Conférence de presse de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur le développement de la démocratie, l'élargissement de l'UE et le droit d'ingérence, Varsovie le 26 juin 2000.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Voyage de M. Hubert Védrine à Varsovie le 26 juin 2000 pour la conférence "Vers une communauté des démocraties"

Texte intégral

Je suis venu ce matin à l'invitation de mon ami, Bronislaw Geremek, car j'ai trouvé que c'était une bonne occasion de participer à une réflexion sur le processus de démocratisation.
Après des siècles difficiles, c'est maintenant un processus mondial. Chaque pays doit trouver sa propre voie pour aboutir à la démocratie. Aucun pays n'est jamais passé brusquement à une démocratie parfaite. Il faut tirer des leçons du passé, du passé ancien comme du passé récent, pour favoriser l'apparition des démocraties, le développement des démocraties, les transitions des régimes totalitaires à des régimes démocratiques. Et donc il faut tirer des leçons du passé pour faciliter la démarche des peuples qui ont à approfondir la démocratie. Il est nécessaire de mettre l'accent sur une action, un processus de démocratisation dans le seul souci d'efficacité pour l'avenir.
J'ai rappelé deux autres choses : d'abord, le processus démocratique n'avait jamais été exclusivement politique, mais était constitué de processus globaux : économiques, sociaux, culturels et politiques ; et j'ai d'autre part dit que la démocratisation n'était jamais parfaite, et que même les démocraties les plus installées doivent faire face à des problèmes par exemple, le désintérêt pour la politique, l'abstention croissante, le rôle abusif des lobbies et des financements dans les campagnes électorales modernes. Donc, pas d'autosatisfaction, mais toujours une volonté de perfectionnement. En un résumé très court, voilà ce que j'ai dit dans mon discours.
Q - (sur l'élargissement de l'Union européenne)
R - D'abord, il n'y a plus de groupes. (...) Il y a donc 12 négociations. Chaque candidature doit être jugée sur ses mérites propres. C'est d'ailleurs la seule façon d'aider chaque pays candidat à régler ses propres problèmes. Ce qu'on peut attendre de la présidence française c'est qu'elle va porter les négociations dans le vif du sujet. Nous avons l'espoir de pouvoir indiquer à chaque pays candidat à la fin de la présidence un scénario expliquant quels sont encore les problèmes à surmonter. Nous nous en occuperons avec énergie.
Q - Les représentants de l'UE ne sont pas présents à cette conférence. (...) Est-ce que cela ne veut pas dire que l'Union européenne ne compte pas dans le processus de démocratisation ?
R - Je ne peux pas répondre aux questions sur l'organisation de cette rencontre. Il faudrait demander aux responsables polonais. Le caractère éminemment démocratique de l'Union européenne est maintenant confirmé depuis longtemps. On n'a pas besoin de le justifier.
Q - (...) Quelles sont les limites du devoir d'ingérence ?
R - Il suffit de se référer au chapitre VII de la Charte des Nations unies qui est le seul texte universellement admis qui définisse l'intervention dans les affaires intérieures d'un pays. Chacun comprend que face à des situations actuellement tragiques et urgentes, il faudrait pouvoir agir. Il faut le faire selon un mécanisme de décision à peu près stable. Sinon chaque pays pourra l'évoquer, ce serait ouvrir la boîte de Pandore et ce ne serait pas un progrès.
C'est un processus de réflexion amenant à réduire les abus de l'utilisation du droit de veto au sein du Conseil de sécurité.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 juin 2000)