Texte intégral
Q- Les gels de crédits ministériels sont-ils prévus si les prix des matières premières, à commencer par le pétrole, devaient rester à ce point à la hausse. Le projet de loi de finances 2005 est en débat à l'Assemblée nationale à partir d'aujourd'hui. Mais l'hypothèse de croissance du Gouvernement risque d'être remis en cause et l'opposition s'inquiète de la sincérité du budget. [...] Les ministres, ce matin, s'inquiètent-ils des budgets de leur ministère et de possibles gels de crédits ?
R- D'abord, les ministres ont le souci de l'intérêt général et de voir notre pays réduire son endettement. Pour vous donner une image, en octobre, en novembre et en décembre, la France emprunte la totalité de ses dépenses de fonctionnement sur le marché international, ce qui n'est pas une situation qui pourra durer éternellement. S'agissant du budget de l'Education nationale, cette inquiétude est assez faible puisqu'il s'agit essentiellement d'un budget de rémunération et qu'on ne gèle pas les rémunérations.
Q-Néanmoins, s'agissant de l'hypothèse de croissance, quand l'opposition dit que ce budget est-il sincère, qu'est-ce que cela veut dire ? Sincérité ?
R- S. Paoli, depuis 20 ans que je suis député, je n'ai jamais entendu une opposition dire autre chose que le budget n'est pas sincère. La vérité c'est qu'il est bâti sur des hypothèses de croissance qui sont réalistes et qui d'ailleurs, en 2004, ont été dépassées. Il y a une incertitude qui est liée au prix du pétrole. Personne ne peut dire aujourd'hui si cette crise va durer, ou si cette crise ne va pas durer. Il est clair que si elle durait longtemps, si le prix du pétrole continuait à augmenter, nous serions obligés, comme tous les autres pays, de réajuster nos prévisions de croissance.
Q-Avec tout de même aussi la présentation aujourd'hui du rapport Camdessus. Alors M. Camdessus, c'est tout de même l'ancien directeur général du Fonds monétaire international, l'ancien gouverneur de la Banque de France qui dit que la France est en situation de décrochage économique si très rapidement, des mesures importantes ne sont pas prises. Vous partagez ce pessimisme-là ?
R- Il ne faut pas non plus noircir le tableau. Mais ce qui est vrai, c'est que depuis longtemps, la France vit très nettement au-dessus de ses moyens et quand on vit au-dessus de ses moyens, on puise dans ses réserves. Et il y a un jour où il y a plus de réserves. Je crois qu'aujourd'hui, il est temps que nos concitoyens se rendent compte qu'on ne peut pas avoir le meilleur système de protection sociale, un des systèmes de retraite les plus généreux dans le monde, le système d'indemnisation du chômage également le plus efficace, l'école et l'université gratuites pour tout le monde, en travaillant moins que les autres pays européens. Donc voilà, on doit avoir comme objectif au moins de faire aussi bien que nos voisins européens et cela suppose dans un certain nombre de domaines de nous retrousser les manches. Cela suppose, comme le suggère le rapport Camdessus, de faire en sorte que le taux d'activités des jeunes soit plus élevé. Pourquoi est-ce qu'on a le taux de chômage des jeunes le plus fort ? Ce n'est pas parce que nos jeunes sont moins bien formés que les autres, c'est parce qu'on a une rigidité dans le droit du travail qui fait que les entreprises hésitent à embaucher de manière définitive des jeunes qui n'ont pas d'expérience. Et de la même manière, on a le taux d'activités le plus faible des seniors parce qu'on a pris l'habitude de mettre tout le monde à la porte après 50 ou 55 ans, comme si c'était une manière de gérer les problèmes d'emploi. Donc sur ces deux axes là, oui, il va falloir faire des progrès.
Q-Mais dans le domaine qui vous intéresse, celui de l'Education nationale, par exemple, M. Camdessus préconise des mesures assez radicales. D'abord beaucoup moins de fonctionnaires, dit-il. Comment a été créée cette question, justement, des personnes qui seraient en situation d'être à la retraite et qui pourraient continuer de travailler ? Cette pondération-là, comment vous la géreriez vous à l'Education nationale ?
