modernes dont la France moderne a besoin et qui, simplement, ont envie d'être elles-mêmes et d'être reconnues pour ce qu'elles sont. "
Oui, mais il ne suffit pas, je dirais, de les accompagner. Il faut convaincre leur entourage. On sait bien que les familles font des pressions, que les grands frères sont parfois très durs avec leurs soeurs. Il y a des exemples tragiques. Qu'est-ce que vous faites pour faire comprendre tout cela aux familles, aux autres acteurs des quartiers ?
- " D'abord, nous allons les faire émerger, c'est-à-dire les rendre visibles ces jeunes femmes. Elles ont besoin d'être reconnues et d'être acceptées partout dans la société. C'est très important parce qu'on ne peut pas parler d'égalité si on n'a pas cette représentativité de ce qu'elles portent en elles dans toute la société, dans les instances. C'est pourquoi d'ailleurs j'avais proposé que Fadela Amara puisse être nommée à l'Observatoire de la Parité. C'est très important que ces jeunes femmes soient, encore une fois, porteuses d'une voix, d'une espérance et d'une conscience. Mais au-delà, nous allons naturellement agir sur, pour reprendre l'exemple que vous citez, différentes formes de violences, sur les mariages forcés, par exemple. "
Il y a une question qui agite évidemment la société française aujourd'hui, c'est la question du port du voile à l'école. Est-ce que, s'il y avait une loi qui interdisait le port des signes religieux ostentatoires, ça aiderait ces jeunes femmes ou est-ce que cela aggraverait un peu le climat ?
- " Je pense qu'une clarification est nécessaire sur ce sujet. Il est tout à fait évident que nous aurons à concilier avec intelligence, exigence et générosité aussi, la liberté de conscience, la liberté d'expression avec les principes de la République. C'est l'affirmation d'une laïcité moderne, généreuse. "
Donc interdire...
- " Mais il me semble que, par exemple, à l'école, ce lieu doit être effectivement un lieu de neutralité, un lieu d'acquisition du savoir, d'émancipation. Et, de ce point de vue, je voudrais dire combien il est essentiel pour ces jeunes femmes de poursuivre intégralement leur scolarité. Voilà un vrai sujet. Et aussi d'avoir un accès direct et entier à la formation, à la qualification. Là comme ailleurs, l'émancipation vient aussi de l'accès à l'économie, à un emploi, à l'autonomie financière. "
Et cela, vous pourrez les aider justement, les former, enfin celles qui seront volontaires, qui pourront rentrer dans ce circuit de l'intégration par l'école et par le travail ?
- " La France, aujourd'hui, a besoin de tous ses talents et il faut, comme pour l'ensemble des femmes de France, être extraordinairement attentif à la valorisation des compétences et au fait qu'il serait absurde de se priver d'un potentiel de ressources humaines dont nous aurons très vite besoin. "
Vous parliez de parrainage, à un moment donné, par des entrepreneurs ?
- " Absolument. Je souhaite que ces jeunes femmes, en particulier, puissent bénéficier de toutes les chances. Le véritable accès à l'emploi passera sans doute par, effectivement, la création, pourquoi pas, de son propre emploi d'activité d'entreprise et nous avons lancé une opération, avec les Chambres de Commerce, les Chambres de Métiers, qui seront sollicitées pour accompagner des démarches qui seront essentielles. Parce que, encore une fois, pourquoi se priver de ces talents ? Il n'y a pas d'assistance. Il y a véritablement simplement la révélation de ce qu'elles sont : des jeunes femmes porteuses de projets et de richesses. "
N. Ameline, il y a aussi une autre question, c'est la réforme des retraites dont tout le monde parle et beaucoup de femmes s'inquiètent. Est-ce que cette réforme ne va pas les pénaliser ?
- " Je voudrais dire tout d'abord que nous n'avons pas de leçon à recevoir de l'opposition qui, pendant des années, a choisi l'immobilisme à l'action et qui d'ailleurs a poursuivi ce choix dans le cadre de la discussion parlementaire en préférant l'obstruction à la discussion. Cette réforme est actuellement portée avec intelligence et modernité par F. Fillon et J.-P. Delevoye... "
Et sur les femmes alors ?
