Texte intégral
Monsieur le Ministre,
Messieurs les Sénateurs,
Messieurs les Députés,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Monsieur le Président du Conseil général,
Mesdames et Messieurs les Maires et les Elus,
Mesdames et Messieurs,
Dans la vallée de la Vézère, la présence de l'Homme est inscrite depuis l'aube des temps.
Oui, ici, l'on peut dire en toute connaissance de cause, selon l'expression du grand paléontologue Yves Coppens, " ce qu'est l'homme et d'où il vient ". Ici, l'on sait dans quelle histoire, celle de la vie, s'inscrit " l'odyssée de l'espèce " que tant de témoignages rassemblés dans ce musée unique au monde, nous racontent sur les lieux mêmes où nos lointains ancêtres vivaient depuis 400 000 ans.
Tout autour, en effet, ont été découverts depuis le milieu du XIXe siècle, parfois au hasard, parfois dans le cadre de prospections plus organisées, des grottes ornées, de simples abris ou de grands gisements qui ont fait à chaque découverte progresser à la fois la connaissance et la vision du destin de l'humanité.
Car c'est ici, au confluent de la Vézère et de la Beune, qu'est née la science de la préhistoire, dont on peut dire ce qu'Yves Coppens a écrit de la paléontologie : elle est " une science qui se doit de rêver pour comprendre ". Ce magnifique musée national de la préhistoire nous permet et de rêver et de comprendre. Et il n'est pas besoin d'être savant pour être profondément ému par ces preuves de la très haute ancienneté de l'homme, que Boucher de Perthes appelait " antédiluvien ", avant que la notion d'évolution humaine soit universellement acceptée. L'homme qui a survécu à l'alternance d'au moins une vingtaine de cycles glaciaires et interglaciaires au cours de l'ère quaternaire, qui ont façonné les paysages que nous connaissons aujourd'hui et l'héritage commun de l'humanité. Un héritage qui n'est pas seulement génétique ou biologique, car il est autant naturel que culturel et il est artistique aussi, comme le prouvent les uvres d'art rupestres et les objets présentés ici.
C'est parce que cet héritage n'est pas seulement celui du Périgord, de la France, ni même de l'Europe, mais bien parce qu'il appartient à l'humanité tout entière, qu'il a été, dès 1979, inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. Les grottes ornées de la vallée de la Vézère, la vallée de l'Homme, figurent en effet au deuxième rang sur cette liste prestigieuse, juste après la cathédrale de Chartres et avant les grottes d'Altamira, en Espagne, qui y ont été inscrites en 1985.
L'histoire des découvertes successives qui ont eu lieu ici, depuis la fouille de la grotte Richard par Edouard LARTET et Henri CHRISTY, en 1863 et celle de l'abri Cro-Magnon en 1868, est aussi l'histoire de la reconnaissance de l'art pariétal, des pratiques funéraires et d'une expression symbolique chez les premiers hommes. Une expression qui fit l'objet de débats passionnés et des plus vives polémiques, parce qu'elle remettait en cause bien des certitudes et interroge ce qu'il y a de plus profond dans l'homme. Au fur et à mesure que les connaissances progressent et la science préhistorique française continue à apporter une contribution déterminante au décryptage de l'évolution de l'humanité, ces interrogations demeurent. Elles saisissent encore le visiteur confronté au regard de pierre de " l'homme primitif " de Dardé qui surplombe la Vézère, sur le flanc de ce musée.
Je tiens à rendre hommage à tous les précurseurs et à toutes les institutions qui ont été les acteurs de ces découvertes et de leur protection.
La loi de 1913 sur les monuments historiques facilitait la protection des sites archéologiques. Il fallait un musée pour mettre à l'abri et présenter les collections. C'est donc dès 1913 que Denis PEYRONY, ancien instituteur, chargé de mission au Ministère des Beaux-Arts, crée le premier musée de préhistoire des Eyzies, où il pratiquait des fouilles depuis des années avec l'abbé BREUIL et le docteur CAPITAN.
Il fit acheter par l'Etat les ruines du château des Eyzies pour y installer un dépôt de fouilles et un musée " national " de Préhistoire, dans lequel entre sa propre collection, dont la majeure partie des séries lithiques et d'industrie osseuse de la grotte de la Madeleine. L'archéologue a également constitué un important fonds photographique de plus de 400 négatifs sur les fouilles et sur les collections du musée.
