Déclaration de M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie, sur l'avenir des métiers de l'industrie et leur revalorisation face aux nécessités à venir de recrutement dans les entreprises industrielles, Bercy le 27 octobre 2004.

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Circonstance : Lancement de la Campagne nationale sur les métiers de l'industrie à Bercy le 27 octobre 2004

Texte intégral

Je suis heureux de vous accueillir aujourd'hui pour le lancement de cette campagne sur les métiers de l'industrie, dont j'ai souhaité prendre l'initiative, en coopération avec les fédérations professionnelles que je salue et que je remercie de leur implication dans cette campagne.
A l'heure où notre pays est mobilisé dans la bataille de la compétitivité et la lutte pour l'emploi, j'attache un très grand prix à la réussite de cette campagne qui doit contribuer à la nécessaire valorisation des métiers de l'industrie.
Permettez-moi de saluer le travail très important accompli par le service de communication du ministère et sa directrice Mme DELEMASURE ainsi que par tous les services du ministère qui ont été mobilisés pour mener à bien à ce projet.
Pour bien faire comprendre les enjeux en cause, je voudrais brièvement établir devant vous quelques constats (I) avant de vous dire quelles formes revêtira la campagne que nous lançons (II).
I. Quelques constats tout d'abord sur la situation actuelle
1/ 1er constat : 6e du monde, l'industrie française offre de très nombreuses perspectives de carrière
L'industrie française, c'est 885 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2003, dont un tiers à l'exportation. Ce sont 150 000 entreprises, dont 21 500 emploient plus de 20 salariés, totalisent 4,2 millions d'emplois directs et en génèrent 2 autres millions dans les services.
16% des jeunes entrés cette année dans la vie active ont intégré une entreprise industrielle. La proportion est encore plus forte pour les jeunes diplômés : 23 % des jeunes qui ont achevé leurs études en 2004 avec un bac + 4, ou plus, ont été recrutés dans l'industrie.
Le degré de satisfaction des jeunes par rapport à l'emploi industriel est d'ailleurs plutôt bon. Les trois quarts des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur long, issus de spécialités industrielles, et les titulaires de BTS ou de DUT se disent employés à leur niveau de compétence voire au-delà.
31 % des entreprises du secteur industriel prévoient de commencer l'année 2005 avec des effectifs en augmentation par rapport à il y a un an. C'est dire que les opportunités existent bien dans l'industrie.
Les intentions d'embauche sont importantes puisque 26,7 % des entreprises industrielles veulent recruter, chiffre à peu près identique pour les services à l'industrie (26,4 %). Au total, tous les secteurs de l'industrie annoncent 120.000 projets de recrutements.
Je veux souligner que cette réalité sera accentuée dans les années à venir sous l'effet mécanique des départs à la retraite et de la nécessité de pourvoir les postes laissés vacants. Les perspectives d'emplois liées aux besoins de remplacement sont évaluées à plus d'un million d'embauches.
Tous les domaines industriels vont devoir recruter dans les prochaines années, notamment pour certains métiers comme ceux d'informaticiens, d'ouvriers qualifiés, de techniciens et d'ingénieurs.
2/ Or, paradoxalement, les entreprises industrielles et de services à l'industrie rencontrent de réelles difficultés de recrutement
Il nous faut constater, pour le déplorer, que les filières technologiques de formation manquent de candidats, alors même que l'industrie a du mal à recruter, à tous les niveaux de compétences, depuis les opérateurs qualifiés jusqu'aux ingénieurs et cadres, et ce dans toutes les branches d'activité.
Les acteurs économiques nous alertent régulièrement sur leurs difficultés de recrutement et sur l'adaptation insuffisante de la main d'oeuvre aux besoins de l'économie.
Les facteurs d'explication de cette mauvaise adéquation entre l'offre et la demande sont naturellement multiples. Mais je crois que l'on peut y voir le signe d'une mauvaise image du secteur industriel par les demandeurs d'emplois.
D'abord, la culture technique s'est dépréciée car elle a souffert d'une confusion entre les métiers de l'industrie et le travail manuel, lui-même associé à l'idée de pénibilité.
Ensuite, force est de constater que la réalité de l'activité industrielle, la diversité des métiers, les conditions de travail et les perspectives de carrière dans l'industrie sont largement méconnues. Je crois d'ailleurs que c'est dès l'école que se construit l'image que le jeune, une fois arrivé à l'âge adulte, pourra avoir du monde de l'industrie. Or, nous avons un gros effort à entreprendre dans ce domaine.
Enfin, les besoins de recrutement des entreprises industrielles sont mal évalués. A l'évidence, la médiatisation de certains plans sociaux, l'impact de délocalisations sur le tissu local contribuent à une image négative.
