Texte intégral
Vous attendiez-vous à une rentrée aussi agitée ?
Non, mais elle s'annonce passionnante car elle place au cur du débat public un certain nombre de questions que nous souhaitions voir émerger depuis longtemps : le quinquennat qui va exiger un rééquilibrage des pouvoirs, la refondation sociale ou les nouvelles régulations, la constitution européenne, l'avenir de la régionalisation que pose la question Corse. Il faut aujourd'hui redistribuer vers les citoyens, les partenaires sociaux, les élus locaux un pouvoir trop centralisé, trop bureaucratique et trop parisien.
N'est-ce pas paradoxal que cette évolution se fasse avec un gouvernement de gauche ?
Cette évolution est subie par le gouvernement davantage que voulue. En Corse, si Lionel Jospin a du se tourner vers les élus, c'est parce que la politique qu'il avait menée -notamment avec le préfet Bonnet- avait échoué et ridiculisé l'Etat.
José Rossi, le patron de l'Assemblée Corse, a d'ailleurs été un des principaux artisans du processus de Matignon. Ce que tout le monde à DL n'a pas apprécié ?
D'abord, José Rossi a mené une discussion avec les élus Corse qui sont, dans leur immense majorité, des élus républicains profondément attachés à l'unité de la France et fiers d'être Français. Ensuite, les échecs et les errements passés doivent inviter les politiques à traiter de façon responsable ce dossier et se garder de jugements à l'emporte pièce. Cela étant, Lionel Jospin a commis une erreur. Il aurait fallu inclure un statut spécifique pour la Corse dans un projet de redistribution des pouvoirs au profit de toute les régions françaises. Faire une exception Corse, c'est donner le sentiment de payer une rançon au terrorisme. Quant à la proposition d'un pouvoir législatif délégué en Corse, elle ne saurait se limiter à la Corse, et l'opposition propose d'ailleurs depuis longtemps un droit à l'expérimentation qui n'est autre qu'un droit de déroger, dans certains cas précis et limités, aux lois nationales. Mais la proposition Jospin est ambiguë au point que certains ont pu croire qu'il y aurait un jour des juges Corses jugeant en langue Corse, selon un droit pénal ou civil Corse. Il ne saurait, bien entendu, en être question. Il y a donc des interrogations légitimes. Oui à l'enseignement du Corse, non au Corse obligatoire.
Yves Nicolin, député DL de la Loire, a annoncé son intention d'avoir une " explication de gravure " avec M. Rossi ce week-end au Coudray-Montceau.
La Corse fait monter les passions. S'il faut débattre, débattons, mais de façon responsable et constructive. Et attendons de juger sur pièce le texte qui sera proposé par le gouvernement.
Jean-Pierre Chevenement a-t-il eu raison de démissionner ?
Il aurait dû le faire beaucoup plus tôt. N'est ce pas M. Chevènement qui disait que le préfet Bonnet était " l'homme qu'il fallait là où il fallait ? " Cela n'a pas empêché l'autorité de l'Etat, de la gendarmerie, de la police et de la justice d'être bafouée. Pourquoi Jean-Pierre Chevènement n'est-il pas parti alors ?
La majorité " plurielle " existe-t-elle encore ?
Le départ du ministre de l'Intérieur révèle, au même titre que la grève du vote référendaire de Robert Hue ou l'acharnement fiscal des Verts sur l'essence, que la majorité plurielle est profondément minée de l'intérieur. On voit bien d'ailleurs l'extrême difficulté, l'incapacité même, de Jospin à tracer une perspective d'ensemble. Il se contente de bricoler plus ou moins bien selon les jours sans jamais dessiner de véritable avenir pour la France. Il est en situation de faiblesse politique.
Le premier Ministre a manifesté une certaine fermeté dans le conflit qui oppose le gouvernement aux routiers
Monsieur Jospin a du faire des concessions aux routiers, aux taxis, aux agriculteurs. Mais aujourd'hui le prix de l'essence ce n'est pas seulement un problème pour les routiers, les agriculteurs ou les taxis, c'est un problème pour tous les Français. Et tous n'ont pas un camions pour bloquer une raffinerie ! C'est pourquoi la sagesse eut été de baisser les taxes sur les carburants devenues insupportables pour l'ensemble des automobilistes.
De combien aurait-il fallu baisser le prix de l'essence ?
Autour d'un franc par litre. C'était à notre portée compte tenu des sur-profits fiscaux encaissés par l'Etat. Mais le gouvernement préfère financer les 35 heures ou embaucher 17 000 fonctionnaires supplémentaires. Entre les automobilistes et les Verts -qui sont à l'origine d'un plan absurde d'augmentation de la fiscalité du gazole- Jospin a choisi.
La suppression de la vignette était-elle une bonne idée ?
C'est une mesure spectaculaire même si ce n'est pas la plus juste. Avec Laurent Fabius, il vaut mieux avoir une Ferrari qu'un camion ou un tracteur !
La fin de non recevoir de Lionel Jospin a été malgré tout plutôt entendue, y compris par le Medef ?