Il milite par ailleurs pour faire de la vallée de la Vézère un important centre de tourisme culturel. Dès 1920, le village possède son syndicat d'initiative et la grotte de Font de Gaume est électrifiée en vue de son ouverture ou public C'est dire ce que le nouveau musée que nous inaugurons, mais aussi le Pôle international de préhistoire qui accompagne aujourd'hui son ouverture aux publics doivent à cette figure de conservateur, d'archéologue et de pionnier du tourisme.
Le Pôle international de Préhistoire, a été créé en 2002 sous la forme d'un groupement d'intérêt public associant l'Etat, la région Aquitaine et le département de la Dordogne, pour valoriser les sites préhistoriques de la vallée, l'accueil des visiteurs et la mise en place d'outils de médiation destinés à favoriser pour tous les publics, mais en particulier le public scolaire, l'accès aux connaissances dans le domaine de la Préhistoire et des sciences de l'histoire de l'Homme.
Il me semble que nous nous rapprochons là de l'ambition, à la fois scientifique et pédagogique, du fondateur du musée des Eyzies, Denis PEYRONY, et je me réjouis que le musée national soit, dès sa réouverture au public, le pilier principal de cette coopération entre les collectivités territoriales et l'Etat.
C'est le fils de Didier PEYRONY, Elie PEYRONY, qui va diriger le musée pendant trente ans à partir de 1936, poursuivra cette uvre magnifique en portant, toutefois, les efforts du musée davantage vers l'accueil des chercheurs, pendant que les visiteurs affluent, en raison du développement du tourisme et de la découverte fortuite, en 1940, de la grotte de Lascaux, puis de celle de Rouffignac en 1956.
Il fallait préserver Lascaux et sa fermeture, en 1963, entraîne un regain d'intérêt pour les Eyzies. Les salles permanentes furent entièrement réorganisées après la nomination de Jean GUICHARD comme conservateur en 1967 et le rattachement de l'établissement à la direction des musées de France en 1972. Tout en posant dès 1973 les jalons d'une nouvelle extension du musée, Jean GUICHARD mène cette rénovation complète qui s'achève en 1979 avec l'ouverture de la grande salle de morphotypologie de l'industrie lithique destinée à permettre au grand public de comprendre les classifications des préhistoriens.
Pour relever le défi du rayonnement mondial qu'entraîne l'inscription des sites de la vallée sur la liste de l'UNESCO, le ministère de la culture décide le lancement d'une nouvelle extension. Le musée national des Eyzies, grâce aux collaborations nouées avec les grands organismes de recherche de la région - le Centre national de Préhistoire, l'Institut du quaternaire de l'Université de Bordeaux, le Service régional et le service départemental de l'archéologie, - grâce aussi à la nomination en 1988 d'un nouveau directeur, Jean-Jacques CLEYET-MERLE, connaît ainsi un nouveau développement de ses collections.
Il conserve désormais et enrichit de manière continue des séries d'intérêt mondial dans le domaine de la paléontologie, de l'art, des industries lithiques et osseuses. Porté par l'essor de la science préhistorique, il se devait de présenter ces collections exceptionnelles dans le cadre d'un projet scientifique, culturel et muséographique nouveau, afin de rendre intelligibles les grandes étapes de l'aventure humaine au sein d'une région d'un intérêt exceptionnel pour tous ceux que la Préhistoire passionne.
L'intérêt des collectivités locales, de la Région et du département pour la mise en valeur de la Vallée de la Vézère plaidait aussi en faveur de la construction d'un musée entièrement nouveau.
Un concours d'architecture est lancé en 1984, que remporte Jean-Pierre BUFFI auquel nous devons donc les beaux bâtiments, si bien inscrits dans la falaise et dans le village des Eyzies, que nous inaugurons aujourd'hui. Après de fructueuse fouilles de sauvetage entre 1989 et 1991, justifiées par l'implantation sur un site archéologique très important, et diverses opérations de sécurité, les travaux de construction proprement dit ont commencé en 1995.
Le bâtiment était achevé fin 2002. Les aménagements muséographiques, particulièrement délicats, en raison notamment du tri très complexe des 18 000 objets exposés, en raison également de l'enrichissement continu des collections, auront quant à eux duré un peu plus de deux ans.