R- Ca c'est possible aujourd'hui du fait de la loi sur les retraites que j'avais fait voter. On peut désormais prendre sa retraite et puis continuer à avoir une activité salariée. C'était une des manières que nous avions trouvée d'inciter nos concitoyens à travailler plus longtemps. S'agissant de l'Education nationale, quand on dit, il faut moins de fonctionnaires, ça ne s'applique pas forcément à l'ensemble des secteurs d'activité de l'Etat. Nous sommes, avec l'Education nationale, dans un domaine où qu'on soit en France ou qu'on soit en Angleterre ou en Allemagne - ils n'ont pas forcément le même statut - mais il y a grosso modo le même nombre d'enseignants par élèves. On en a un peu plus que les autres, il faut bien le reconnaître. Donc l'objectif du Gouvernement, ce n'est pas de réduire de manière aveugle le nombre de fonctionnaires, c'est d'essayer de faire en sorte que l'Etat se retire des secteurs où il n'est pas franchement efficace pour se concentrer sur ceux qui sont sa vraie responsabilité. Si il y a vraiment un secteur qui est la responsabilité de l'Etat, c'est bien l'éducation.
Q-Et sur l'université - on parlera évidemment dans un instant du rapport Thélot et de la façon dont il va maintenant évoluer - mais ce que dit M. Camdessus, sur les universités : "autonomie des universités", "la plus grande déconcentration possible" ?
R- Ce qui est vrai c'est que le système universitaire français est malade. Nous avons aujourd'hui, si on regarde par exemple en terme de dépenses, la dépense française pour ses étudiants est beaucoup plus faible que la moyenne européenne, alors que la dépense française pour les lycéens est beaucoup plus élevée que la moyenne européenne. Donc notre université a besoin de réformes profondes. Elle est déjà en train d'en mener une, qui ne fait pas beaucoup de bruit mais qui est très importante et qui est ce qu'on appelle, la réforme du LMD, c'est à dire que nous allons avoir désormais un cursus universitaire qui va être le même dans tous les pays européens. Cela n'a l'air de rien, mais cela nous a obligé à repenser complètement nos formations, et à mettre en place des systèmes d'évaluation auxquels nous n'étions pas du tout, il faut bien le dire, habitués dans notre pays. Il y a une deuxième réforme qui va être introduite dans le cadre de la loi sur la recherche que je suis en train de préparer, justement sur l'évaluation des établissements et des enseignants. Il restera la question de l'organisation de l'université, de son ouverture vers l'extérieur, de son financement, qui sont des questions qu'il va falloir que nous traitions.
Q-Et la formation tout au long de la vie, là aussi, comme le préconise M. Camdessus, dans une société qui va être de plus en plus celle de la connaissance et même d'une économie de la connaissance.
R- C'est dans cette perspective-là que nous sommes en train de concevoir la loi sur l'école. Ce qu'il faut que nous fassions aujourd'hui, c'est donner à nos concitoyens, le bagage nécessaire pour pouvoir à tout moment reprendre des études, changer de métier, changer d'orientation grâce à la formation continue. Lorsque j'étais ministre des Affaires sociales, j'ai fait voter une réforme très très importante qui donne un droit à chaque salarié à la formation continue. Cette réforme, elle est en tain de se mettre en uvre, il faut maintenant qu'on l'étende et notamment, qu'on l'étende au secteur public. Pensez que les enseignants qui devraient être les plus grands consommateurs de formation continue, en sont pratiquement privés et ceci depuis toujours.
Q-Le bagage nécessaire, certains vous opposent que le fameux socle commun ce serait, alors méfions-nous des formules, mais une sorte de Smic culturel.