Ce qu'on attend d'un premier ministre c'est qu'il défende d'abord l'autorité de l'Etat. Qu'il fasse tout pour qu'un pays ne soit pas paralysé et qu'il rappelle que l'on n'a pas le droit de bloquer une raffinerie. Monsieur Jospin a si souvent accepté la violence syndicale, celle des postiers qui dispersent des sacs de courriers, des grévistes qui jettent du poison dans les rivières, qu'il n'est pas en position aujourd'hui de dire ce que les Français attendent d'un gouvernement courageux : la loi doit être la même pour tous ; il n'y a pas d'excuse à la violence. En affirmant qu'il ne lachera pas un centime de plus, Lionel Jospin a simplement voulu empêcher les Verts de quitter son gouvernement et cela s'est vu.
A-t-on entendu assez le Président de la République sur la Corse ?
Jacques Chirac a parlé de façon responsable sur la Corse en fixant les limites à ne pas franchir. J'ai regretté cependant qu'il ait justifié la nécessité de réformes par la spécificité insulaire de la Corse et le besoin de paix sans l'inscrire dans un projet plus vaste de réformes institutionnelles pour l'ensemble des régions françaises.
Serez-vous candidat à la présidentielle de 2002 ?
Dans tous les pays, le choix libéral est offert aux électeurs, et il est légitime qu'il le soit aussi en France. Je pense même qu'il est susceptible de rassembler une majorité de Français. Les circonstances s'y prêteront-elles ? Nous verrons bien. Serais-je candidat ? Nous n'en sommes pas là.
Vous semblez-tenté ?
Ce n'est pas la question de cette rentrée ni la question que se posent les Français. Parlons-leur en revanche du coût de l'essence, de la Corse, des impôts et du quinquennat
Ferez-vous campagne pour le " oui " ?
Il y a plusieurs façons de dire " oui ". Il y a les " oui " grincheux, les " oui " riquiqui, les " béni oui-oui ". Nous, notre " oui " c'est un " oui pour aller plus loin ", car réduire le mandat présidentiel c'est inéluctablement poser la question du nécessaire rééquilibrage de nos institutions.
Etes-vous confiant sur les chances de l'opposition de revenir au pouvoir ?
Oui, mais pour cela il faut proposer aux Français un vrai changement car ils sont fatigués de ces alternances molles où les mesures des énarques de gauche viennent remplaçer les mesures des énarques de droite sans que l'on ait le courage de vraies réformes.
(source http://www.demlib.com, le 12Septembre 2000)
Non, mais elle s'annonce passionnante car elle place au cur du débat public un certain nombre de questions que nous souhaitions voir émerger depuis longtemps : le quinquennat qui va exiger un rééquilibrage des pouvoirs, la refondation sociale ou les nouvelles régulations, la constitution européenne, l'avenir de la régionalisation que pose la question Corse. Il faut aujourd'hui redistribuer vers les citoyens, les partenaires sociaux, les élus locaux un pouvoir trop centralisé, trop bureaucratique et trop parisien.
N'est-ce pas paradoxal que cette évolution se fasse avec un gouvernement de gauche ?
Cette évolution est subie par le gouvernement davantage que voulue. En Corse, si Lionel Jospin a du se tourner vers les élus, c'est parce que la politique qu'il avait menée -notamment avec le préfet Bonnet- avait échoué et ridiculisé l'Etat.
José Rossi, le patron de l'Assemblée Corse, a d'ailleurs été un des principaux artisans du processus de Matignon. Ce que tout le monde à DL n'a pas apprécié ?
D'abord, José Rossi a mené une discussion avec les élus Corse qui sont, dans leur immense majorité, des élus républicains profondément attachés à l'unité de la France et fiers d'être Français. Ensuite, les échecs et les errements passés doivent inviter les politiques à traiter de façon responsable ce dossier et se garder de jugements à l'emporte pièce. Cela étant, Lionel Jospin a commis une erreur. Il aurait fallu inclure un statut spécifique pour la Corse dans un projet de redistribution des pouvoirs au profit de toute les régions françaises. Faire une exception Corse, c'est donner le sentiment de payer une rançon au terrorisme. Quant à la proposition d'un pouvoir législatif délégué en Corse, elle ne saurait se limiter à la Corse, et l'opposition propose d'ailleurs depuis longtemps un droit à l'expérimentation qui n'est autre qu'un droit de déroger, dans certains cas précis et limités, aux lois nationales. Mais la proposition Jospin est ambiguë au point que certains ont pu croire qu'il y aurait un jour des juges Corses jugeant en langue Corse, selon un droit pénal ou civil Corse. Il ne saurait, bien entendu, en être question. Il y a donc des interrogations légitimes. Oui à l'enseignement du Corse, non au Corse obligatoire.
Yves Nicolin, député DL de la Loire, a annoncé son intention d'avoir une " explication de gravure " avec M. Rossi ce week-end au Coudray-Montceau.
