Déclaration de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur le rôle du Conseil supérieur des Français de l'étranger (CFSE), la scolarisation et la protection des Français expatriés et sur les axes généraux de la politique étrangère de la France, Paris le 2 octobre 1998.

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Circonstance : Déjeuner offert en l'honneur des sénateurs et des délégués du Conseil supérieur des Français de l'étranger (CSFE) à Paris le 2 octobre 1998

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs les Délégués,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de me retrouver à nouveau parmi vous à l'occasion de ce déjeuner et à l'occasion de cette Assemblée plénière du Conseil supérieur des Français de l'étranger. Je crois que cette Assemblée plénière, qui coïncide avec le cinquantenaire depuis la création en 1948 du CSFE était très dense. L'ouverture des travaux lundi dernier par le Premier ministre auxquels j'ai assisté, puis la réception du CSFE par le président de la République à laquelle malheureusement je n'ai pas pu assister car je suis arrivé juste après la fin pour cause de "Kossovo", ont démontré l'intérêt que portent les plus hautes autorités de l'Etat à la situation de nos compatriotes de l'étranger et aux activités du Conseil supérieur. Mais cela vous le savez déjà et c'est bien d'avoir cette occasion solennelle de le redire.
Votre Assemblée plénière s'est ensuite poursuivie par de multiples réunions de vos commissions au cours desquelles, nombre de sujets qui sont au coeur des préoccupations des Français de l'étranger que vous représentez ont été débattus. Le directeur des Français de l'étranger ici présent, M. Lafon, m'a informé des résultats de vos travaux. Sur tous les thèmes que vous avez abordés, - audiovisuel extérieur, réforme de la coopération, conséquence de l'introduction de l'euro, scolarité à l'étranger, problèmes fiscaux et d'assurances liés à l'expatriation, d'autres thèmes encore -, il y a eu des interlocuteurs de haut niveau, vraiment compétents qui ont pu compléter votre information, recueillir vos suggestions et entendre le point de vue des Français de l'étranger. Cette Assemblée est faite pour cela.
Le Premier ministre s'est longuement exprimé devant vous lundi dernier sur la politique du gouvernement à l'égard des Français de l'étranger. Je crois que les orientations qu'il a tracées, les annonces qu'il a faites concernant les moyens budgétaires affectés à cette politique ont été favorablement recueillis d'après ce que j'ai ressenti, d'après ce que j'ai compris, par votre Conseil supérieur. Je ne vais évidemment pas répéter ses propos mais je voudrais revenir en insistant sur quelques uns des points qu'il a mentionné à cette occasion.
Beaucoup d'entre vous se souviendront que, l'an dernier, en ouvrant vos travaux, j'avais dressé devant vous, une sorte de plan d'actions aussi précis que possible en faveur des Français de l'étranger. J'avais identifié plusieurs domaines : protection sociale, scolarité, dispositif en faveur de l'emploi à l'étranger, sécurité des communautés françaises, modernisation de l'administration en charge des Français de l'étranger. Ces domaines m'avaient été signalés par mes services qui sont à votre contact quotidien et qui connaissent bien vos problèmes et dans lesquels on avait indiqué que, non seulement il fallait faire des progrès mais que l'on pouvait faire des progrès.
Tout au long de l'année qui s'est écoulée depuis, M. Lafon et son équipe, les autres services concernés du Quai d'Orsay, mon cabinet ont avancé dans ce plan d'actions. Un important travail a été accompli dont je crois que vous commencez à mesurer les effets.
Sur quelques dossiers précis, - même si je sais bien qu'il y a beaucoup à faire encore, et croyez-moi nous allons continuez bien sûr -, la situation me paraît plus favorable qu'elle ne l'était il y a un an. Ce mérite revient, - je vais le resaluer comme chacun d'entre vous le fait - au directeur et à ses collaborateurs. Vous connaissez leur dévouement, vous constatez leur dévouement.
M. Lafon est rouge de confusion, mais ces applaudissements sont bien mérités. Ils s'étendent bien entendu à tous ses collaborateurs. Vous connaissez leur dévouement à tous et vous avez pu constater leur disponibilité. Je connaissais bien le ministère des Affaires étrangères avant d'être dans ces fonctions, mais je ne connaissais pas spécialement cette direction. En fait, c'est celle avec laquelle j'avais eu moins l'occasion de travailler.