R- C'est comme cela que commencent tous les débats dans notre pays, c'est-à-dire qu'avant même d'avoir sérieusement réfléchi au contenu des propositions qui sont faites, en général, par des gens venant d'horizons très divers comme c'est le cas de la commission Thélot, on lance quelques slogans assassins comme le "Smic culturel", de manière à tuer toute réflexion dans l'uf. La vérité c'est que tout le monde doit être très modeste sur ce débat parce que notre système éducatif aujourd'hui, n'atteint pas les objectifs que la Nation lui a fixés. Toutes les études qui sont faites, que ce soit des études internationales qui sont les plus sévères, ou que ce soit les propres évaluations que nous conduisons, montrent qu'il y a un recul de notre système par rapport à la moyenne des pays industrialisés. Il y a une enquête internationale faite par l'OCDE qui vient de sortir, qui a été réactualisée et qui montre que la France a reculé par rapport aux autres grands pays en matière de performances éducatives. Donc il faut bien prendre le taureau par les cornes et la question la plus importante aujourd'hui, c'est de définir le rôle de l'école, de définir quelles sont les connaissances fondamentales dont les enfants ont besoin pour progresser ensuite dans leur cursus scolaire et universitaire, et dans la vie. Et puis concentrer les enseignants sur ces objectifs-là, et pas les disperser vers des tas d'objectifs secondaires qui sont tous naturellement, pris individuellement, importants, mais qui viennent, comment dirais-je, polluer l'objectif principal de l'école qui est de donner les instruments : savoir lire, écrire, compter, maîtriser le français, maîtriser une langue étrangère, avoir une notion du monde qui vous entoure à travers l'histoire et à travers la géographie. Il faut revenir à ces fondamentaux là.
Q-Et sur la méthode, vous évoquiez la question de la retraite tout à l'heure, même démarche ? C'est-à-dire qu'à partir de maintenant, vous rencontrez les syndicats, les différents partenaires ?
R- On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, donc on va pas exactement utiliser la même démarche. Les sujets sont un peu différents et puis, j'arrive alors même qu'un débat très long a eu lieu sur la question de l'école, mais je vais utiliser la même méthode dans le sens où je vais, avec les organisations syndicales, conduire la préparation de la loi de concert. C'est-à-dire qu'à chaque stade de cette préparation, nous aurons une concertation avec les organisations syndicales et puis plus large, s'agissant de l'école
Q-Et tout le monde, les mains libres ? Le poids du rapport Thélot, vous avez dit ça ne nous engage pas. Mais enfin quand même.
R- Non parce que je suis très attaché à l'idée que dans la République, c'est le Parlement qui décide et c'est le Gouvernement qui propose. Ce ne sont pas les experts. Ceci étant, ce rapport il a quand même l'avantage de nous mettre sur la table, une réflexion qui est une réflexion très aboutie, qui est la suite du grand débat sur l'école, et qui a été conduit par des gens d'origines extrêmement diverses. Donc on ne peut pas dire que ce rapport, il est - j'ai entendu, de gauche, de droite -, pédago, républicain. Je crois que tout cela ce sont des slogans. Il y a dans le rapport Thélot beaucoup de réflexions très abouties, il y a des sujets sur lesquels je trouve qu'il n'y a pas de propositions. Sans doute parce qu'ils n'ont pas réussi à se mettre d'accord. Donc je vais essayer à partir de cette base-là, de construire une loi d'orientation dont je souhaite vraiment qu'elle ne soit pas un enjeu politicien, mais qu'elle soit l'objet d'une réflexion assez consensuelle sur l'avenir de la jeunesse.
Q-Une toute dernière chose, P. Roger l'évoquait d'un mot dans le journal à 8 heures. La question des signes religieux à l'école, les Sikhs et leur turban, comment vous gérez ça ?
