Tribune de M. Jean-Luc Cazettes, président de la CFE-CGC, dans "Les Echos" du 9 juin 2004, sur l'oppposition de la CFE-CGC au projet gouvernemental de réforme de l'assurance maladie.

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Circonstance : Avis favorable du conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) sur le projet de loi de réforme de l'assurance maladie le 9 juin 2004

Média : Energies News - Les Echos - Les Echos

Texte intégral

Les soucis de l'égalitarisme et du racket, au nom de la solidarité, sont toujours aussi vivaces au pays de Marat et d'Hébert ! C'est ainsi que de soi-disant intellectuels regroupés au sein d'un comité Cicéron ont trouvé la solution aux problèmes récurrents de l'assurance-maladie. Cette solution miracle, que nous sommes tous trop bêtes, les uns et les autres, pour l'avoir imaginée, c'est de rendre la CSG progressive et d'exclure les plus aisés (notion éminemment subjective) de la Constitution pour qu'il soit bien clair que " le droit aux prestations sociales a lieu sous conditions de ressources ". Et les auteurs de ce merveilleux projet de préciser qu'ainsi 50 % de la population pourraient être écartés des remboursements, qu'ils auraient à s'assurer et nourriraient ainsi un système privé plus performant, etc.
On aura ainsi quasiment bouclé la boucle entre ceux qui bénéficieront de toutes les faiblesses et de toutes les attentions des pouvoirs publics, et ceux qui n'auront qu'un droit, celui de payer toujours plus pour obtenir toujours moins. L'exception française, c'est aussi d'être le pays européen qui fait peser le poids de l'impôt sur une partie de plus en plus réduite de sa population. En France, moins de 50 % de la population paient l'impôt alors qu'en Allemagne, au Danemark ou dans les pays nordiques ce taux dépasse les 80 %.
Et ça ne décourage personne de continuer le racket sur les catégories moyennes, dont l'encadrement représente la plus grosse part. Mais ces honorables, et sans doute respectables personnages, semblent ignorer la nature concurrentielle du monde où nous vivons et la volonté de la Commission de Bruxelles d'introduire la concurrence dans nos modèles sociaux. Or Bruxelles n'exonère du principe de la concurrence que lorsqu'il y a proportionnalité entre cotisations versées et prestations perçues.
Soyons clairs : les cadres, les techniciens, les agents de maîtrise, qui sont déjà les "vaches à lait, les cochons de payant et les moutons à tondre ", refuseront ce qui ne sera plus de la solidarité, mais du vol. Pour l'encadrement, je présenterai immédiatement devant les autorités de Bruxelles une demande d'exemption de la Sécurité sociale française, pour passer éventuellement un contrat avec un groupe d'assurance privé. Si nos populations ont tout à y gagner, je ne suis pas sûr que cela n'entraînera pas un surcoût important pour l'Etat et pour les autres assurés sociaux. Alors que chacun réfléchisse bien sur la limite entre la solidarité et l'exclusion, en sachant que nous ne nous laisserons pas faire.

(source http://www.cfecgc.org, le 11 juin 2004)