Texte intégral
S. Paoli-. Alors que le chômage est aujourd'hui - et de loin devant l'insécurité - la première préoccupation et inquiétude des Français, des mesures d'incitation, inspirées de celles existantes en Allemagne, convaincront-elles en France les chômeurs d'accepter les postes qu'on leur propose ? Le RMA, Revenu minimum d'activité, en débat à l'Assemblée nationale, sera-t-il un salaire ou un sous-contrat de travail générant des travailleurs pauvres, comme le craignent certaines associations ? Enfin, la révolution de la réforme du dialogue social aura-t-elle lieu ? Mais d'abord, juste deux mots sur l'ambiance générale dans la majorité : si on lit Le Canard ce matin, on y apprend que le Premier ministre est peut-être en sursis jusqu'aux prochaines régionales... Avec l'UDF, on dit que c'est désormais la rupture consommée après qu'elle n'ait pas voté le budget. Sarkozy omniprésent... Si j'ose dire, vous avez neuf minutes pour nous convaincre que la majorité n'est pas bouillonnante !
- "Je vais essayer, mais en tout cas, ce n'est pas Le Canard qui fait les gouvernements, vous le savez bien..."
Mais vous savez aussi qu'ils sont souvent bien informés dans Le Canard !
- "Nous sommes dans une situation qui est difficile, parce qu'il y a beaucoup de réformes à faire, parce que ce pays a pris beaucoup de retard. Si l'on veut le redresser, il faut changer beaucoup de choses. On a très longtemps fait croire aux Français qu'on pouvait conserver les premières places et le meilleur système de protection sociale, sans faire d'efforts et même en en faisant moins. Il faut donc réussir à inverser la tendance dans notre pays. C'est difficile, mais c'est tout l'honneur du Gouvernement que de ne pas reculer devant l'effort."
Mais dans une telle fébrilité, est-il facile de gouverner et de réformer ?
- "Mais la fébrilité est médiatique, je veux dire qu'elle n'est pas au sein du Gouvernement. Le Gouvernement travaille, a un calendrier de réformes, qui d'ailleurs correspond, pour l'essentiel, au programme sur lequel le président de la République et la majorité ont été élus. Les relations avec l'UDF que vous évoquiez tout à l'heure ne sont pas à la rupture. Je vois le débat qui vient de s'ouvrir sur le RMI et sur le RMA. L'UDF soutient clairement les projets du Gouvernement. Naturellement, il y a des débats, chacun veut essayer d'améliorer les choses, mais ma conviction est que nous sortirons de cette période, à la fois renforcés au plan politique et surtout, en ayant le sentiment du devoir bien fait, c'est-à-dire en ayant enclenché les réformes sur lesquelles nous nous sommes engagés. Il n'y a que cela qui compte. Les Français jugent sur le bilan final. Je vous rappelle que tous les gouvernements et tous les Premiers ministres qui ont bénéficié de cote de popularité très élevée ont quand même tous été battus aux élections législatives."
Il n'y a pas de malice dans la question que je vous pose, mais comment peut-on rêver aujourd'hui d'être Premier ministre, quand on voit...
- "Ah, ça, je ne suis pas sûr qu'il y ait tant de personnes que ça qui en rêvent !"
Vous, vous n'y pensez pas du tout ?
- "C'est encore de l'agitation médiatique..."
Qu'est-ce que c'est ? C'est de la politique politicienne ? Sarkozy, ce soir à la télévision, tout le monde ne parle que de ça et du coup, on se dit que du coup, aujourd'hui, il y en a deux aujourd'hui, dans la majorité, qui pourraient peut-être prendre la place du Premier ministre, s'il devait partir : c'est Sarkozy évidemment, et il y a peut-être Fillon aussi !
- "Tout cela est très flatteur pour les intéressés, mais la vérité est que la tâche est extrêmement difficile, que le président de la République - qui, je le rappelle, est celui qui nomme le Premier ministre - a choisi un Premier ministre, une ligne politique et une équipe gouvernementale, et qu'il n'y a pas de salut hors de la solidarité au sein de cette équipe. Tous ceux qui pourraient penser que c'est en compliquant la vie du Premier ministre que les choses pourraient s'améliorer, naturellement, se trompent."
Le chômage est la première grande inquiétude des Français. Or le dollar est à la baisse - certains se demandent même s'il n'y a pas de nouveau une stratégie américaine du dollar à la baisse -, l'euro n'a jamais été aussi haut et on finit par s'interroger sur la possibilité ou pas de la reprise en Europe. Et donc, s'il n'y a pas de reprise, il y aura encore plus de chômage...