C'est beaucoup de temps, dit-on, mais si peu au regard de l'histoire qui nous est contée ici, et c'est tout à fait raisonnable, me semble-t-il, pour un établissement qui compte parmi les très rares grands musées entièrement dévolus à la Préhistoire ancienne en Europe, et probablement l'un des plus réussis. Avec plus de 3600 m2 de surfaces nouvelles, dont 1450 m2 de galeries d'exposition permanente ou temporaire, il dote la capitale mondiale de la préhistoire d'un foyer de rayonnement exceptionnel.
Cette réussite nous la devons bien sûr à Jean-Jacques CLEYET-MERLE, directeur du musée, et à toute son équipe qui ont travaillé sur ce projet en liaison étroite avec un comité scientifique international présidé par Jean-Philippe RIGAUD, ancien directeur du Centre national de la Préhistoire de Périgueux.
Nous la devons également à Jean-Pierre BUFFI, qui a réussi merveilleusement cette confrontation avec un paysage marqué par la présence d'une grande falaise donnant sur une vaste vallée et un village faisant contrepoids à la verticalité d'un château médiéval. Le pari était difficile compte tenu des nombreuses contraintes liées notamment à la nature du sol, à l'exiguïté de la parcelle et à l'incroyable dénivelé.
Je voudrais saluer également le remarquable travail accompli par les muséographes de l'agence HB Design, Roberto BENAVENTE et Christian VALDES, et par l'atelier TER BEKKE-BEHAGE pour la signalétique. Mes remerciements vont également au maître d'ouvrage délégué de ce projet, la S.E.MI.P.E.R., que préside M. le Sénateur Bernard CAZEAU, qui a accompli là, dans des conditions parfois difficiles, un remarquable travail de coordination des entreprises.
Je voudrais remercier enfin et féliciter également de l'attention incessante qu'ils ont portée à cette grande opération nationale, depuis son lancement il y a vingt ans, les responsables successifs de la Direction des musées de France et de la Direction régionale des affaires culturelles d'Aquitaine, ainsi que leurs services.
Au-delà de ses missions patrimoniales et de recherche qu'il est maintenant en mesure de poursuivre dans les meilleures conditions, le nouveau musée national de Préhistoire des Eyzies-de-Tayac doit assurer un travail tout aussi essentiel d'accueil et de diffusion culturelle auprès du plus large public.
Je pense en particulier aux jeunes générations, et aux touristes de toutes origines nombreux dans la région.
L'attrait de cette vallée pour les visiteurs du monde entier me paraît exemplaire du rôle que notre patrimoine, et nos musées, jouent dans le développement de nos territoires.
Si la France est la première destination touristique mondiale, si elle accueille 75 millions de touristes chaque année, ce qui représente une immense richesse, au-delà de la contribution, de l'ordre de 7 % à notre produit intérieur brut, c'est-à-dire à la croissance et à l'emploi, c'est en grande partie grâce à la force d'attraction de notre patrimoine et à sa capacité à répondre à la soif de découvertes, de connaissances, de curiosité, de tous ces citoyens du monde, citoyens de la culture.
Qu'il s'agisse de visiteurs étrangers ou français, le tourisme culturel constitue l'un des modes d'accès à la culture, qui participe le plus à son ouverture à tous les publics. Je préfère ce mot d'ouverture à celui de démocratisation. Car la culture est par essence démocratique, en un double sens : elle est une exigence et elle appartient à tous.
Cette volonté de toucher le plus large public est incluse dans l'exigence du service public de la culture. Une exigence de qualité qui est au fondement de la rencontre entre la culture et le tourisme. Et qui s'inscrit dans une éthique, comme ici, dans la vallée de la Vézère, dans cette belle région chère à notre cur, où tous les partenaires réunis autour du musée ont le souci permanent du développement durable.
C'est avec ce souci que les musées et notre patrimoine demeureront des lieux d'excellence, des lieux de transmission du savoir, des lieux d'éducation, des lieux d'intégration et de cohésion sociale.
Des lieux porteurs de la vocation universelle de la culture.
Le musée national de la préhistoire, qui expose toute l'histoire de l'homme de 400 000 ans à 8 000 ans avant notre ère, est tout à fait exemplaire de cette vocation.
