Texte intégral
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Maire de Givors,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Je suis très heureux de présider cette première signature d'une convention consacrant chronologiquement la première scène conventionnée de Rhône Alpes.
Abraham Bengio tenait beaucoup à ce que je puisse être présent aujourd'hui et je dois dire que la puissance dialectique de notre directeur régional, conjuguée - bien sûr - à l'excellence des contenus m'ont très naturellement décidé.
Premier, donc, des 9 établissements choisis dans la région Rhône-Alpes, Givors inaugure une "nouvelle vague", une "nouvelle famille" peut-être, dans la longue histoire des appellations ou des labels de notre ministère : "les scènes conventionnées". Derrière ce programme national ambitieux, 150 structures de création et de diffusion retenues dans les 3 années à venir, il faut souligner le sens profond de cette reconnaissance :
On peut dire que les Scènes conventionnées sont les derniers enfants d'un couple de plus en plus "uni" celui de la déconcentration et de la décentralisation.
Si l'on ne devait retenir qu'une chose de l'histoire culturelle de ces vingt dernières années ce serait cela ; la montée en puissance continue des DRAC liée à l'engagement croissant des collectivités en matière artistique et culturelle. Cette dernière période s'est écrite sous le sceau du partenariat et l'ensemble du champ culturel ne peut plus s'inscrire durablement que dans la responsabilité publique partagée.
Les "théâtres municipaux" ou encore " théâtres de ville" comme certains veulent les appeler n'avaient pas attendu l'intervention de l'Etat pour - au-delà des institutions - constituer une formidable réseau de diffusion - (et de plus en plus de création) - qui fait de notre pays une exception.
C'est ce grand ensemble qui depuis une décennie, s'est organisé, a recherché d'autres formes d'organisation, de production, à innové dans sa relation aux publics et aux territoires, qui a su penser simultanément, son devoir de proximité, son exigence de qualité, et son obligation d'ouverture.
Il représente à mes yeux une position avancée de la décentralisation dans toutes ses composantes et mérite évidemment à ce titre un soutien appuyé de notre ministère.
Personnellement, très attentif à ce "pays réel de la culture", aux mouvements, aux initiatives multiples et passionnantes qui le caractérisent aujourd'hui, et parfois très inquiet devant certaines attitudes, certaines déclarations nostalgiques ou conservatrices de tel ou tel en matière de politique culturelle, je veux vous dire ici - beaucoup plus que mon intérêt - mon engagement sur ce territoire-là, ma conviction que cette démarche là est juste et irréversible.
Ici, à Givors, les aspirations de la Ville sont parfaitement en phase avec ces convictions. " Les Saisons " sont installées dans la Cité des étoiles, construite par Jean Renaudie et ce n'est pas anecdotique. La construction de cet ensemble architectural était un acte de confiance dans l'avenir dans un moment difficile et douloureux, celui de la désindustrialisation de Givors. Elle s'inscrivait dans un mouvement issu des avant-gardes du début du siècle, avec l'ambition de faire converger le projet politique d'émancipation sociale avec celui de l'art pour tous. Ce fut aussi le fruit d'une longue réflexion et de débats passionnés.
Aujourd'hui, trente ans plus tard, le centre-ville est travaillé par des mutations profondes et la réhabilitation des Etoiles de Renaudie est engagée. Givors va redevenir un laboratoire, non pour élaborer une nouvelle utopie mais pour essayer de répondre à des questions qui ne sont pas seulement givordines et que Jacky Vieux, directeur de l'institut pour l'art et la ville pose en ces termes : quelle urbanité démocratique favoriser ? quelle citoyenneté locale ? comment vivre ensemble avec la multiplication des différences ?
Il s'agit bien là de questions culturelles et " Les saisons ", scène conventionnée pour l'action culturelle, s'inscrit dans ce travail culturel de la ville sur elle-même. C'est l'objet même de ce conventionnement où le projet artistique se donne pour mission la transformation des systèmes de représentations que peuvent avoir les habitants de Givors sur l'art et la culture. Il s'adresse " non seulement aux groupes familiers du spectacle vivant mais aussi à ceux que les circonstances ont tenu éloignés des pratiques artistiques ".
Le théâtre de Givors conjugue soutien à la création contemporaine, ateliers de pratique artistique, " ateliers du regard " pour les acteurs éducatifs et sociaux, politique tarifaire afin d'irriguer l'ensemble du territoire de la ville et de s'adresser à toute la population. Nous savons tous combien ces démarches sont exigeantes et demandent une grande détermination dans des territoires qui ont particulièrement souffert des grandes mutations économiques des cinquante dernières années. C'est pourquoi, et le texte de la convention le souligne, il est nécessaire de faire appel aux artistes les plus exigeants et les plus rigoureux dans leur démarche de création.
Je souhaite que cette convention, et les moyens financiers qui l'accompagneront sur trois ans, permettent au Théâtre de Givors de poursuivre et de renforcer ses actions, d'innover, d'inventer pour nourrir le débat démocratique dans la ville et sur la ville. Il incarnera ainsi ce sur quoi je m'engagerai tout au long de mon mandat ministériel : une décentralisation de partenariat, de dialogue et de responsabilité partagée au service de la démocratie culturelle.
( Source http://www.culture.gouv.fr, le 3 juillet 2000)