Texte intégral
Déclaration lors du diner officiel offert par la partie malienne à Bamako le 10 :
Mesdames et Messieurs les Ministres
Mesdames et Messieurs les Députés
Chers amis,
Je me réjouis de me trouver, pour la quatrième fois depuis que j'assume la fonction de ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, à Bamako. Un lien sentimental tout particulier m'attache à votre pays, car c'est ici que j'ai reçu mes premières impressions ministérielles. C'était quelques jours après la constitution du gouvernement auquel j'appartiens et j'étais venu assister à la cérémonie d'investiture du président Konare, le 8 juin 1997.
Le Sahel ne m'était pas étranger. Le Conseil général des Côtes d'Armor, que j'ai présidé pendant 21 ans, entretient en effet une coopération décentralisée active avec Agades et je m'étais fréquemment rendu au Niger.
Cette région, qu'on ne peut aborder avec des idées simples, vous me l'avez fait peu à peu connaître, comprendre, aimer.
Je venais pour la première fois au Mali, et, d'emblée, j'avais pu apprécier le sens de l'hospitalité dont savent faire preuve les Maliens. Je le vérifie une nouvelle fois aujourd'hui, soyez en remerciés, chers amis.
Je suis heureux que vous ayez pu m'accueillir aujourd'hui à Bamako, parce que ce début de millénaire constitue, j'en suis convaincu, une période importante pour le Mali comme pour les relations franco-maliennes. Si j'y ajoute que le Mali, par l'action de son président, porte une grande idée de l'Afrique : libre, responsable, partenaire du monde, et que la France veut partager cette vision et la faire partager à ses partenaires, notamment européens, vous comprendrez l'importance que j'accorde à cette visite.
J'ai tenu à venir vous rencontrer, Monsieur le Président de la République, dès que possible, et dès que votre calendrier si chargé l'a permis, au moment où le Mali assume les présidences de la CEDEAO et de l'UEMOA, bientôt du CILSS, et où il devient membre du Conseil de sécurité des Nations Unies, pour la première fois depuis 1967.
Nous mesurons l'importance du rôle qui échoit ainsi à votre pays. C'est la première fois, si je ne me trompe, qu'un chef d'Etat exerce simultanément la présidence de ces deux organisations régionales. Cela signifie, à la fois, une responsabilité toute particulière et, j'en suis persuadé, une capacité d'action accrue. C'est pourquoi cette coïncidence que, je le sais, vous avez souhaitée, est particulièrement bienvenue, alors que le processus d'intégration au sein de l'UEMOA comme de la CEDEAO franchit des étapes importantes et que les conditions semblent réunies pour son accélération, alors aussi que des thèmes qui ont toujours été au cur de la conception malienne de l'avenir de l'Afrique et des relations internationales - je pense à l'Unité africaine -. sont à nouveau au centre des débats. L'influence que vous confère cette double présidence vous permettra également d'apporter une contribution d'autant plus active au règlement des crises qui, hélas, affectent gravement le continent et plusieurs pays de la sous-région.
D'ores et déjà, vous avez instauré un nouveau style, celui d'une diplomatie que vous voulez directe et dont je sais combien elle est appréciée.
L'exercice de ces responsabilités, qui renforce encore son image, permettra au Mali d'être avec efficacité la voix de l'Afrique au Conseil de sécurité des Nations unies.
Membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, entretenant avec l'Afrique des relations étroites et fidèles, la France porte un intérêt majeur à un dialogue approfondi sur ces grands thèmes.
C'est une dimension nouvelle de notre relation si ancienne que nous entreprenons ainsi de construire. Par la force des choses, la coopération au développement est une dimension essentielle de la relation entre nos deux pays. Désormais, le Mali est un partenaire politique, et nous nous félicitons de l'audience que votre entrée au Conseil y conférera à l'Afrique.
L'avenir de l'Afrique, c'est aussi un peu le nôtre, et nous souhaitons, dans un dialogue égal et dans la fraternité, défendre sur la scène internationale nos valeurs communes : la paix et la sécurité, la démocratie, une culture que l'histoire nous a conduit à partager.
