Texte intégral
Je suis particulièrement heureuse d'intervenir aujourd'hui dans le cadre de cette manifestation sur la coopération franco-allemande en sciences humaines et sociales.
Je souhaite aussi dédier cette manifestation à la mémoire de Madame Brigitte Sauzay, qui a tant fait pour donner sens à la relation franco-allemande et qui vient de nous quitter.
Je voudrais avant toute chose rappeler le sens de la manifestation qui nous réunit aujourd'hui. Quand il s'est agi de donner une forte dimension recherche aux manifestations de célébration du quarantième anniversaire du traité de l'Elysée, j'ai naturellement pensé aux sciences de l'homme et de la société. Il m'a semblé en effet important à la fois de comprendre et d'analyser la signification profonde de la relation franco-allemande et surtout de la projeter résolument dans l'avenir.
Autant dire que cette journée du 21 novembre 2003 répond parfaitement à ce double objectif.
Nous aurons dans un instant l'opportunité à la fois de mesurer les racines profondes d'une telle relation grâce à l'exposé d'Heinz Wismann et d'écouter des binômes de jeunes chercheurs, qui témoignent- des pistes extrêmement prometteuses qui s'ouvrent.
Ces binômes représentent autant de témoignages de cette culture du projet que j'appelle de mes voeux. Autour de l'islam, autour des politiques publiques, autour de l'immigration, autour de la géographie sociale, ce sont des partenariats scientifiques étroits qui se nouent, des partenariats qui sont à la base de réseaux de recherche extrêmement féconds.
Au-delà des barrières de nationalité ou de langue, au-delà des clivages institutionnels, les chercheurs se sont ainsi rapprochés pour construire des enquêtes communes sur de grands sujets, des sujets qui renvoient à autant d'interrogations aiguës qui traversent nos sociétés.
Il est de notre responsabilité de donner la possibilité à de tels projets de pouvoir se réaliser dans les meilleures conditions.
C'est le sens des actions menées dans le cadre du Fonds National de la Science pour les sciences humaines et sociales. J'en prendrai un certain nombre d'exemples. J'ai ainsi souhaité aussi qu'à partir de cette année, le FNS mette en place, à l'image de ce qui se fait dans les sciences de la vie, des Actions concertées Incitatives généralement baptisées " blanches ", à savoir des ACI complètement ouvertes pour les thématiques et les conditions administratives, permettant le soutien des projets les plus prometteurs.
Je voudrais aussi rappeler le rôle de l'ACI " Internationalisation " pour précisément soutenir des projets de collaboration entre équipes des sciences humaines et sociales d'horizons différents.
Plus largement, c'est pour moi l'occasion de souligner le rôle majeur joué par les maisons des sciences de l'homme et de la société. Nous avons eu la possibilité ce matin de connaître en profondeur les activités de deux Maisons, à savoir l'Institut des Sciences de l'Homme et de la Maison de l'Orient Méditerranéen.
De tels établissements ont à mes yeux trois vocations principales.
La première est de fédérer les équipes de recherche à travers une articulation étroite avec les universités et les organismes de recherche, à commencer bien sûr par le CNRS.
Une deuxième dimension est celle de la mutualisation des moyens. On ne pourra pas dans notre pays faire tout bien, partout. En revanche, on doit faire très bien en des endroits névralgiques, pour l'ensemble de la communauté. La nécessité de contrats d'objectifs, évalués et acceptés de manière collective, est bien au coeur de la notion même de réseau, qui sous-tend une distribution équilibrée des moyens.
La troisième dimension est celle de l'incubation de groupes de jeunes chercheurs. Par leur poids scientifique, des pôles de recherche comme les maisons ont en effet naturellement vocation à voir apparaître puis s'affirmer de nouvelles équipes, qui assureront la vitalité d'ensemble du dispositif.
Je ne saurais oublier de manière parallèle la nécessité pour les Maisons des sciences de l'homme de savoir tisser des opérations fortes de restitution sociale : soit en développant des initiatives de culture scientifique et technique ; soit en travaillant en interaction avec des projets de développement économique et social. Ce matin, j'ai par exemple découvert des travaux d'économie des transports ou de linguistique, de numérisation des données ou de traitement de l'image qui montrent toute l'importance des sciences humaines et sociales dans la construction d'une croissance maîtrisée.
