Texte intégral
H. Lauret-. Bonjour A. Lambert.
- "Bonjour H. Lauret."
M. le ministre du Budget, la principale nouvelle de la nuit, c'est l'échec des négociations entre F. Pinault et la justice américaine, sur l'affaire Executive Life. Alors, vous avez quelques heures, Monsieur le Ministre, pour dire si vous - le gouvernement français - acceptez le protocole qui a été conclu par ailleurs, avec le Lyonnais et le CDR, et qui prévoit, je le rappelle, une amende record de 475 millions de dollars que devra acquitter l'Etat français, pour solde de tout compte. Alors ?
- "Ecoutez, à l'heure où nous parlons, je n'ai pas d'information complémentaire sur le dossier, dont je rappelle qu'il ne relève pas de mes attributions, tout ce que je peux vous dire c'est que l'accord ne pèsera pas sur le déficit de l'Etat, puisque des provisions ont été constituées à cette fin dans les structures de défaisance du Crédit Lyonnais, qu'il s'agisse de la PFR ou du CDR, et donc la France a les moyens d'acquitter cette..."
Cette petite fortune Monsieur le Ministre, c'est quand même le contribuable qui va l'acquitter en l'occurrence.
- "Ah ! Mais Le Crédit Lyonnais aura été une catastrophe financière, nous le savons tous, gageons que c'est la dernière."
Alors, ce matin, il est aussi beaucoup question, A. Lambert, du rapport du député de la majorité, G. Carrez, qui, dit-il, veut réhabiliter le travail, plutôt que l'impôt. En fait, l'idée qui est dans l'air c'est celle d'une amnistie fiscale, pour les capitaux qui ont fui la France, qui ont fui l'ISF. Alors, pour faire revenir tout ou partie de ces capitaux, S. Berlusconi en Italie, n'a pas hésité, il a décrété, lui, l'amnistie, d'ailleurs 60 milliards d'euros seraient, ou sont revenus en Italie. Monsieur le Ministre, est-ce que la droite aura le culot politique de l'imiter ? Après tout est-ce que ce qui compte par-dessus tout, aujourd'hui, c'est bien de faire revenir l'argent ?
- "Ecoutez, il n'y a pas de dossier de travail ouvert en France, sur ce sujet. Le Gouvernement n'a pas travaillé sur ce sujet. Moi, je vais demander que nous regardions ce qu'ont fait nos voisins à ce propos. Mais nous n'avons pas encore travaillé sur ce sujet. Mais le rapport Carrez parle d'autre chose : il revalorise le terme de la valeur travail, et c'est le plus important, car le gouvernement est très très attaché à restaurer la dignité, la primauté du travail, et d'ailleurs toutes les lignes du budget pour 2004, en portent l'ambition. La France doit travailler plus pour répartir davantage, et il faut qu'on récompense mieux le travail dans notre pays et permettre à tous d'y avoir accès. Alors sur les questions d'amnistie fiscale..."
Oui, tout de même A. Lambert.
- "Je ne les considère pas comme un tabou. Certains de vos confrères m'ont posé la question hier. J'ai dit que le Gouvernement n'y travaillait pas, je vous le confirme. J'ai dit que je suis pour ma part - puisque c'est dans mes attributions - et à titre personnel tout à fait prêt à y réfléchir. Cela étant, il faut dire dans quelles conditions nous pouvons y travailler. D'abord, je crois qu'il faut que la France soit mature et, donc, il faudrait qu'un minimum de consensus trans-partisan, c'est-à-dire que les principales forces politiques du pays, acceptent d'y travailler de manière sincère ensemble.."
Mais, A. Lambert, vous ne pouvez tout de même pas compter sur l'appui du Parti Socialiste, pour une opération comme celle-ci.
- "Pourquoi accusez-vous le Parti Socialiste de ne pas aimer notre pays autant que nous, et en tout cas faire en sorte que tous les capitaux français disponibles à s'investir en France, pour créer des emplois, puissent être l'objectif partagé par le plus grand nombre ?"
Auriez-vous seulement une majorité à droite ? Sur l'ensemble du spectre à droite, une majorité politique pour une idée comme celle-ci ?