Evoquer une histoire et une culture partagées, ce n'est pas nier les différences. Je suis aussi, vous le savez, ministre en charge de la Francophonie. Je voudrais dire ici que le temps d'une Francophonie arc-boutée dans une attitude défensive, contre l'anglais par exemple, est révolu. Avec le Secrétaire général de la Francophonie, M. Boutros-Ghali, nous souhaitons au contraire tisser des liens entre la Francophonie et les autres aires linguistiques : hispanophie, lusophonie, et aussi Commonwealth. Car le combat pour la francophonie est en fait un combat pour la diversité, c'est dire qu'il ne saurait s'opposer par exemple à la défense et illustration de vos langues nationales. Notre horizon commun c'est, tout simplement, un équilibre entre respect des identités et partage de valeurs universelles que nous devons rechercher, loin du repli sur soi comme de l'oubli de soi.
Qui dit partenariat dit naturellement échanges entre les hommes. A ce sujet, j'aimerais aborder sans tabous les questions des visas et de l'immigration.
Vous connaissez les fondements de la politique française et l'engagement du gouvernement à développer les échanges d'étudiants, de scientifiques, d'ingénieurs, d'universitaires, d'hommes d'affaires, de commerçants... En même temps, la France ne saurait accueillir, comme l'a dit un jour Michel Rocard, alors Premier ministre, toute la misère du monde.
L'immigration zéro n'est ni possible, ni souhaitable, une immigration sans limites ne l'est pas davantage. La politique des visas est au carrefour de ces deux préoccupations, et l'expérience des derniers mois, ici à Bamako, montre que leur conciliation ne débouche pas obligatoirement sur une politique restrictive. Le nombre des visas délivrés est passé d'un peu plus de 12000 en 1998 à 14000 en 1997 et l'on se situe, pour les derniers mois, à un rythme annuel de 18000, avec un taux de refus qui, si l'on excepte les refus pour fraude manifeste, est inférieur à 5 %. Il convient en outre de préciser que plus de 4700 Maliens bénéficient d'un visa de circulation qui leur permet d'aller et venir à leur guise entre nos deux pays.
Nous savons aussi que les conditions d'accueil sont souvent difficiles, tout comme du reste les conditions de travail pour nos personnels. Elles nuisent à une politique d'ouverture qui exige en effet un accueil respectueux des demandeurs de visas. Je vous confirme que la construction du nouveau consulat commencera dans quelques semaines, en avril prochain. Je signale aussi au passage que nous rénoverons ensuite le bâtiment actuel de l'ambassade. Nous avons voulu faire de notre poste à Bamako l'un des exemples d'une politique cohérente : plus ouverte et plus accueillante. Je vous demande de la mesurer aux faits.
Je voudrais surtout réitérer ici notre volonté d'aborder ces sujets dans un esprit de dialogue. C'est pourquoi je vous ai proposé que nous réunissions prochainement le Comité franco-malien sur les migrations. Dans le domaine de l'immigration comme dans les autres, le maître mot doit être partenariat.
Bien entendu, la réussite du partenariat implique un minimum de moyens. Dialogue égal ne signifie pas diminution de l'aide, et je me félicite que le gouvernement auquel j'appartiens ait été en mesure de mettre un terme à la diminution de nos enveloppes d'aide publique au développement. L'an dernier, comme vous le savez, la France a été le premier bailleur de fonds du Mali, avec un montant légèrement supérieur à 35 milliards de francs CFA.
Le Mali fait partie de la "zone de solidarité prioritaire" que nous avons définie, et nous le plaçons au tout premier rang des pays qui méritent notre solidarité, de par les efforts que les Maliens eux-mêmes déploient pour assainir leur économie et asseoir durablement la démocratie, condition de la fidélité à nos valeurs, mais aussi du développement.
Demain comme aujourd'hui, la France sera aux côtés du Mali.
