Déclaration de M. Christian Poncelet, Président du Sénat, sur la commémoration du 60ème anniversaire de la Libération, au Sénat le 3 juin 2004.

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Circonstance : Exposition "La France Libérée, la République Restaurée" au Sénat le 3 juin 2004

Texte intégral

DISCOURS D'INAUGURATION :
Messieurs les Ambassadeurs,
Messieurs les Ministres,
Messieurs les Présidents,
Messieurs les Représentants du monde combattant,
Mes Chers Collègues,
Mesdames, Messieurs,
Je suis particulièrement fier, heureux et honoré de vous accueillir aujourd'hui dans cette Cour d'honneur du Sénat, aménagée de manière inhabituelle pour un moment solennel et symbolique, mais aussi culturel et symphonique.
Mes pensées, comme les vôtres, vont, en cette douce soirée de juin, vers ces jeunes gens qui s'embarquèrent, il y a soixante ans, sur les bateaux qui s'apprêtaient à traverser la Manche pour la plus grande opération militaire jamais réalisée.
Il s'agissait pour la plupart d'entre eux de jeunes gens, entre 18 et 20 ans, qui n'avaient jamais affronté la guerre. Beaucoup furent emportés à l'orée de leur vie. Leur sacrifice suprême a permis à une autre jeunesse de vivre, sinon dans un monde paisible, au moins dans un pays qui a fait la paix avec ses voisins, à défaut de la faire toujours avec lui-même.
Le Bureau du Sénat a souhaité, en cette année de commémoration exceptionnelle, rendre à ces jeunes héros, à ces combattants de la liberté, un hommage tout particulier qui revêt une signification supplémentaire dans le contexte actuel de " refroidissement " des relations transatlantiques.
Nous n'oublions pas, nous n'oublierons jamais, la dette contractée envers nos alliés au premier rang desquels figurent nos amis américains, britanniques et canadiens. Nous avons à leur égard un devoir de reconnaissance.
John, Peter, William ou Andrew resteront un symbole vivace : celui de la victoire, tôt ou tard inéluctable, des forces de la liberté sur les puissances de l'asservissement.
C'est cette certitude qui illumina, un autre jour de juin, un homme qui s'était toujours fait une certaine idée de la France, un général, le Général de Gaulle qui ne se résignait pas à la défaite de notre pays.
Il put s'appuyer sur des poignées d'hommes déterminés, les Français libres, qui portèrent un temps, seuls, l'honneur de la France. C'est grâce à eux et grâce à la Résistance que la France libérée a pu être aussi une France indépendante.
Puisse cette commémoration nous rappeler, à nous, à nos enfants, à nos petits-enfants et au-delà à leur postérité, que la paix est un bien fragile dont la préservation peut requérir l'engagement de chacun.
Malgré l'immense importance du Jour J dans l'histoire de la deuxième guerre mondiale, le Sénat n'a pas entendu limiter la commémoration de la libération de la France au seul débarquement de Normandie.
Il a voulu rappeler que la libération du territoire français a impliqué une mobilisation et des combats pendant près d'une année, jusqu'au 8 mai 1945, date de la victoire.
C'est ainsi que parmi les images désormais disposées sur les grilles de la rue de Médicis, celles de la bataille de Normandie voisinent avec celles du débarquement en Provence, réalisé aux deux-tiers par des forces françaises dont la majeure partie était issue de la France ultramarine.
De même les images de la progression des armées de la France combattante, celle de Leclerc, celle de de Lattre, jouxtent les témoignages visuels de la rencontre avec les populations civiles et ceux de l'ardeur des combattants de l'ombre, sans qui la victoire de nos alliés n'aurait pas été possible.
Je n'aurais garde d'oublier, en cet instant, tous ceux, déportés ou prisonniers qui, pendant les sombres années de l'occupation, ont été privés de leur liberté et souvent de leur vie dans des conditions qui ont bafoué la dignité humaine.
Cette bataille ne fut donc pas seulement celle de la libération d'un territoire : elle fut aussi et surtout un combat pour des valeurs qui ont pour nom liberté, démocratie, et, du moins pouvons-nous l'espérer, fraternité.
C'est pourquoi le Sénat entend tout au long de cette année qui nous sépare de la commémoration de la fin de la guerre, insister sur la signification politique et humaine de ces événements.
- Tout d'abord, la restauration de la République, dont l'installation, dans le Palais du Luxembourg, de l'Assemblée consultative provisoire, fondée à Alger par le Général de Gaulle fut le premier symbole, le premier signe du rétablissement de la légalité républicaine. C'est ainsi que nous célébrerons, dans l'hémicyle, le 9 novembre prochain le premier discours du Général de Gaulle devant cette assemblée.