- "Ce sont des prévisions extrêmement pessimistes, qui ne correspondent pas à la réalité. La réalité, c'est un taux de croissance, pour le troisième trimestre, de 0,4 %. Si vous projetez ce taux de croissance, ce qui serait vraiment le minimum, sur l'année prochaine, cela veut dire que l'objectif du Gouvernement d'un taux de croissance de 1,7 % est tout à fait atteignable désormais. Et on est un certain nombre à penser que les choses pourraient même aller mieux que cela. Or avec la politique économique et la politique de l'emploi que nous conduisons depuis deux ans, nous avons réussi à abaisser en dessous de 1 % le niveau de croissance au-delà duquel l'économie française crée des emplois. Et d'ailleurs, l'Insee vient de démontrer que depuis le troisième trimestre, l'économie marchande ne détruit plus d'emplois dans notre pays, l'emploi dans le secteur marchand est stabilisé et la croissance de cet emploi va reprendre au début de 2004. Cette croissance sera-t-elle très forte ou sera-t-elle gênée par un dollar trop bas, c'est une question qui naturellement nous préoccupe, mais je n'ai pas d'inquiétude sur le fait qu'en 2004, la F'rance aura un taux de croissance qui sera largement positif et qu'elle recommencera à créer des emplois."
A propos des mesures d'incitation auxquelles vous songez, pour pousser les chômeurs à accepter les emplois qu'on leur propose, y a-t-il encore, dans ce pays, des gens qui se complaisent dans le chômage ?
- "Il ne faut tomber dans aucune caricature. Dire que tous les chômeurs ne cherchent pas de travail ou ont souhaité la situation dans laquelle ils se trouvent, c'est évidemment stupide et ne correspond pas à la réalité. Mais en même temps, personne ne peut ne pas entendre la grogne et la critique qui montent de plus en plus dans l'opinion publique, au regard de certains chômeurs qui, eux, ne souhaitent pas reprendre un emploi, en tout cas ce leur propose aujourd'hui le service public de l'emploi. Il y a 350.000 offres d'emploi non satisfaites en France et qui ne sont pas toutes liées à des problèmes de qualification très élevée, au contraire. Il faut donc regarder les choses avec réalisme. Il y a beaucoup de chômeurs qui sont dans une situation très difficile, qui n'ont pas demandé à être dans cette situation et qui ne trouvent pas d'emploi parce qu'il n'y en a pas. Mais il y en a aussi un certain nombre à qui on propose des solutions et qui les refusent. Nos amis anglais, nos amis allemands viennent d'adopter des législations assez contraignantes..."
Qu'est-ce que cela veut dire, "assez contraignantes" ?
- "C'est très simple : si une personne est au chômage en Angleterre et refuse plus de trois ou quatre offres qui lui sont faites, et à condition que ces offres soient raisonnables, c'est-à-dire qu'elles ne correspondent pas à une différence de rémunération ou de qualification considérable par rapport à la situation initiale de la personne au chômage, eh bien, les aides au chômage sont réduites, voire même supprimées. Nous, nous n'en sommes pas là..."
Mais vous y pensez quand même ?
- "Disons simplement qu'il faut, dans un premier temps, que nous soyons capables d'offrir à toutes les personnes qui sont au chômage des formations très concrètes, très rapidement opérationnelles, aux emplois qui ne sont pas pourvus - il y en a 350 000. Si déjà on pouvait réduire ce nombre de 100 000, ce que j'ai proposé, vous voyez l'impact considérable que cela aurait sur le chômage. On va voir si cela fonctionne..."
Quand le feriez-vous ?
- "Nous allons proposer ces formations très vite, à la fin ou au début de l'année prochaine. Par contre, la modification éventuelle de la législation autour de l'accès à l'emploi, de l'indemnisation du chômage, c'est un sujet sur lequel j'ai demandé une réflexion à plusieurs experts et pour lequel je voudrais proposer aux partenaires sociaux une concertation au début de l'année prochaine."
Il y a une autre grande inquiétude sur le RMA : certains se demandent aujourd'hui si ce n'est pas la mise en place de quelque chose qui aboutirait à ce que l'on appelle aux Etats-Unis les "travailleurs pauvres", c'est-à-dire à une forme de sous-salariat, ce qui profiterait plus aux entreprises qu'aux travailleurs finalement.