- " S'agissant des femmes, le dispositif général consolide et améliore l'ensemble des avantages familiaux. Il y a, effectivement, un certain nombre de dispositions, nouvelles d'ailleurs, et d'une manière générale, on peut dire qu'il s'agit là d'un progrès car, au fond, nous avons, notamment sur les aspects de prise en compte très importants des interruptions de carrière et du temps partiel, fait progresser le dispositif général, en application aussi de la jurisprudence européenne. "
Mais, est-ce que le problème ce n'est pas l'égalité dans les carrières justement et cela c'est votre travail. Vous, vous êtes ministre de l'Egalité Professionnelle. On en est encore loin non ?
- " Et vous avez mille fois raison. Le facteur explicatif du faible niveau de retraite des femmes en France, il n'est pas à rechercher dans le système des retraites lui-même, il est à rechercher dans le niveau général des carrières. C'est le coeur de ma mission. C'est l'égalité professionnelle. Et je suis fière que le dialogue social que nous avons sollicité, sur ce point, se poursuive dans de très bonnes conditions et déboucherons, je le souhaite, sur une offensive en termes de formation professionnelle à la rentrée. "
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 juin 2003)
- " Oui. C'est un dossier qui me tient formidablement à coeur et qui tient au coeur du Gouvernement. Nous sommes résolument engagés aux côtés de ces jeunes femmes, qui ont, avec un esprit de responsabilité et beaucoup de courage, porté ce combat, qui est le combat de la dignité, qui est le combat de la citoyenneté. "
Alors, concrètement, qu'est-ce que vous avez fait ? Qu'est-ce que vous allez faire pour les aider ? Qu'est-ce qu'elles demandent ?
- " Alors, engagement tenu pour le Gouvernement qui, avec J.-P. Raffarin, s'était engagé non seulement à les écouter, mais à les accompagner dans leurs démarches. D'abord sur l'urgence : urgence sociale car, vous le savez, un certain nombre de ces jeunes femmes sont victimes souvent d'une oppression, d'une souffrance réelle. Et nous avons, avec J.-L. Borloo, identifié par exemple une cinquantaine de logements qui permettront de répondre en direct à leurs attentes et à leurs besoins. "
Concrètement, ça veut dire que des femmes qui peuvent être battues ou maltraitées peuvent, dans ces quartiers, se réfugier dans ces logements ?
- " Absolument. Nous avons un premier exemple : il y a quelques jours à peine, une jeune femme et sa famille a souhaité être hébergée dans ces conditions pour fuir un agresseur qui venait d'être libéré, mais dont elle redoutait effectivement des représailles. Donc, nous avons répondu à son appel. Çà, ça fait partie de la première réaction. Il y en a d'autres, puisque ces jeunes femmes nous ont demandé - et j'insiste sur la méthode, il n'y a pas de prêt-à-penser dans ce domaine, mais plutôt une démarche très contractuelle, une démarche de confiance - de les aider aussi à ce que, dans les commissariats de police, elles soient accueillies d'une manière très sensible, très particulière, et ça c'est tout à fait en cours. Ce sera fait systématiquement. Nous avons, là, un appui formidable du ministre de l'Intérieur. Mais plus encore, Fadela Amara et un certain nombre d'autres associations nous avaient demandé des actions précises. Je reviens à cette marche "Ni putes ni soumises". Les actions sur lesquelles le Premier Ministre s'est engagé sont claires. Elles concernent l'édition notamment d'un guide : "De l'éducation au respect". C'est un très beau sujet. "
Je souris. C'est un très beau sujet certainement et il suffit d'écrire des mots pour que cela entre dans les esprits, dans les mentalités et dans le concret ?
- " C'est beaucoup plus que des mots. C'est aussi un appel à la conscience. Et c'est aussi l'expression d'une véritable espérance, celle d'une citoyenneté à part entière. Que demandent ces jeunes femmes ? Elles ne demandent pas l'assistance, elles demandent à être reconnues pour ce qu'elles sont : des jeunes femmes modernes dont la France moderne a besoin et qui, simplement, ont envie d'être elles-mêmes et d'être reconnues pour ce qu'elles sont. "
Oui, mais il ne suffit pas, je dirais, de les accompagner. Il faut convaincre leur entourage. On sait bien que les familles font des pressions, que les grands frères sont parfois très durs avec leurs soeurs. Il y a des exemples tragiques. Qu'est-ce que vous faites pour faire comprendre tout cela aux familles, aux autres acteurs des quartiers ?