- "Ecoutez, moi pour ma part, je n'y ai pas travaillé, donc je ne peux pas vous répondre. Mais ce n'est pas d'actualité dans les travaux du Gouvernement, encore une fois. Je considère que le Parlement qui est l'institution qui travaille sur l'impôt, est dans son rôle en travaillant sur ce sujet. Mais le Gouvernement, encore une fois, n'a pas ouvert de dossier sur ce sujet."
Mais est-ce que c'est le Gouvernement qui décidera ? Est-ce que c'est l'Assemblée Nationale, ou est-ce que ce n'est pas tout simplement le président de la République lui-même ? On se souvient du débat sur la loi Dutreil précisément, qui prévoit une exonération partielle de l'ISF dans le cas de capitaux qui sont investis dans les entreprises en faveur précisément de l'emploi et du travail. Or, ça a été plus compliqué que ça n'en avait l'air.
- "Ce qu'il faut, c'est créer une vraie société de confiance qui permette aux Français, d'abord de retrouver confiance en eux-mêmes, qu'ils soient convaincus que c'est leur foi dans l'avenir, leur décision de consommer, d'entreprendre, de consacrer leurs capitaux à l'économie française, qui sera le meilleur atout pour le développement de la France. Donc ce qui compte, c'est en effet de pouvoir restaurer cette confiance. S'agissant de questions comme celle dite de l'amnistie fiscale - et gageons que ce n'est pas d'ailleurs le meilleur mot - je crois qu'il faut laisser le Parlement, composé de toutes les sensibilités politiques, y travailler et puis nous verrons bien comment évolue l'état d'esprit de la représentation nationale."
Le ministre du Budget que vous êtes M. Lambert, a-t-il idée des sommes qui pourraient être rapatriées de cette façon, chez nous ?
- "C'est assez controversé. On me dit - mais je n'ai pas une étude complète sur le sujet - que nos voisins ont peut-être été un peu déçus sur le résultat en la matière."
Ah, 60 milliards d'euros en Italie, tout de même !
- "C'est vrai, il demeure que c'est sans doute un peu moins que ce qu'ils escomptaient."
Hier, pour la première fois, Monsieur le Ministre, eh bien les agents, je ne sais pas comment on dit, les personnels du Quai d'Orsay ont fait grève. Manifestement, dans les grands équilibres budgétaires que vous avez définis avec vos collègues ministres, tout le monde se plaint, y compris donc, et pour la première fois de son histoire, le Quai d'Orsay. A priori je dirais que seul le ministère de la Défense jusqu'à présent ne s'est pas manifesté. Est-ce que, au fond, lorsque les ministres et les ministères se plaignent, c'est un bon signe de rigueur ?
- "Non, c'est le signe qu'ils font des efforts pour rationaliser leur gestion. Vous savez, le ministère des Affaires Etrangères dispose, globalement, je dis bien globalement, des moyens nécessaires pour exercer ses attributions. Au sein de l'enveloppe globale que je leur ai attribuée, et qui a été votée par le Parlement, ce ministère a reçu ce qu'il lui fallait. Il peut au sein de cette enveloppe, procéder à tous les redéploiements utiles. Il faut savoir que la France dépense 6 points de produit intérieur brut, ce qui doit représenter entre 80 et 90 milliards d'euros de plus que la moyenne de ses voisins. Ce serait un comble si, avec ces prélèvements supplémentaires, nous n'avions pas les moyens pour accomplir toutes nos missions. Alors sans doute les ministères, et celui des Affaires Etrangères, comme tous les autres, peut-il trouver des marges de progrès dans une meilleure organisation."
Oui, mais, c'est vrai que nous dépensons beaucoup plus que la plupart de nos voisins, et néanmoins A. Lambert on s'aperçoit qu'il y a de grosses difficultés, par exemple dans le domaine de la santé, dans le domaine hospitalier, comme en ce moment avec cette épidémie de bronchiolite par exemple.
- "Je parlais tout à l'heure de l'action de l'Etat. S'agissant des dépenses de santé, nous voyons bien en effet qu'il y a une forte tension. Il demeure que nous avons toujours des progrès à accomplir en terme d'organisation et je crois que nos administrations, là encore, doivent garder confiance en elles-mêmes, dans leurs capacités à se moderniser. Moi je leur propose un beau challenge : c'est d'être aussi performantes que le privé, et lorsqu'elles se seront fixé ce magnifique challenge, elles seront très très fières à nouveau, des missions qu'elles ont reçues, pour lesquelles elles ont été instituées, et vous verrez que le moral de la France reprendra immédiatement."