- "Cette crainte montre bien à quel point notre système est aujourd'hui perverti. Penser qu'il est préférable pour quelqu'un de rester au RMI, de toucher presque à vie une allocation, plutôt que de tout tenter pour le remettre au travail, c'est le résultat d'années et d'années d'erreurs idéologiques. Nous disons aujourd'hui que le RMI a été une réforme dont il faut être fier. On a mis en place un filet de sécurité pour les gens les plus fragiles. Mais ce filet de sécurité fonctionne aujourd'hui comme un filet qui retient. Un très grand nombre de personnes au RMI le sont depuis plusieurs années, un nombre très important le sont depuis plus de dix ans. Nous proposons, sans obligation, aux personnes qui sont au RMI, qui le souhaiteront, d'aller travailler, soit dans une association, une collectivité locale ou une entreprise, pour un salaire qui sera un salaire normal, c'est-à-dire un salaire au Smic. Simplement, l'employeur bénéficiera, pendant une période de 18 mois, du versement de l'allocation de revenu minimum. C'est une incitation à aller vers le travail, à la fois pour la personne qui est au RMI et, naturellement, c'est une incitation pour les employeurs, qu'ils soient publics ou privés, à accepter des publics qui sont très éloignés de l'emploi."
On ne va pas faire le procès des employeurs, mais tous n'ont pas toujours beaucoup de vertu... N'y en aura-t-il pas certains qui auront la tentation de supprimer des emplois qui leur coûtent plus chers, pour aller engager au RMA...
- "Tout cela est très encadré, vous l'imaginez bien. Il faudra que le Conseil général signe avec l'employeur une convention. Dans cette convention, l'employeur devra s'engager sur un certain nombre d'objectifs, sur des objectifs de formation notamment, pour que tout cela débouche sur l'emploi. Et tout employeur qui se livrerait au jeu que vous venez d'évoquer ne sera pas agréé par les départements pour recevoir des emplois. Il y a quelque chose qui me frappe beaucoup dans ce débat : c'est que tant qu'il s'agit d'inventer des contrats avec des salaires réduits, avec des systèmes sociaux réduits, dans le secteur public, tout le monde trouve cela très bien. Comme si tous les employeurs dans le secteur public étaient des gens formidables ! Du moment que vous êtes dans le secteur public, vous n'êtes soupçonnés d'aucun défaut ! Mais quand c'est dans le secteur privé, c'est le "mal absolu", pour reprendre une expression chère au Président américain ! Eh bien, les choses ne fonctionnent pas comme cela. Il y a beaucoup de gens, dans l'entreprise, qui sont prêts à s'engager dans l'insertion. D'ailleurs, on le voit bien, avec l'emploi des handicapés, avec les entreprises d'insertion qui sont dans le secteur privé et qui, aujourd'hui, font de très gros efforts et donnent de très bons résultats."
On n'a même pas eu le temps de parler de la réforme du dialogue social...
- "Oui, c'est vraiment dommage, c'est pour cela que j'étais venu !"
Ah, vous voyez comment sont les politiques ! On ne fait pas de la communication, ici, à France Inter !
- "Parce que c'est la première réforme qui vient d'être proposée !"
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 novembre 2003)
- "Je vais essayer, mais en tout cas, ce n'est pas Le Canard qui fait les gouvernements, vous le savez bien..."
Mais vous savez aussi qu'ils sont souvent bien informés dans Le Canard !
- "Nous sommes dans une situation qui est difficile, parce qu'il y a beaucoup de réformes à faire, parce que ce pays a pris beaucoup de retard. Si l'on veut le redresser, il faut changer beaucoup de choses. On a très longtemps fait croire aux Français qu'on pouvait conserver les premières places et le meilleur système de protection sociale, sans faire d'efforts et même en en faisant moins. Il faut donc réussir à inverser la tendance dans notre pays. C'est difficile, mais c'est tout l'honneur du Gouvernement que de ne pas reculer devant l'effort."
Mais dans une telle fébrilité, est-il facile de gouverner et de réformer ?
- "Mais la fébrilité est médiatique, je veux dire qu'elle n'est pas au sein du Gouvernement. Le Gouvernement travaille, a un calendrier de réformes, qui d'ailleurs correspond, pour l'essentiel, au programme sur lequel le président de la République et la majorité ont été élus. Les relations avec l'UDF que vous évoquiez tout à l'heure ne sont pas à la rupture. Je vois le débat qui vient de s'ouvrir sur le RMI et sur le RMA. L'UDF soutient clairement les projets du Gouvernement. Naturellement, il y a des débats, chacun veut essayer d'améliorer les choses, mais ma conviction est que nous sortirons de cette période, à la fois renforcés au plan politique et surtout, en ayant le sentiment du devoir bien fait, c'est-à-dire en ayant enclenché les réformes sur lesquelles nous nous sommes engagés. Il n'y a que cela qui compte. Les Français jugent sur le bilan final. Je vous rappelle que tous les gouvernements et tous les Premiers ministres qui ont bénéficié de cote de popularité très élevée ont quand même tous été battus aux élections législatives."