R- Il y a une communauté sikh dans notre pays qui est très réduite, et qui ne pose aucune difficulté. Mais en même temps, la loi elle s'applique à tout le monde. Et donc aujourd'hui, vous savez que nous avons les premières procédures disciplinaires qui sont engagées. Il reste environ 70 cas de voiles dans notre pays sur les à peu près 600 qui se sont présentés au moment de la rentrée. Bon il faut que les Sikhs se plient à la loi comme les autres. Alors on a trouvé avec eux des solutions qui semblaient acceptables, certains ne veulent pas les accepter. La loi s'appliquera.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 octobre 2004
R- D'abord, les ministres ont le souci de l'intérêt général et de voir notre pays réduire son endettement. Pour vous donner une image, en octobre, en novembre et en décembre, la France emprunte la totalité de ses dépenses de fonctionnement sur le marché international, ce qui n'est pas une situation qui pourra durer éternellement. S'agissant du budget de l'Education nationale, cette inquiétude est assez faible puisqu'il s'agit essentiellement d'un budget de rémunération et qu'on ne gèle pas les rémunérations.
Q-Néanmoins, s'agissant de l'hypothèse de croissance, quand l'opposition dit que ce budget est-il sincère, qu'est-ce que cela veut dire ? Sincérité ?
R- S. Paoli, depuis 20 ans que je suis député, je n'ai jamais entendu une opposition dire autre chose que le budget n'est pas sincère. La vérité c'est qu'il est bâti sur des hypothèses de croissance qui sont réalistes et qui d'ailleurs, en 2004, ont été dépassées. Il y a une incertitude qui est liée au prix du pétrole. Personne ne peut dire aujourd'hui si cette crise va durer, ou si cette crise ne va pas durer. Il est clair que si elle durait longtemps, si le prix du pétrole continuait à augmenter, nous serions obligés, comme tous les autres pays, de réajuster nos prévisions de croissance.
Q-Avec tout de même aussi la présentation aujourd'hui du rapport Camdessus. Alors M. Camdessus, c'est tout de même l'ancien directeur général du Fonds monétaire international, l'ancien gouverneur de la Banque de France qui dit que la France est en situation de décrochage économique si très rapidement, des mesures importantes ne sont pas prises. Vous partagez ce pessimisme-là ?
R- Il ne faut pas non plus noircir le tableau. Mais ce qui est vrai, c'est que depuis longtemps, la France vit très nettement au-dessus de ses moyens et quand on vit au-dessus de ses moyens, on puise dans ses réserves. Et il y a un jour où il y a plus de réserves. Je crois qu'aujourd'hui, il est temps que nos concitoyens se rendent compte qu'on ne peut pas avoir le meilleur système de protection sociale, un des systèmes de retraite les plus généreux dans le monde, le système d'indemnisation du chômage également le plus efficace, l'école et l'université gratuites pour tout le monde, en travaillant moins que les autres pays européens. Donc voilà, on doit avoir comme objectif au moins de faire aussi bien que nos voisins européens et cela suppose dans un certain nombre de domaines de nous retrousser les manches. Cela suppose, comme le suggère le rapport Camdessus, de faire en sorte que le taux d'activités des jeunes soit plus élevé. Pourquoi est-ce qu'on a le taux de chômage des jeunes le plus fort ? Ce n'est pas parce que nos jeunes sont moins bien formés que les autres, c'est parce qu'on a une rigidité dans le droit du travail qui fait que les entreprises hésitent à embaucher de manière définitive des jeunes qui n'ont pas d'expérience. Et de la même manière, on a le taux d'activités le plus faible des seniors parce qu'on a pris l'habitude de mettre tout le monde à la porte après 50 ou 55 ans, comme si c'était une manière de gérer les problèmes d'emploi. Donc sur ces deux axes là, oui, il va falloir faire des progrès.
Q-Mais dans le domaine qui vous intéresse, celui de l'Education nationale, par exemple, M. Camdessus préconise des mesures assez radicales. D'abord beaucoup moins de fonctionnaires, dit-il. Comment a été créée cette question, justement, des personnes qui seraient en situation d'être à la retraite et qui pourraient continuer de travailler ? Cette pondération-là, comment vous la géreriez vous à l'Education nationale ?