Cette perception négative se reflète dans l'orientation scolaire et professionnelle des jeunes. A l'exception des écoles d'ingénieurs, dont les effectifs ont augmenté de plus de 60 % au cours de la dernière décennie, la part des jeunes s'orientant vers les spécialités de production n'évolue pas depuis plusieurs années, quels que soient la filière et le niveau de diplôme préparé.
Je veux en particulier relever les choix d'orientation des jeunes filles qui se concentrent dans le domaine des services, alors même que les métiers de l'industrie leur sont désormais largement ouverts.
Par exemple, 88 % des jeunes filles, en cas d'orientation en BEP, choisissent des spécialités de services. Cette surreprésentation des services dans leur choix d'orientation se retrouve également pour celles d'entre elles qui préparent un bac technologique : 67 % des demandes d'orientation en sciences et technologies tertiaires sont le fait de jeunes filles. Enfin, le métier d'ingénieur est rarement évoqué (8 %) par les jeunes filles dans leurs choix d'orientation.
Pour autant, nous ne devons pas nous laisser gagner par le pessimisme. Les jeunes sont aussi plus ouverts à évoluer dans des secteurs pour lesquels ils éprouvaient auparavant des réticences, l'automobile ou l'aéronautique par exemple.
J'y vois le signe que l'attractivité des entreprises dépend d'abord de la capacité des entreprises à répondre positivement aux attentes des jeunes quant à leur vie professionnelle et donc à donner des métiers qu'elles proposent une image valorisante.
II. Dans ce contexte, la campagne que nous lançons a évidemment une grande importance et je voudrais vous la présenter brièvement maintenant
1/ Permettez-moi d'abord de rappeler que le ministère n'a pas pris seul cette initiative destinée à revaloriser les métiers de l'industrie
Il a choisi d'organiser cette campagne avec le Groupe des fédérations industrielles (GFI), le Comité de liaison des industries de main d'oeuvre (CLIMO) et les entreprises industrielles.
Comme je l'ai indiqué, l'attractivité des métiers de l'industrie est d'abord l'affaire des entreprises qui détiennent les clés dans ce domaine, même si naturellement l'Etat, en particulier à travers l'appareil de formation et la formation tout au long de la vie, doit naturellement jouer tout son rôle.
L'objet de la campagne est de revaloriser les métiers de l'industrie auprès des élèves des lycées et collèges, des étudiants du premier cycle de l'enseignement supérieur et des jeunes diplômés en recherche d'emploi.
Elle s'adresse aussi à l'ensemble des prescripteurs en matière d'orientation professionnelle, en particulier les parents d'élèves et leurs fédérations, les enseignants et les organismes spécialisés.
2/ Comment va s'organiser la campagne ?
Elle s'articule autour de deux actions principales. : le parrainage d'émissions sur M6 et un jeu interactif sur Internet.
Les émissions, composées de programmes courts, présenteront des exemples concrets de parcours professionnels réussis dans l'industrie. Des jeunes témoignent de leur métier, de ce qu'ils contribuent à réaliser, et comment eux-mêmes se réalisent professionnellement.
Le jeu interactif, récompensé par des prix attractifs, sollicitera la curiosité des joueurs et les incitera à découvrir activement, dans une démarche ludique, les métiers de l'industrie.
Ceux qui souhaiteront aller plus loin pour satisfaire leur curiosité et enrichir leurs connaissances sur le secteur, pourront " naviguer " sur les rubriques du site internet http://www.industrie-jeunes.fr, qui propose également des liens avec les sites des partenaires industriels de l'opération.
La signature de la campagne prendra la forme d'un message simple, direct, positif et valorisant : " Avec l'industrie, mon aventure commence ". Ce message exclut toute démagogie car l'aventure c'est aussi le risque : l'accepter, c'est aussi la vivre de manière positive.
Naturellement, nous devons rester modestes. Notre objectif n'est pas, en quelques mois, de changer en profondeur l'image de l'industrie mais plus simplement de mieux la faire connaître, de susciter la curiosité et de faire comprendre aux jeunes de manière très concrète comment ils pourraient trouver dans l'industrie une réponse à leurs aspirations professionnelles.
Pour finir, je voudrais signaler que cette campagne sur les métiers sera relayée au mois de mars par le Printemps de l'Innovation, dont le but est de fêter notre industrie et sa capacité d'innovation, à travers différentes actions : organisation de journées nationales du patrimoine industriel, de débats entre acteurs et experts de l'innovation, création d'un label du produit innovant, et bien d'autres initiatives encore.
Je vous remercie.

(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 29 octobre 2004)