Je tenais à vous le dire et à vous en remercier.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 20 août 2004)
Messieurs les Sénateurs,
Messieurs les Députés,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Monsieur le Président du Conseil général,
Mesdames et Messieurs les Maires et les Elus,
Mesdames et Messieurs,
Dans la vallée de la Vézère, la présence de l'Homme est inscrite depuis l'aube des temps.
Oui, ici, l'on peut dire en toute connaissance de cause, selon l'expression du grand paléontologue Yves Coppens, " ce qu'est l'homme et d'où il vient ". Ici, l'on sait dans quelle histoire, celle de la vie, s'inscrit " l'odyssée de l'espèce " que tant de témoignages rassemblés dans ce musée unique au monde, nous racontent sur les lieux mêmes où nos lointains ancêtres vivaient depuis 400 000 ans.
Tout autour, en effet, ont été découverts depuis le milieu du XIXe siècle, parfois au hasard, parfois dans le cadre de prospections plus organisées, des grottes ornées, de simples abris ou de grands gisements qui ont fait à chaque découverte progresser à la fois la connaissance et la vision du destin de l'humanité.
Car c'est ici, au confluent de la Vézère et de la Beune, qu'est née la science de la préhistoire, dont on peut dire ce qu'Yves Coppens a écrit de la paléontologie : elle est " une science qui se doit de rêver pour comprendre ". Ce magnifique musée national de la préhistoire nous permet et de rêver et de comprendre. Et il n'est pas besoin d'être savant pour être profondément ému par ces preuves de la très haute ancienneté de l'homme, que Boucher de Perthes appelait " antédiluvien ", avant que la notion d'évolution humaine soit universellement acceptée. L'homme qui a survécu à l'alternance d'au moins une vingtaine de cycles glaciaires et interglaciaires au cours de l'ère quaternaire, qui ont façonné les paysages que nous connaissons aujourd'hui et l'héritage commun de l'humanité. Un héritage qui n'est pas seulement génétique ou biologique, car il est autant naturel que culturel et il est artistique aussi, comme le prouvent les uvres d'art rupestres et les objets présentés ici.
C'est parce que cet héritage n'est pas seulement celui du Périgord, de la France, ni même de l'Europe, mais bien parce qu'il appartient à l'humanité tout entière, qu'il a été, dès 1979, inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. Les grottes ornées de la vallée de la Vézère, la vallée de l'Homme, figurent en effet au deuxième rang sur cette liste prestigieuse, juste après la cathédrale de Chartres et avant les grottes d'Altamira, en Espagne, qui y ont été inscrites en 1985.
L'histoire des découvertes successives qui ont eu lieu ici, depuis la fouille de la grotte Richard par Edouard LARTET et Henri CHRISTY, en 1863 et celle de l'abri Cro-Magnon en 1868, est aussi l'histoire de la reconnaissance de l'art pariétal, des pratiques funéraires et d'une expression symbolique chez les premiers hommes. Une expression qui fit l'objet de débats passionnés et des plus vives polémiques, parce qu'elle remettait en cause bien des certitudes et interroge ce qu'il y a de plus profond dans l'homme. Au fur et à mesure que les connaissances progressent et la science préhistorique française continue à apporter une contribution déterminante au décryptage de l'évolution de l'humanité, ces interrogations demeurent. Elles saisissent encore le visiteur confronté au regard de pierre de " l'homme primitif " de Dardé qui surplombe la Vézère, sur le flanc de ce musée.
Je tiens à rendre hommage à tous les précurseurs et à toutes les institutions qui ont été les acteurs de ces découvertes et de leur protection.
La loi de 1913 sur les monuments historiques facilitait la protection des sites archéologiques. Il fallait un musée pour mettre à l'abri et présenter les collections. C'est donc dès 1913 que Denis PEYRONY, ancien instituteur, chargé de mission au Ministère des Beaux-Arts, crée le premier musée de préhistoire des Eyzies, où il pratiquait des fouilles depuis des années avec l'abbé BREUIL et le docteur CAPITAN.
Il fit acheter par l'Etat les ruines du château des Eyzies pour y installer un dépôt de fouilles et un musée " national " de Préhistoire, dans lequel entre sa propre collection, dont la majeure partie des séries lithiques et d'industrie osseuse de la grotte de la Madeleine. L'archéologue a également constitué un important fonds photographique de plus de 400 négatifs sur les fouilles et sur les collections du musée.
