Texte intégral
Je voudrais dire d'abord que j'ai été à la fois très heureux et très honoré de pouvoir déjeuner avec le président Fox. Cette rencontre m'a permis d'aborder avec lui les grands problèmes internationaux et notamment la situation internationale, les grandes crises au Moyen-Orient, notamment en Irak, l'état des relations entre l'Union européenne et l'Amérique latine, ainsi qu'entre l'Union européenne et le Mexique. Vous savez que depuis quelques années ces liens se sont beaucoup développés. Comme je viens de le dire au président, les exportations mexicaines vers la France ont augmenté de plus de 40% au cours des six derniers mois. C'est un chiffre très symbolique qui reflète les efforts déployés. Nous avons naturellement discuté aussi de la situation générale en Amérique latine, de la coopération entre la France et le Mexique. Vous savez que nous nous sommes profondément engagés en France dans un processus de réforme. C'est le cas de la réforme des retraites. Il a été très intéressant pour moi de débattre des perspectives communes de réforme : la réforme des retraites, la réforme de l'énergie, la réforme fiscale. Dans nos pays, la réforme est un processus constant. J'ai pu également transmettre au président Fox un message d'amitié du président Chirac ainsi que le plaisir que nous avons eu à le recevoir à Paris et à Evian. Vous savez que le président Fox est venu en France quatre fois au cours de ces dernières années et que nous avons eu la joie de l'accueillir à Evian, lors du Sommet du G8 élargi aux autres grands pays du monde.
Si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir.
Q - Après la position adoptée par la France avant et après la guerre en Irak, quelle est son attitude face au scandale vécu à Washington à la suite des mensonges du gouvernement américain ?
R - La position de la France est, comme vous le savez, guidée par des principes ainsi que par la volonté d'assumer sa responsabilité envers un pays qui se trouve encore dans une situation très difficile, pleine d'incertitudes. Les principes, vous les connaissez, ce sont le respect du multilatéralisme et la volonté que l'ONU puisse jouer un rôle central dans la reconstruction politique et économique de l'Irak. Nous sommes convaincus que seuls l'unité de la communauté internationale et les efforts de tous dans le même sens, aux côtés de l'ONU, peuvent renforcer la légitimité de l'action menée par la communauté internationale. C'est à cette seule condition que nous serons capables de progresser rapidement en Irak. Nous sommes convaincus que ce qui est primordial aujourd'hui c'est d'avancer politiquement, de lancer le processus politique. Il faut que les Irakiens aient vraiment le sentiment qu'ils vont retrouver toute leur souveraineté sur leur pays et qu'ils sont capables de prendre leur destin en main. Cela me paraît l'élément fondamental. La récente formation d'un Conseil de gouvernement est une bonne chose, mais il faut aller plus loin. Il faut travailler à la préparation d'élections qui permettent véritablement de former un gouvernement irakien, capable de prendre en main les destinées du pays.
Q - Quelle est la position de la France face au scandale soulevé par le gouvernement du président Bush ?
R - Il ne m'appartient pas de commenter ce qui se passe aux Etats-Unis au sujet des armes de destruction massive. Nous avons, comme vous le savez, adopté une position très claire qui consistait à évaluer le risque que l'Irak possède des armes de destruction massive, tout en considérant que les inspecteurs étaient à la fois l'il et la main de la communauté internationale. Nous devions tous leur faire confiance en ce qui concerne le meilleur chemin à choisir, la meilleure façon d'avancer. Je me souviens que, lorsque nous avons assumé la présidence du Conseil de sécurité en janvier dernier, j'ai commencé par écrire à tous les pays membres du Conseil de sécurité pour leur demander s'ils disposaient d'informations utiles pour les inspecteurs afin qu'ils puissent les vérifier. Ce sont en effet les plus à même de vérifier ce type d'informations. Au fur et à mesure que nous avons reçu des informations, nous les avons données aux inspecteurs de l'ONU, à MM. Hans Blix et El Baradeï, parce qu'ils étaient en mesure de les vérifier. Dans le débat actuel il y a, comme vous le savez, un très grand problème : la vérité n'est pas la vérité. C'est pour cette raison que nous pensons que les inspections étaient le meilleur moyen d'avancer dans la voie d'un désarmement pacifique de l'Irak.