- " D'abord, nous allons les faire émerger, c'est-à-dire les rendre visibles ces jeunes femmes. Elles ont besoin d'être reconnues et d'être acceptées partout dans la société. C'est très important parce qu'on ne peut pas parler d'égalité si on n'a pas cette représentativité de ce qu'elles portent en elles dans toute la société, dans les instances. C'est pourquoi d'ailleurs j'avais proposé que Fadela Amara puisse être nommée à l'Observatoire de la Parité. C'est très important que ces jeunes femmes soient, encore une fois, porteuses d'une voix, d'une espérance et d'une conscience. Mais au-delà, nous allons naturellement agir sur, pour reprendre l'exemple que vous citez, différentes formes de violences, sur les mariages forcés, par exemple. "
Il y a une question qui agite évidemment la société française aujourd'hui, c'est la question du port du voile à l'école. Est-ce que, s'il y avait une loi qui interdisait le port des signes religieux ostentatoires, ça aiderait ces jeunes femmes ou est-ce que cela aggraverait un peu le climat ?
- " Je pense qu'une clarification est nécessaire sur ce sujet. Il est tout à fait évident que nous aurons à concilier avec intelligence, exigence et générosité aussi, la liberté de conscience, la liberté d'expression avec les principes de la République. C'est l'affirmation d'une laïcité moderne, généreuse. "
Donc interdire...
- " Mais il me semble que, par exemple, à l'école, ce lieu doit être effectivement un lieu de neutralité, un lieu d'acquisition du savoir, d'émancipation. Et, de ce point de vue, je voudrais dire combien il est essentiel pour ces jeunes femmes de poursuivre intégralement leur scolarité. Voilà un vrai sujet. Et aussi d'avoir un accès direct et entier à la formation, à la qualification. Là comme ailleurs, l'émancipation vient aussi de l'accès à l'économie, à un emploi, à l'autonomie financière. "
Et cela, vous pourrez les aider justement, les former, enfin celles qui seront volontaires, qui pourront rentrer dans ce circuit de l'intégration par l'école et par le travail ?
- " La France, aujourd'hui, a besoin de tous ses talents et il faut, comme pour l'ensemble des femmes de France, être extraordinairement attentif à la valorisation des compétences et au fait qu'il serait absurde de se priver d'un potentiel de ressources humaines dont nous aurons très vite besoin. "
Vous parliez de parrainage, à un moment donné, par des entrepreneurs ?
- " Absolument. Je souhaite que ces jeunes femmes, en particulier, puissent bénéficier de toutes les chances. Le véritable accès à l'emploi passera sans doute par, effectivement, la création, pourquoi pas, de son propre emploi d'activité d'entreprise et nous avons lancé une opération, avec les Chambres de Commerce, les Chambres de Métiers, qui seront sollicitées pour accompagner des démarches qui seront essentielles. Parce que, encore une fois, pourquoi se priver de ces talents ? Il n'y a pas d'assistance. Il y a véritablement simplement la révélation de ce qu'elles sont : des jeunes femmes porteuses de projets et de richesses. "
N. Ameline, il y a aussi une autre question, c'est la réforme des retraites dont tout le monde parle et beaucoup de femmes s'inquiètent. Est-ce que cette réforme ne va pas les pénaliser ?
- " Je voudrais dire tout d'abord que nous n'avons pas de leçon à recevoir de l'opposition qui, pendant des années, a choisi l'immobilisme à l'action et qui d'ailleurs a poursuivi ce choix dans le cadre de la discussion parlementaire en préférant l'obstruction à la discussion. Cette réforme est actuellement portée avec intelligence et modernité par F. Fillon et J.-P. Delevoye... "
Et sur les femmes alors ?
- " S'agissant des femmes, le dispositif général consolide et améliore l'ensemble des avantages familiaux. Il y a, effectivement, un certain nombre de dispositions, nouvelles d'ailleurs, et d'une manière générale, on peut dire qu'il s'agit là d'un progrès car, au fond, nous avons, notamment sur les aspects de prise en compte très importants des interruptions de carrière et du temps partiel, fait progresser le dispositif général, en application aussi de la jurisprudence européenne. "
Mais, est-ce que le problème ce n'est pas l'égalité dans les carrières justement et cela c'est votre travail. Vous, vous êtes ministre de l'Egalité Professionnelle. On en est encore loin non ?
- " Et vous avez mille fois raison. Le facteur explicatif du faible niveau de retraite des femmes en France, il n'est pas à rechercher dans le système des retraites lui-même, il est à rechercher dans le niveau général des carrières. C'est le coeur de ma mission. C'est l'égalité professionnelle. Et je suis fière que le dialogue social que nous avons sollicité, sur ce point, se poursuive dans de très bonnes conditions et déboucherons, je le souhaite, sur une offensive en termes de formation professionnelle à la rentrée. "
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 juin 2003)