Il milite par ailleurs pour faire de la vallée de la Vézère un important centre de tourisme culturel. Dès 1920, le village possède son syndicat d'initiative et la grotte de Font de Gaume est électrifiée en vue de son ouverture ou public C'est dire ce que le nouveau musée que nous inaugurons, mais aussi le Pôle international de préhistoire qui accompagne aujourd'hui son ouverture aux publics doivent à cette figure de conservateur, d'archéologue et de pionnier du tourisme.
Le Pôle international de Préhistoire, a été créé en 2002 sous la forme d'un groupement d'intérêt public associant l'Etat, la région Aquitaine et le département de la Dordogne, pour valoriser les sites préhistoriques de la vallée, l'accueil des visiteurs et la mise en place d'outils de médiation destinés à favoriser pour tous les publics, mais en particulier le public scolaire, l'accès aux connaissances dans le domaine de la Préhistoire et des sciences de l'histoire de l'Homme.
Il me semble que nous nous rapprochons là de l'ambition, à la fois scientifique et pédagogique, du fondateur du musée des Eyzies, Denis PEYRONY, et je me réjouis que le musée national soit, dès sa réouverture au public, le pilier principal de cette coopération entre les collectivités territoriales et l'Etat.
C'est le fils de Didier PEYRONY, Elie PEYRONY, qui va diriger le musée pendant trente ans à partir de 1936, poursuivra cette uvre magnifique en portant, toutefois, les efforts du musée davantage vers l'accueil des chercheurs, pendant que les visiteurs affluent, en raison du développement du tourisme et de la découverte fortuite, en 1940, de la grotte de Lascaux, puis de celle de Rouffignac en 1956.
Il fallait préserver Lascaux et sa fermeture, en 1963, entraîne un regain d'intérêt pour les Eyzies. Les salles permanentes furent entièrement réorganisées après la nomination de Jean GUICHARD comme conservateur en 1967 et le rattachement de l'établissement à la direction des musées de France en 1972. Tout en posant dès 1973 les jalons d'une nouvelle extension du musée, Jean GUICHARD mène cette rénovation complète qui s'achève en 1979 avec l'ouverture de la grande salle de morphotypologie de l'industrie lithique destinée à permettre au grand public de comprendre les classifications des préhistoriens.
Pour relever le défi du rayonnement mondial qu'entraîne l'inscription des sites de la vallée sur la liste de l'UNESCO, le ministère de la culture décide le lancement d'une nouvelle extension. Le musée national des Eyzies, grâce aux collaborations nouées avec les grands organismes de recherche de la région - le Centre national de Préhistoire, l'Institut du quaternaire de l'Université de Bordeaux, le Service régional et le service départemental de l'archéologie, - grâce aussi à la nomination en 1988 d'un nouveau directeur, Jean-Jacques CLEYET-MERLE, connaît ainsi un nouveau développement de ses collections.
Il conserve désormais et enrichit de manière continue des séries d'intérêt mondial dans le domaine de la paléontologie, de l'art, des industries lithiques et osseuses. Porté par l'essor de la science préhistorique, il se devait de présenter ces collections exceptionnelles dans le cadre d'un projet scientifique, culturel et muséographique nouveau, afin de rendre intelligibles les grandes étapes de l'aventure humaine au sein d'une région d'un intérêt exceptionnel pour tous ceux que la Préhistoire passionne.
L'intérêt des collectivités locales, de la Région et du département pour la mise en valeur de la Vallée de la Vézère plaidait aussi en faveur de la construction d'un musée entièrement nouveau.
Un concours d'architecture est lancé en 1984, que remporte Jean-Pierre BUFFI auquel nous devons donc les beaux bâtiments, si bien inscrits dans la falaise et dans le village des Eyzies, que nous inaugurons aujourd'hui. Après de fructueuse fouilles de sauvetage entre 1989 et 1991, justifiées par l'implantation sur un site archéologique très important, et diverses opérations de sécurité, les travaux de construction proprement dit ont commencé en 1995.
Le bâtiment était achevé fin 2002. Les aménagements muséographiques, particulièrement délicats, en raison notamment du tri très complexe des 18 000 objets exposés, en raison également de l'enrichissement continu des collections, auront quant à eux duré un peu plus de deux ans.