Q - Monsieur de Villepin, deux questions. M. Bush et M. Blair ont réaffirmé hier que l'occupation militaire de l'Irak était justifiée, contredisant vos propos selon lesquels il faut que l'Irak retrouve sa pleine souveraineté. Qu'en pensez-vous ?
Seconde question : si vous me le permettez, à partir de votre rencontre d'aujourd'hui avec le président Fox, pensez-vous que le Mexique puisse se retrouver aux côtés de la France dans une nouvelle tentative de révision de la résolution du Conseil de sécurité permettant aux Nations Unies de jouer un rôle plus important, car il ne faut pas oublier que le Mexique est soumis à une forte pression de la part de Washington, qui essaie de conditionner sa position ?
R - La communauté internationale traverse à l'heure actuelle une période très difficile. Certes, les forces de la coalition sont dans une situation très délicate en Irak et nous sommes désolés des victimes que comptent dans leurs rangs les Etats-Unis et la Grande-Bretagne depuis ces derniers mois. La question que nous nous posons et à laquelle il nous faut répondre est la suivante : quel est le meilleur moyen pour parvenir à une situation stable en Irak ? Nous l'avons déjà dit, il faut relancer rapidement le processus politique. La garantie pour un peuple de recouvrer son destin est un élément très important. Nous ne devons pas sous-estimer l'importance de ces facteurs d'identité dans le monde d'aujourd'hui. Il s'agit de quelque chose d'important, personne ne peut, de l'extérieur, dicter à un pays ce qu'il doit faire. Nous connaissons tous l'histoire de l'Irak et sa complexité avec la présence de Kurdes, de Sunnites et de Chiites. Il faut déployer beaucoup d'efforts si nous voulons maintenir la stabilité, l'unité de l'Irak. Nous devons compter sur les Irakiens, nous devons compter sur tous les pays de la région pour faciliter véritablement un processus de paix, de stabilité et de reconstruction. Il est important pour la communauté internationale que nous puissions rapidement obtenir des résultats qui seront un encouragement pour nous tous. C'est pourquoi j'estime qu'il est important que nous entretenions un dialogue permanent. D'où l'importance de l'entretien que j'ai eu avec mon ami Luis Ernesto Derbez, et des entretiens que nous avons chaque jour les uns avec les autres, Anglais, Américains, Allemands et Russes. Nous sommes tous les jours en contact pour trouver la meilleure solution. La question qui se pose est la suivante : la résolution 1483 est-elle suffisante pour répondre aux problèmes actuels de l'Irak ? C'est une bonne question et tout dépend en grande partie du sentiment et de la façon de voir les choses des deux pays qui ont encore aujourd'hui le plus de responsabilités en Irak. L'Angleterre et les Etats-Unis sont dans une situation compliquée et aucun de nous ne souhaite rendre les choses encore plus complexes ; nous voulons au contraire, contribuer à la recherche de solutions. Nous l'avons clairement dit après la guerre : il faut maintenant regarder en avant. Nous devons faire en sorte que la communauté internationale réunie soit plus forte, plus à même de trouver des solutions. C'est ce que nous sommes en train de faire. Il faut voir ce que veulent et pensent les Américains et les Anglais. Nous sommes convaincus que, si les Nations unies n'assument pas la responsabilité de tout le processus, si la communauté internationale ne dispose pas de la légitimité pour agir, les choses continueront à être très difficiles. C'est là notre conviction dans un monde très complexe et incertain. Nous allons donc continuer à discuter au cours des prochains jours et semaines, prendre en compte les réflexions des Américains et des Britanniques à partir de leur façon de voir les choses. Je constate qu'ils n'ont rien demandé. Nous verrons quelles sont les solutions les mieux adaptées aux intérêts de l'Irak, du Moyen-Orient et de la communauté internationale. Ce que je peux dire aujourd'hui, c'est que nous sommes vraiment prêts à répondre de manière positive, en vue de soutenir ce processus, et d'assurer une plus grande stabilité à cette partie du monde car, comme nous le constatons tous les jours, l'interdépendance des crises, l'interdépendance de ces situations fragiles est très grande tout comme l'urgence pour nous d'agir.
