Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Président de la Délégation pour l'Union européenne,
Messieurs les Sénateurs, chers collègues,
Chers amis,
A moins de dix jours de l'entrée effective dans l'Union européenne de dix nouveaux Etats membres, je suis particulièrement heureux d'accueillir au Sénat nos futurs ambassadeurs.
J'emploie ce possessif, que d'aucun pourrait trouver familier ou exagéré, car l'Europe est pour moi une grande famille, dont vous êtes désormais membres à part entière. Et, au risque de paraître vieux jeu, je crois en la famille en général et en la famille européenne en particulier. Tel est le sens de mon invitation d'aujourd'hui.
Ce déjeuner de famille, avec certes quelques jours d'avance, n'a d'autre objectif que de célébrer l'élargissement de l'Union européenne et de fêter ce que j'appellerai les retrouvailles de l'Europe.
Comme beaucoup de familles, en effet, l'Europe a longtemps été divisée. Après avoir vaincu la barbarie nazie, l'Europe semblait immuable dans ses divisions, incarnées par cet abominable rideau de fer qui la coupait en deux, condamnant les peuples à la séparation, quand ce n'était pas, pour trop d'entre eux, à la répression et à l'arbitraire.
Il y a seulement quinze ans, quelques mois avant la chute du mur de Berlin, en ce grand jour de novembre 1989, qui aurait crû que huit des dix pays que vous représentez, qui souffraient alors encore du joug soviétique, rejoindraient si rapidement l'Union européenne.
Et pourtant, c'est aujourd'hui chose faite, grâce, il faut bien le dire -saluons cet exploit-, au courage et à la détermination de vos compatriotes comme de vos gouvernements, qui ont toujours su faire passer l'intérêt de leur pays et de l'Europe avant leurs préoccupations politiciennes. C'est suffisamment rare pour qu'on leur rende hommage.
En une dizaine d'années seulement, la plupart de vos pays ont dû passer d'une gestion centralisée et bureaucratique à une économie de marché, d'un système politique et administratif étatique à un régime fondé sur la liberté individuelle et la concurrence.
Personne ici ne sous-estime les coûts sociaux de transitions aussi brutales. Personne n'ignore ce qu'il a fallu de détermination à vos peuples et à leurs élus pour maintenir le cap.
Sans prétendre comparer nos mérites, je dois cependant rappeler que les Etats membres, qui vous accueillent aujourd'hui, ont fait de leur mieux pour vous faciliter la tâche.
Aux côtés de la Commission européenne, ils ont accompagné leur effort financier en votre faveur d'un investissement humain, en détachant beaucoup de leurs meilleurs fonctionnaires pour former vos cadres aux techniques et aux méthodes européennes.
Plus de 1 000 fonctionnaires, issus des quinze Etats de l'Union européenne ont ainsi rempli cette mission avec enthousiasme, parmi lesquels plus de 150 Français.
Je crois donc pouvoir dire que vos dix pays sont aujourd'hui bien préparés à cette échéance majeure, à cette grande aventure que sont les retrouvailles de l'Europe avec elle-même.
Depuis le Congrès de Vienne, en 1815, jamais l'Europe n'aura connu de transformation aussi fondamentale. Mais en 2004, fort heureusement, cette nouvelle Europe voit le jour sans violence, sans drame et sans guerre.
C'est d'ailleurs la paix qui reste le principal acquis mais aussi le principal dessein de l'Europe.
Puisque nous parlons de l'avenir, et qu'il nous est permis plus que jamais de voir en grand, avec une Union européenne forte de 25 Etats, de près de 500 millions d'habitants et de la deuxième économie du monde, je souhaiterais vous dire un mot de la constitution européenne.
Je voudrais simplement appeler de mes voeux l'adoption rapide du projet de constitution soumis à la Conférence intergouvernementale.
Tout texte, notamment lorsqu'il est technique et austère, est perfectible. J'aurais par exemple préféré que le rôle des parlements nationaux fût davantage renforcé.
Mais le moment me semble venu d'en finir avec la défense à courte vue des intérêts nationaux et de privilégier l'intérêt général -en l'occurrence européen- plutôt que les préoccupations particulières. A chacun de faire sa part de concessions. C'est le propre de la vie en commun ! Je fais confiance à la Présidence irlandaise pour trouver la solution.
Je disais tout à l'heure que la paix est la grande affaire de l'Europe. Un vieux précepte rappelle sagement : " Si tu veux la paix, prépare la guerre ".
Assurément, l'Europe ne veut pas la guerre. Mais pour qu'elle ait, sur la scène internationale, l'influence politique que devrait lui conférer son poids économique et démographique, il lui faut une défense effective, qui puisse être mobilisée rapidement et efficacement, au service de la paix.
Il ne s'agit pas de construire cette défense contre les Etats-Unis, mais bien à leurs côtés. J'insiste sur ce point.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, vous allez demain être dans l'Europe sans être encore dans l'euro. Parce que l'union économique et monétaire est l'un des plus forts ciments de notre identité européenne, avec la constitution et la défense, dont je viens de parler, je forme le voeu que vos pays puissent rapidement rejoindre la zone euro. Je sais que c'est le souhait de beaucoup d'entre vous et je ne doute pas que là aussi vos gouvernements réussiront ce pari.
Mais l'enthousiasme que je ressens à quelques jours d'une date réellement historique me rend prolixe.
Aussi conclurai-je en levant mon verre à l'Europe et à ses dix nouveaux membres.
Longue vie à l'Union européenne !
