Interview de Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances, dans "La Lettre de la DIV" de juin 2004, sur les missions du secrétariat d'état à l'intégration et à l'égalité des chances.

Prononcé le 1er juin 2004

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Média : La Lettre de la DIV

Texte intégral

La Lettre de la DIV : Quelle place la politique de la ville tient-elle au sein de votre secrétariat d'Etat ?
Catherine Vautrin : J'aimerais au préalable évoquer le pôle de Cohésion sociale placé sous l'autorité de Jean-Louis Borloo et dont je fais partie. Calqué sur les besoins de nos concitoyens, il comporte trois piliers : le logement, l'emploi et la vie des quartiers. La particularité de ce pôle est que nous travaillons en équipe, avec deux réunions des ministres par semaine. Chaque secrétaire d'État ou ministre délégué est responsable de son secteur tout en étant solidaire du secteur des autres. Je suis, pour ma part, plus spécialement en charge de l'intégration qui concerne les primo-arrivants, les Français issus de l'immigration, ainsi que de l'égalité des chances, c'est-à-dire le volet " humain " de la politique de rénovation urbaine conduite par Jean-Louis Borloo alors qu'il était ministre de la Ville.
La Lettre de la DIV : Précisément, quels vont être vos chantiers dans le cadre de ce volet " humain " ?
Catherine Vautrin : Sans dévoiler le plan de cohésion sociale que nous présenterons fin juin avec Jean-Louis Borloo, je peux vous donner quelques pistes de travail : nous souhaitons, par exemple, travailler sur le soutien des jeunes enfants, dès l'école maternelle (2-12 ans), notre but étant de limiter le plus possible le décrochage scolaire. Nous réfléchissons à la question de l'accompagnement tant scolaire que personnel au moment où se construit la personnalité de l'enfant. Il se fait un travail très efficace en Grande-Bretagne et aux États-Unis, notamment depuis 1962. Autre chantier, celui de l'égalité des chances entre villes riches et villes pauvres car une ville dont 80 % du territoire est en ZUS ne part pas sur les mêmes bases que celle dont la ZUS représente seulement 20 % du territoire ! Il faut des actions fortes pour rétablir un équilibre dans les 200 villes les plus pauvres. Cela passera sans doute par un réaménagement de la dotation de solidarité urbaine.
La Lettre de la DIV : Quels liens entretenez-vous avec l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) ?
Catherine Vautrin : Je partage la tutelle de l'ANRU avec Marc-Philippe Daubresse, secrétaire d'État au Logement: nous voulons que cette structure ait la double lecture " logement " et " ville ", afin que les chantiers de rénovation soient décidés sur les critères les plus justes possible. Sachant que dans certains quartiers en difficulté, 32 % des habitants ont moins de 20 ans, nous voulons mener un programme d'investissement lourd de rénovation urbaine, d'aide financière et de soutien humain - en termes d'emploi, notamment. L'insertion des jeunes dans le monde du travail en fait ainsi partie. Nous allons notamment travailler sur l'apprentissage afin d'améliorer leurs chances de trouver un emploi.
La Lettre de la DIV : Quels sont les autres secteurs sur lesquels vous souhaitez intervenir ?
Catherine Vautrin : Avec l'équipe de Jacques Toubon, dans le cadre du futur Musée de l'histoire de l'immigration, je souhaite mener une réflexion sur les immigrés de la première génération. Il me semble qu'en effectuant un travail de mémoire, nous pourrons leur rendre enfin hommage.
Par ailleurs, nous réfléchissons à étendre la protection maternelle et infantile (PMI) de 3 à 6 ans, âge légal de l'entrée à l'école. Nous avons aussi entamé un important travail interministériel sur la prévention de la délinquance. Mon point de vue est qu'il nous faut réapprendre le vivre ensemble et concilier humanité et fermeté. L'écoute et la médiation n'excluent pas la réparation et c'est dans ce sens que je souhaite avancer. Enfin, la relance des ZFU va être l'occasion, pour nous, de travailler sur l'immobilier d'entreprises et le développement de pépinières dans les quartiers. Plus ces pépinières sont nombreuses, moins le risque d'échec est grand pour les entrepreneurs.
La Lettre de la DIV : Environ deux mois après votre arrivée, quelle est votre vision des quartiers ?
Catherine Vautrin : J'ai envie d'en donner un autre visage que celui qu'on nous montre habituellement. Il faut absolument parler des réussites qui ont lieu dans ces quartiers, et cela au-delà de l'opération Talents des cités. En impliquant plus et mieux les gens qui réussissent - et ils sont nombreux dans ces quartiers - nous pourrions en faire des référents pour les jeunes d'aujourd'hui. Et puis je crois qu'il faut pratiquer le benchmarking [échange de pratiques] et aller voir chez nos voisins étrangers ce qui se fait de bien. Sur l'accompagnement des enfants, je sais par exemple que des choses intéressantes se passent en Grande-Bretagne.
(source http://www.ville.gouv.fr, le 22 juillet 2004)