Je sais que les maisons des sciences de l'homme ont déjà tissé des liens forts avec des structures de recherche allemandes mais je crois qu'il faut aller aujourd'hui encore plus loin.
Les sciences humaines et sociales contribuent en effet fortement à consolider la relation franco-allemande.
Avant d'aborder les évolutions les plus récentes et les perspectives de cette coopération, je souhaite revenir un instant sur ses origines car elles renferment à mon sens une vérité première : le caractère fondamental de la connaissance des langues. Les véritables précurseurs de ce que nous célébrons aujourd'hui sont des romanistes allemands et des germanistes français.
Ce simple constat nous rappelle qu'une coopération est d'autant plus riche qu'elle ne met pas de côté la question de la langue en recourant à une quelconque lingua franca. La rencontre entre un sociologue français et un sociologue allemand, entre un historien français et un historien allemand, et, plus encore, entre un philosophe français et un philosophe allemand, c'est d'abord la rencontre entre deux langues, avec tout ce que celle-ci peut avoir de structurant pour l'individu et de décisif dans la constitution du bagage culturel et scientifique des chercheurs. L'Europe ne serait pas l'Europe, c'est-à-dire une entité culturelle et historique, sans cette diversité linguistique.
Je sais d'expérience que, dans un environnement international comme l'est celui des scientifiques de haut niveau, il n'est pas toujours facile de travailler dans plusieurs langues. Gardons-nous donc de tout dogmatisme en la matière et travaillons dans deux directions parallèlement :
- La première consiste à encourager l'apprentissage de l'allemand et du français dans nos deux pays parce que cet apprentissage reste au fondement de la communication et de la compréhension de l'autre,
- La seconde à soutenir les traductions d'essais et de textes en sciences humaines et sociales,
Je saisis cette occasion pour saluer le travail sur les transferts franco-allemands en sciences humaines et sociales réalisé sous la direction de Catherine Colliot-Thélène et de Fritz Nies. Une telle enquête révèle l'étendue des progrès à faire si nous voulons que les communautés scientifiques de nos deux pays partagent à l'avenir un plus grand nombre de références communes. Mais elle témoigne aussi du fait que nous ne sommes jamais allés aussi loin dans la réflexion sur la constitution d'un socle commun de connaissances.
Revenons-en à la chronologie de la coopération franco-allemande. Dans l'ordre de ses promoteurs, juste après les linguistes arrivent - ce n'est pas un hasard non plus - les historiens. Faut-il rappeler qu'entre la France et l'Allemagne, plus qu'entre aucun autre pays, coopération rime avec réconciliation ? Cette coopération a longtemps porté principalement sur l'exploration de notre histoire commune. Elle a longtemps été une relation en miroir. En ce sens elle a sans doute eu une fonction politique indéniable.
La coopération franco-allemande ne se résume cependant plus depuis longtemps à ce face-à-face.
Depuis quelques années, en écho à la chute du Mur et à la réunification allemande, la coopération entre nos deux pays a franchi véritablement un cap. Elle a acquis une maturité nouvelle, qui s'est traduite par la mise en place d'initiatives très efficaces.
Permettez-moi ainsi de rappeler, pour la partie française, le lancement du Centre Marc Bloch il y a dix ans. Ce Centre est particulièrement intéressant d'un point de vue institutionnel et scientifique. Crée par les Ministères de la recherche et des affaires étrangères français, c'est une unité de recherche associée au CNRS, qui bénéficie d'une subvention importante du ministère fédéral de l'éducation et de la recherche pour pouvoir accueillir de jeunes chercheurs allemands.
Je souhaite aussi souligner l'importance du Centre interdisciplinaire d'études et de recherche sur l'Allemagne, le CIERA, créé en 2001, qui a un rôle véritablement structurant pour les études interdisciplinaires sur l'Allemagne.
A côté de ces centres de recherche qui ont fortement contribué à l'organisation de la Journée qui nous réunit aujourd'hui, je voudrais insister sur l'importance de l'Université franco-allemande qui a su développer des formations intégrées avec doubles diplômes dans le champ des sciences humaines et sociales. Une piste véritablement prometteuse dans le cadre de l'européanisation des établissements d'enseignement supérieur.