Le moral de la France n'a pas été le moins du monde touché par l'affaire dite du pacte de stabilité. La France et l'Allemagne, les deux piliers de l'Europe, tout le monde le sait, se sont assis, on peut le dire Monsieur le Ministre, sans vouloir vous offenser, sur le pacte de stabilité. Sur le moment, et avec le recul, maintenant on peut dire que c'est un très mauvais signal, un mauvais coup qui a été porté à l'Europe, beaucoup de gens l'ont dit en tout cas, et le tout, pour échapper à nos propres turpitudes budgétaires. Franchement, A. Lambert, est-ce que vous n'avez pas de regrets, vous qui êtes précisément un adepte d'une gestion budgétaire saine ?
- "Je ne crois pas du tout qu'il s'agisse d'un relâchement, je crois au contraire qu'il s'agit de plus de discipline, et l'accord de nos partenaires européens est d'ailleurs basé sur la confiance. Nous avons pris des engagements forts de bonne discipline, nous les tiendrons car nous sommes attachés à mériter la confiance de nos partenaires. Quels sont nos engagements ? Maîtriser la dépense, nous le disions il y a un instant, celle de l'Etat est tenue à l'euro près, et certains ministères s'en plaignent d'ailleurs. Deuxième engagement : privilégier les réformes de structures. Nous avons déjà réussi la réforme des retraites, nous réussirons celle de l'Assurance Maladie."
Dans un an, M. le Ministre, pas avant.
- "Pour l'été prochain. Troisième engagement, nous engager à mieux utiliser les plus-values fiscales conjoncturelles qui naîtront de la croissance, qui pourront être affectées aux déficits. En fait, l'esprit du pacte demeure. Je pense même, personnellement, qu'il peut sortir renforcé de cette épreuve. D'ailleurs entre nous, tous les textes, et c'est un jeune texte le Pacte de stabilité, tous ces textes ont besoin de l'épreuve du temps, pour s'adapter aux situations les plus diverses, que les circonstances imposent, et une bonne interprétation de la règle, vous verrez, permettra de réconcilier l'analyse économique et l'analyse juridique."
Pourquoi, faudrait-il que certains de nos collègues européens, appliquent la règle, y compris la nouvelle, dès lors que nous n'avons pas appliqué la précédente ?
- "D'abord, il faut que le pacte fonctionne sur la durée du cycle. Le pacte, lorsqu'il se sera appliqué sur la durée totale du cycle.."
Qu'est-ce que vous entendez par-là, A. Lambert ?
- "Ecoutez, pour l'instant nous observons les performances des pays année après année. Ce qui est intéressant, c'est de voir leur comportement sur la durée du cycle économique, puisque chacun sait que l'économie s'apprécie sur un cycle complet. Lorsque le pacte aura connu une application sur l'ensemble du cycle, vous verrez que nous aurons résolu toutes les difficultés. Je veux vous dire que nous sommes très très attachés à marquer notre respect, et notre esprit de solidarité, à l'endroit de nos partenaires dont les finances publiques ont été assainies, et ils l'ont fait parfois au prix d'efforts douloureux..."
Ceux qui ont bien géré.
- "Oui, et ces pays l'ont fait au moment où la France s'en désintéressait, je pense aux années 98 et 2000. Mais ils doivent savoir que nous voulons faire redémarrer nos économies, pour être plus forts tous ensemble, pour renforcer le potentiel de croissance de l'Europe toute entière."
Alors précisément, puisque vous parlez de redémarrage de l'économie, il semble, A. Lambert, et peut-être allez-vous nous le confirmer, qu'il y ait comme de la reprise dans l'air, en ce moment. Est-ce que vous partagez ce relatif optimisme qui émane à la fois des milieux d'affaires, des investisseurs, de la Bourse, d'ailleurs on le voit, ou est-ce que vous faites preuve de plus de prudence ? Quels sont vos pronostics à l'horizon 2004 ?
- "Moi, je crois que la croissance est là, qu'on va pouvoir en percevoir les fruits en 2004, elle poursuit son redressement, c'est près de 1,5 au troisième trimestre 2003, en rythme annuel, et l'amélioration est très nette, du climat des affaires. Pourquoi..."