Cette solidarité prendra bien entendu pleinement en compte vos nouvelles priorités. Je pense d'abord à la formation, dont je sais combien elle vous tient à cur. Chacun a retenu du "Bouillon de culture" enregistré il y a deux ans à Bamako que le président Konare se définissait d'abord comme maître d'école, enseignant, avant d'être Président. Au moment où le Mali approfondit sa démocratie, que vous apprivoisez ici comme un art de vivre ensemble, préférant les échanges loyaux sur des sujets politiques et de société à toute lutte stérile pour le pouvoir, je voudrais vous dire combien nous comprenons votre souci de former une génération de jeunes Maliens responsables, entreprenants, libres. Et combien est grande notre disponibilité pour coopérer avec vous sur ce thème.
Mais je pense aussi à la décentralisation, autre grand projet de votre second mandat et qui sera précisément, j'en suis convaincu, à la fois une école de la démocratie et un levier du développement.
Demain, je serai à Mopti. J'y verrai la manière dont la décentralisation se traduit sur le terrain. Je me félicite aussi de pouvoir y rencontrer des représentants des coopérations décentralisées françaises, qui me sont si chères, d'autant que Mopti entretient des liens étroits avec ma Bretagne natale, notamment avec cette ville de Rennes qui se souvient avec émotion de la visite que le président Konare avait bien voulu y faire le 1er octobre dernier.
De mes visites régulières au Mali, je retiens l'image d'un pays qui progresse dans le souci constant de la paix, à l'intérieur de ses frontières et dans la région. Sans la paix, sans la démocratie, pas de développement durable. Notre coopération, étroite, multiforme, confiante, est au service de cet objectif.
Vive le Mali, vive la France, vive la coopération franco-malienne.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 février 2000)
Déclaration pour la clôture des travaux de la réunion de suivi de la commission mixte à Mopti le 11 :
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs,
La France et le Mali ont signé en juin 1998 - nous avons signé tous deux, Monsieur le Ministre - le premier accord de partenariat de la Zone de solidarité prioritaire. Cet accord a permis un renforcement du dialogue franco-malien sur les questions de coopération.
Durant trois jours et en présence, du côté français, du directeur général de la DGCID, vous avez procédé à une revue détaillée de notre coopération, pour examiner ensemble les progrès accomplis depuis juin 1998.
On m'a rapporté la qualité des échanges, caractérisés par l'engagement des uns et des autres. Vous avez, chacun à votre niveau, su sortir du discours et prendre des dispositions pour mieux ancrer le partenariat dans la réalité quotidienne, fondant ainsi une pratique renouvelée de notre coopération : transparence, confiance réciproque, écoute et respect mutuel... une véritable éthique du partenariat.
Qu'il me soit permis de remercier le ministre et son directeur de la coopération internationale, qui ont permis que cette réunion se tienne dans de bonnes conditions, malgré la brièveté des délais impartis pour sa préparation.
Un regret toutefois : que la dynamique du partenariat entre les sociétés civiles (associations comme collectivités) de nos deux pays n'ait pu s'exprimer parallèlement à cette réunion des administrations, comme elle l'avait fait lors de notre Commission mixte. J'ai été informé de la dynamique nouvelle créée dans ce domaine au Mali. Je m'en réjouis et souhaite que nous la renforcions toujours davantage, pour que la relation franco-malienne bénéficie pleinement des apports de tous ceux qui sont prêts à s'engager pour l'enrichir. Sachez que, pour ce qui le concerne, le service de coopération et d'action culturelle de notre ambassade ne ménagera pas ses efforts pour amplifier encore cette dynamique, à laquelle, permettez-moi de le dire, je sais qu'il a activement contribué.
Cette clôture des travaux est également l'occasion de réitérer l'engagement de la France à vos côtés. Je viens de procéder à la signature de trois conventions de financement qui concrétisent cet engagement. Celles-ci portent sur un montant total de 3,6 milliards de FCFA de crédits du Fonds d'Aide et de Coopération. Elles prévoient respectivement :
- une première participation de la coopération française au programme de développement sanitaire et social du Mali (PRODESS) pour 1,4 milliard de FCFA
- un appui à la filière livre (bibliothèques scolaires, de lecture publique et associatives) pour 1,2 milliard de FCFA.