Alors oui, la relation franco-allemande est une réalité forte du monde de la recherche en sciences humaines et sociales comme elle se nourrit des avancées de tous ces travaux, mais je crois que nous pouvons aller au-delà en resituant cette collaboration si fructueuse dans un horizon plus large.
Faut-il ainsi opposer coopération franco-allemande, et plus généralement coopération bilatérale, et coopération multilatérale ? Il s'agit à mon sens d'une fausse alternative. L'opposition du bilatéral et du multilatéral est, en l'occurrence, un leurre. La coopération franco-allemande s'inscrit culturellement et institutionnellement dans une perspective européenne. Elle entretient en vérité une relation dialectique avec la coopération multilatérale. Les deux dynamiques s'entretiennent l'une l'autre. Elles sont indispensables l'une à l'autre, sans jamais se confondre ni se substituer.
C'est vrai pour la construction politique de l'Europe, comme le montre le rôle joué par le moteur franco-allemand dans l'invention de l'Union européenne. Mais c'est également juste dans le domaine de la science et de la recherche.
Les représentants du Centre Marc Bloch comme les responsables de la Mission historique française en Allemagne, autre institution majeure, ont su nouer par exemple chacun dans leur domaine, des liens avec des chercheurs et des institutions de pays tiers : le Royaume-Uni et la Pologne pour la première, la Pologne encore, mais aussi la République tchèque et la Hongrie pour le second. Et ces deux institutions ne
sont pas des cas isolés. A chaque fois, l'enjeu est le même : la construction d'un espace européen de la recherche.
Pour conclure, je souhaitais donc remercier vivement tous ceux qui se sont mobilisés pour la réussite de cette rencontre. Vous avez tous su montrer l'importance névralgique des liens scientifiques qui rapprochent Allemands et Français. Quand parfois on peut lire ici ou là des réflexions nostalgiques teintées d'un nationalisme exacerbé, nous ne devons avoir nous représentants du monde de la recherche qu'une seule et unique réponse : affirmer la grande mission sociale et politique de la recherche, celle de construire, de vivre au quotidien et de rêver l'Europe de demain.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 4 décembre 2003)
Je souhaite aussi dédier cette manifestation à la mémoire de Madame Brigitte Sauzay, qui a tant fait pour donner sens à la relation franco-allemande et qui vient de nous quitter.
Je voudrais avant toute chose rappeler le sens de la manifestation qui nous réunit aujourd'hui. Quand il s'est agi de donner une forte dimension recherche aux manifestations de célébration du quarantième anniversaire du traité de l'Elysée, j'ai naturellement pensé aux sciences de l'homme et de la société. Il m'a semblé en effet important à la fois de comprendre et d'analyser la signification profonde de la relation franco-allemande et surtout de la projeter résolument dans l'avenir.
Autant dire que cette journée du 21 novembre 2003 répond parfaitement à ce double objectif.
Nous aurons dans un instant l'opportunité à la fois de mesurer les racines profondes d'une telle relation grâce à l'exposé d'Heinz Wismann et d'écouter des binômes de jeunes chercheurs, qui témoignent- des pistes extrêmement prometteuses qui s'ouvrent.
Ces binômes représentent autant de témoignages de cette culture du projet que j'appelle de mes voeux. Autour de l'islam, autour des politiques publiques, autour de l'immigration, autour de la géographie sociale, ce sont des partenariats scientifiques étroits qui se nouent, des partenariats qui sont à la base de réseaux de recherche extrêmement féconds.
Au-delà des barrières de nationalité ou de langue, au-delà des clivages institutionnels, les chercheurs se sont ainsi rapprochés pour construire des enquêtes communes sur de grands sujets, des sujets qui renvoient à autant d'interrogations aiguës qui traversent nos sociétés.
Il est de notre responsabilité de donner la possibilité à de tels projets de pouvoir se réaliser dans les meilleures conditions.
C'est le sens des actions menées dans le cadre du Fonds National de la Science pour les sciences humaines et sociales. J'en prendrai un certain nombre d'exemples. J'ai ainsi souhaité aussi qu'à partir de cette année, le FNS mette en place, à l'image de ce qui se fait dans les sciences de la vie, des Actions concertées Incitatives généralement baptisées " blanches ", à savoir des ACI complètement ouvertes pour les thématiques et les conditions administratives, permettant le soutien des projets les plus prometteurs.
