Déclaration de Mme Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, sur le référendum concernant l'avenir institutionnel de la Corse et sur la stratégie du PCF pour s'opposer à la politique du gouvernement, à Bastia le 3 juillet 2003.

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Circonstance : Meeting pour le "non" au référendum en Corse, à Bastia le 3 juillet 2003

Texte intégral


Chers amis,
Chers camarades,
" Approuvez-vous les orientations proposées pour le statut de la collectivité territoriale de Corse ? " N'attendez pas de moi que je monte sur une chaise en plastique pour vous dire ce que j'en pense, cela pourrait créer des ennuis au nouveau préfet de ce qui doit rester votre département. La question qui vous est posée aujourd'hui ne brille ni par sa pertinence, ni par sa clarté. On aurait pu se réjouir que le peuple soit consulté, qu'on lui donne enfin la parole que ces dernières années on lui a refusée. On aurait pu saluer les progrès de la démocratie, le nouveau visage de la République qui permet des consultations locales sur des sujets importants. Et le sujet est important, s'il s'agit justement de la démocratie dans l'île, et des contours de la décentralisation. On aurait pu, donc, se féliciter de ce référendum, en démocrate convaincu. Mais hélas, cette consultation n'est qu'un stratagème utilisé par le gouvernement pour mieux faire passer la pilule de sa politique régressive. S'il n'a pas encore levé le voile sur l'ensemble de ses projets pour la Corse, ils sont pourtant connus. Voilà la question en réalité posée : voulez-vous délier les mains du gouvernement ? Eh bien non, comme l'a montré notre peuple ce printemps, le gouvernement n'aura pas les mains libres !
Permettez-moi, pour commencer, de citer le ministre de l'intérieur lors de sa première visite en Corse il y a quelques mois : " Je connais le goût des Corses pour la politique, au sens noble du terme, c'est-à-dire pour les grands débats, ceux qui engagent le sens de la vie collective. Je ne suis pas venu vous expliquer ce que vous devez faire. Je n'arrive pas avec un nouveau statut, une nouvelle loi. Je crois que la Corse a maintenant besoin d'action beaucoup plus que de discours et d'incantations ou encore de postures. " Et voici qu'aujourd'hui le coq a chanté trois fois. Et voici que Monsieur Sarkozy s'est renié trois fois : pas de grand débat, des leçons à tour de bras, et une énième réforme institutionnelle pour couronner le tout.
La confrontation politique a été réduite à une question de confiance. Mais vous ne vous résignez pas au plébiscite que l'on vous impose car les attentes des corses méritent un vrai débat politique, une vraie recherche collective. La précipitation avec laquelle ce référendum a été organisé, en plein été, témoigne de l'importance que le gouvernement accorde décidément à ce débat. Encore une réforme à laquelle les corses n'ont pas été associés.
C'est là le deuxième reniement : que fait notre gouvernement depuis un mois si ce n'est expliquer aux citoyennes et aux citoyens de la région Corse qu'ils n'ont pas le choix que la solution est celle du gouvernement, alors qu'il promettait de ne pas venir expliquer aux Corses ce qu'ils doivent faire. Que fait-il sinon adopter des postures et provoquer la confusion : " je tends la main au peuple corse ", " les corses ne peuvent que refuser l'immobilisme ", j'en passe et des meilleures. Encore hier, le Premier ministre à la tribune de l'Assemblée nationale a fait beaucoup de phrases inquiétantes et beaucoup de phrases creuses dont celle-ci : " L'enjeu, c'est la République en Corse et la Corse dans la République. " Il s'agirait, nous dit-on de " répondre à l'appel de la République ". Eh bien non, ce n'est pas la question posée, n'en déplaise au Président de la République. Il s'agit de répondre à la pression libérale de ce gouvernement, il s'agit de refuser que la Corse continue à être utilisée comme un cobaye de l'Europe de Maastricht, il s'agit de dire non à l'éclatement de la République, en Corse et ailleurs.
