Interview de M. François Hollande, premier secrétaire du PS au "Journal du dimanche" le 5 octobre 2003, à propos de la polémique faite par le gouvernement autour des 35 heures.

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Média : Le Journal du Dimanche

Texte intégral

Qu'attendez-vous de la commission d'enquête parlementaire sur les 35 heures ? Va-t-elle calmer les esprits ?
Nous n'avons jamais voulu les échauffer mais il n'est pas acceptable que le gouvernement utilise les 35 heures comme prétexte à ses échecs. Le sujet mérite mieux que la polémique. Nous n'avons rien à redouter d'une évaluation globale et rigoureuse des effets de la RTT sur l'emploi, l'organisation du travail ou les comptes publics. Francis Mer parle de 10 milliards d'euros, Alain Lambert de 15, ces chiffres sont à la fois faux et contradictoires. Par une évaluation précise et incontestable, l'enquête parlementaire nous préservera à l'avenir de tout procès en sorcellerie. J'ajoute que les allégements de charge sans contrepartie -accordés hier par Alain Juppé, aujourd'hui par François Fillon- coûtent, eux, près de 10 milliards à la collectivité. La polémique va se retourner comme un boomerang.
Pensez-vous vraiment que le gouvernement veuille abolir les 35 heures ?
Il sait parfaitement que la grande majorité des salariés passés aux 35 heures se mobiliserait contre. S'il repart à l'offensive, c'est qu'il est dans l'impasse par ses choix stratégiques et budgétaires. Il veut mobiliser son électorat le plus droitier alors même qu'il a déjà fait voter, il y a un an, une loi permettant aux entreprises et aux branches de renégocier les 35 heures. Aucune ne l'a fait. Cela prouve bien que la RTT a été intégrée et acceptée comme un progrès de société et un outil économique contre le chômage. La droite en fait un sujet idéologique mais, nous, nous sommes pragmatiques et avons toujours accepté l'idée que, à l'initiative des partenaires sociaux, il y ait des adaptations au fil du temps.
Extrême-gauche, syndicats et même le PRG disent : pas touche à la loi. Ces intégristes ne vont-ils pas vous gêner ?
Je me félicite de cette mobilisation pro-35 heures ! Le gouvernement ne pouvait rendre meilleur service à cette belle idée. Que tous les syndicats, même les plus réticents hier, soient unanimes à la défendre en dit long sur l'état d'esprit des salariés ! Entre LO et la LCR soutenir la réforme de Lionel Jospin, qu'ils brocardaient hier sous prétexte de flexibilité, est un plaisir que je ne pensais pas savourer à la veille des échéances électorales.
Interview accordée à Pascale Amauric du JDD
(Source http://www.partisocialistr.fr, le 7 octobre 2003)