- Ce retour de la République n'avait cependant de sens que s'il pouvait prendre appui sur la consultation libre des citoyens français. Les premières élections libres, les 29 avril et 13 mai 1945, furent des élections locales, municipales et cantonales. C'est un symbole auquel le Sénat ne pouvait qu'être sensible, lui qui, au delà de son rôle d'assemblée parlementaire à part entières, représente les collectivités territoriales de la République. Il était ainsi démontré, une fois encore, que la démocratie commence, et se vit, au plus près des citoyens.
L'exercice, pour la première fois à cette occasion du vote des femmes, décidé par le gouvernement provisoire, a donné à ces élections un caractère encore plus singulier. Ce vote des femmes consacrait, mais aussi annonçait, le long mouvement d'émancipation de nos concitoyennes.
En 2005, le 8 mars, jour désormais dédié aux femmes, verra le rassemblement à Paris, à notre initiative, des quatre mille femmes élues maires de leur commune pour les premiers États généraux de la parité.
- Le meilleur hommage aux combattants d'hier sera cependant de nous tourner vers l'avenir.
C'est cette jeunesse d'aujourd'hui que nous comptons réunir au mois de mai prochain, dans notre hémicycle, sans considération de patries, pour qu'elle nous aide à construire, à l'échelle du continent européen, un système démocratique, gage de paix, de prospérité et de fraternité.
Comme le rappelait un Président de la Ve République, qui fut membre du Sénat : " la France est notre patrie, mais l'Europe est notre avenir ".
Avant de céder la " parole musicale " à l'orchestre de la Garde Républicaine, que je salue, je voudrais remercier tous ceux qui ont contribué à la réalisation de l'exposition remarquable que nous venons de découvrir.
A partir d'une idée de Jean-Claude Narcy, cette exposition a été conçue, configurée et concrétisée par une équipe réunissant le Sénat, la Mission interministérielle du 60ème anniversaire des Débarquements et de la Libération, l'Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense, Paris-Match, EDF et TF1.
Cette exposition montre que les audaces culturelles et événementielles que le Sénat de la République a su prendre, ces dernières années, peuvent être mises au service de l'histoire.
Elles peuvent aussi, et c'est leur but profond, contribuer à enrichir notre mémoire collective, à renforcer notre identité citoyenne, à conforter la démocratie et à préparer un monde meilleur.
DISCOURS A L'ISSUE DE LA VISITE :
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Chères et chers Collègues,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec un réel plaisir que je vous accueille ici, au nom du Président et du Bureau du Sénat qui ont souhaité donner une ampleur particulière à la commémoration du 60ème anniversaire de la Libération.
Dans cette maison qui représente la diversité de la France, je devrais d'ailleurs dire : commémoration du 60ème anniversaire des libérations.
En effet, la libération de la France a été progressive et a réclamé près d'une année d'engagements. Une année de sacrifices pour nos alliés, au premier rang desquels nos amis américains, britanniques et canadiens, mais aussi de tous ceux, Français de métropole ou d'outre-mer, qui ont contribué à la victoire de la France, à la victoire d'une France indépendante et au retour de la République. Ce processus de rétablissement d'un Etat de droit a été couronné par les premières élections libres organisées les 29 avril et 13 mai 1945, élections locales qui virent, pour la première fois, les Françaises exercer leur droit de vote.
Toute à l'heure, nous assisterons à un concert de l'orchestre de la Garde républicaine qui commencera, vous le verrez, ou plutôt, vous l'entendrez, par des airs très symboliques et très évocateurs des événements que nous commémorons. Mais avant de nous, de vous retrouver dans la cour d'honneur du Sénat, je voudrais demander à M. Jean-Claude Narcy, qui a eu l'idée de l'exposition que vous venez de visiter, de vous dire, très brièvement, comment celle-ci a été conçue, configurée puis concrétisée.
Comme vous le savez, cette belle aventure a réuni, autour du Sénat, et dans un partenariat exemplaire, la mission pour la commémoration du soixantième anniversaire de la Libération, l'Etablissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense, Electricité de France, Paris-Match et TF1.
Que tous ces complices d'une belle action, dictée par notre devoir de mémoire au service de la paix, de la solidarité et de la fraternité, trouvent ici l'expression de mes remerciements les plus chaleureux.
Mesdames et Messieurs, Chers amis, soyez vous aussi cordialement remerciés pour votre présence et votre participation à ces moments où la France se penche sur son passé pour mieux éclairer son avenir au sein d'une Europe plus forte, d'une Europe plus dynamique, d'une Europe plus solidaire.
(Source http://www.senat.fr, le 7 juin 2004)