Troisième reniement : pas de nouvelle loi ? Les bonnes intentions n'ont décidément pas duré. C'est bien ce terrain-là que le gouvernement a choisi. On nous explique à tout va que l'essentiel est de sortir du statu quo. Pour aller où ? Peu importe, nous dit-on, vous verrez bien. Que sait on réalité de cette collectivité territoriale unique, de ces conseils territoriaux sans moyens ni légitimité, des modes de désignation des représentants du peuple ? Rien, ou presque. On affirme ici et là que l'apparition de la violence sur l'île coïncide avec la mise en place des départements. Ces procédés malhonnêtes ne grandissent pas la démocratie et la République. Le gouvernement entre de plain-pied sur le terrain des nationalistes pour qui la seule question est celle du pouvoir. Si les problèmes de la Corse étaient purement institutionnels, la situation ne serait pas si grave. On contribue à faire ici une exception corse alors que ces problèmes de démocratie et d'institutions se posent à tous. Bien qu'Alain Juppé nous assure que c'est la réforme " du gouvernement " et non pas celle des nationalistes, le gouvernement a choisi se retrouver à leurs côtés. Que cherche le gouvernement ? Un plébiscite pour sa politique, un chèque en blanc. Il a une manière de présenter les choses qui ne laisse aucun doute : cette consultation n'est pas sincère. Mais j'ai la conviction que les citoyennes et les citoyens ne se laisseront pas berner. Il y a d'autres possibles pour la Corse que cette énième réforme institutionnelle qui ne résoudra rien, et qui aggravera les problèmes démocratiques.
Le processus de Matignon a tenu à l'écart les citoyennes et les citoyens, il s'est lui aussi focalisé sur les questions institutionnelles telles qu'elles étaient posées par une poignées de nationalistes, il ne s'est pas appuyé sur le monde associatif et syndical. Une grande consultation des corses reste nécessaire sur l'avenir de l'île. Mais une véritable consultation ! Le processus de Matignon a débouché enfin sur un grand flou institutionnel, sur le risque d'une aggravation de particularismes injustifiés. Heureusement, il contenait aussi le déblocage de fonds pour un plan exceptionnel d'investissement, acquis sous la pression des élus communistes de l'île et des parlementaires communistes. Ce plan est nécessaire à la remise à niveau des infrastructures
Tout cet argent, débloqué lors du processus de Matignon, va-t-on accepter qu'il soit géré par une poignée d'élus régionaux, de préférence de droite, sans aucune concertation et co-élaboration avec les habitants et habitantes de l'île ? " La Corse est face à des problèmes considérables et personne ne commande la totalité des manettes pour mettre en oeuvre un projet de développement ", regrette le gouvernement. Voilà, pour lui, le nud du problème. Et qu'on ne vienne pas après des tirades comme celle-là, nous donner des leçons de décentralisation ! Nous ne voulons pas de potentats locaux, ni en Corse, ni dans n'importe quelle région de France ! Si c'est cela la cohérence prônée par le gouvernement, la Corse n'en a pas besoin. Elle n'a pas besoin non plus d'être une immense zone franche. Les problèmes de la Corse sont ceux du développement de ses potentialités, de la valorisation de ses qualités et du travail des hommes et des femmes. Ce dont la Corse a besoin, c'est d'un programme économique et social, qui améliore la qualité de l'emploi et le niveau des salaires. Ce dont la Corse a besoin, c'est de l'application du droit et du respect des libertés dans tous les domaines. Ce dont la Corse a besoin, c'est d'une démocratie vivante et de proximité, c'est de services publics efficaces, qui répondent toujours mieux aux besoins. Ce dont la Corse a besoin, c'est d'être respectée.