R- Ca c'est possible aujourd'hui du fait de la loi sur les retraites que j'avais fait voter. On peut désormais prendre sa retraite et puis continuer à avoir une activité salariée. C'était une des manières que nous avions trouvée d'inciter nos concitoyens à travailler plus longtemps. S'agissant de l'Education nationale, quand on dit, il faut moins de fonctionnaires, ça ne s'applique pas forcément à l'ensemble des secteurs d'activité de l'Etat. Nous sommes, avec l'Education nationale, dans un domaine où qu'on soit en France ou qu'on soit en Angleterre ou en Allemagne - ils n'ont pas forcément le même statut - mais il y a grosso modo le même nombre d'enseignants par élèves. On en a un peu plus que les autres, il faut bien le reconnaître. Donc l'objectif du Gouvernement, ce n'est pas de réduire de manière aveugle le nombre de fonctionnaires, c'est d'essayer de faire en sorte que l'Etat se retire des secteurs où il n'est pas franchement efficace pour se concentrer sur ceux qui sont sa vraie responsabilité. Si il y a vraiment un secteur qui est la responsabilité de l'Etat, c'est bien l'éducation.
Q-Et sur l'université - on parlera évidemment dans un instant du rapport Thélot et de la façon dont il va maintenant évoluer - mais ce que dit M. Camdessus, sur les universités : "autonomie des universités", "la plus grande déconcentration possible" ?
R- Ce qui est vrai c'est que le système universitaire français est malade. Nous avons aujourd'hui, si on regarde par exemple en terme de dépenses, la dépense française pour ses étudiants est beaucoup plus faible que la moyenne européenne, alors que la dépense française pour les lycéens est beaucoup plus élevée que la moyenne européenne. Donc notre université a besoin de réformes profondes. Elle est déjà en train d'en mener une, qui ne fait pas beaucoup de bruit mais qui est très importante et qui est ce qu'on appelle, la réforme du LMD, c'est à dire que nous allons avoir désormais un cursus universitaire qui va être le même dans tous les pays européens. Cela n'a l'air de rien, mais cela nous a obligé à repenser complètement nos formations, et à mettre en place des systèmes d'évaluation auxquels nous n'étions pas du tout, il faut bien le dire, habitués dans notre pays. Il y a une deuxième réforme qui va être introduite dans le cadre de la loi sur la recherche que je suis en train de préparer, justement sur l'évaluation des établissements et des enseignants. Il restera la question de l'organisation de l'université, de son ouverture vers l'extérieur, de son financement, qui sont des questions qu'il va falloir que nous traitions.
Q-Et la formation tout au long de la vie, là aussi, comme le préconise M. Camdessus, dans une société qui va être de plus en plus celle de la connaissance et même d'une économie de la connaissance.
R- C'est dans cette perspective-là que nous sommes en train de concevoir la loi sur l'école. Ce qu'il faut que nous fassions aujourd'hui, c'est donner à nos concitoyens, le bagage nécessaire pour pouvoir à tout moment reprendre des études, changer de métier, changer d'orientation grâce à la formation continue. Lorsque j'étais ministre des Affaires sociales, j'ai fait voter une réforme très très importante qui donne un droit à chaque salarié à la formation continue. Cette réforme, elle est en tain de se mettre en uvre, il faut maintenant qu'on l'étende et notamment, qu'on l'étende au secteur public. Pensez que les enseignants qui devraient être les plus grands consommateurs de formation continue, en sont pratiquement privés et ceci depuis toujours.
Q-Le bagage nécessaire, certains vous opposent que le fameux socle commun ce serait, alors méfions-nous des formules, mais une sorte de Smic culturel.
