Texte intégral
Paris n'envisage pas d'envoyer des forces en Irak
Al-Charq Al-Awsat :
Mis à part la situation irakienne qui constitue un danger dans la région, quelles sont les autres sources de menaces dans le Moyen-Orient, selon l'opinion française ?
Michèle Alliot-Marie :
Les pays de la région sont étroitement liés et le conflit israélo-palestinien est l'un des facteurs allant à l'encontre de la stabilité de la région.
Le terrorisme est un autre facteur d'instabilité. Il porte atteinte aux nations de la région qui sont elles-mêmes les premières victimes du terrorisme. Par ailleurs, la situation instable dans la région devient un prétexte pour des opérations terroristes dans les différentes régions et les différents continents. A cela, s'ajoute la volonté de certains pays à développer les armes de destruction massive notamment les armes nucléaires.
Il ne nous faut pas oublier d'autres facteurs sociaux, la pauvreté en particulier mais aussi d'autres facteurs comme le déséquilibre budgétaire et la volonté de ces peuples qui aspirent à la démocratie.
En d'autres termes, cette région du monde réunit tout les éléments qui causent sa déstabilisation. Et ce qui s'est passé dernièrement dans la capitale saoudienne, qui a été la cible des terroristes, vient justifier ce que nous sommes en train de dire.
Après l'Espagne et l'Indonésie, la République Dominicaine a décidé le retrait de ses forces armées en Irak. Est-ce que vous croyez que cela va créer un effet " boule de neige " menant les autres pays à retirer leurs troupes dans le pays?
Vous connaissez la position de la France sur ce sujet. Nous avons toujours soutenu qu'il était essentiel que le peuple irakien retrouve sa souveraineté complète. Il est primordial que nous arrivions dans les plus brefs délais à l'étape où les Nations unies joueront un rôle premier dans le pays et où un nouveau gouvernement irakien légitime et représentant toutes les institutions du pays sera mis en place, ce qui permettra d'entamer la reconstruction dans les meilleures conditions.
Il y a une date fixant le transfert des pouvoirs aux Irakiens (30 juin). Selon vous, à qui reviendrait la responsabilité d'assurer la sécurité et la stabilité dans le pays, une fois que le transfert de souveraineté aura été réalisé?
Il va de soi que cela appartiendrait au gouvernement irakien légitime et reconnu d'assurer la sécurité et la stabilité du pays. Et c'est à lui qu'appartiendrait également de solliciter le soutien des pays étrangers dont il a besoin.
Qu'est ce que vous entendez par là ?
J'entends par là qu'il reviendrait au gouvernement irakien et non pas à une autre partie de faire appel à un certain nombre de pays et solliciter auprès d'eux un soutien pour former à nouveau la police locale et l'armée qui sont essentielles pour la sécurité et la stabilité d'un quelconque pays.
Le président Jacques Chirac a évoqué la nécessité qu'il y ait " une période de transition " après le 30 juin. Comment pourrait-on envisager la mise en place de cette transition ?
Le premier élément de cette transition, c'est le rôle que doivent avoir les institutions dans le pays. A partir du moment où un gouvernement irakien légitime sera mis en place et où les Nations unies se verront accorder le premier rôle en Irak, c'est à cette période-là que nous sortirons d'une situation animée par les conflits. Dès lors, nous entrerons dans une nouvelle phase.
Il y a par ailleurs l 'élément psychologique. A ce propos, les Irakiens doivent prendre conscience qu'ils sont passés à une nouvelle étape, celle de la reconstruction du pays. Par ailleurs, les pays étrangers pourraient participer à cette reconstruction, et ceci en respectant la souveraineté du pays. Cette contribution ne peut se faire qu'à la demande expresse du gouvernement irakien souverain.
Est-ce que vous entendez par là que les forces de l'Alliance et les forces américaines pourraient jouer un rôle en Irak après le 30 juin ?
Cette question devra être posée au gouvernement irakien qui seul pourra engager des discussions avec les autorités américaines et celles de l'Alliance.
Sous quel contrôle seraient mises les forces internationales en Irak? Est-ce que celles-ci doivent dépendre de l'ONU ?
Les Nations unies ont la responsabilité des forces qui sont sous son contrôle. Prenons l'exemple de la Côte d'Ivoire : nous avons des forces locales mais aussi des forces françaises qui sont présentes à la demande du gouvernement local et avec l'accord de la communauté internationale. Des forces dépendants des Nations unies sont également présentes sur ce terrain. Et chacune de ces forces est dépendante d'une délégation qui lui est attribuée.