- un appui aux administrations financières pour 1 milliard de FCFA
Par cette signature, je veux témoigner de la résolution de la France à accompagner le développement du Mali, au bénéfice de ses populations, de ses associations et collectivités territoriales, comme du renforcement des capacités de ses administrations.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 février 2000)
Déclaration à l'occasion de la réception à la résidence de France à Bamako le 11 :
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Maire du district,
Messieurs les Maires de Bamako,
Chers amis,
Permettez-moi tout d'abord de dire combien je suis sensible à l'accueil qu'une fois de plus les autorités de ce pays m'ont réservé pour le quatrième voyage que j'effectue au Mali depuis que je suis au gouvernement, voyage auquel j'ai pu cette fois associer mon épouse et mes enfants, ce qui, bien sûr, accroît mon plaisir à être ici. Permettez-moi aussi de vous remercier tous de l'honneur d'avoir répondu aussi massivement à l'invitation de notre ambassadeur, Christian Connan, et de son épouse.
Chacune de ces visites approfondit, je crois, le sens de la relation franco-malienne : en juin 1997, quelques jours après ma nomination, je représentais le gouvernement français à l'investiture du président Konare pour son second mandat présidentiel et lui disais la confiance et l'amitié de notre pays. En décembre de la même année, j'accompagnais notre Premier Ministre dans son premier voyage en Afrique, dont Bamako fut une étape importante. En mai 1998, nous engagions ici à Bamako un dialogue sur les migrations et le codéveloppement, en créant le Comité franco-malien sur les migrations.
J'avais de bonnes raisons de souhaiter revenir à Bamako : depuis le début de cette année le président Konare exerce la double présidence de la CEDEAO et de l'UEMOA, à laquelle il joindra bientôt celle du CILSS, et le Mali, pour la première fois depuis 1967, est entré au Conseil de sécurité des Nations unies. Il était donc naturel, il était même nécessaire, que le gouvernement français puisse aussi rapidement que possible nouer avec les autorités maliennes le dialogue sur ces sujets, tant ils rejoignent nos propres préoccupations : le processus d'intégration régionale dans un continent africain qui se recompose ; le présent et l'avenir de ce continent (la communauté internationale sait que les crises qu'on y vit ne se résoudront qu'avec les Africains eux-mêmes) ; le rôle que la France peut y tenir enfin au moment où elle s'apprête à prendre la présidence de l'Union européenne le 1er juillet prochain.
Est-il besoin d'ajouter qu'il était précieux pour moi de prendre le pouls de la vie politique malienne ? Je l'ai fait tout au long de la matinée en rencontrant l'ensemble des nombreuses familles politiques du pays. Je leur ai dit combien l'expérience malienne, dans une Afrique qui trop souvent encore tâtonne dans la recherche d'une vie démocratique apaisée, était pour la France un exemple à encourager et à faire partager, sans doute aussi à parfaire.
Nous savons la difficulté du dialogue politique, la difficulté aussi qu'il y a à élaborer des règles qui s'imposent pour qu'une communauté nationale soit assurée de la stabilité intérieure, d'un débat clair et loyal, de projets de société nécessairement concurrents mais librement choisis, aux échéances prévues, par les électeurs.
En proportion de ces efforts que nous saluons et que, je le répète, nous encourageons, le Mali connaît la paix, avec des règles qu'en 1991 le peuple malien a lui-même choisies. La perspective des élections de 2002 sera pour tous, je veux le croire, l'occasion de consolider la démocratie malienne. Et puisque, j'ai pu le constater, tous s'y disent prêts, il reste à mettre les actes en harmonie avec les intentions.
La démocratie est en effet le socle de la paix et du développement. C'est donc une valeur universelle qui ne se négocie pas. Mais elle se décline et s'approfondit par les peuples eux-mêmes. La France en est si persuadée qu'elle a défini en Afrique depuis bientôt trois ans une politique dépourvue de toute ambiguïté : fidèle à ses amis, qu'elle soutient par un dialogue politique constant, une coopération de partenaire à partenaire, et par l'influence que lui donne sa position dans les instances internationales et multilatérales, elle est leur avocat de tous les instants pour leur permettre d'approfondir chez eux les principes d'une vie publique qui soient respectueux du droit, de la démocratie, de la liberté, et propices au développement.