Merci aux ménages. Merci à la consommation des ménages.
- "Mais ça veut dire que les Français ont une part importante à jouer dans la reprise économique, parce que dès lors qu'ils consomment, dès lors qu'ils investissent, lorsque les entreprises investissent, eh bien ils alimentant la croissance française. Pourquoi avons-nous tous ensemble, des motifs d'espoir pour l'avenir ? Eh bien d'abord parce que le rebond de la consommation des ménages est là, nous venons de le dire, l'activité du commerce de détail poursuit son redressement en octobre et en novembre.."
Et, là, vous espérez qu'en fin d'année, évidemment, ce sera une confirmation avec les fêtes de Noël.
- "Les fêtes de Noël seront le signal décisif de la reprise. Les mises en chantiers de logements s'accélèrent, nous en avons 78 000 mises en chantiers au troisième trimestre, ça représente 5 % de plus sur un an.."
Et quid de l'investissement productif des entreprises ?
- "Les investissements productifs des entreprises repartent, car les entreprises ont des carnets de commandes qui se regarnissent. Elles doivent naturellement être compétitives, elles doivent reconstituer leurs stocks, elles doivent naturellement accroître leurs productions. Les créations d'entreprises d'ailleurs s'envolent, il y a 192 000 créations pures, sur les 9 premiers mois.."
C'est un peu l'effet de la loi Dutreil, ça, d'ailleurs.
- "Sans doute. La production industrielle, je le disais, s'améliore, et puis le retour de la confiance sur les Bourses reflète des anticipations des entreprises."
Donc c'est un ministre du Budget, ce matin, qui est optimiste ?
- "Qui dit aux Français : nous avons pendant un moment traversé une nappe de brouillard, mais l'horizon s'éclaircit. Nous devons nous mettre en ordre de bataille, pour gagner la bataille de la reprise, et je suis confiant."
Strauss-Kahn, c'était le trou d'air, vous c'est la nappe de brouillard. Merci A. Lambert d'avoir été notre invité ce matin.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 2 décembre 2003)
- "Bonjour H. Lauret."
M. le ministre du Budget, la principale nouvelle de la nuit, c'est l'échec des négociations entre F. Pinault et la justice américaine, sur l'affaire Executive Life. Alors, vous avez quelques heures, Monsieur le Ministre, pour dire si vous - le gouvernement français - acceptez le protocole qui a été conclu par ailleurs, avec le Lyonnais et le CDR, et qui prévoit, je le rappelle, une amende record de 475 millions de dollars que devra acquitter l'Etat français, pour solde de tout compte. Alors ?
- "Ecoutez, à l'heure où nous parlons, je n'ai pas d'information complémentaire sur le dossier, dont je rappelle qu'il ne relève pas de mes attributions, tout ce que je peux vous dire c'est que l'accord ne pèsera pas sur le déficit de l'Etat, puisque des provisions ont été constituées à cette fin dans les structures de défaisance du Crédit Lyonnais, qu'il s'agisse de la PFR ou du CDR, et donc la France a les moyens d'acquitter cette..."
Cette petite fortune Monsieur le Ministre, c'est quand même le contribuable qui va l'acquitter en l'occurrence.
- "Ah ! Mais Le Crédit Lyonnais aura été une catastrophe financière, nous le savons tous, gageons que c'est la dernière."
Alors, ce matin, il est aussi beaucoup question, A. Lambert, du rapport du député de la majorité, G. Carrez, qui, dit-il, veut réhabiliter le travail, plutôt que l'impôt. En fait, l'idée qui est dans l'air c'est celle d'une amnistie fiscale, pour les capitaux qui ont fui la France, qui ont fui l'ISF. Alors, pour faire revenir tout ou partie de ces capitaux, S. Berlusconi en Italie, n'a pas hésité, il a décrété, lui, l'amnistie, d'ailleurs 60 milliards d'euros seraient, ou sont revenus en Italie. Monsieur le Ministre, est-ce que la droite aura le culot politique de l'imiter ? Après tout est-ce que ce qui compte par-dessus tout, aujourd'hui, c'est bien de faire revenir l'argent ?
