Interview de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président délégué et président par intérim de l'UMP et maire de Marseille, à RMC le 10 novembre 2004, sur la situation en Côte d'Ivoire et sur le choix du site du futur réacteur à fusion nucléaire ITER.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

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J.-J. Bourdin - On va d'abord parler de la Côte d'Ivoire. La situation est très tendue à Abidjan ; comment regardez-vous ce qui se passe ?
R - Je crois que ce Président Gbagbo ne respecte pas du tout les accords de Marcoussis. Je crois qu'il veut profiter d'une situation pour essayer de reconquérir tout le nord autour de Bouaké qu'il a perdu, je crois que cet homme-là ne respecte rien par rapport aux accords avec la France, qu'il fait courir, par son attitude brutale des risques à nos nombreux compatriotes qui ont toujours vécu en Côte d'Ivoire et qui participe au développement de l'économie de ce pays. Et par conséquent, nous sommes inquiets. Mais comme l'a dit M. Alliot-Marie très justement, pour nous, il est le responsable.
Q - Pour vous, il est le responsable, alors que peut-on faire maintenant ?
R - D'abord, protéger les Français qui sont là-bas. Eviter, peut-être qu'ils ne paniquent. Un proviseur de lycée français disait à la télévision ces jours-ci, qu'il y avait deux attitudes : une attitude brutale dans la presse, dans les radios, à la télévision et puis la réalité est moindre, ce n'est pas une agression aussi forte. Néanmoins, quand on voit toutes ces troupes de jeunes devant notre ambassade ou pillant, dévastant les maisons de nos compatriotes, on ne peut qu'être inquiet.
Q - C'est vrai que tout le monde est inquiet, mais franchement, depuis quelques semaines, on pensait pouvoir discuter avec le Président Gbagbo.
R - Oui, mais visiblement non, et puis, je vais vous dire, aujourd'hui...
Q - On s'est peut-être trompé...
R - ... c'est aussi un jour de tristesse pour la France, pour les familles de ces soldats, puisque cet après-midi, le président de la République, au nom de la France, leur rendra hommage. Neuf soldats français tués, c'est beaucoup, c'est beaucoup trop !
Q - Autre chose : le décès de Y. Arafat devrait être annoncé aujourd'hui. Il pourrait être enterré à Ramallah. Rumeurs, fausses informations, démentis ; quelle comédie !
R - Oui, mais la France a une attitude très digne, et là aussi, je crois que l'action internationale du président de la République peut impressionner les pays qui sont des pays amis de la France. Nous avons accueilli Y. Arafat, nous le soignons. Peut-être est-il à la fin de sa vie. Pour l'instant, rien d'officiel ne nous a été annoncé. Il doit être, me semble-t-il, enterré à Ramallah, le plus proche de l'endroit où il a vécu.
Q - A-t-on eu raison de l'accueillir ?
R - Oui.
Q - Pourquoi ?
R - Parce que quels que soient les différends politiques, quels que soient les actes passés, les actions qui ont pu être menées, qui n'ont pas toujours été appréciées, il y a un côté humanitaire. La France s'honore de ce côté-là, de transgresser un peu les clivages politiques. Le président de la République a bien fait.
Q - Avez-vous des nouvelles d'ITER.
R - Pas bonnes.
Q - Ah bon ?
R - Les Japonais persistent. Nous avions cru au début de la semaine que les Japonais accepteraient. Finalement, ils disent qu'ils ne veulent pas. La dernière conversation que j'ai eue avec F. d'Aubert, le ministre de la Recherche, un des amis parce que nous nous connaissons depuis longtemps, nous avons évoqué cette question-là. J'encourage la France à faire ITER même sans le Japon. Allons-y quand même !
Q - C'est ce qui est envisagé ?
R - Je crois. Ou bien on réussit à voir l'ensemble de tout le monde parce que c'est le meilleur site, parce que c'est le meilleur endroit, ou bien les Japonais ne veulent pas pour des raisons qui leur sont personnelles, sur l'influence des Etats-Unis, si les Etats-Unis ne nous sont pas favorables actuellement, peut importe, faisons-le. Quand je présidais la région PACA, il y a un certain nombre d'années, déjà plus de dix ans en arrière, j'avais prévu la construction d'un lycée international à Aix ; ce lycée international, il existe, je l'ai inauguré, à l'époque avec monsieur Allègre, quand ce dernier était ministre de l'Education nationale, et nous l'avions fait dans la perspective où nous aurions un jour ITER. Ce sont des questions qui sont longues à mûrir. Les collectivités territoriales ont annoncé des efforts financiers considérables. Madame la députée-maire d'Aix en Provence est à la tête de cette mobilisation, elle fait des efforts considérables et ce serait bien que nous ayons ITER pour l'avenir.
Q - Donc, on pourrait faire ITER avec l'Europe, avec la Russie et la Chine qui sont nos partenaires ?
R - Oui, absolument. Je crois qu'à un moment donné, on ne peut pas toujours accepter qu'on nous fasse chanter...
Q - Ce sont les Américains qui en sous-main... ?
R - Les Américains, ces derniers temps, n'en avaient pas tellement envie et les Japonais qui persistaient à vouloir faire cela ailleurs, alors que tout est réuni à Cadarache pour le faire.
Q - Parlons de politique très vite [...]. Je voudrais aussi parler de Plan de campagne, de ce qui se passe avec ces commerçant de Plan de campagne, qui voudraient voir les dérogations se perpétuer. Pour les auditeurs qui ne connaissent pas, Plan de campagne, c'est la plus grande zone commerciale de France.
R - Voilà. Sauf qu'elle ne fait pas partie de la communauté urbaine de Marseille. Et sauf que bien entendu, ce sont les Marseillais, qui, allant le dimanche, jour où les magasins sont ouverts, dépenser leur argent dans cette zone commerciale, alors que Marseille n'en retire aucun avantage. Nous avons toutes les difficultés d'embouteillage, de transport, et apporter notre argent dans ces grandes surfaces.
Q - Il faut fermer le dimanche ?
R - C'est une décision qui appartient au préfet. Il a des périodes où l'on peut ouvrir et des périodes où l'on peut fermer. Je n'ai pas le dossier sous les yeux pour me prononcer d'une manière précise. Ce que je vous dis, c'est que la ville de Marseille supporte beaucoup de contraintes et ne retire aucun avantage de cela. Alors ne m'en demandez pas trop !
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 10 novembre 2004)