Mais elle a aussi de façon constante tout au long des derniers mois - et de façon plus explicite encore au cours des dernières semaines - démontré qu'elle ne voulait pas et ne voulait plus intervenir dans les affaires intérieures des autres, fussent-ils ses plus proches amis. Elle ne le veut plus parce que la responsabilité de chacun lui appartient en propre ; elle ne le veut plus parce que les solutions imposées de l'extérieur ne sont jamais durables ; elle ne le veut plus parce qu'elle se forme de l'Afrique l'image d'un continent qui aspire au respect, et que le respect ne s'acquiert que dans la responsabilité des peuples eux-mêmes.
Chacun peut voir que ce devoir de non-ingérence ne signifie évidemment pas non-indifférence : notre coopération bilatérale y trouve d'autant plus de sens qu'elle sert aux Etats et aux sociétés à approfondir les pratiques du droit et de la bonne gouvernance. Parallèlement, nous recherchons toutes les possibilités d'action pour que la paix et la sécurité du continent puissent bientôt reposer sur des capacités de défense forgées par les Africains eux-mêmes : le programme RECAMP, de renforcement des capacités de maintien de la paix, qui vise à créer des liens de fraternité, et de valeur entre armées africaines au service de la paix, en est le meilleur exemple.
Mesdames et Messieurs,
Le Mali a ouvert l'an 2000 en prenant d'importantes responsabilités régionales et internationales.
Nous savons qu'avec ce pays et son président, la CEDEAO et l'UEMOA, chevilles d'une sous-région qui aspire à la paix, au développement des échanges économiques, et à la prévention des crises, connaîtront une activité redoublée. Le président Konare m'a communiqué sa vision politique d'un puzzle régional qui a été trop éprouvé ces derniers temps par des crises profondes et douloureuses pour que nous n'en tirions pas avec lui la conséquence que c'est par une volonté politique forte, partagée, et des instruments de concertation diplomatique, économique, sociaux renforcés que les risques de déstabilisation pourront être prévenus.
Dans notre monde global, les solidarités régionales, étayées par le partage des cultures, d'intérêts et du développement, sont le véritable atout des peuples. Profondément attachée à l'Europe, dont elle sait pour elle-même les avantages qui l'emportent (oh combien !) sur les inconvénients, la France ne dit pas autre chose à l'Afrique et se réjouit de la détermination qu'elle trouve chez un partenaire comme le Mali. Et nous apprécions déjà cette forme de diplomatie ouverte, directe, humaine qu'y déploie le président Konare, et qui rencontre le meilleur écho dans la région. En partageant sa vision des choses, la France, qui s'est tant impliquée dans l'intégration économique régionale, souhaite que les outils dont disposent déjà les Etats membres de l'UEMOA puissent aider à rapprocher les pays qui composent la CEDEAO, qui compte des Etats aussi considérables que le Nigeria ou le Ghana.
Nul doute qu'au Conseil de sécurité, où nous nous réjouissons que le Mali siège, pour deux ans, l'Afrique et les pays en développement compteront avec lui une voix forte et des propositions constructives et utiles pour la communauté internationale.
En abordant ces importantes questions, je souhaite pour finir partager avec vous deux réflexions, au centre de la diplomatie et de la coopération françaises telles que le gouvernement les ont infléchies :
- la première tient à la relation privilégiée qui unit l'Europe et l'Afrique. La France souhaite l'approfondir, la diversifier et l'adapter aux besoins de ce continent. Nous venons d'achever l'importante négociation UE/ACP de Bruxelles, qui scelle un nouveau partenariat encourageant le processus d'intégration régionale, mais aussi une sorte de contrat entre les deux parties sur le respect de la bonne gouvernance, de la démocratie et désormais du refus de la corruption, si désastreuse pour le développement.