Je voudrais aussi rappeler le rôle de l'ACI " Internationalisation " pour précisément soutenir des projets de collaboration entre équipes des sciences humaines et sociales d'horizons différents.
Plus largement, c'est pour moi l'occasion de souligner le rôle majeur joué par les maisons des sciences de l'homme et de la société. Nous avons eu la possibilité ce matin de connaître en profondeur les activités de deux Maisons, à savoir l'Institut des Sciences de l'Homme et de la Maison de l'Orient Méditerranéen.
De tels établissements ont à mes yeux trois vocations principales.
La première est de fédérer les équipes de recherche à travers une articulation étroite avec les universités et les organismes de recherche, à commencer bien sûr par le CNRS.
Une deuxième dimension est celle de la mutualisation des moyens. On ne pourra pas dans notre pays faire tout bien, partout. En revanche, on doit faire très bien en des endroits névralgiques, pour l'ensemble de la communauté. La nécessité de contrats d'objectifs, évalués et acceptés de manière collective, est bien au coeur de la notion même de réseau, qui sous-tend une distribution équilibrée des moyens.
La troisième dimension est celle de l'incubation de groupes de jeunes chercheurs. Par leur poids scientifique, des pôles de recherche comme les maisons ont en effet naturellement vocation à voir apparaître puis s'affirmer de nouvelles équipes, qui assureront la vitalité d'ensemble du dispositif.
Je ne saurais oublier de manière parallèle la nécessité pour les Maisons des sciences de l'homme de savoir tisser des opérations fortes de restitution sociale : soit en développant des initiatives de culture scientifique et technique ; soit en travaillant en interaction avec des projets de développement économique et social. Ce matin, j'ai par exemple découvert des travaux d'économie des transports ou de linguistique, de numérisation des données ou de traitement de l'image qui montrent toute l'importance des sciences humaines et sociales dans la construction d'une croissance maîtrisée.
Je sais que les maisons des sciences de l'homme ont déjà tissé des liens forts avec des structures de recherche allemandes mais je crois qu'il faut aller aujourd'hui encore plus loin.
Les sciences humaines et sociales contribuent en effet fortement à consolider la relation franco-allemande.
Avant d'aborder les évolutions les plus récentes et les perspectives de cette coopération, je souhaite revenir un instant sur ses origines car elles renferment à mon sens une vérité première : le caractère fondamental de la connaissance des langues. Les véritables précurseurs de ce que nous célébrons aujourd'hui sont des romanistes allemands et des germanistes français.
Ce simple constat nous rappelle qu'une coopération est d'autant plus riche qu'elle ne met pas de côté la question de la langue en recourant à une quelconque lingua franca. La rencontre entre un sociologue français et un sociologue allemand, entre un historien français et un historien allemand, et, plus encore, entre un philosophe français et un philosophe allemand, c'est d'abord la rencontre entre deux langues, avec tout ce que celle-ci peut avoir de structurant pour l'individu et de décisif dans la constitution du bagage culturel et scientifique des chercheurs. L'Europe ne serait pas l'Europe, c'est-à-dire une entité culturelle et historique, sans cette diversité linguistique.
Je sais d'expérience que, dans un environnement international comme l'est celui des scientifiques de haut niveau, il n'est pas toujours facile de travailler dans plusieurs langues. Gardons-nous donc de tout dogmatisme en la matière et travaillons dans deux directions parallèlement :
- La première consiste à encourager l'apprentissage de l'allemand et du français dans nos deux pays parce que cet apprentissage reste au fondement de la communication et de la compréhension de l'autre,
- La seconde à soutenir les traductions d'essais et de textes en sciences humaines et sociales,
Je saisis cette occasion pour saluer le travail sur les transferts franco-allemands en sciences humaines et sociales réalisé sous la direction de Catherine Colliot-Thélène et de Fritz Nies. Une telle enquête révèle l'étendue des progrès à faire si nous voulons que les communautés scientifiques de nos deux pays partagent à l'avenir un plus grand nombre de références communes. Mais elle témoigne aussi du fait que nous ne sommes jamais allés aussi loin dans la réflexion sur la constitution d'un socle commun de connaissances.