La Corse fait monter les passions. S'il faut débattre, débattons, mais de façon responsable et constructive. Et attendons de juger sur pièce le texte qui sera proposé par le gouvernement.
Jean-Pierre Chevenement a-t-il eu raison de démissionner ?
Il aurait dû le faire beaucoup plus tôt. N'est ce pas M. Chevènement qui disait que le préfet Bonnet était " l'homme qu'il fallait là où il fallait ? " Cela n'a pas empêché l'autorité de l'Etat, de la gendarmerie, de la police et de la justice d'être bafouée. Pourquoi Jean-Pierre Chevènement n'est-il pas parti alors ?
La majorité " plurielle " existe-t-elle encore ?
Le départ du ministre de l'Intérieur révèle, au même titre que la grève du vote référendaire de Robert Hue ou l'acharnement fiscal des Verts sur l'essence, que la majorité plurielle est profondément minée de l'intérieur. On voit bien d'ailleurs l'extrême difficulté, l'incapacité même, de Jospin à tracer une perspective d'ensemble. Il se contente de bricoler plus ou moins bien selon les jours sans jamais dessiner de véritable avenir pour la France. Il est en situation de faiblesse politique.
Le premier Ministre a manifesté une certaine fermeté dans le conflit qui oppose le gouvernement aux routiers
Monsieur Jospin a du faire des concessions aux routiers, aux taxis, aux agriculteurs. Mais aujourd'hui le prix de l'essence ce n'est pas seulement un problème pour les routiers, les agriculteurs ou les taxis, c'est un problème pour tous les Français. Et tous n'ont pas un camions pour bloquer une raffinerie ! C'est pourquoi la sagesse eut été de baisser les taxes sur les carburants devenues insupportables pour l'ensemble des automobilistes.
De combien aurait-il fallu baisser le prix de l'essence ?
Autour d'un franc par litre. C'était à notre portée compte tenu des sur-profits fiscaux encaissés par l'Etat. Mais le gouvernement préfère financer les 35 heures ou embaucher 17 000 fonctionnaires supplémentaires. Entre les automobilistes et les Verts -qui sont à l'origine d'un plan absurde d'augmentation de la fiscalité du gazole- Jospin a choisi.
La suppression de la vignette était-elle une bonne idée ?
C'est une mesure spectaculaire même si ce n'est pas la plus juste. Avec Laurent Fabius, il vaut mieux avoir une Ferrari qu'un camion ou un tracteur !
La fin de non recevoir de Lionel Jospin a été malgré tout plutôt entendue, y compris par le Medef ?
Ce qu'on attend d'un premier ministre c'est qu'il défende d'abord l'autorité de l'Etat. Qu'il fasse tout pour qu'un pays ne soit pas paralysé et qu'il rappelle que l'on n'a pas le droit de bloquer une raffinerie. Monsieur Jospin a si souvent accepté la violence syndicale, celle des postiers qui dispersent des sacs de courriers, des grévistes qui jettent du poison dans les rivières, qu'il n'est pas en position aujourd'hui de dire ce que les Français attendent d'un gouvernement courageux : la loi doit être la même pour tous ; il n'y a pas d'excuse à la violence. En affirmant qu'il ne lachera pas un centime de plus, Lionel Jospin a simplement voulu empêcher les Verts de quitter son gouvernement et cela s'est vu.
A-t-on entendu assez le Président de la République sur la Corse ?
Jacques Chirac a parlé de façon responsable sur la Corse en fixant les limites à ne pas franchir. J'ai regretté cependant qu'il ait justifié la nécessité de réformes par la spécificité insulaire de la Corse et le besoin de paix sans l'inscrire dans un projet plus vaste de réformes institutionnelles pour l'ensemble des régions françaises.
Serez-vous candidat à la présidentielle de 2002 ?
Dans tous les pays, le choix libéral est offert aux électeurs, et il est légitime qu'il le soit aussi en France. Je pense même qu'il est susceptible de rassembler une majorité de Français. Les circonstances s'y prêteront-elles ? Nous verrons bien. Serais-je candidat ? Nous n'en sommes pas là.
Vous semblez-tenté ?
Ce n'est pas la question de cette rentrée ni la question que se posent les Français. Parlons-leur en revanche du coût de l'essence, de la Corse, des impôts et du quinquennat
Ferez-vous campagne pour le " oui " ?
Il y a plusieurs façons de dire " oui ". Il y a les " oui " grincheux, les " oui " riquiqui, les " béni oui-oui ". Nous, notre " oui " c'est un " oui pour aller plus loin ", car réduire le mandat présidentiel c'est inéluctablement poser la question du nécessaire rééquilibrage de nos institutions.
Etes-vous confiant sur les chances de l'opposition de revenir au pouvoir ?
Oui, mais pour cela il faut proposer aux Français un vrai changement car ils sont fatigués de ces alternances molles où les mesures des énarques de gauche viennent remplaçer les mesures des énarques de droite sans que l'on ait le courage de vraies réformes.
(source http://www.demlib.com, le 12Septembre 2000)