Chargé au sein du gouvernement de cette importante mission, je peux indiquer que la France y a joué un rôle actif, et sur les principes, et sur les moyens que l'Union européenne y affectera au travers du fonds européen de développement. En y contribuant pour près d'un quart, c'est un engagement fort que la France a pris et qui, s'adressant aux ACP, s'adresse vous le savez d'abord à l'Afrique.
- ma seconde réflexion tient à la question très sensible des échanges humains entre nos deux pays. Car, si importante que soit notre coopération, la relation franco-malienne ne s'y résume pas. J'y porte, soyez en assuré, comme tout le gouvernement, un grand intérêt.
Je pense naturellement à la question des visas, et plus fondamentalement, à celle de l'immigration, dont je viens de m'entretenir avec le ministre des Affaires étrangères et des Maliens de l'Extérieur, M. Modibo Sidibe.
S'agissant des visas, je souhaiterais aller à l'encontre d'une idée fausse : la France pratiquerait une politique très restrictive en matière de visas, elle ne les accorderait, en quelque sorte, qu'au compte-gouttes. Or, en 1999, notre consulat a délivré 14 000 visas, contre 12 000 l'année précédente. Sur les quatre derniers mois de l'année - c'est-à-dire depuis que la nouvelle politique mise en oeuvre par la nouvelle équipe de l'ambassade et du consulat produit son plein effet -, on en est à un rythme annuel de 18 000 visas délivrés. J'ajoute que plus de 4700 Maliens bénéficient d'un visa de circulation qui leur permet d'aller et venir en France, aussi souvent qu'ils le désirent, sans aucune formalité. Un chiffre est plus significatif encore peut être : celui du pourcentage des refus. Si l'on excepte les refus pour fraudes manifestes, hélas assez fréquents, il faut bien le dire, le taux de refus est inférieur à 5 %.
Prochainement, vous le savez, en avril, commencera la construction d'un nouveau consulat général, qui sera achevé en fin d'année. Les conditions d'accueil en seront considérablement améliorées, et aussi - je tiens à le souligner - les conditions de travail du personnel. Nous allons également - je le dis en passant - rénover entièrement le bâtiment actuel de l'ambassade.
Ce que nous voulons, en fait, c'est favoriser les mouvements et la mobilité qui servent à enrichir et approfondir les liens entre nos deux pays. La France ne peut accueillir tous ceux qui cherchent des conditions d'existence que le sous-développement de leur pays, de leur région, ne leur offre pas. D'ailleurs, si aucune limite n'était mise à l'immigration, les immigrés eux-mêmes ne trouveraient plus en France ce qu'ils y recherchent, et nous ne pourrions leur offrir des conditions de vie décentes. C'est pourquoi il faut des règles, que partagent aussi les Européens, et jeudi dernier à Bruxelles les pays ACP en sont eux-mêmes convenus.
Prochainement, nous réunirons le Comité franco-malien sur les migrations, au sein duquel nous voulons débattre conjointement de ces problèmes.
Mesdames et Messieurs, chers amis,
En vous réunissant aujourd'hui, je voulais vous dire combien nous fondons d'espoir sur le développement du Mali et sur sa stabilité, combien ils nous engagent à rechercher dans notre coopération des solutions adaptées aux enjeux économiques, humains et sociaux de ce pays. Ce développement est celui des Maliens eux-mêmes. La communauté française au Mali, chefs d'entreprise, associations et ONG, enseignants, diplomates, experts dans tous les domaines qui contribuent à l'essor économique et social du pays, sont à vos côtés, avec un dévouement et un attachement pour le Mali dont je veux personnellement les remercier. L'accueil que leur réserve ce pays est, je le sais, le meilleur témoignage de sa gratitude.
Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 février 2000)
Mesdames et Messieurs les Ministres
Mesdames et Messieurs les Députés
Chers amis,
Je me réjouis de me trouver, pour la quatrième fois depuis que j'assume la fonction de ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, à Bamako. Un lien sentimental tout particulier m'attache à votre pays, car c'est ici que j'ai reçu mes premières impressions ministérielles. C'était quelques jours après la constitution du gouvernement auquel j'appartiens et j'étais venu assister à la cérémonie d'investiture du président Konare, le 8 juin 1997.