- "Ecoutez, il n'y a pas de dossier de travail ouvert en France, sur ce sujet. Le Gouvernement n'a pas travaillé sur ce sujet. Moi, je vais demander que nous regardions ce qu'ont fait nos voisins à ce propos. Mais nous n'avons pas encore travaillé sur ce sujet. Mais le rapport Carrez parle d'autre chose : il revalorise le terme de la valeur travail, et c'est le plus important, car le gouvernement est très très attaché à restaurer la dignité, la primauté du travail, et d'ailleurs toutes les lignes du budget pour 2004, en portent l'ambition. La France doit travailler plus pour répartir davantage, et il faut qu'on récompense mieux le travail dans notre pays et permettre à tous d'y avoir accès. Alors sur les questions d'amnistie fiscale..."
Oui, tout de même A. Lambert.
- "Je ne les considère pas comme un tabou. Certains de vos confrères m'ont posé la question hier. J'ai dit que le Gouvernement n'y travaillait pas, je vous le confirme. J'ai dit que je suis pour ma part - puisque c'est dans mes attributions - et à titre personnel tout à fait prêt à y réfléchir. Cela étant, il faut dire dans quelles conditions nous pouvons y travailler. D'abord, je crois qu'il faut que la France soit mature et, donc, il faudrait qu'un minimum de consensus trans-partisan, c'est-à-dire que les principales forces politiques du pays, acceptent d'y travailler de manière sincère ensemble.."
Mais, A. Lambert, vous ne pouvez tout de même pas compter sur l'appui du Parti Socialiste, pour une opération comme celle-ci.
- "Pourquoi accusez-vous le Parti Socialiste de ne pas aimer notre pays autant que nous, et en tout cas faire en sorte que tous les capitaux français disponibles à s'investir en France, pour créer des emplois, puissent être l'objectif partagé par le plus grand nombre ?"
Auriez-vous seulement une majorité à droite ? Sur l'ensemble du spectre à droite, une majorité politique pour une idée comme celle-ci ?
- "Ecoutez, moi pour ma part, je n'y ai pas travaillé, donc je ne peux pas vous répondre. Mais ce n'est pas d'actualité dans les travaux du Gouvernement, encore une fois. Je considère que le Parlement qui est l'institution qui travaille sur l'impôt, est dans son rôle en travaillant sur ce sujet. Mais le Gouvernement, encore une fois, n'a pas ouvert de dossier sur ce sujet."
Mais est-ce que c'est le Gouvernement qui décidera ? Est-ce que c'est l'Assemblée Nationale, ou est-ce que ce n'est pas tout simplement le président de la République lui-même ? On se souvient du débat sur la loi Dutreil précisément, qui prévoit une exonération partielle de l'ISF dans le cas de capitaux qui sont investis dans les entreprises en faveur précisément de l'emploi et du travail. Or, ça a été plus compliqué que ça n'en avait l'air.
- "Ce qu'il faut, c'est créer une vraie société de confiance qui permette aux Français, d'abord de retrouver confiance en eux-mêmes, qu'ils soient convaincus que c'est leur foi dans l'avenir, leur décision de consommer, d'entreprendre, de consacrer leurs capitaux à l'économie française, qui sera le meilleur atout pour le développement de la France. Donc ce qui compte, c'est en effet de pouvoir restaurer cette confiance. S'agissant de questions comme celle dite de l'amnistie fiscale - et gageons que ce n'est pas d'ailleurs le meilleur mot - je crois qu'il faut laisser le Parlement, composé de toutes les sensibilités politiques, y travailler et puis nous verrons bien comment évolue l'état d'esprit de la représentation nationale."
Le ministre du Budget que vous êtes M. Lambert, a-t-il idée des sommes qui pourraient être rapatriées de cette façon, chez nous ?
- "C'est assez controversé. On me dit - mais je n'ai pas une étude complète sur le sujet - que nos voisins ont peut-être été un peu déçus sur le résultat en la matière."
Ah, 60 milliards d'euros en Italie, tout de même !
- "C'est vrai, il demeure que c'est sans doute un peu moins que ce qu'ils escomptaient."