Est-ce que vous entendez par là qu'il est nécessaire d'avoir des forces militaires irakiennes, américaines et internationales dans le pays ?
Cette question doit être traitée par le gouvernement irakien, les Nations unies et par les pays de l'Alliance. Il n'appartient pas à la France d'intervenir sur ce sujet.
La France constitue un membre actif de l'alliance de l'atlantique nord. Est-ce que l'alliance aura un rôle sécuritaire dans le pays ?
Jusqu'à ce jour, aucune décision n'a été pris à ce sujet. Par ailleurs, cela n'est pas à l'ordre du jour. S'agissant de la période de l'après-30 juin, il est possible que des pourparlers soient engagés concernant le rôle de l'Alliance dans le pays. Mais un ensemble de conditions doivent être remplies pour cela. La première de ces conditions consiste en la mise en place d'un gouvernement irakien légitime et que les Nations unies se voient attribuer un rôle dominant dans le pays. Et enfin, il n'est pas envisageable que l'Alliance intervienne en Irak si cela ne répond pas à une demande exprimée par le gouvernement irakien lui-même.
Est-ce que la France voudrait voir les pays arabes et musulmans prendre rang parmi les forces internationales afin d'assurer la sécurité et la stabilité en Irak ?
Je pense qu'il est primordial qu'un grand nombre de pays comptent parmi ces forces, et cela doit se faire à l'initiative des Nations unies. Cela est essentiel non pas pour des raisons matérielles mais pour des raisons morales, d'autant plus que tous les pays du monde sont concernés par les évènements en Irak.
Est-ce que vous êtes prêts à envoyer des forces en Irak ?
Non, certainement pas. Nous avons bien dit que nous sommes prêts à apporter notre concours pour former la police locale, la gendarmerie et l'armée du pays avec l'aide de l'Allemagne et d'autres pays. S'agissant de l'envoi de forces armées en Irak, c'est une question qui n'est pas à l'ordre du jour.
Propos recueillis par Michel Abou-Najem
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 25 mai 2004)
Al-Charq Al-Awsat :
Mis à part la situation irakienne qui constitue un danger dans la région, quelles sont les autres sources de menaces dans le Moyen-Orient, selon l'opinion française ?
Michèle Alliot-Marie :
Les pays de la région sont étroitement liés et le conflit israélo-palestinien est l'un des facteurs allant à l'encontre de la stabilité de la région.
Le terrorisme est un autre facteur d'instabilité. Il porte atteinte aux nations de la région qui sont elles-mêmes les premières victimes du terrorisme. Par ailleurs, la situation instable dans la région devient un prétexte pour des opérations terroristes dans les différentes régions et les différents continents. A cela, s'ajoute la volonté de certains pays à développer les armes de destruction massive notamment les armes nucléaires.
Il ne nous faut pas oublier d'autres facteurs sociaux, la pauvreté en particulier mais aussi d'autres facteurs comme le déséquilibre budgétaire et la volonté de ces peuples qui aspirent à la démocratie.
En d'autres termes, cette région du monde réunit tout les éléments qui causent sa déstabilisation. Et ce qui s'est passé dernièrement dans la capitale saoudienne, qui a été la cible des terroristes, vient justifier ce que nous sommes en train de dire.
Après l'Espagne et l'Indonésie, la République Dominicaine a décidé le retrait de ses forces armées en Irak. Est-ce que vous croyez que cela va créer un effet " boule de neige " menant les autres pays à retirer leurs troupes dans le pays?
Vous connaissez la position de la France sur ce sujet. Nous avons toujours soutenu qu'il était essentiel que le peuple irakien retrouve sa souveraineté complète. Il est primordial que nous arrivions dans les plus brefs délais à l'étape où les Nations unies joueront un rôle premier dans le pays et où un nouveau gouvernement irakien légitime et représentant toutes les institutions du pays sera mis en place, ce qui permettra d'entamer la reconstruction dans les meilleures conditions.
Il y a une date fixant le transfert des pouvoirs aux Irakiens (30 juin). Selon vous, à qui reviendrait la responsabilité d'assurer la sécurité et la stabilité dans le pays, une fois que le transfert de souveraineté aura été réalisé?