C'est beaucoup de temps, dit-on, mais si peu au regard de l'histoire qui nous est contée ici, et c'est tout à fait raisonnable, me semble-t-il, pour un établissement qui compte parmi les très rares grands musées entièrement dévolus à la Préhistoire ancienne en Europe, et probablement l'un des plus réussis. Avec plus de 3600 m2 de surfaces nouvelles, dont 1450 m2 de galeries d'exposition permanente ou temporaire, il dote la capitale mondiale de la préhistoire d'un foyer de rayonnement exceptionnel.
Cette réussite nous la devons bien sûr à Jean-Jacques CLEYET-MERLE, directeur du musée, et à toute son équipe qui ont travaillé sur ce projet en liaison étroite avec un comité scientifique international présidé par Jean-Philippe RIGAUD, ancien directeur du Centre national de la Préhistoire de Périgueux.
Nous la devons également à Jean-Pierre BUFFI, qui a réussi merveilleusement cette confrontation avec un paysage marqué par la présence d'une grande falaise donnant sur une vaste vallée et un village faisant contrepoids à la verticalité d'un château médiéval. Le pari était difficile compte tenu des nombreuses contraintes liées notamment à la nature du sol, à l'exiguïté de la parcelle et à l'incroyable dénivelé.
Je voudrais saluer également le remarquable travail accompli par les muséographes de l'agence HB Design, Roberto BENAVENTE et Christian VALDES, et par l'atelier TER BEKKE-BEHAGE pour la signalétique. Mes remerciements vont également au maître d'ouvrage délégué de ce projet, la S.E.MI.P.E.R., que préside M. le Sénateur Bernard CAZEAU, qui a accompli là, dans des conditions parfois difficiles, un remarquable travail de coordination des entreprises.
Je voudrais remercier enfin et féliciter également de l'attention incessante qu'ils ont portée à cette grande opération nationale, depuis son lancement il y a vingt ans, les responsables successifs de la Direction des musées de France et de la Direction régionale des affaires culturelles d'Aquitaine, ainsi que leurs services.
Au-delà de ses missions patrimoniales et de recherche qu'il est maintenant en mesure de poursuivre dans les meilleures conditions, le nouveau musée national de Préhistoire des Eyzies-de-Tayac doit assurer un travail tout aussi essentiel d'accueil et de diffusion culturelle auprès du plus large public.
Je pense en particulier aux jeunes générations, et aux touristes de toutes origines nombreux dans la région.
L'attrait de cette vallée pour les visiteurs du monde entier me paraît exemplaire du rôle que notre patrimoine, et nos musées, jouent dans le développement de nos territoires.
Si la France est la première destination touristique mondiale, si elle accueille 75 millions de touristes chaque année, ce qui représente une immense richesse, au-delà de la contribution, de l'ordre de 7 % à notre produit intérieur brut, c'est-à-dire à la croissance et à l'emploi, c'est en grande partie grâce à la force d'attraction de notre patrimoine et à sa capacité à répondre à la soif de découvertes, de connaissances, de curiosité, de tous ces citoyens du monde, citoyens de la culture.
Qu'il s'agisse de visiteurs étrangers ou français, le tourisme culturel constitue l'un des modes d'accès à la culture, qui participe le plus à son ouverture à tous les publics. Je préfère ce mot d'ouverture à celui de démocratisation. Car la culture est par essence démocratique, en un double sens : elle est une exigence et elle appartient à tous.
Cette volonté de toucher le plus large public est incluse dans l'exigence du service public de la culture. Une exigence de qualité qui est au fondement de la rencontre entre la culture et le tourisme. Et qui s'inscrit dans une éthique, comme ici, dans la vallée de la Vézère, dans cette belle région chère à notre cur, où tous les partenaires réunis autour du musée ont le souci permanent du développement durable.
C'est avec ce souci que les musées et notre patrimoine demeureront des lieux d'excellence, des lieux de transmission du savoir, des lieux d'éducation, des lieux d'intégration et de cohésion sociale.
Des lieux porteurs de la vocation universelle de la culture.
Le musée national de la préhistoire, qui expose toute l'histoire de l'homme de 400 000 ans à 8 000 ans avant notre ère, est tout à fait exemplaire de cette vocation.
Je tenais à vous le dire et à vous en remercier.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 20 août 2004)