Il n'y a pas de malice dans la question que je vous pose, mais comment peut-on rêver aujourd'hui d'être Premier ministre, quand on voit...
- "Ah, ça, je ne suis pas sûr qu'il y ait tant de personnes que ça qui en rêvent !"
Vous, vous n'y pensez pas du tout ?
- "C'est encore de l'agitation médiatique..."
Qu'est-ce que c'est ? C'est de la politique politicienne ? Sarkozy, ce soir à la télévision, tout le monde ne parle que de ça et du coup, on se dit que du coup, aujourd'hui, il y en a deux aujourd'hui, dans la majorité, qui pourraient peut-être prendre la place du Premier ministre, s'il devait partir : c'est Sarkozy évidemment, et il y a peut-être Fillon aussi !
- "Tout cela est très flatteur pour les intéressés, mais la vérité est que la tâche est extrêmement difficile, que le président de la République - qui, je le rappelle, est celui qui nomme le Premier ministre - a choisi un Premier ministre, une ligne politique et une équipe gouvernementale, et qu'il n'y a pas de salut hors de la solidarité au sein de cette équipe. Tous ceux qui pourraient penser que c'est en compliquant la vie du Premier ministre que les choses pourraient s'améliorer, naturellement, se trompent."
Le chômage est la première grande inquiétude des Français. Or le dollar est à la baisse - certains se demandent même s'il n'y a pas de nouveau une stratégie américaine du dollar à la baisse -, l'euro n'a jamais été aussi haut et on finit par s'interroger sur la possibilité ou pas de la reprise en Europe. Et donc, s'il n'y a pas de reprise, il y aura encore plus de chômage...
- "Ce sont des prévisions extrêmement pessimistes, qui ne correspondent pas à la réalité. La réalité, c'est un taux de croissance, pour le troisième trimestre, de 0,4 %. Si vous projetez ce taux de croissance, ce qui serait vraiment le minimum, sur l'année prochaine, cela veut dire que l'objectif du Gouvernement d'un taux de croissance de 1,7 % est tout à fait atteignable désormais. Et on est un certain nombre à penser que les choses pourraient même aller mieux que cela. Or avec la politique économique et la politique de l'emploi que nous conduisons depuis deux ans, nous avons réussi à abaisser en dessous de 1 % le niveau de croissance au-delà duquel l'économie française crée des emplois. Et d'ailleurs, l'Insee vient de démontrer que depuis le troisième trimestre, l'économie marchande ne détruit plus d'emplois dans notre pays, l'emploi dans le secteur marchand est stabilisé et la croissance de cet emploi va reprendre au début de 2004. Cette croissance sera-t-elle très forte ou sera-t-elle gênée par un dollar trop bas, c'est une question qui naturellement nous préoccupe, mais je n'ai pas d'inquiétude sur le fait qu'en 2004, la F'rance aura un taux de croissance qui sera largement positif et qu'elle recommencera à créer des emplois."
A propos des mesures d'incitation auxquelles vous songez, pour pousser les chômeurs à accepter les emplois qu'on leur propose, y a-t-il encore, dans ce pays, des gens qui se complaisent dans le chômage ?
- "Il ne faut tomber dans aucune caricature. Dire que tous les chômeurs ne cherchent pas de travail ou ont souhaité la situation dans laquelle ils se trouvent, c'est évidemment stupide et ne correspond pas à la réalité. Mais en même temps, personne ne peut ne pas entendre la grogne et la critique qui montent de plus en plus dans l'opinion publique, au regard de certains chômeurs qui, eux, ne souhaitent pas reprendre un emploi, en tout cas ce leur propose aujourd'hui le service public de l'emploi. Il y a 350.000 offres d'emploi non satisfaites en France et qui ne sont pas toutes liées à des problèmes de qualification très élevée, au contraire. Il faut donc regarder les choses avec réalisme. Il y a beaucoup de chômeurs qui sont dans une situation très difficile, qui n'ont pas demandé à être dans cette situation et qui ne trouvent pas d'emploi parce qu'il n'y en a pas. Mais il y en a aussi un certain nombre à qui on propose des solutions et qui les refusent. Nos amis anglais, nos amis allemands viennent d'adopter des législations assez contraignantes..."
Qu'est-ce que cela veut dire, "assez contraignantes" ?
- "C'est très simple : si une personne est au chômage en Angleterre et refuse plus de trois ou quatre offres qui lui sont faites, et à condition que ces offres soient raisonnables, c'est-à-dire qu'elles ne correspondent pas à une différence de rémunération ou de qualification considérable par rapport à la situation initiale de la personne au chômage, eh bien, les aides au chômage sont réduites, voire même supprimées. Nous, nous n'en sommes pas là..."