Je dois vous dire que, depuis maintenant quinze mois, j'ai à la fois vérifié - ce que vous connaissez ; c'est-à-dire le dévouement et la disponibilité mais j'ai constaté plusieurs autres choses très intéressantes. Le caractère central des fonctions diverses de cette direction par rapport à la vie du ministère et à la vie internationale. Le caractère interministériel de cette direction et le contact quotidien du ministère de l'Intérieur, de la Justice, de la Défense, des Finances, j'en oublie... C'est très important parce que c'est tout à fait dans ce sens-là que je souhaite voir évoluer l'ensemble du ministère des Affaires étrangères, comme remplissant une fonction éminente, centrale, mais dans une relation normale, déformalisée, rapide, efficace avec toutes les autres administrations. En plus, dans certaines de ses fonctions, la DFAE est une sorte de vitrine du service public du ministère des Affaires étrangères. Elle doit projeter, elle y parvient très largement, l'image d'une administration moderne, réactive, soucieuse de l'accueil du public. C'est une préoccupation qui, je le sais, qui habite M. Lafon et nous progressons vraiment sur ce plan. Lorsque je dis public, il y a le public français mais aussi le public étranger avec lequel nous sommes en relation à Paris, à Nantes ou dans les consulats. Il faut que ce soit une relation humaine, une relation mutuellement respectueuse et une relation efficace. Et c'est tout un programme de travail qui est derrière ces simples mots.
Je parlais du travail qui a été accompli ces derniers mois : priorité accordée à la sécurité des communautés françaises, puisque malheureusement le problème se pose et il se pose plus que jamais, comme j'ai dit par euphémisme à l'Assemblée générale des Nations unies : le monde n'est pas en train de progresser spontanément vers l'harmonie n'est-ce pas ?
Modernisation du service central de l'état civil, introduction soutenue des nouvelles technologies de l'information en matière d'administration des Français de l'étranger, mise en oeuvre d'une nouvelle politique de l'adoption internationale, à la suite de la ratification par la France de la Convention de La Haye, lancement d'un programme d'aménagement d'urgence de plusieurs consulats où la qualité de l'accueil devait être impérativement améliorée. D'ailleurs, j'ai l'intention de me rendre dans l'un d'entre eux pour montrer de façon spectaculaire les changements intervenus. Je n'ai pas encore choisi les endroits mais il faudra je crois attirer l'attention sur ce qui est pour moi, le début d'une démarche.
Nouvelle modalité de notre politique des visas qui était menée en étroite collaboration entre Jean-Pierre Chevènement, Claude Allègre et moi, relance de plusieurs négociations en vue de régler d'anciens contentieux en matière de biens, en particulier avec la Tunisie, avec Madagascar et d'autres cas aussi. Je rappelle ces points simplement pour souligner devant vous, pour dire devant vous, solennellement, que ces actions étaient indispensables, qu'elles avaient été entamées avant dans certains cas, dans d'autres, c'est moi qui les ai entamées. Il faut de toute façon les poursuivre et elle doivent être approfondies sans relâche au cours des prochains mois, nous avons un important programme de travail devant nous.
Sur deux domaines qui vous tiennent tout particulièrement à coeur : la scolarisation des enfants de nos compatriotes à l'étranger et la politique sociale au profit des Français de l'étranger en situation précaire, vous avez entendu le Premier ministre vous faire part de mesures positives inscrites au budget 1999. Elles traduisent clairement le souci porté par le gouvernement aux préoccupations que vous avez, que vous aviez maintes fois exprimées. Je les rappelle encore : l'accroissement de 20 millions de Francs des bourses scolaires qui portera les crédits de bourse à 217 millions de Francs en 1999, et ce qui permettra, je l'espère, de soulager l'effort de nombreuses familles françaises pour qui, la scolarisation de leurs enfants, dans le réseau de l'AEFE peut représenter un véritable sacrifice financier. Cet accent marqué sur les bourses et que je souhaite poursuivre dans les budgets suivants, on ne sait jamais ce que seront les budgets suivants mais j'exprime une volonté-là ne doit pas résumer à lui seul notre politique scolaire à l'étranger.