Il va de soi que cela appartiendrait au gouvernement irakien légitime et reconnu d'assurer la sécurité et la stabilité du pays. Et c'est à lui qu'appartiendrait également de solliciter le soutien des pays étrangers dont il a besoin.
Qu'est ce que vous entendez par là ?
J'entends par là qu'il reviendrait au gouvernement irakien et non pas à une autre partie de faire appel à un certain nombre de pays et solliciter auprès d'eux un soutien pour former à nouveau la police locale et l'armée qui sont essentielles pour la sécurité et la stabilité d'un quelconque pays.
Le président Jacques Chirac a évoqué la nécessité qu'il y ait " une période de transition " après le 30 juin. Comment pourrait-on envisager la mise en place de cette transition ?
Le premier élément de cette transition, c'est le rôle que doivent avoir les institutions dans le pays. A partir du moment où un gouvernement irakien légitime sera mis en place et où les Nations unies se verront accorder le premier rôle en Irak, c'est à cette période-là que nous sortirons d'une situation animée par les conflits. Dès lors, nous entrerons dans une nouvelle phase.
Il y a par ailleurs l 'élément psychologique. A ce propos, les Irakiens doivent prendre conscience qu'ils sont passés à une nouvelle étape, celle de la reconstruction du pays. Par ailleurs, les pays étrangers pourraient participer à cette reconstruction, et ceci en respectant la souveraineté du pays. Cette contribution ne peut se faire qu'à la demande expresse du gouvernement irakien souverain.
Est-ce que vous entendez par là que les forces de l'Alliance et les forces américaines pourraient jouer un rôle en Irak après le 30 juin ?
Cette question devra être posée au gouvernement irakien qui seul pourra engager des discussions avec les autorités américaines et celles de l'Alliance.
Sous quel contrôle seraient mises les forces internationales en Irak? Est-ce que celles-ci doivent dépendre de l'ONU ?
Les Nations unies ont la responsabilité des forces qui sont sous son contrôle. Prenons l'exemple de la Côte d'Ivoire : nous avons des forces locales mais aussi des forces françaises qui sont présentes à la demande du gouvernement local et avec l'accord de la communauté internationale. Des forces dépendants des Nations unies sont également présentes sur ce terrain. Et chacune de ces forces est dépendante d'une délégation qui lui est attribuée.
Est-ce que vous entendez par là qu'il est nécessaire d'avoir des forces militaires irakiennes, américaines et internationales dans le pays ?
Cette question doit être traitée par le gouvernement irakien, les Nations unies et par les pays de l'Alliance. Il n'appartient pas à la France d'intervenir sur ce sujet.
La France constitue un membre actif de l'alliance de l'atlantique nord. Est-ce que l'alliance aura un rôle sécuritaire dans le pays ?
Jusqu'à ce jour, aucune décision n'a été pris à ce sujet. Par ailleurs, cela n'est pas à l'ordre du jour. S'agissant de la période de l'après-30 juin, il est possible que des pourparlers soient engagés concernant le rôle de l'Alliance dans le pays. Mais un ensemble de conditions doivent être remplies pour cela. La première de ces conditions consiste en la mise en place d'un gouvernement irakien légitime et que les Nations unies se voient attribuer un rôle dominant dans le pays. Et enfin, il n'est pas envisageable que l'Alliance intervienne en Irak si cela ne répond pas à une demande exprimée par le gouvernement irakien lui-même.
Est-ce que la France voudrait voir les pays arabes et musulmans prendre rang parmi les forces internationales afin d'assurer la sécurité et la stabilité en Irak ?
Je pense qu'il est primordial qu'un grand nombre de pays comptent parmi ces forces, et cela doit se faire à l'initiative des Nations unies. Cela est essentiel non pas pour des raisons matérielles mais pour des raisons morales, d'autant plus que tous les pays du monde sont concernés par les évènements en Irak.
Est-ce que vous êtes prêts à envoyer des forces en Irak ?
Non, certainement pas. Nous avons bien dit que nous sommes prêts à apporter notre concours pour former la police locale, la gendarmerie et l'armée du pays avec l'aide de l'Allemagne et d'autres pays. S'agissant de l'envoi de forces armées en Irak, c'est une question qui n'est pas à l'ordre du jour.
Propos recueillis par Michel Abou-Najem
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 25 mai 2004)