Mais vous y pensez quand même ?
- "Disons simplement qu'il faut, dans un premier temps, que nous soyons capables d'offrir à toutes les personnes qui sont au chômage des formations très concrètes, très rapidement opérationnelles, aux emplois qui ne sont pas pourvus - il y en a 350 000. Si déjà on pouvait réduire ce nombre de 100 000, ce que j'ai proposé, vous voyez l'impact considérable que cela aurait sur le chômage. On va voir si cela fonctionne..."
Quand le feriez-vous ?
- "Nous allons proposer ces formations très vite, à la fin ou au début de l'année prochaine. Par contre, la modification éventuelle de la législation autour de l'accès à l'emploi, de l'indemnisation du chômage, c'est un sujet sur lequel j'ai demandé une réflexion à plusieurs experts et pour lequel je voudrais proposer aux partenaires sociaux une concertation au début de l'année prochaine."
Il y a une autre grande inquiétude sur le RMA : certains se demandent aujourd'hui si ce n'est pas la mise en place de quelque chose qui aboutirait à ce que l'on appelle aux Etats-Unis les "travailleurs pauvres", c'est-à-dire à une forme de sous-salariat, ce qui profiterait plus aux entreprises qu'aux travailleurs finalement.
- "Cette crainte montre bien à quel point notre système est aujourd'hui perverti. Penser qu'il est préférable pour quelqu'un de rester au RMI, de toucher presque à vie une allocation, plutôt que de tout tenter pour le remettre au travail, c'est le résultat d'années et d'années d'erreurs idéologiques. Nous disons aujourd'hui que le RMI a été une réforme dont il faut être fier. On a mis en place un filet de sécurité pour les gens les plus fragiles. Mais ce filet de sécurité fonctionne aujourd'hui comme un filet qui retient. Un très grand nombre de personnes au RMI le sont depuis plusieurs années, un nombre très important le sont depuis plus de dix ans. Nous proposons, sans obligation, aux personnes qui sont au RMI, qui le souhaiteront, d'aller travailler, soit dans une association, une collectivité locale ou une entreprise, pour un salaire qui sera un salaire normal, c'est-à-dire un salaire au Smic. Simplement, l'employeur bénéficiera, pendant une période de 18 mois, du versement de l'allocation de revenu minimum. C'est une incitation à aller vers le travail, à la fois pour la personne qui est au RMI et, naturellement, c'est une incitation pour les employeurs, qu'ils soient publics ou privés, à accepter des publics qui sont très éloignés de l'emploi."
On ne va pas faire le procès des employeurs, mais tous n'ont pas toujours beaucoup de vertu... N'y en aura-t-il pas certains qui auront la tentation de supprimer des emplois qui leur coûtent plus chers, pour aller engager au RMA...
- "Tout cela est très encadré, vous l'imaginez bien. Il faudra que le Conseil général signe avec l'employeur une convention. Dans cette convention, l'employeur devra s'engager sur un certain nombre d'objectifs, sur des objectifs de formation notamment, pour que tout cela débouche sur l'emploi. Et tout employeur qui se livrerait au jeu que vous venez d'évoquer ne sera pas agréé par les départements pour recevoir des emplois. Il y a quelque chose qui me frappe beaucoup dans ce débat : c'est que tant qu'il s'agit d'inventer des contrats avec des salaires réduits, avec des systèmes sociaux réduits, dans le secteur public, tout le monde trouve cela très bien. Comme si tous les employeurs dans le secteur public étaient des gens formidables ! Du moment que vous êtes dans le secteur public, vous n'êtes soupçonnés d'aucun défaut ! Mais quand c'est dans le secteur privé, c'est le "mal absolu", pour reprendre une expression chère au Président américain ! Eh bien, les choses ne fonctionnent pas comme cela. Il y a beaucoup de gens, dans l'entreprise, qui sont prêts à s'engager dans l'insertion. D'ailleurs, on le voit bien, avec l'emploi des handicapés, avec les entreprises d'insertion qui sont dans le secteur privé et qui, aujourd'hui, font de très gros efforts et donnent de très bons résultats."
On n'a même pas eu le temps de parler de la réforme du dialogue social...
- "Oui, c'est vraiment dommage, c'est pour cela que j'étais venu !"
Ah, vous voyez comment sont les politiques ! On ne fait pas de la communication, ici, à France Inter !
- "Parce que c'est la première réforme qui vient d'être proposée !"
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 novembre 2003)