Hier, pour la première fois, Monsieur le Ministre, eh bien les agents, je ne sais pas comment on dit, les personnels du Quai d'Orsay ont fait grève. Manifestement, dans les grands équilibres budgétaires que vous avez définis avec vos collègues ministres, tout le monde se plaint, y compris donc, et pour la première fois de son histoire, le Quai d'Orsay. A priori je dirais que seul le ministère de la Défense jusqu'à présent ne s'est pas manifesté. Est-ce que, au fond, lorsque les ministres et les ministères se plaignent, c'est un bon signe de rigueur ?
- "Non, c'est le signe qu'ils font des efforts pour rationaliser leur gestion. Vous savez, le ministère des Affaires Etrangères dispose, globalement, je dis bien globalement, des moyens nécessaires pour exercer ses attributions. Au sein de l'enveloppe globale que je leur ai attribuée, et qui a été votée par le Parlement, ce ministère a reçu ce qu'il lui fallait. Il peut au sein de cette enveloppe, procéder à tous les redéploiements utiles. Il faut savoir que la France dépense 6 points de produit intérieur brut, ce qui doit représenter entre 80 et 90 milliards d'euros de plus que la moyenne de ses voisins. Ce serait un comble si, avec ces prélèvements supplémentaires, nous n'avions pas les moyens pour accomplir toutes nos missions. Alors sans doute les ministères, et celui des Affaires Etrangères, comme tous les autres, peut-il trouver des marges de progrès dans une meilleure organisation."
Oui, mais, c'est vrai que nous dépensons beaucoup plus que la plupart de nos voisins, et néanmoins A. Lambert on s'aperçoit qu'il y a de grosses difficultés, par exemple dans le domaine de la santé, dans le domaine hospitalier, comme en ce moment avec cette épidémie de bronchiolite par exemple.
- "Je parlais tout à l'heure de l'action de l'Etat. S'agissant des dépenses de santé, nous voyons bien en effet qu'il y a une forte tension. Il demeure que nous avons toujours des progrès à accomplir en terme d'organisation et je crois que nos administrations, là encore, doivent garder confiance en elles-mêmes, dans leurs capacités à se moderniser. Moi je leur propose un beau challenge : c'est d'être aussi performantes que le privé, et lorsqu'elles se seront fixé ce magnifique challenge, elles seront très très fières à nouveau, des missions qu'elles ont reçues, pour lesquelles elles ont été instituées, et vous verrez que le moral de la France reprendra immédiatement."
Le moral de la France n'a pas été le moins du monde touché par l'affaire dite du pacte de stabilité. La France et l'Allemagne, les deux piliers de l'Europe, tout le monde le sait, se sont assis, on peut le dire Monsieur le Ministre, sans vouloir vous offenser, sur le pacte de stabilité. Sur le moment, et avec le recul, maintenant on peut dire que c'est un très mauvais signal, un mauvais coup qui a été porté à l'Europe, beaucoup de gens l'ont dit en tout cas, et le tout, pour échapper à nos propres turpitudes budgétaires. Franchement, A. Lambert, est-ce que vous n'avez pas de regrets, vous qui êtes précisément un adepte d'une gestion budgétaire saine ?
- "Je ne crois pas du tout qu'il s'agisse d'un relâchement, je crois au contraire qu'il s'agit de plus de discipline, et l'accord de nos partenaires européens est d'ailleurs basé sur la confiance. Nous avons pris des engagements forts de bonne discipline, nous les tiendrons car nous sommes attachés à mériter la confiance de nos partenaires. Quels sont nos engagements ? Maîtriser la dépense, nous le disions il y a un instant, celle de l'Etat est tenue à l'euro près, et certains ministères s'en plaignent d'ailleurs. Deuxième engagement : privilégier les réformes de structures. Nous avons déjà réussi la réforme des retraites, nous réussirons celle de l'Assurance Maladie."
Dans un an, M. le Ministre, pas avant.
- "Pour l'été prochain. Troisième engagement, nous engager à mieux utiliser les plus-values fiscales conjoncturelles qui naîtront de la croissance, qui pourront être affectées aux déficits. En fait, l'esprit du pacte demeure. Je pense même, personnellement, qu'il peut sortir renforcé de cette épreuve. D'ailleurs entre nous, tous les textes, et c'est un jeune texte le Pacte de stabilité, tous ces textes ont besoin de l'épreuve du temps, pour s'adapter aux situations les plus diverses, que les circonstances imposent, et une bonne interprétation de la règle, vous verrez, permettra de réconcilier l'analyse économique et l'analyse juridique."