La suppression des départements est une mascarade. Pour la droite, il s'agit surtout de supprimer au passage des élus gênants, des freins à sa politique libérale qui livre la Corse aux financiers de tous bords. Remplacer les départements par des structures administratives, on veut nous faire croire que ce serait là un grand progrès démocratique ? Nous n'acceptons pas qu'on nom de la proximité on supprime des élus proches du peuple et attachés au développement de leur territoire. Montrer du doigt une catégorie en lui mettant sur le dos tous les malheurs du monde relève du populisme et c'est inacceptable. En concentrant les pouvoirs dans une collectivité unique dont on sait finalement peu de choses, le gouvernement veut créer de l'espace pour livrer au marché les missions de l'Etat. L'heure est à inventer des coopérations nouvelles et efficaces, à uvrer au co-développement, plutôt que de se livrer à des concurrences acharnées qui détruisent l'emploi, l'environnement, les hommes et les femmes.
Cette réforme, c'est la Corse, transformée en laboratoire d'une Europe des régions, d'une Europe de la concurrence à outrance, d'une Europe libérale.
Cette réforme, c'est la Corse soumise au bon vouloir d'une collectivité unique concentrant tous les pouvoirs. C'est l'installation, prévue partout, de féodalités locales.
Cette réforme, c'est la suppression des départements, dans votre vaste région, et d'un échelon essentiel dans la démocratie de proximité. C'est la réduction de l'espace politique, et de la politique à la portion congrue. Or il y a besoin de politique, de proximité, de citoyenneté, de coopérations entre collectivités territoriales, entre régions, entre pays.
Cette réforme, c'est la mise en uvre de la soi-disant décentralisation du gouvernement, c'est l'éclatement de la République, c'est l'éclatement des garanties collectives, c'est l'éclatement du service public bientôt livré en pâture aux logiques marchandes.
Cette réforme, c'est un cadeau pour ceux qui veulent régner en maîtres sur une Corse repliée sur elle-même.
Cette réforme, c'est la régression, c'est le recul. C'est l'insécurité qui progresse dans tous les domaines.
Au nom de la Corse, au nom de toutes les autres régions de France, au nom de la République, il faut dire non au gouvernement.
Au nom de la justice sociale et démocratique, au nom du progrès pour tous il faut dire non au gouvernement.
" Le " non " en Corse se pratique à grande échelle, et avec conviction encore ! " a encore récemment affirmé le ministre Sarkozy. Quel mépris pour les citoyennes et les citoyens, quel mépris pour les corses. Eh bien, ayons de la conviction, puisqu'on nous le reproche !
Dire non, c'est obliger le gouvernement à répondre aux vraies questions qui se posent à la Corse, c'est l'obliger à entendre les autres propositions qui sont faites notamment en termes de coopérations institutionnelles. Dire non, c'est ouvrir un avenir à la Corse.
Peut-on faire confiance à ce gouvernement comme il en émet le voeu à l'occasion de ce référendum ? Peut-on faire confiance à ce gouvernement qui détruit tout sur son passage ?
C'est ce gouvernement qui a imposé à notre peuple un recul de civilisation sans précédent, contre l'avis du peuple, avec la casse des retraites. C'est ce gouvernement qui menace l'éducation nationale avec sa réforme de décentralisation. C'est ce gouvernement qui programme les privatisations et l'abandon des services publics. C'est ce gouvernement qui veut livrer la sécurité sociale, et la santé des françaises et des français au MEDEF. C'est ce gouvernement qui s'attaque aux libertés. A-t-il daigné seulement écouter ces millions de françaises et de français exprimant d'une manière ou d'une autre leur refus de cette réforme injuste, leurs propositions alternatives, leur volonté de voir mis en oeuvre d'autres choix de société ? Ce gouvernement a un projet clair en tête, celui d'une France livrée au déferlement du marché, de l'argent-roi, des logiques marchandes. Ce gouvernement veut écraser toute résistance, faire voler en éclats toutes les solidarités qui nous unissent. Il veut remodeler la société en profondeur pour adapter notre pays aux exigences du capitalisme mondialisé. Il nous promet une société du chacun pour soi, une société des inégalités. Il nous promet toujours plus de capitalisme ! Peut-on faire confiance à ce gouvernement ?