Le Sahel ne m'était pas étranger. Le Conseil général des Côtes d'Armor, que j'ai présidé pendant 21 ans, entretient en effet une coopération décentralisée active avec Agades et je m'étais fréquemment rendu au Niger.
Cette région, qu'on ne peut aborder avec des idées simples, vous me l'avez fait peu à peu connaître, comprendre, aimer.
Je venais pour la première fois au Mali, et, d'emblée, j'avais pu apprécier le sens de l'hospitalité dont savent faire preuve les Maliens. Je le vérifie une nouvelle fois aujourd'hui, soyez en remerciés, chers amis.
Je suis heureux que vous ayez pu m'accueillir aujourd'hui à Bamako, parce que ce début de millénaire constitue, j'en suis convaincu, une période importante pour le Mali comme pour les relations franco-maliennes. Si j'y ajoute que le Mali, par l'action de son président, porte une grande idée de l'Afrique : libre, responsable, partenaire du monde, et que la France veut partager cette vision et la faire partager à ses partenaires, notamment européens, vous comprendrez l'importance que j'accorde à cette visite.
J'ai tenu à venir vous rencontrer, Monsieur le Président de la République, dès que possible, et dès que votre calendrier si chargé l'a permis, au moment où le Mali assume les présidences de la CEDEAO et de l'UEMOA, bientôt du CILSS, et où il devient membre du Conseil de sécurité des Nations Unies, pour la première fois depuis 1967.
Nous mesurons l'importance du rôle qui échoit ainsi à votre pays. C'est la première fois, si je ne me trompe, qu'un chef d'Etat exerce simultanément la présidence de ces deux organisations régionales. Cela signifie, à la fois, une responsabilité toute particulière et, j'en suis persuadé, une capacité d'action accrue. C'est pourquoi cette coïncidence que, je le sais, vous avez souhaitée, est particulièrement bienvenue, alors que le processus d'intégration au sein de l'UEMOA comme de la CEDEAO franchit des étapes importantes et que les conditions semblent réunies pour son accélération, alors aussi que des thèmes qui ont toujours été au cur de la conception malienne de l'avenir de l'Afrique et des relations internationales - je pense à l'Unité africaine -. sont à nouveau au centre des débats. L'influence que vous confère cette double présidence vous permettra également d'apporter une contribution d'autant plus active au règlement des crises qui, hélas, affectent gravement le continent et plusieurs pays de la sous-région.
D'ores et déjà, vous avez instauré un nouveau style, celui d'une diplomatie que vous voulez directe et dont je sais combien elle est appréciée.
L'exercice de ces responsabilités, qui renforce encore son image, permettra au Mali d'être avec efficacité la voix de l'Afrique au Conseil de sécurité des Nations unies.
Membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, entretenant avec l'Afrique des relations étroites et fidèles, la France porte un intérêt majeur à un dialogue approfondi sur ces grands thèmes.
C'est une dimension nouvelle de notre relation si ancienne que nous entreprenons ainsi de construire. Par la force des choses, la coopération au développement est une dimension essentielle de la relation entre nos deux pays. Désormais, le Mali est un partenaire politique, et nous nous félicitons de l'audience que votre entrée au Conseil y conférera à l'Afrique.
L'avenir de l'Afrique, c'est aussi un peu le nôtre, et nous souhaitons, dans un dialogue égal et dans la fraternité, défendre sur la scène internationale nos valeurs communes : la paix et la sécurité, la démocratie, une culture que l'histoire nous a conduit à partager.
Evoquer une histoire et une culture partagées, ce n'est pas nier les différences. Je suis aussi, vous le savez, ministre en charge de la Francophonie. Je voudrais dire ici que le temps d'une Francophonie arc-boutée dans une attitude défensive, contre l'anglais par exemple, est révolu. Avec le Secrétaire général de la Francophonie, M. Boutros-Ghali, nous souhaitons au contraire tisser des liens entre la Francophonie et les autres aires linguistiques : hispanophie, lusophonie, et aussi Commonwealth. Car le combat pour la francophonie est en fait un combat pour la diversité, c'est dire qu'il ne saurait s'opposer par exemple à la défense et illustration de vos langues nationales. Notre horizon commun c'est, tout simplement, un équilibre entre respect des identités et partage de valeurs universelles que nous devons rechercher, loin du repli sur soi comme de l'oubli de soi.
