Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Ministres ,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs ,
Mesdames et Messieurs les Représentants des institutions internationales,
Mesdames et Messieurs les Représentants de la société civile,
Je suis très heureux et très honoré de prendre la parole aujourd'hui, en conclusion de cette première journée du Forum Union européenne-Afrique sur le coton. La France, vous le savez, s'est proposée pour accueillir ce Forum, organisé à l'initiative et sur l'invitation de la Commission européenne, à laquelle j'adresse mes sincères remerciements.
La culture du coton est en Afrique une activité vitale. Localisée principalement dans des régions géographiques très souvent démunies et sujettes à un important exode rural, elle joue un rôle essentiel pour combattre la pauvreté. Pauvreté qui, sur ce continent - ai-je besoin de le rappeler ? - est d'abord rurale.
En une trentaine d'années, les filières cotonnières ont connu un essor exceptionnel. Ce développement est le produit de politiques volontaristes, dans lesquelles la France a pris une part souvent déterminante avec certains pays africains.
Cependant, nous avons tous pu mesurer combien ce succès est fragile. Non seulement, ces pays dépendent encore beaucoup trop de l'activité et des revenus de la filière : c'est là hélas un problème de développement bien connu. Mais aussi et surtout, la filière est elle-même soumise à une organisation mondiale du marché et aux politiques agricoles nationales qui fragilisent les positions des pays producteurs.
Ainsi, la baisse des cours observée au début de cette décennie et leur volatilité, liée notamment à l'impact des subventions à la production dans plusieurs pays, viennent souligner les inconvénients d'une dépendance excessive des pays producteurs. Ces aspects sont bien connus de vous, je n'y insisterai pas.
Mais cette situation n'est pas une fatalité. Le développement de la production de coton, joint à l'ouverture des marchés, offre une occasion pour les producteurs de tirer parti de la mondialisation. C'est bien l'objet de ce Forum que de chercher à y contribuer, ensemble.
La France, vous le savez, est historiquement engagée aux côtés de nombre de pays producteurs dans la mise en place de filières cotonnières : elle y a consacré pas moins de 800 millions d'euros d'Aide publique au développement (APD) sur 30 ans sans interruption.
Elle s'y investit aujourd'hui encore au nom de la lutte contre la pauvreté, qui est le premier des objectifs du Millénaire pour le Développement. Et, à y regarder plus près, bien d'autres de ces objectifs - la mortalité infantile, l'accès à l'eau potable pour ne citer que ces deux-là - ne sont-ils pas aussi de fait recherchés à travers le développement de la culture du coton ?
Permettez-moi d'insister sur ce point auprès de tous les donateurs : l'appui aux filières cotonnières a réellement un caractère global et stratégique pour le développement.
C'est bien pour cette raison que le président de la République a été à l'origine d'une initiative commerciale pour l'Afrique en février 2003. C'est pour cette raison également qu'il a proposé, lors de son voyage au Niger et au Mali en octobre dernier, qu'une initiative européenne en faveur des producteurs de coton soit lancée.
Cette initiative, que la Commission européenne a reprise à son compte et a conduite depuis lors avec beaucoup d'efficacité et d'engagement, a connu des développements importants, dont notre réunion d'aujourd'hui n'est pas le moindre. Ai-je besoin de rappeler que nous soutenons totalement cette initiative et que nous y contribuerons comme nous n'avons cessé de le faire depuis son lancement ?
Il importe d'ailleurs de souligner l'approche qui a été retenue. En effet, la question cotonnière, et tout particulièrement telle qu'elle se pose en Afrique, n'est pas seulement un problème commercial, comme l'actualité tendrait à le laisser croire ; c'est aussi un problème de développement et il revient aux porteurs de l'initiative de bien traiter ensemble ces deux problèmes.
S'agissant des aspects commerciaux, je ne reviendrai pas sur le chemin parcouru. Mais je tiens à saluer le travail accompli par l'Union européenne, dont témoignent aussi bien sa décision de révision, pour le coton, de l'organisation commune du marché que la revendication d'un traitement spécifique du coton au sein de la négociation agricole à l'Organisation mondiale du Commerce. Ce sont là des actes à mettre au crédit de la cause des pays producteurs de coton.
En ce qui concerne le développement, l'enjeu est considérable. Il s'agit ni plus ni moins de placer les régions cotonnières sur une voie de croissance et de développement durable qui, par-delà une meilleure compétitivité, et donc une augmentation des revenus, favorisera l'accès des populations aux services de base et introduira une gestion à long terme des espaces et de ressources naturelles.