Revenons-en à la chronologie de la coopération franco-allemande. Dans l'ordre de ses promoteurs, juste après les linguistes arrivent - ce n'est pas un hasard non plus - les historiens. Faut-il rappeler qu'entre la France et l'Allemagne, plus qu'entre aucun autre pays, coopération rime avec réconciliation ? Cette coopération a longtemps porté principalement sur l'exploration de notre histoire commune. Elle a longtemps été une relation en miroir. En ce sens elle a sans doute eu une fonction politique indéniable.
La coopération franco-allemande ne se résume cependant plus depuis longtemps à ce face-à-face.
Depuis quelques années, en écho à la chute du Mur et à la réunification allemande, la coopération entre nos deux pays a franchi véritablement un cap. Elle a acquis une maturité nouvelle, qui s'est traduite par la mise en place d'initiatives très efficaces.
Permettez-moi ainsi de rappeler, pour la partie française, le lancement du Centre Marc Bloch il y a dix ans. Ce Centre est particulièrement intéressant d'un point de vue institutionnel et scientifique. Crée par les Ministères de la recherche et des affaires étrangères français, c'est une unité de recherche associée au CNRS, qui bénéficie d'une subvention importante du ministère fédéral de l'éducation et de la recherche pour pouvoir accueillir de jeunes chercheurs allemands.
Je souhaite aussi souligner l'importance du Centre interdisciplinaire d'études et de recherche sur l'Allemagne, le CIERA, créé en 2001, qui a un rôle véritablement structurant pour les études interdisciplinaires sur l'Allemagne.
A côté de ces centres de recherche qui ont fortement contribué à l'organisation de la Journée qui nous réunit aujourd'hui, je voudrais insister sur l'importance de l'Université franco-allemande qui a su développer des formations intégrées avec doubles diplômes dans le champ des sciences humaines et sociales. Une piste véritablement prometteuse dans le cadre de l'européanisation des établissements d'enseignement supérieur.
Alors oui, la relation franco-allemande est une réalité forte du monde de la recherche en sciences humaines et sociales comme elle se nourrit des avancées de tous ces travaux, mais je crois que nous pouvons aller au-delà en resituant cette collaboration si fructueuse dans un horizon plus large.
Faut-il ainsi opposer coopération franco-allemande, et plus généralement coopération bilatérale, et coopération multilatérale ? Il s'agit à mon sens d'une fausse alternative. L'opposition du bilatéral et du multilatéral est, en l'occurrence, un leurre. La coopération franco-allemande s'inscrit culturellement et institutionnellement dans une perspective européenne. Elle entretient en vérité une relation dialectique avec la coopération multilatérale. Les deux dynamiques s'entretiennent l'une l'autre. Elles sont indispensables l'une à l'autre, sans jamais se confondre ni se substituer.
C'est vrai pour la construction politique de l'Europe, comme le montre le rôle joué par le moteur franco-allemand dans l'invention de l'Union européenne. Mais c'est également juste dans le domaine de la science et de la recherche.
Les représentants du Centre Marc Bloch comme les responsables de la Mission historique française en Allemagne, autre institution majeure, ont su nouer par exemple chacun dans leur domaine, des liens avec des chercheurs et des institutions de pays tiers : le Royaume-Uni et la Pologne pour la première, la Pologne encore, mais aussi la République tchèque et la Hongrie pour le second. Et ces deux institutions ne
sont pas des cas isolés. A chaque fois, l'enjeu est le même : la construction d'un espace européen de la recherche.
Pour conclure, je souhaitais donc remercier vivement tous ceux qui se sont mobilisés pour la réussite de cette rencontre. Vous avez tous su montrer l'importance névralgique des liens scientifiques qui rapprochent Allemands et Français. Quand parfois on peut lire ici ou là des réflexions nostalgiques teintées d'un nationalisme exacerbé, nous ne devons avoir nous représentants du monde de la recherche qu'une seule et unique réponse : affirmer la grande mission sociale et politique de la recherche, celle de construire, de vivre au quotidien et de rêver l'Europe de demain.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 4 décembre 2003)