Vous avez à cet égard pris note des propos du Premier ministre sur l'implication souhaitable - il l'a dit avec prudence - comme en tant qu'ancien ministre de l'Education nationale, mais il l'a dit quand même, l'implication souhaitable du ministère de l'Education nationale dans les activités de l'AEFE. Le directeur des Français de l'étranger m'a indiqué qu'une partie importante de vos débats de cette semaine avait porté sur cette question. Je mesure parfaitement la sensibilité qu'elle revêt pour le Conseil Supérieur. Je compte poursuivre avec Claude Allègre les discussions que j'ai déjà entamées avec lui sur les responsabilités respectives de nos deux administrations en matière d'enseignement à l'étranger. J'ai poursuivi cette conversation hier matin et ce matin, avec lui après avoir entendu les propos de lundi. Hier, c'était en attendant le début d'une réunion de ministres qui a lieu régulièrement, et ce matin, c'était en attendant le début de la séance plénière que nous avions avec le Premier ministre marocain. Sur beaucoup de plans, nous avons essayé de relancer les choses dans les relations entre les deux maisons.
Il y a ce point dont je parlais qui vous concerne tout particulièrement mais aussi beaucoup d'autres sujets où l'Education et les Affaires étrangères travaillent main dans la main. Il y a énormément de choses que l'on peut développer en se tournant vers l'avenir. Je pense à toutes les réflexions que nous menons en matière d'offre française de formation de haut niveau par rapport au marché mondial de formation.
L'effort en question est fait avec un certain mérite car nous sommes dans un budget pour l'essentiel reconduit à l'identique. Il y a une petite baisse apparente mais qui n'en est pas une car elle correspond à une diminution de certains crédits de l'ancien ministère de la Coopération qui sont en déclin normal car c'est un type d'intervention qui se fait de moins en moins par rapport aux économies africaines. En fait, nous avons un budget reconduit. L'effort fait dont je vous parle est fait par redéploiement, - ce sont des arbitrages internes je le souligne.
Second domaine sensible, évoqué aussi, c'est celui de la protection sociale à l'étranger. Je crois que les voeux maintes fois exprimés dans le passé par le CSFE ont été entendu puisqu'avec 10 % d'augmentation nette de nos crédits d'aide sociale à l'étranger pour la prochaine année, nous allons pouvoir mieux répondre à ces situations souvent difficiles que vous connaissez, là de façon très directe, vous êtes souvent face à ce désarroi. Nous allons être confrontés dans les années qui viennent à des évolutions dont il faudra bien que l'Etat tienne compte sur le plan social. L'apparition de phénomènes de paupérisation de certaines catégories de Français résidant à l'étranger m'a frappé dans mes tous premiers voyages, au Maghreb, en Afrique notamment. Conséquence tirée de la multiplication de situation de binationalité qui complique tout, car toutes nos approches et toutes nos réponses, on pourrait presque se demander systématiquement, quelles sont les conditions d'application, et ce qu'elles signifient, selon que l'on a à faire à des nationaux ou à des binationaux. C'est toujours un peu plus compliqué.
Dans le même temps, la comptabilité de nos aides sociales versées à des ressortissants Français en Europe, au regard de la réglementation communautaire devra être modifiée, c'est une obligation. Notre commission des affaires sociales s'est saisie cette semaine de cette question cruciale pour nos compatriotes. Le CSFE doit bien entendu continuer à être le lieu de débats privilégiés d'analyses de ces problèmes et d'évaluation des solutions. M. Jean-Pierre Lafon, en me rendant compte de vos travaux de cette semaine m'a indiqué que d'autres thèmes avaient également retenu votre attention.
L'avenir du service national de coopération avec la perspective du débat prochain d'un projet de loi créant un volontariat à l'étranger sur lequel le CSFE sera formellement consulté comme sur les questions touchant à l'organisation et au fonctionnement des services de l'Etat à l'étranger, consulat en particulier, avec le souci légitime qui vous anime de maintenir la qualité du service public rendu aux usagers, de maintenir ou de rétablir.