Je sais que la coopération française aura l'occasion, au cours de ces deux journées, de présenter les éléments d'une stratégie d'appui au développement des filières cotonnières, à titre de contribution à l'élaboration du partenariat Union européenne-Afrique.
Permettez-moi de m'arrêter sur deux aspects de cette stratégie qui me semblent particulièrement importants.
Tout d'abord, le développement des filières cotonnières passe par le succès des réformes structurelles, les privatisations. Je ne reviendrai pas sur les raisons de réussir ces privatisations. Celles-ci doivent s'inscrire dans des échéances rapprochées et réalistes. Mais elles ne doivent pas être conduites au prix de la remise en cause de l'intégration des filières, et notamment de la disparition des services collectifs qu'elles rendent aux producteurs. Tout est affaire de rythme et d'équilibre.
Dans ce processus, il appartient aux organisations de producteurs de prendre toute leur place - notre coopération y travaille - et aux autorités de tenir leurs engagements.
Mais le développement des filières impose aussi de savoir investir pour demain. J'entends dire ici et là que le coton africain, pourtant de la meilleure qualité qui soit, voit ses rendements stagner. Ou que la concurrence de nouveaux pays producteurs performants pourrait bien évincer les Africains du marché.
C'est là une évidence. Faute de faire les investissements utiles en recherche-développement pour préserver la fertilité des sols ou pour développer la qualité de la fibre, on peut craindre la marginalisation des producteurs africains mais aussi l'épuisement des ressources et la dégradation durable des espèces.
Je sais que la recherche française - et notamment le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) - accompagne sur ce terrain les systèmes nationaux de recherche agronomique, et je m'en félicite. Mais il nous faut faire plus et je voudrais inviter l'Union européenne, les autres Etats membres et tous les donateurs à accorder à cette dimension une place plus importante en coopération.
Il faudra notamment contribuer au débat sur les intérêts et les risques que présentent pour les pays producteurs les cotons génétiquement modifiés.
Il faudra aussi probablement envisager d'apporter à ces pays un soutien en matière de formation, de même qu'un appui institutionnel, les aidant à maîtriser cette innovation.
Sans des femmes et des hommes sensibilisés et formés, il est illusoire de prétendre se donner les moyens d'appliquer le principe de précaution. Ce doit être, me semble t-il, une composante importante de notre partenariat.
Permettez-moi, Messieurs et Mesdames, de rappeler pour terminer à quel point l'enjeu de notre réunion est considérable et dans quelle urgence nous nous trouvons.
Il s'agit de mettre notre capacité d'action et notre APD au service d'une activité économique dont l'avenir met en jeu la survie de 15 millions d'Africains parmi les plus pauvres. Si rien n'était fait, l'Afrique pourrait bien voir ses capacités de production de coton disparaître très rapidement, avec toutes les conséquences que l'on imagine.
Aussi, je formule le voeu que le partenariat Union européenne-Afrique puisse démarrer dans les meilleurs délais. Sur le plan commercial, la cause progresse, et c'est sur le terrain du développement que nous devons nous mobiliser.
Quand bien même en effet, la négociation commerciale tournerait à l'avantage des pays africains producteurs, cela ne saurait dispenser de faire les efforts de compétitivité nécessaires. Ce sont là les conditions indispensables d'une intégration réussie, sur le long terme, à l'économie mondiale.
Cette mobilisation ne sera pas l'oeuvre des seuls partenaires de l'Afrique. Il est indispensable qu'elle soit d'abord celle de nos amis africains et surtout, sur le terrain, celle des agriculteurs et de leurs organisations, qui devront prendre part à son pilotage.
Je tiens à le dire aux représentants des plus importantes organisations paysannes africaines qui sont parmi nous aujourd'hui : mon souhait est que ce partenariat soit le leur et qu'il contribue à ce qu'à terme, les filières cotonnières soient totalement leur affaire.