Avez-vous vu cet homme emprisonné à grands renforts de police ? Avez-vous vu cet homme dont l'Etat est venu casser la porte ? Pourquoi ? Est-ce un terroriste ? Est-ce un criminel, un voleur ? Non, c'est un militant. Qu'a-t-il fait pour sa peine ? Il a fauché un champ de maïs transgénique. Aujourd'hui, c'est José Bové, ici, c'est Jean-Pierre Balestini, roué de coups, et à Ajaccio le secrétaire de la CGT menotté. C'est la liberté syndicale, c'est la liberté d'opinion qu'on veut mettre au pas. Avez-vous vu ces enseignants contre qui on a fait donner les gaz lacrymogènes. Avez-vous vu ces projets pour restreindre le droit de grève. A écouter l'UMP, on aura bientôt plus le droit de faire grève que lorsque cela ne gênera personne, que lorsque le patron sera d'accord. On n'aura bientôt plus le droit que de travailler pour ceux qui ont cette chance. C'est la démocratie que l'on menace, que l'on restreint, que l'on formate. Le gouvernement et la droite mènent une offensive idéologique de grande ampleur basée sur l'élitisme, le libéralisme, la répression, la division, l'individualisme.
Mais malgré la publicité mensongère du gouvernement et la mise en branle de tous ses pouvoirs de communication, sa réforme des retraites ne passe pas. Des millions de personnes ont manifesté leur opposition à ces projets. La loi a été adoptée ce matin, mais les députés communistes ont tenu à être à la hauteur du mouvement social, des hommes et des femmes qui se sont battus. Nous avons mené la bataille contre ce projet tant que nous le pouvions et voici le gouvernement tenu de la faire adopter en session extraordinaire, au creux de l'été. Nous avons tenu à être à la hauteur et les sénateurs communistes vont engager le combat dès lundi pour préparer une rentrée tous ensemble, une rentrée combative. Cette réforme nous promet une baisse considérable du niveau des pensions, elle nous oblige pour ceux qui le pourront à travailler plus longtemps encore, elle ouvre grand la porte à la capitalisation. C'est le système de retraites par répartition que l'on veut envoyer au cimetière. Ce sont les salariés que l'on veut encore exploiter. Depuis trente ans, le volume de la rémunération du travail dans la valeur ajoutée globale a perdu huit points au profit de la rémunération du capital. On travaille toujours plus pour gagner toujours moins. C'est le choix de ce gouvernement, c'est la volonté du MEDEF et des tenants du capitalisme. Il y en a assez de ces logiques qui écrasent les hommes et les femmes ! Il y a bien là une lutte de classes que la droite mène sans complexe pour le plus grand plaisir du patronat. Les minorités sont stigmatisées : les jeunes, les prostituées, les gens du voyage, les demandeurs d'asile. C'est par eux, les plus vulnérables, que le gouvernement a commencé son offensive. Le droit du travail est menacé de cambriolage par un gouvernement qui s'est fait prescrire la législation par ordonnances en la matière. Les limitations du temps de travail ont déjà été assouplies, comme on dit en langage policé. En ligne de mire, on peut déjà apercevoir la sécurité sociale, les services publics et la privatisation d'EDF-GDF bientôt livrés aux appétits de la finance. Le budget de la recherche, celui de l'éducation, celui de la culture ont été rabotés. Les baisses d'impôts ont été accordées aux plus riches et au patronat. Aujourd'hui, les intermittents du spectacle sont en colère. Ils défendent bien plus qu'un statut que le MEDEF tente depuis de nombreux mois de faire disparaître. Ils défendent la création et la culture qui sont en danger parce que les hommes et les femmes qui les font vivre aujourd'hui sont précarisés. Il défendent la culture menacée par l'Accord général sur le commerce et les services de l'organisation mondiale du commerce, auquel l'union européenne résiste bien peu.