Pourquoi, faudrait-il que certains de nos collègues européens, appliquent la règle, y compris la nouvelle, dès lors que nous n'avons pas appliqué la précédente ?
- "D'abord, il faut que le pacte fonctionne sur la durée du cycle. Le pacte, lorsqu'il se sera appliqué sur la durée totale du cycle.."
Qu'est-ce que vous entendez par-là, A. Lambert ?
- "Ecoutez, pour l'instant nous observons les performances des pays année après année. Ce qui est intéressant, c'est de voir leur comportement sur la durée du cycle économique, puisque chacun sait que l'économie s'apprécie sur un cycle complet. Lorsque le pacte aura connu une application sur l'ensemble du cycle, vous verrez que nous aurons résolu toutes les difficultés. Je veux vous dire que nous sommes très très attachés à marquer notre respect, et notre esprit de solidarité, à l'endroit de nos partenaires dont les finances publiques ont été assainies, et ils l'ont fait parfois au prix d'efforts douloureux..."
Ceux qui ont bien géré.
- "Oui, et ces pays l'ont fait au moment où la France s'en désintéressait, je pense aux années 98 et 2000. Mais ils doivent savoir que nous voulons faire redémarrer nos économies, pour être plus forts tous ensemble, pour renforcer le potentiel de croissance de l'Europe toute entière."
Alors précisément, puisque vous parlez de redémarrage de l'économie, il semble, A. Lambert, et peut-être allez-vous nous le confirmer, qu'il y ait comme de la reprise dans l'air, en ce moment. Est-ce que vous partagez ce relatif optimisme qui émane à la fois des milieux d'affaires, des investisseurs, de la Bourse, d'ailleurs on le voit, ou est-ce que vous faites preuve de plus de prudence ? Quels sont vos pronostics à l'horizon 2004 ?
- "Moi, je crois que la croissance est là, qu'on va pouvoir en percevoir les fruits en 2004, elle poursuit son redressement, c'est près de 1,5 au troisième trimestre 2003, en rythme annuel, et l'amélioration est très nette, du climat des affaires. Pourquoi..."
Merci aux ménages. Merci à la consommation des ménages.
- "Mais ça veut dire que les Français ont une part importante à jouer dans la reprise économique, parce que dès lors qu'ils consomment, dès lors qu'ils investissent, lorsque les entreprises investissent, eh bien ils alimentant la croissance française. Pourquoi avons-nous tous ensemble, des motifs d'espoir pour l'avenir ? Eh bien d'abord parce que le rebond de la consommation des ménages est là, nous venons de le dire, l'activité du commerce de détail poursuit son redressement en octobre et en novembre.."
Et, là, vous espérez qu'en fin d'année, évidemment, ce sera une confirmation avec les fêtes de Noël.
- "Les fêtes de Noël seront le signal décisif de la reprise. Les mises en chantiers de logements s'accélèrent, nous en avons 78 000 mises en chantiers au troisième trimestre, ça représente 5 % de plus sur un an.."
Et quid de l'investissement productif des entreprises ?
- "Les investissements productifs des entreprises repartent, car les entreprises ont des carnets de commandes qui se regarnissent. Elles doivent naturellement être compétitives, elles doivent reconstituer leurs stocks, elles doivent naturellement accroître leurs productions. Les créations d'entreprises d'ailleurs s'envolent, il y a 192 000 créations pures, sur les 9 premiers mois.."
C'est un peu l'effet de la loi Dutreil, ça, d'ailleurs.
- "Sans doute. La production industrielle, je le disais, s'améliore, et puis le retour de la confiance sur les Bourses reflète des anticipations des entreprises."
Donc c'est un ministre du Budget, ce matin, qui est optimiste ?
- "Qui dit aux Français : nous avons pendant un moment traversé une nappe de brouillard, mais l'horizon s'éclaircit. Nous devons nous mettre en ordre de bataille, pour gagner la bataille de la reprise, et je suis confiant."
Strauss-Kahn, c'était le trou d'air, vous c'est la nappe de brouillard. Merci A. Lambert d'avoir été notre invité ce matin.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 2 décembre 2003)