La France, le ministère des Affaires étrangères, l'Agence française de développement, le CIRAD, mais aussi bien sûr le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation de la Pêche et des Affaires rurales mettront naturellement toutes leurs compétences et apporteront leurs contributions financières à la réalisation de ce partenariat. J'espère très vivement que celui-ci ouvrira une nouvelle phase de l'engagement de l'Union européenne auprès de l'Afrique dans son combat pour le développement.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 juillet 2004)
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs ,
Mesdames et Messieurs les Représentants des institutions internationales,
Mesdames et Messieurs les Représentants de la société civile,
Je suis très heureux et très honoré de prendre la parole aujourd'hui, en conclusion de cette première journée du Forum Union européenne-Afrique sur le coton. La France, vous le savez, s'est proposée pour accueillir ce Forum, organisé à l'initiative et sur l'invitation de la Commission européenne, à laquelle j'adresse mes sincères remerciements.
La culture du coton est en Afrique une activité vitale. Localisée principalement dans des régions géographiques très souvent démunies et sujettes à un important exode rural, elle joue un rôle essentiel pour combattre la pauvreté. Pauvreté qui, sur ce continent - ai-je besoin de le rappeler ? - est d'abord rurale.
En une trentaine d'années, les filières cotonnières ont connu un essor exceptionnel. Ce développement est le produit de politiques volontaristes, dans lesquelles la France a pris une part souvent déterminante avec certains pays africains.
Cependant, nous avons tous pu mesurer combien ce succès est fragile. Non seulement, ces pays dépendent encore beaucoup trop de l'activité et des revenus de la filière : c'est là hélas un problème de développement bien connu. Mais aussi et surtout, la filière est elle-même soumise à une organisation mondiale du marché et aux politiques agricoles nationales qui fragilisent les positions des pays producteurs.
Ainsi, la baisse des cours observée au début de cette décennie et leur volatilité, liée notamment à l'impact des subventions à la production dans plusieurs pays, viennent souligner les inconvénients d'une dépendance excessive des pays producteurs. Ces aspects sont bien connus de vous, je n'y insisterai pas.
Mais cette situation n'est pas une fatalité. Le développement de la production de coton, joint à l'ouverture des marchés, offre une occasion pour les producteurs de tirer parti de la mondialisation. C'est bien l'objet de ce Forum que de chercher à y contribuer, ensemble.
La France, vous le savez, est historiquement engagée aux côtés de nombre de pays producteurs dans la mise en place de filières cotonnières : elle y a consacré pas moins de 800 millions d'euros d'Aide publique au développement (APD) sur 30 ans sans interruption.
Elle s'y investit aujourd'hui encore au nom de la lutte contre la pauvreté, qui est le premier des objectifs du Millénaire pour le Développement. Et, à y regarder plus près, bien d'autres de ces objectifs - la mortalité infantile, l'accès à l'eau potable pour ne citer que ces deux-là - ne sont-ils pas aussi de fait recherchés à travers le développement de la culture du coton ?
Permettez-moi d'insister sur ce point auprès de tous les donateurs : l'appui aux filières cotonnières a réellement un caractère global et stratégique pour le développement.
C'est bien pour cette raison que le président de la République a été à l'origine d'une initiative commerciale pour l'Afrique en février 2003. C'est pour cette raison également qu'il a proposé, lors de son voyage au Niger et au Mali en octobre dernier, qu'une initiative européenne en faveur des producteurs de coton soit lancée.
Cette initiative, que la Commission européenne a reprise à son compte et a conduite depuis lors avec beaucoup d'efficacité et d'engagement, a connu des développements importants, dont notre réunion d'aujourd'hui n'est pas le moindre. Ai-je besoin de rappeler que nous soutenons totalement cette initiative et que nous y contribuerons comme nous n'avons cessé de le faire depuis son lancement ?
Il importe d'ailleurs de souligner l'approche qui a été retenue. En effet, la question cotonnière, et tout particulièrement telle qu'elle se pose en Afrique, n'est pas seulement un problème commercial, comme l'actualité tendrait à le laisser croire ; c'est aussi un problème de développement et il revient aux porteurs de l'initiative de bien traiter ensemble ces deux problèmes.
S'agissant des aspects commerciaux, je ne reviendrai pas sur le chemin parcouru. Mais je tiens à saluer le travail accompli par l'Union européenne, dont témoignent aussi bien sa décision de révision, pour le coton, de l'organisation commune du marché que la revendication d'un traitement spécifique du coton au sein de la négociation agricole à l'Organisation mondiale du Commerce. Ce sont là des actes à mettre au crédit de la cause des pays producteurs de coton.
En ce qui concerne le développement, l'enjeu est considérable. Il s'agit ni plus ni moins de placer les régions cotonnières sur une voie de croissance et de développement durable qui, par-delà une meilleure compétitivité, et donc une augmentation des revenus, favorisera l'accès des populations aux services de base et introduira une gestion à long terme des espaces et de ressources naturelles.