R- C'est comme cela que commencent tous les débats dans notre pays, c'est-à-dire qu'avant même d'avoir sérieusement réfléchi au contenu des propositions qui sont faites, en général, par des gens venant d'horizons très divers comme c'est le cas de la commission Thélot, on lance quelques slogans assassins comme le "Smic culturel", de manière à tuer toute réflexion dans l'uf. La vérité c'est que tout le monde doit être très modeste sur ce débat parce que notre système éducatif aujourd'hui, n'atteint pas les objectifs que la Nation lui a fixés. Toutes les études qui sont faites, que ce soit des études internationales qui sont les plus sévères, ou que ce soit les propres évaluations que nous conduisons, montrent qu'il y a un recul de notre système par rapport à la moyenne des pays industrialisés. Il y a une enquête internationale faite par l'OCDE qui vient de sortir, qui a été réactualisée et qui montre que la France a reculé par rapport aux autres grands pays en matière de performances éducatives. Donc il faut bien prendre le taureau par les cornes et la question la plus importante aujourd'hui, c'est de définir le rôle de l'école, de définir quelles sont les connaissances fondamentales dont les enfants ont besoin pour progresser ensuite dans leur cursus scolaire et universitaire, et dans la vie. Et puis concentrer les enseignants sur ces objectifs-là, et pas les disperser vers des tas d'objectifs secondaires qui sont tous naturellement, pris individuellement, importants, mais qui viennent, comment dirais-je, polluer l'objectif principal de l'école qui est de donner les instruments : savoir lire, écrire, compter, maîtriser le français, maîtriser une langue étrangère, avoir une notion du monde qui vous entoure à travers l'histoire et à travers la géographie. Il faut revenir à ces fondamentaux là.
Q-Et sur la méthode, vous évoquiez la question de la retraite tout à l'heure, même démarche ? C'est-à-dire qu'à partir de maintenant, vous rencontrez les syndicats, les différents partenaires ?
R- On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, donc on va pas exactement utiliser la même démarche. Les sujets sont un peu différents et puis, j'arrive alors même qu'un débat très long a eu lieu sur la question de l'école, mais je vais utiliser la même méthode dans le sens où je vais, avec les organisations syndicales, conduire la préparation de la loi de concert. C'est-à-dire qu'à chaque stade de cette préparation, nous aurons une concertation avec les organisations syndicales et puis plus large, s'agissant de l'école
Q-Et tout le monde, les mains libres ? Le poids du rapport Thélot, vous avez dit ça ne nous engage pas. Mais enfin quand même.
R- Non parce que je suis très attaché à l'idée que dans la République, c'est le Parlement qui décide et c'est le Gouvernement qui propose. Ce ne sont pas les experts. Ceci étant, ce rapport il a quand même l'avantage de nous mettre sur la table, une réflexion qui est une réflexion très aboutie, qui est la suite du grand débat sur l'école, et qui a été conduit par des gens d'origines extrêmement diverses. Donc on ne peut pas dire que ce rapport, il est - j'ai entendu, de gauche, de droite -, pédago, républicain. Je crois que tout cela ce sont des slogans. Il y a dans le rapport Thélot beaucoup de réflexions très abouties, il y a des sujets sur lesquels je trouve qu'il n'y a pas de propositions. Sans doute parce qu'ils n'ont pas réussi à se mettre d'accord. Donc je vais essayer à partir de cette base-là, de construire une loi d'orientation dont je souhaite vraiment qu'elle ne soit pas un enjeu politicien, mais qu'elle soit l'objet d'une réflexion assez consensuelle sur l'avenir de la jeunesse.
Q-Une toute dernière chose, P. Roger l'évoquait d'un mot dans le journal à 8 heures. La question des signes religieux à l'école, les Sikhs et leur turban, comment vous gérez ça ?
R- Il y a une communauté sikh dans notre pays qui est très réduite, et qui ne pose aucune difficulté. Mais en même temps, la loi elle s'applique à tout le monde. Et donc aujourd'hui, vous savez que nous avons les premières procédures disciplinaires qui sont engagées. Il reste environ 70 cas de voiles dans notre pays sur les à peu près 600 qui se sont présentés au moment de la rentrée. Bon il faut que les Sikhs se plient à la loi comme les autres. Alors on a trouvé avec eux des solutions qui semblaient acceptables, certains ne veulent pas les accepter. La loi s'appliquera.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 octobre 2004