Je relève aussi que vous avez débattu, - et je m'en réjouis -,de plusieurs sujets d'actualité qui sont au coeur des projets de réforme que je conduis depuis ma prise de fonction : réforme de nos instruments d'aide au développement, évolution de notre politique audiovisuelle extérieure en particulier. Je souhaite que sur ces dossiers très importants, le CSFE soit non seulement consulté mais qu'il émette également des avis qui puissent aider le gouvernement à orienter le plus efficacement possible ses actions. Vous pouvez être assurés, mesdames et messieurs les membres du Conseil supérieur des Français de l'étranger que j'aurai à coeur, tout au long de ces prochains mois, de veiller à l'association étroite du Conseil supérieur à ces débats.
Cette 51ème assemblée plénière s'achève, vous vous apprêtez à retourner, pour la majorité d'entre vous dans vos différents pays de résidence. Je souhaite que vous fassiez l'échos auprès de nos compatriotes que vous représentez de la volonté du président de la République, du Premier ministre, du gouvernement tout entier de contribuer, autant qu'il nous est possible à l'amélioration de leur situation et aux règlements de leurs problèmes.
Je ne veux pas terminer cette petite intervention sans vous dire un mot général du contexte mondial dans lequel nous avons à travailler aujourd'hui et des axes généraux de la politique étrangère de la France. Vous la connaissez bien sûr, je ne vais pas reprendre sujet par sujet. Je voudrais simplement vous dire que nous sommes dans une période préoccupante. C'est un mot dont on abuse dans le langage diplomatique et dans les communiqués : on se dit préoccupé tous les jours par quelque chose ? Qu'est-ce que je trouve réellement préoccupant ? C'est qu'après les illusions d'il y a quelques années, après la fin de la guerre froide, nouvel ordre international, ce genre de vision sympathique mais malheureusement irréaliste, on voit au contraire se développer des conflits de toute sorte, des phénomènes qui échappent à tout contrôle et monde paraît moins contrôlé, moins canalisé, moins régulé que depuis longtemps. Si on relit, comme je l'avais fait avant d'aller à l'ONU la charte des Nations unies, l'écart entre les nobles aspirations qui y sont inscrites et la façon dont les choses se passent est frappante aujourd'hui.
Dans le monde actuel, il n'y a pas moins d'une trentaine de conflits mettant aux prises une cinquantaine d'Etats sur des continents variés, ce qui est beaucoup sur les 185 Etats au monde. L'Afrique, le Moyen-Orient, l'Asie centrale, l'Asie sont plus touchés que l'Europe ou les Amériques. Mais il y en a aussi en Europe et en Amérique. Je mets tous les types de conflits, qu'ils soient classiques où un pays envahi son voisin ou plus contemporains, plus modernes dans lesquels on voit des Etats qui implosent, qui se déstructurent. Et quand les structures d'Etats se délitent, on voit d'abord que tous les fondements de base de l'ordre public et de la paix civile s'effondrent. Cette situation permet un nouveau développement de toutes les formes les plus anciennes, les plus ancestrales de la haine entre les différents types humains. Mais cela rend encore plus difficile et encore plus vaine, la lutte qu'il faut pourtant mener contre les phénomènes de grande criminalité ou autre. Ces phénomènes sont déjà difficiles à traiter par des Etats efficaces et normalement organisés.
Il y a donc une situation qui mérite toute notre attention, tous nos soins. A ceci s'ajoute la crise financière qui ne frappe en général pas les mêmes Etats. Il y a peu d'Etats qui soient touchés par les deux phénomènes. Un peu la Russie, qui est le siège d'une crise financière particulière, liée à 90 % à des causes russes, même s'il y a des phénomènes annexes de contagion dont elle peut souffrir ou dont elle peut faire souffrir d'autres. Mais c'est un pays qui est touché aussi notamment sur ses frontières sud par ces phénomènes de guerre ou de guerre civile ou de désagrégation des structures étatiques.
Dans la plupart des autres cas, ce ne sont pas les mêmes zones. Donc cela s'additionne. Qu'il s'agisse du Japon, d'autres pays du sud-est asiatique, la Russie, l'inquiétude sur l'Amérique latine avec les phénomènes de rebond, il n'y a pas tellement de zones dans la planète, à l'heure actuelle qui échappent à ces facteurs de déstabilisation et d'inquiétude.