Je sais que la coopération française aura l'occasion, au cours de ces deux journées, de présenter les éléments d'une stratégie d'appui au développement des filières cotonnières, à titre de contribution à l'élaboration du partenariat Union européenne-Afrique.
Permettez-moi de m'arrêter sur deux aspects de cette stratégie qui me semblent particulièrement importants.
Tout d'abord, le développement des filières cotonnières passe par le succès des réformes structurelles, les privatisations. Je ne reviendrai pas sur les raisons de réussir ces privatisations. Celles-ci doivent s'inscrire dans des échéances rapprochées et réalistes. Mais elles ne doivent pas être conduites au prix de la remise en cause de l'intégration des filières, et notamment de la disparition des services collectifs qu'elles rendent aux producteurs. Tout est affaire de rythme et d'équilibre.
Dans ce processus, il appartient aux organisations de producteurs de prendre toute leur place - notre coopération y travaille - et aux autorités de tenir leurs engagements.
Mais le développement des filières impose aussi de savoir investir pour demain. J'entends dire ici et là que le coton africain, pourtant de la meilleure qualité qui soit, voit ses rendements stagner. Ou que la concurrence de nouveaux pays producteurs performants pourrait bien évincer les Africains du marché.
C'est là une évidence. Faute de faire les investissements utiles en recherche-développement pour préserver la fertilité des sols ou pour développer la qualité de la fibre, on peut craindre la marginalisation des producteurs africains mais aussi l'épuisement des ressources et la dégradation durable des espèces.
Je sais que la recherche française - et notamment le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) - accompagne sur ce terrain les systèmes nationaux de recherche agronomique, et je m'en félicite. Mais il nous faut faire plus et je voudrais inviter l'Union européenne, les autres Etats membres et tous les donateurs à accorder à cette dimension une place plus importante en coopération.
Il faudra notamment contribuer au débat sur les intérêts et les risques que présentent pour les pays producteurs les cotons génétiquement modifiés.
Il faudra aussi probablement envisager d'apporter à ces pays un soutien en matière de formation, de même qu'un appui institutionnel, les aidant à maîtriser cette innovation.
Sans des femmes et des hommes sensibilisés et formés, il est illusoire de prétendre se donner les moyens d'appliquer le principe de précaution. Ce doit être, me semble t-il, une composante importante de notre partenariat.
Permettez-moi, Messieurs et Mesdames, de rappeler pour terminer à quel point l'enjeu de notre réunion est considérable et dans quelle urgence nous nous trouvons.
Il s'agit de mettre notre capacité d'action et notre APD au service d'une activité économique dont l'avenir met en jeu la survie de 15 millions d'Africains parmi les plus pauvres. Si rien n'était fait, l'Afrique pourrait bien voir ses capacités de production de coton disparaître très rapidement, avec toutes les conséquences que l'on imagine.
Aussi, je formule le voeu que le partenariat Union européenne-Afrique puisse démarrer dans les meilleurs délais. Sur le plan commercial, la cause progresse, et c'est sur le terrain du développement que nous devons nous mobiliser.
Quand bien même en effet, la négociation commerciale tournerait à l'avantage des pays africains producteurs, cela ne saurait dispenser de faire les efforts de compétitivité nécessaires. Ce sont là les conditions indispensables d'une intégration réussie, sur le long terme, à l'économie mondiale.
Cette mobilisation ne sera pas l'oeuvre des seuls partenaires de l'Afrique. Il est indispensable qu'elle soit d'abord celle de nos amis africains et surtout, sur le terrain, celle des agriculteurs et de leurs organisations, qui devront prendre part à son pilotage.
Je tiens à le dire aux représentants des plus importantes organisations paysannes africaines qui sont parmi nous aujourd'hui : mon souhait est que ce partenariat soit le leur et qu'il contribue à ce qu'à terme, les filières cotonnières soient totalement leur affaire.
La France, le ministère des Affaires étrangères, l'Agence française de développement, le CIRAD, mais aussi bien sûr le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation de la Pêche et des Affaires rurales mettront naturellement toutes leurs compétences et apporteront leurs contributions financières à la réalisation de ce partenariat. J'espère très vivement que celui-ci ouvrira une nouvelle phase de l'engagement de l'Union européenne auprès de l'Afrique dans son combat pour le développement.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 juillet 2004)