Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur l'avenir des services publics dans le cadre de la réforme de l'Etat, Paris le 18 mars 2003.

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Circonstance : Ouverture de la "Table ronde sur l'avenir des services publics" au Sénat le 18 mars 2003

Texte intégral

Messieurs les ministres, chers Jean-Paul DELEVOYE et Henri PLAGNOL,
Messieurs les présidents d'association d'élus locaux,
Messieurs les présidents des commissions des affaires économiques, des lois et des finances,
Mesdames, Messieurs,
C'est un honneur pour moi de vous accueillir aujourd'hui à la présidence du Sénat pour cette " Table ronde sur l'avenir des services publics ".
Sans attendre, je tiens à remercier MM. Jean-Paul DELEVOYE, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire ? et Henri PLAGNOL, secrétaire d'État à la réforme de l'État qui ont bien voulu accepter de participer à cet échange que je souhaite sans tabous et serein.
En tant que Président du Sénat, assemblée parlementaire à part entière et représentant constitutionnel des collectivités territoriales, je tiens à féliciter Messieurs les Présidents d'avoir répondu à notre invitation afin d'engager, en amont, cette nécessaire réflexion sur l'avenir du service public. Il n'est pas trop tard, mais il n'est que temps !
Car malheureusement, en France, il faut bien le reconnaître, notre tradition jacobine séculaire a longtemps jeté un voile de " suspicion " sur le dialogue et la concertation.
Or comme vous, cher Jean-Paul, je crois beaucoup aux vertus de l'échange, dans le respect de l'autre, comme moteur de l'action publique, comme catalyseur d'une République revivifiée et réconciliée.
C'est aussi la raison d'être de notre réunion d'aujourd'hui.
Rassurez-vous, je ne prononcerai pas un long discours, car l'idée de notre rencontre est bien de débattre.
Très simplement, je souhaite que chacun puisse s'exprimer et exposer ses préoccupations qui, je crois le savoir, sont nombreuses.
Avant d'engager un tour de table et d'écouter, en réponse, les ministres, je veux seulement vous dire que le Sénat, en tant qu'avocat et maison des collectivités locales, sera toujours à vos côtés.
En tant que législateur, nous devons savoir faire la part des choses et vous aider à inscrire vos légitimes inquiétudes dans le " champ des possibles ".
Aujourd'hui, nous sommes en train de vivre une véritable révolution, un moment historique avec la ratification, par le Parlement réuni en Congrès hier à Versailles, de l'ancrage constitutionnel de la décentralisation.
Vous connaissez tous l'engagement qui a été le mien depuis 1998 en faveur de la constitutionnalisation de l'autonomie locale qui passe par un renforcement des principes de libre administration et d'autonomie fiscale et financière.
Le " premier étage de la fusée mis en orbite ", il nous reste maintenant à en décliner les principes dans les projets de loi de transferts, d'expérimentation et de financement à venir.
Il nous reste, il vous reste aussi à engager, concomitamment, la réforme de l'État.
Car la relance de la décentralisation ne saurait constituer en soi une forme de réforme d'État.
En revanche, elle renforce l'exigence, sans attendre, d'une remise à plat de son organisation territoriale.
Ainsi, l'avenir des services publics est au cur de cette exigence.
La pleine réussite de l'acte deux de la décentralisation est à ce prix !
En ce sens, je souhaite que l'on puisse élaborer une méthode afin d'éviter, autant que faire se peut, les affrontements bien souvent stériles entre l'État et les collectivités locales, et dépasser les oppositions hors d'âge entre le rural et l'urbain, entre le public et le privé.
Car au fond, nous sommes tous animés par la même volonté : contribuer à un aménagement harmonieux du territoire.
Cet objectif commun nécessite donc de trouver le juste équilibre entre la nécessaire mutation des services publics et le respect d'un maillage pertinent du territoire, auquel les Français sont attachés.
La résolution de cette équation, délicate dans le contexte budgétaire actuel, pourrait passer par l'adossement de la restructuration du réseau des services publics à l'amélioration de la qualité du service rendu.
Plus encore, elle nécessite l'engagement d'une réflexion interministérielle d'ensemble afin d'éviter que les élus locaux ne découvrent, dans la presse, la fermeture de tel ou tel service public.
Agences postales, hôpitaux ruraux, trésoreries, succursales de la Banque de France, subdivisions des services déconcentrés de l'État... autant de chantiers qui méritent un " tir groupé ".
Cet objectif de concertation et de coordination de l'action est essentiel si l'on veut parvenir à une juste répartition de ces services sur le territoire dont la diversité rend de plus en plus difficile le maintien.
Il l'est encore plus si l'on veut conforter l'attractivité des territoires et mettre un terme à la spirale infernale de la " fracture territoriale " qui, finalement, pénalise toujours les plus faibles.
Messieurs les ministres, aujourd'hui, je compte donc sur vous pour entendre les préoccupations des élus locaux qui, chaque jour, sont confrontés à une demande sociale accrue.
Je souhaite aussi que cette réunion soit l'occasion pour vous d'expliciter la démarche du gouvernement afin de dissiper, s'il en existait, les malentendus éventuels.
En ce sens, si vous en étiez d'accord, nous pourrions convenir d'organiser au Sénat, d'ici à l'été, un débat d'ensemble sur ces sujets essentiels dans le cadre d'une séance mensuelle réservée.
Vous renouvelant mes remerciements, je forme le vu que cette " table ronde " soit aussi constructive que sereine, pour l'avenir de nos territoires, pour une France plus solidaire, plus dynamique et plus moderne.
(Source http://www.senat.gouv.fr, le 18 avril 2003)