Avec le Mexique, nous avons une grande convergence d'objectifs et de convictions ; nous nous sentons très proches ; nous sommes toujours convaincus de la nécessité du multilatéralisme dans le monde. Cela justifie ma présence au Mexique et le plaisir que j'ai eu de pouvoir parler avec mon homologue M. Derbez ainsi qu'avec le président Fox. En ce moment, l'important c'est de voir quelles sont les solutions possibles et d'uvrer conjointement. Nous sommes tous deux membres du Conseil de sécurité et il est très important que nous coopérions. Mais, comme vous le savez, dans la vie internationale, dans la vie du Conseil de sécurité, on ne peut pas dire haut et fort tout ce qu'on fait, tout ce dont on parle. Il faut travailler en relation étroite, très forte, pour pouvoir être plus efficaces. C'est ce que nous faisons, avec à la fois une grande ambition et une grande humilité, car nous travaillons au service de la communauté internationale
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 juillet 2003)
Si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir.
Q - Après la position adoptée par la France avant et après la guerre en Irak, quelle est son attitude face au scandale vécu à Washington à la suite des mensonges du gouvernement américain ?
R - La position de la France est, comme vous le savez, guidée par des principes ainsi que par la volonté d'assumer sa responsabilité envers un pays qui se trouve encore dans une situation très difficile, pleine d'incertitudes. Les principes, vous les connaissez, ce sont le respect du multilatéralisme et la volonté que l'ONU puisse jouer un rôle central dans la reconstruction politique et économique de l'Irak. Nous sommes convaincus que seuls l'unité de la communauté internationale et les efforts de tous dans le même sens, aux côtés de l'ONU, peuvent renforcer la légitimité de l'action menée par la communauté internationale. C'est à cette seule condition que nous serons capables de progresser rapidement en Irak. Nous sommes convaincus que ce qui est primordial aujourd'hui c'est d'avancer politiquement, de lancer le processus politique. Il faut que les Irakiens aient vraiment le sentiment qu'ils vont retrouver toute leur souveraineté sur leur pays et qu'ils sont capables de prendre leur destin en main. Cela me paraît l'élément fondamental. La récente formation d'un Conseil de gouvernement est une bonne chose, mais il faut aller plus loin. Il faut travailler à la préparation d'élections qui permettent véritablement de former un gouvernement irakien, capable de prendre en main les destinées du pays.
Q - Quelle est la position de la France face au scandale soulevé par le gouvernement du président Bush ?
R - Il ne m'appartient pas de commenter ce qui se passe aux Etats-Unis au sujet des armes de destruction massive. Nous avons, comme vous le savez, adopté une position très claire qui consistait à évaluer le risque que l'Irak possède des armes de destruction massive, tout en considérant que les inspecteurs étaient à la fois l'il et la main de la communauté internationale. Nous devions tous leur faire confiance en ce qui concerne le meilleur chemin à choisir, la meilleure façon d'avancer. Je me souviens que, lorsque nous avons assumé la présidence du Conseil de sécurité en janvier dernier, j'ai commencé par écrire à tous les pays membres du Conseil de sécurité pour leur demander s'ils disposaient d'informations utiles pour les inspecteurs afin qu'ils puissent les vérifier. Ce sont en effet les plus à même de vérifier ce type d'informations. Au fur et à mesure que nous avons reçu des informations, nous les avons données aux inspecteurs de l'ONU, à MM. Hans Blix et El Baradeï, parce qu'ils étaient en mesure de les vérifier. Dans le débat actuel il y a, comme vous le savez, un très grand problème : la vérité n'est pas la vérité. C'est pour cette raison que nous pensons que les inspections étaient le meilleur moyen d'avancer dans la voie d'un désarmement pacifique de l'Irak.
Q - Monsieur de Villepin, deux questions. M. Bush et M. Blair ont réaffirmé hier que l'occupation militaire de l'Irak était justifiée, contredisant vos propos selon lesquels il faut que l'Irak retrouve sa pleine souveraineté. Qu'en pensez-vous ?
Seconde question : si vous me le permettez, à partir de votre rencontre d'aujourd'hui avec le président Fox, pensez-vous que le Mexique puisse se retrouver aux côtés de la France dans une nouvelle tentative de révision de la résolution du Conseil de sécurité permettant aux Nations Unies de jouer un rôle plus important, car il ne faut pas oublier que le Mexique est soumis à une forte pression de la part de Washington, qui essaie de conditionner sa position ?
