Déclaration de M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, sur la loi de finances rectificative pour 2003, la confirmation des évaluations de recettes du PLF et diverses dispositions normatives, au Sénat le 15 décembre 2003.

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Circonstance : Soumission du projet de loi de finances rectificative pour 2003 au Sénat le 15 décembre 2003

Texte intégral


Monsieur le président,
Monsieur le président et Monsieur le rapporteur général de la Commission des finances,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Le projet de loi de finances rectificative que vous soumet aujourd'hui le gouvernement a été adopté par l'Assemblée nationale le 4 décembre dernier. Ce projet présente trois caractéristiques principales.
La première, c'est de vous proposer un montant de crédits nets inférieur à celui initialement prévu, à hauteur de 900 millions environ, preuve du soin attentif qui préside au suivi de la loi de finances 2003.
La seconde, c'est de confirmer les évaluations de recettes fournies en septembre, au moment de la présentation du PLF 2004.
Nos moins-values par rapport à la LFI 2003 sont donc de 10 milliards. Le déficit s'établit à un peu plus de 54 milliards d'euros et devrait, en fin de gestion, s'élever à environ 56 milliards, attendu les perspectives de consommation des crédits de report.
Nous sommes en ligne avec nos prévisions de fin septembre, lors de la présentation du PLF 2004. Le gouvernement a donc été rigoureux dans la construction budgétaire pour 2004, comme il l'a été dans l'exécution 2003.
La troisième caractéristique, c'est de contenir diverses dispositions normatives au-delà des mesures portant sur les crédits et sur les évaluations de recettes.
Ces dispositions sont, par nature, disparates, mais claire est notre volonté de mettre en oeuvre la loi organique relative aux lois de finances, de simplifier, de promouvoir l'attractivité de notre territoire et enfin de conforter la maîtrise de nos finances publiques.
1ère grande caractéristique :
Un montant de crédits nets inférieur à la loi de finances initiale (LFI)
La loi de finances initiale a ouvert 273,8 milliards de crédits. Le projet qui vous est aujourd'hui soumis propose un montant de 272,9 milliards, en diminution de 900 millions.
Cette différence s'explique aisément.
Nous faisons, au total, 4,3 milliards d'ouvertures, dont 3,4 milliards dans le collectif et 0,9 milliard par différents décrets d'avance, qui nous ont permis de faire face à diverses situations d'urgence.
Face à ces 4,3 milliards d'ouvertures, nous annulons 5,8 milliards, dont 5,2 milliards ont un impact sur l'équilibre, le solde portant sur des crédits de report.
Au total, le montant des crédits nets est bien minoré de 900 millions par rapport à la LFI 2003.
Trois lignes de force caractérisent les ouvertures de crédits que nous sollicitons.
1. Le social représente le principal poste de dépenses supplémentaires.
Nous finançons la prime de Noël et ajustons de manière substantielle les crédits du RMI et de l'aide médicale d'Etat.
Ce collectif porte également la marque de l'effort en faveur de l'emploi : les compensations d'exonérations de charges sociales sont réajustées, comme les crédits en faveur des contrats emploi-solidarité et les dotations du fonds national de l'emploi.
2. Les besoins liés aux différentes catastrophes que nous avons subies sont couverts par le collectif ou les décrets d'avance qui l'ont précédé. Il s'agit notamment de la sécheresse, de la lutte contre les feux de forêt et de la compensation, par l'Etat, de l'arrêt de la production de phosgène à Toulouse, à la suite de l'explosion de l'usine AZF.
Je voudrais souligner l'effort financier en faveur des agriculteurs victimes de la sécheresse, d'un montant de 520 millions.
3. Le collectif finance l'ajustement de diverses lignes déficitaires, comme il est d'usage. Vous noterez une ouverture de 400 millions pour compenser les surcoûts des opérations extérieures, soit les deux tiers des surcoûts estimés pour 2003, des redéploiements internes au ministère de la Défense finançant le solde.
Le bilan de la gestion 2003 tient en trois observations.
1ère observation : nous avons à financer des besoins très importants en gestion.
Face à la dégradation de la conjoncture économique, le gouvernement a mené une politique active de l'emploi : les dépenses supplémentaires en sont la contrepartie. Certains minima sociaux ont nécessité des crédits supplémentaires. Enfin, de nombreux imprévus ont dû être financés.
Seconde observation, indissociable de la précédente : la démarche de précaution initiée en début d'année est confortée et validée.
Il était indispensable de procéder à la mise en réserve précoce de certains crédits, pour faire face aux besoins et aux aléas de la gestion. La commission des finances du Sénat nous a toujours soutenus dans cette démarche et je voudrais l'en remercier.
Troisième observation : grâce à cette démarche de précaution, nous pouvons maintenir notre objectif d'exécution de 273,8 milliards, à savoir le niveau initialement autorisé en loi de finances pour 2003.
L'écart de 900 millions entre le niveau des crédits en collectif s'explique par nos prévisions de consommation nette de reports.
Je rappelle que 11 milliards de crédits de report sont issus de la gestion 2002. Grâce à notre volonté de maîtrise de la dépense, nous en limiterons la consommation et en diminuerons le montant. Nous préparons, ainsi, l'entrée en vigueur de la loi organique qui plafonne le montant des reports à 3% de chaque programme.
Au total, ce collectif témoigne de notre volonté de respecter, en dépense, le plafond arrêté par le Parlement lorsqu'il a voté la loi de finances initiale pour 2003.
Il y a deux conceptions de l'autorisation parlementaire.