(source http://www.senat.fr, le 3 mai 2004)
Monsieur le Président de la Délégation pour l'Union européenne,
Messieurs les Sénateurs, chers collègues,
Chers amis,
A moins de dix jours de l'entrée effective dans l'Union européenne de dix nouveaux Etats membres, je suis particulièrement heureux d'accueillir au Sénat nos futurs ambassadeurs.
J'emploie ce possessif, que d'aucun pourrait trouver familier ou exagéré, car l'Europe est pour moi une grande famille, dont vous êtes désormais membres à part entière. Et, au risque de paraître vieux jeu, je crois en la famille en général et en la famille européenne en particulier. Tel est le sens de mon invitation d'aujourd'hui.
Ce déjeuner de famille, avec certes quelques jours d'avance, n'a d'autre objectif que de célébrer l'élargissement de l'Union européenne et de fêter ce que j'appellerai les retrouvailles de l'Europe.
Comme beaucoup de familles, en effet, l'Europe a longtemps été divisée. Après avoir vaincu la barbarie nazie, l'Europe semblait immuable dans ses divisions, incarnées par cet abominable rideau de fer qui la coupait en deux, condamnant les peuples à la séparation, quand ce n'était pas, pour trop d'entre eux, à la répression et à l'arbitraire.
Il y a seulement quinze ans, quelques mois avant la chute du mur de Berlin, en ce grand jour de novembre 1989, qui aurait crû que huit des dix pays que vous représentez, qui souffraient alors encore du joug soviétique, rejoindraient si rapidement l'Union européenne.
Et pourtant, c'est aujourd'hui chose faite, grâce, il faut bien le dire -saluons cet exploit-, au courage et à la détermination de vos compatriotes comme de vos gouvernements, qui ont toujours su faire passer l'intérêt de leur pays et de l'Europe avant leurs préoccupations politiciennes. C'est suffisamment rare pour qu'on leur rende hommage.
En une dizaine d'années seulement, la plupart de vos pays ont dû passer d'une gestion centralisée et bureaucratique à une économie de marché, d'un système politique et administratif étatique à un régime fondé sur la liberté individuelle et la concurrence.
Personne ici ne sous-estime les coûts sociaux de transitions aussi brutales. Personne n'ignore ce qu'il a fallu de détermination à vos peuples et à leurs élus pour maintenir le cap.
Sans prétendre comparer nos mérites, je dois cependant rappeler que les Etats membres, qui vous accueillent aujourd'hui, ont fait de leur mieux pour vous faciliter la tâche.
Aux côtés de la Commission européenne, ils ont accompagné leur effort financier en votre faveur d'un investissement humain, en détachant beaucoup de leurs meilleurs fonctionnaires pour former vos cadres aux techniques et aux méthodes européennes.
Plus de 1 000 fonctionnaires, issus des quinze Etats de l'Union européenne ont ainsi rempli cette mission avec enthousiasme, parmi lesquels plus de 150 Français.
Je crois donc pouvoir dire que vos dix pays sont aujourd'hui bien préparés à cette échéance majeure, à cette grande aventure que sont les retrouvailles de l'Europe avec elle-même.
Depuis le Congrès de Vienne, en 1815, jamais l'Europe n'aura connu de transformation aussi fondamentale. Mais en 2004, fort heureusement, cette nouvelle Europe voit le jour sans violence, sans drame et sans guerre.
C'est d'ailleurs la paix qui reste le principal acquis mais aussi le principal dessein de l'Europe.
Puisque nous parlons de l'avenir, et qu'il nous est permis plus que jamais de voir en grand, avec une Union européenne forte de 25 Etats, de près de 500 millions d'habitants et de la deuxième économie du monde, je souhaiterais vous dire un mot de la constitution européenne.
Je voudrais simplement appeler de mes voeux l'adoption rapide du projet de constitution soumis à la Conférence intergouvernementale.
Tout texte, notamment lorsqu'il est technique et austère, est perfectible. J'aurais par exemple préféré que le rôle des parlements nationaux fût davantage renforcé.
Mais le moment me semble venu d'en finir avec la défense à courte vue des intérêts nationaux et de privilégier l'intérêt général -en l'occurrence européen- plutôt que les préoccupations particulières. A chacun de faire sa part de concessions. C'est le propre de la vie en commun ! Je fais confiance à la Présidence irlandaise pour trouver la solution.
Je disais tout à l'heure que la paix est la grande affaire de l'Europe. Un vieux précepte rappelle sagement : " Si tu veux la paix, prépare la guerre ".
Assurément, l'Europe ne veut pas la guerre. Mais pour qu'elle ait, sur la scène internationale, l'influence politique que devrait lui conférer son poids économique et démographique, il lui faut une défense effective, qui puisse être mobilisée rapidement et efficacement, au service de la paix.
Il ne s'agit pas de construire cette défense contre les Etats-Unis, mais bien à leurs côtés. J'insiste sur ce point.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, vous allez demain être dans l'Europe sans être encore dans l'euro. Parce que l'union économique et monétaire est l'un des plus forts ciments de notre identité européenne, avec la constitution et la défense, dont je viens de parler, je forme le voeu que vos pays puissent rapidement rejoindre la zone euro. Je sais que c'est le souhait de beaucoup d'entre vous et je ne doute pas que là aussi vos gouvernements réussiront ce pari.
Mais l'enthousiasme que je ressens à quelques jours d'une date réellement historique me rend prolixe.
Aussi conclurai-je en levant mon verre à l'Europe et à ses dix nouveaux membres.
Longue vie à l'Union européenne !
(source http://www.senat.fr, le 3 mai 2004)