En Europe, notre Europe, l'Union européenne, dans laquelle on a le sentiment, jusqu'à un certain point que l'euro fonctionne par avance, comme un bouclier et comme un système dissuasif par rapport aux déstabilisations monétaires, les facteurs de déstabilisations sont là. Lorsque l'on regarde l'économie de la drogue par rapport au PNB mondial et le contraste est effrayant lorsque l'on regarde la quantité de masses financières, des masses cycloniques, lorsque l'on regarde les masses financières par rapport aux moyens d'intervention de l'ensemble des banques centrales du monde et des institutions financières dans leur état actuel, il est clair que les moyens d'interventions sont insuffisants.
En 1970, les capitaux qui pouvaient circuler librement étaient l'équivalent du PNB mondial de l'époque. Aujourd'hui, c'est 17 fois les capitaux qui peuvent circuler instantanément en plus sur un marché qui s'est élargi, qui s'est étendu, 17 fois, le PNB mondial. Il n'y a aucune force qui soit, aujourd'hui, ni réglementairement puisqu'il n'y a pas de règlement international, ni légalement, car il n'y a pas de loi internationale. Il y a un marché mondial mais il n'y a pas d'état mondial. Il n'y a pas les moyens de canalisation. Sur le plan monétaire et économique, il n'y a pas non plus ces moyens-là.
Je ne pouvais pas laisser passer cette occasion sans vous dire quelques mots à ce sujet. En dehors de ce que fait la politique étrangère française constamment et vous connaissez bien tous les efforts que l'on fait pour l'Europe, pour le processus de paix, pour aider l'Afrique à se stabiliser sur tous les sujets sur lesquels nous sommes présents, nous essayons d'être inventifs et utiles bien sûr. En dehors de cela, nous avons une obligation plus générale aujourd'hui, qui est de participer activement à tout ce qui pourra renforcer les organes de régulation dans le monde.
Il y a le Conseil de sécurité qui est important mais vous en connaissez les limites. C'est vrai que depuis la fin de la guerre froide, il n'est plus paralysé automatiquement par le droit de veto mais son usage n'est pas pour autant aisé et ses pouvoirs ne sont pas illimités. D'autre part, sa légitimité s'est un peu affaiblie avec le temps, c'est pour cela qu'il faut l'élargir pour qu'il redevienne légitime en étant mieux représentatifs mais qu'il demeure pour autant efficace. La solution de cette équation n'est pas évidente.
Il y a le G7/G8 qui a eu un immense mérite. Il a été créé en 1975 par le président Valéry Giscard d'Estaing et Helmut Schmidt et a eu l'immense mérite durant la première période de crise de canaliser les politiques économiques nationales. Sans cela, celles-ci auraient pu diverger, s'opposer et généraliser une crise qui aurait pu être beaucoup plus terrible qu'elle n'a été. On voit bien que le G7/G8 aujourd'hui, lui aussi atteint ses limites. Il a du mal à aborder cette réalité notamment parce que, si on rassemble les Etats, finalement, on rassemble des Etats qui, eux-mêmes ont tous perdu du terrain par rapport à tous les phénomènes légaux ou illégaux que les Etats ne contrôlent plus.
L'Union européenne progresse, l'euro est une immense avancée mais elle a les moyens, jusqu'à un certain point, de stabiliser sa propre zone. Cependant elle n'a pas les moyens par magie ou par miracle d'aller stabiliser des zones tout à fait éloignées. Il y a beaucoup d'organisations dans le monde qui sont des coquilles vides ou qui n'ont pas d'influence véritable sur les choses, ce sont des cadres formels. L'organisation des Etats américains n'existe pas en tant que telle. L'OUA n'arrive pas à régler les problèmes qui la concernent etc...
Nous avons donc une obligation et nous le faisons activement aussi bien, s'agissant du Conseil de sécurité que s'agissant des grands sommets, de l'Union européenne, du FMI, des institutions de Bretton Woods. Nous sommes aussi bien le président de la République, le Premier ministre, le ministre M. Strauss-Kahn ou moi, très engagés sur ce terrain. C'est aujourd'hui une vraie urgence, une vraie nécessité, comme une sorte de clef de voûte qui doit donner sa cohérence générale aux actions que nous menons sur tous les autres plans.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 octobre 2001)