L'une, inexacte, voit, dans cette autorisation, une obligation de dépenser chaque crédit voté, dans chaque ministère.
L'autre, qui est la mienne, ne confond pas autorisation et obligation : les crédits votés au profit de chaque budget sont des plafonds et non des prescriptions.
Dans un monde qui évolue en permanence, seule cette seconde conception, juridiquement exacte qui plus est, permet de redéployer les crédits pour faire face aux aléas sans dégrader le plafond global arrêté par le Parlement. Si nous devions y renoncer, il n'y aurait plus, au bout du compte, de politique budgétaire.
Seconde caractéristique :
La confirmation des évaluations de recettes du PLF
En matière de recettes, le projet de loi confirme les évaluations sous-jacentes au projet de loi de finances pour 2004.
Nous maintenons notre évaluation des recettes fiscales nettes, soit 7,5 milliards de moins-values par rapport à la LFI 2003.
Les dernières orientations sont plutôt favorables : la TVA encaissée en octobre a notamment été légèrement supérieure au profil.
Mais nous ne disposons pas encore de toutes les données pour la TVA et la taxe intérieure sur les produits pétroliers et nous attendons l'acompte d'impôt sur les sociétés pour la fin d'année.
Nous maintenons également nos évaluations de recettes non fiscales, objets d'ajustements mineurs.
Troisième caractéristique
Diverses dispositions normatives
Outre les dispositions traditionnelles d'appel des crédits, le projet contient, dans le texte voté par l'Assemblée nationale, une cinquantaine d'articles. Nombre de ces dispositions visent à corriger des imperfections purement techniques.
Ces articles permettent, tout d'abord, la poursuite de la mise en oeuvre de la loi organique.
Les garanties existantes font ainsi l'objet d'une information et d'une autorisation du Parlement. Nous achevons, par ailleurs, la réforme des taxes parafiscales. Au lieu d'une cinquantaine de taxes parafiscales, nous aurons ainsi une quinzaine de taxes affectées. Les autres taxes ont été fusionnées, ou transformées en contributions volontaires ou en subventions budgétaires.
A ce propos, je voudrais fermement rappeler le principe de dévolution au budget général de l'Etat des bonis de liquidation des taxes parafiscales.
Le collectif conforte ce principe, au profit du budget annexe de la protection sociale agricole, qui se voit attribuer, dans le texte du gouvernement, 177 millions issus des bonis de liquidation des taxes de quatre organismes agricoles. Nous avons, en effet, souhaité que ces prélèvements agricoles reviennent au financement de la protection sociale des agriculteurs.
Nous aurons l'occasion d'évoquer cette disposition lors de la discussion des articles ; d'emblée, je souhaite indiquer que le gouvernement tient fermement au dispositif initial qu'il a proposé.
Afin de conforter la bonne exécution de la loi de finances, le collectif vous propose par ailleurs l'aménagement de l'aide médicale d'Etat. Ce dispositif aurait dû coûter 45 millions, selon le précédent gouvernement qui l'a créé. Il en coûte en réalité dix fois plus, tant il suscite d'abus.
Pour le maîtriser, sans lui retirer son caractère humanitaire, nous le réformons, en liaison avec François Fillon. Avec notamment, une condition de résidence de 3 mois, comme pour la CMU. Un ticket modérateur sera en outre prochainement institué.
En matière fiscale, enfin, certaines dispositions méritent d'être mentionnées.
La principale doit renforcer l'attractivité de la France et encourager la venue de cadres de haut niveau.
En effet, pour les salariés appelés par une entreprise établie à l'étranger à occuper un emploi en France, il est proposé, à compter du 1er janvier prochain, d'exonérer d'impôt sur le revenu les suppléments de rémunération liés à l'impatriation.
Seraient concernés les salariés qui n'ont pas été domiciliés dans notre pays les dix années précédant leur arrivée.
S'y ajouterait la possibilité de déduire, sous certaines conditions, du revenu imposable les cotisations versées aux régimes de sécurité sociale et de prévoyance de leur Etat d'origine.
Par cette mesure que préconisaient plusieurs rapports parlementaires, le Gouvernement souhaite renforcer les chances de la France dans la compétition internationale, et attirer des activités à haute valeur ajoutée pour créer de nouveaux emplois.
Plusieurs dispositions répondent, par ailleurs, au souci de préserver l'environnement et de garantir le développement durable.
Pour favoriser la production de carburants respectueux de l'environnement, le collectif adapte les taux de réduction de la TIPP qui seront appliqués aux biocarburants en 2004. L'assemblée nationale a introduit une novation importante, en permettant désormais l'incorporation directe de l'alcool éthylique dans les supercarburants.
Par ailleurs se poursuit le rééquilibrage de la fiscalité sur les différents modes de production d'électricité, avec :
la suppression de la taxe due par les propriétaires d'ouvrages hydroélectriques,
et le relèvement de l'imposition applicable aux réacteurs nucléaires.

Nous poursuivons, enfin, l'effort de simplification :
simplification du processus de garantie des métaux précieux,
achèvement du transfert à la direction générale des impôts du recouvrement de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur les salaires prévu par la loi de finances rectificative pour 2002.
Maîtriser la dépense, simplifier l'impôt, améliorer l'attractivité de la France, moderniser le droit budgétaire et appliquer la loi organique : le projet qui vous est soumis s'inscrit dans l'action engagée depuis près de deux ans par le gouvernement.
Je vous remercie par avance de bien vouloir l'adopter, afin de conforter cette action.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 18 décembre 2003)