Le gouvernement applaudit devant cette Europe libérale, que l'on masque derrière l'idée d'une Europe des régions. Cette Europe libérale dont le seul but est la dérégulation maximale, la disparition des solidarités nationales, l'éclatement du droit et l'aggravation des difficultés de la démocratie. En proposant cette réforme pour la Corse, il pense à cette Europe-là. Il se trompe de chemin. Bien au contraire, il faut rendre l'Europe aux citoyennes et aux citoyens, ou plus exactement la leur donner car jusqu'ici elle n'est pas leur affaire. La Constitution Européenne qui vient de nous être livrée ne peut que nous inquiéter. Les réactions extrêmement positives qui l'entourent ne sont pas faites non plus pour rassurer. Elle met au coeur de ses principes la libre concurrence et ne dit pas un mot des services publics, elle laisse la banque centrale libre de tout contrôle démocratique, elle se contente de droits établis à minima. Cette Constitution est dans la droite ligne de Maastricht. Nous allons la faire connaître, nous demandons un référendum. Nous voulons résolument une autre Europe, sociale, démocratique, de coopération. Une Europe d'hommes et de femmes libres et égaux.
Les coups pleuvent sur nos têtes, vous le savez, la liste est longue. Et pourtant, la résistance s'organise, des espoirs renaissent. Partout en France, le mouvement populaire qui s'est levé contre l'arrogance et les projets de ce gouvernement n'a pas dit son dernier mot. Même si le Premier ministre a annoncé qu'il changerait de braquet afin d'éviter une retour tonitruant des mobilisations sur le devant de la scène, nombreux sont ceux qui ont décidé de ne pas se laisser faire. Ce mouvement qui a mis en difficulté le gouvernement et l'oblige aujourd'hui à revoir son tempo, ce mouvement était puissant. D'abord, il portait des projets alternatifs en matière de retraites, en matière d'éducation. Ensuite, il était porteur d'intérêt général, de bien commun. Enfin, il portait en lui l'exigence d'autres choix de société, l'exigence de réponses politiques qui soient à la hauteur, l'exigence d'une alternative politique. Ce mouvement, dont les corses ont été des acteurs déterminés, ce mouvement change la donne, il ouvre des espoirs. Si toutes ces intelligences et ces énergies investissent vraiment comme elles ont commencé à le faire, le champ politique, alors, il y a de quoi espérer. Je sais qu'ici en Corse, la mobilisation a été très forte. L'alternative politique ? Elle est à construire et les communistes ont décidé d'ouvrir ce chantier. Nous pensons qu'il faut tirer les leçons du 21 avril, prendre la mesure de la fracture opérée entre la politique et les citoyennes et les citoyens, regarder en face l'échec de la gauche qui n'a pas apporté les réponses nécessaires et n'a pas conduit les changements qui s'imposaient. Nous croyons que sans un contenu transformateur anticapitaliste audacieux et sans une démarche profondément citoyenne et démocratique, le 21 avril restera notre horizon politique. Nous voulons mettre toutes les questions politiques sur la place publique et construire ensemble le changement. Nous voulons le faire avec les acteurs et actrices du mouvement social, avec tous les citoyens et citoyennes qui s'interrogent. Ils nous ont envoyé le même message le 21 avril. C'est pourquoi nous avons lancé les forums citoyens dans toute la France. Pas question de régler les affaires dans des réunions d'Etats-majors, au sommet, pour produire des rassemblements et des propositions qui n'appartiennent pas à notre peuple. La politique doit se faire avec le plus grand nombre, et au grand jour. C'est ainsi, pensons-nous que l'on pourra ouvrir des perspectives et bâtir une alternative à la fois révolutionnaire et rassembleuse. Dans ces forums qui se dérouleront partout, il convient que toutes les formations politique à gauche soient présentes pour mener le débat d'égal à égal avec les citoyens. La question des rassemblements et des alliances sera sur la table comme celle des contenus de la politique à mener. Oui, y compris cette question-là. Il n'y a pas de jardin secret de la politique, pas de chasse gardée. L'intervention citoyenne seule est capable de provoquer les transformations sociales nécessaires. C'est cela le pari que nous faisons. Dans ce cadre-là, les communistes entendent prendre leurs responsabilités, faire des propositions, donner à voir leur visée communiste de dépassement du capitalisme. Ils le feront comme ils l'ont fait pour les retraites, en proposant une modulation de la cotisation des entreprises, un plan d'action pour des emplois tables avec des salaires décents, et comme ils le feront pour la protection sociale à la rentrée. Nous avons des propositions pour une démocratie renouvelée, pour mettre en cause le règne de la finance et des logiques marchandes, pour construire d'autres rapports entre les individus, entre les peuples, pour une véritable sécurité d'emploi et de formation, pour donner le pouvoir aux salariés dans l'entreprise, pour changer l'Europe et les institutions internationales. Mais notre combat n'a de sens que s'il est partagé et s'inscrit dans l'espoir d'un changement possible. Pour tout cela, il y a beaucoup à faire, mais j'ai beaucoup d'espoir.