R - La communauté internationale traverse à l'heure actuelle une période très difficile. Certes, les forces de la coalition sont dans une situation très délicate en Irak et nous sommes désolés des victimes que comptent dans leurs rangs les Etats-Unis et la Grande-Bretagne depuis ces derniers mois. La question que nous nous posons et à laquelle il nous faut répondre est la suivante : quel est le meilleur moyen pour parvenir à une situation stable en Irak ? Nous l'avons déjà dit, il faut relancer rapidement le processus politique. La garantie pour un peuple de recouvrer son destin est un élément très important. Nous ne devons pas sous-estimer l'importance de ces facteurs d'identité dans le monde d'aujourd'hui. Il s'agit de quelque chose d'important, personne ne peut, de l'extérieur, dicter à un pays ce qu'il doit faire. Nous connaissons tous l'histoire de l'Irak et sa complexité avec la présence de Kurdes, de Sunnites et de Chiites. Il faut déployer beaucoup d'efforts si nous voulons maintenir la stabilité, l'unité de l'Irak. Nous devons compter sur les Irakiens, nous devons compter sur tous les pays de la région pour faciliter véritablement un processus de paix, de stabilité et de reconstruction. Il est important pour la communauté internationale que nous puissions rapidement obtenir des résultats qui seront un encouragement pour nous tous. C'est pourquoi j'estime qu'il est important que nous entretenions un dialogue permanent. D'où l'importance de l'entretien que j'ai eu avec mon ami Luis Ernesto Derbez, et des entretiens que nous avons chaque jour les uns avec les autres, Anglais, Américains, Allemands et Russes. Nous sommes tous les jours en contact pour trouver la meilleure solution. La question qui se pose est la suivante : la résolution 1483 est-elle suffisante pour répondre aux problèmes actuels de l'Irak ? C'est une bonne question et tout dépend en grande partie du sentiment et de la façon de voir les choses des deux pays qui ont encore aujourd'hui le plus de responsabilités en Irak. L'Angleterre et les Etats-Unis sont dans une situation compliquée et aucun de nous ne souhaite rendre les choses encore plus complexes ; nous voulons au contraire, contribuer à la recherche de solutions. Nous l'avons clairement dit après la guerre : il faut maintenant regarder en avant. Nous devons faire en sorte que la communauté internationale réunie soit plus forte, plus à même de trouver des solutions. C'est ce que nous sommes en train de faire. Il faut voir ce que veulent et pensent les Américains et les Anglais. Nous sommes convaincus que, si les Nations unies n'assument pas la responsabilité de tout le processus, si la communauté internationale ne dispose pas de la légitimité pour agir, les choses continueront à être très difficiles. C'est là notre conviction dans un monde très complexe et incertain. Nous allons donc continuer à discuter au cours des prochains jours et semaines, prendre en compte les réflexions des Américains et des Britanniques à partir de leur façon de voir les choses. Je constate qu'ils n'ont rien demandé. Nous verrons quelles sont les solutions les mieux adaptées aux intérêts de l'Irak, du Moyen-Orient et de la communauté internationale. Ce que je peux dire aujourd'hui, c'est que nous sommes vraiment prêts à répondre de manière positive, en vue de soutenir ce processus, et d'assurer une plus grande stabilité à cette partie du monde car, comme nous le constatons tous les jours, l'interdépendance des crises, l'interdépendance de ces situations fragiles est très grande tout comme l'urgence pour nous d'agir.
Avec le Mexique, nous avons une grande convergence d'objectifs et de convictions ; nous nous sentons très proches ; nous sommes toujours convaincus de la nécessité du multilatéralisme dans le monde. Cela justifie ma présence au Mexique et le plaisir que j'ai eu de pouvoir parler avec mon homologue M. Derbez ainsi qu'avec le président Fox. En ce moment, l'important c'est de voir quelles sont les solutions possibles et d'uvrer conjointement. Nous sommes tous deux membres du Conseil de sécurité et il est très important que nous coopérions. Mais, comme vous le savez, dans la vie internationale, dans la vie du Conseil de sécurité, on ne peut pas dire haut et fort tout ce qu'on fait, tout ce dont on parle. Il faut travailler en relation étroite, très forte, pour pouvoir être plus efficaces. C'est ce que nous faisons, avec à la fois une grande ambition et une grande humilité, car nous travaillons au service de la communauté internationale
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 juillet 2003)