Et si dimanche, les Corses résistent à l'indécente pression du gouvernement libéral, ils donneront un signe fort que d'autres choix sont possibles en France et en Europe. Ils apporteront de l'eau claire au moulin de l'espoir. Ils mettront le gouvernement sur le reculoir, ils jetteront le doute sur cette fausse décentralisation qui guette toutes les régions de France. Une fois n'est pas coutume, le gouvernement donne la parole au peuple, du bout des doigts. Alors le peuple doit prendre la parole à pleines mains ! Et qu'il lui dise " non " ! Il y a au moins trois bonnes raisons pour cela : cette réforme est antidémocratique, antirépublicaine et antisociale. Les manoeuvres mesquines et déplacées du gouvernement en Corse s'inscrivent dans son vaste projet de remodelage de la société. Il ne casse pas la solidarité nationale pour la consolider ensuite avec la Corse. Il n'ouvre pas les portes aux projets de l'Europe libérale pour ensuite défendre l'île face aux velléités de Bruxelles. Avec cette réforme, il entend même faire de la Corse un poste avancé du libéralisme, un exemple de sa politique dévastatrice. Les réformes qui vont venir à la rentrée pour mettre en place la soi-disant décentralisation vont correspondre à une dislocation des droits entre les citoyennes et les citoyens français s'ils sont issus de régions riches ou de régions pauvres. Et ne cachons pas que les personnels aujourd'hui employés par l'Etat, soumis à la décentralisation, au clientélisme et aux privatisations qui iront de pair, vont faire les frais des mesures d'économies visées par le gouvernement et la droite dans les services publics. Combien de temps survivront-ils, dans l'île, aux coupes claires, prévues par la droite dès 2004 ? Or c'est du contraire que la Corse a besoin, de services publics efficaces, de la mise en oeuvre des projets de développement économique décidés. La suppression des départements règle-t-elle ces problèmes ? Non, elle les aggrave !
Je sais que les Corses n'ont pas l'habitude de se laisser faire. Ils l'ont encore montré ces dernières semaines en contestant fortement la réforme des retraites. La droite veut saisir l'opportunité de maîtriser toutes les manettes, comme cela a été avoué dans l'hémicycle-même. Vous voici placés ainsi à la pointe du combat républicain pour la liberté l'égalité et la fraternité. Votre dignité est grande pour mener ce combat. Votre " non " sera un acte de lutte qui parlera à toute la France. Non à ce gouvernement et à sa réforme funeste, non à sa potion amère de soi-disant décentralisation. Oui à un avenir solidaire pour la Corse, pour les Corses, pour l'ensemble des citoyens de ce pays ! Oui, la Corse est en mouvement, avec le " non " amplifions ce mouvement !

(Source http://www.pcf.fr, le 7 juillet 2003)