Qui dit partenariat dit naturellement échanges entre les hommes. A ce sujet, j'aimerais aborder sans tabous les questions des visas et de l'immigration.
Vous connaissez les fondements de la politique française et l'engagement du gouvernement à développer les échanges d'étudiants, de scientifiques, d'ingénieurs, d'universitaires, d'hommes d'affaires, de commerçants... En même temps, la France ne saurait accueillir, comme l'a dit un jour Michel Rocard, alors Premier ministre, toute la misère du monde.
L'immigration zéro n'est ni possible, ni souhaitable, une immigration sans limites ne l'est pas davantage. La politique des visas est au carrefour de ces deux préoccupations, et l'expérience des derniers mois, ici à Bamako, montre que leur conciliation ne débouche pas obligatoirement sur une politique restrictive. Le nombre des visas délivrés est passé d'un peu plus de 12000 en 1998 à 14000 en 1997 et l'on se situe, pour les derniers mois, à un rythme annuel de 18000, avec un taux de refus qui, si l'on excepte les refus pour fraude manifeste, est inférieur à 5 %. Il convient en outre de préciser que plus de 4700 Maliens bénéficient d'un visa de circulation qui leur permet d'aller et venir à leur guise entre nos deux pays.
Nous savons aussi que les conditions d'accueil sont souvent difficiles, tout comme du reste les conditions de travail pour nos personnels. Elles nuisent à une politique d'ouverture qui exige en effet un accueil respectueux des demandeurs de visas. Je vous confirme que la construction du nouveau consulat commencera dans quelques semaines, en avril prochain. Je signale aussi au passage que nous rénoverons ensuite le bâtiment actuel de l'ambassade. Nous avons voulu faire de notre poste à Bamako l'un des exemples d'une politique cohérente : plus ouverte et plus accueillante. Je vous demande de la mesurer aux faits.
Je voudrais surtout réitérer ici notre volonté d'aborder ces sujets dans un esprit de dialogue. C'est pourquoi je vous ai proposé que nous réunissions prochainement le Comité franco-malien sur les migrations. Dans le domaine de l'immigration comme dans les autres, le maître mot doit être partenariat.
Bien entendu, la réussite du partenariat implique un minimum de moyens. Dialogue égal ne signifie pas diminution de l'aide, et je me félicite que le gouvernement auquel j'appartiens ait été en mesure de mettre un terme à la diminution de nos enveloppes d'aide publique au développement. L'an dernier, comme vous le savez, la France a été le premier bailleur de fonds du Mali, avec un montant légèrement supérieur à 35 milliards de francs CFA.
Le Mali fait partie de la "zone de solidarité prioritaire" que nous avons définie, et nous le plaçons au tout premier rang des pays qui méritent notre solidarité, de par les efforts que les Maliens eux-mêmes déploient pour assainir leur économie et asseoir durablement la démocratie, condition de la fidélité à nos valeurs, mais aussi du développement.
Demain comme aujourd'hui, la France sera aux côtés du Mali.
Cette solidarité prendra bien entendu pleinement en compte vos nouvelles priorités. Je pense d'abord à la formation, dont je sais combien elle vous tient à cur. Chacun a retenu du "Bouillon de culture" enregistré il y a deux ans à Bamako que le président Konare se définissait d'abord comme maître d'école, enseignant, avant d'être Président. Au moment où le Mali approfondit sa démocratie, que vous apprivoisez ici comme un art de vivre ensemble, préférant les échanges loyaux sur des sujets politiques et de société à toute lutte stérile pour le pouvoir, je voudrais vous dire combien nous comprenons votre souci de former une génération de jeunes Maliens responsables, entreprenants, libres. Et combien est grande notre disponibilité pour coopérer avec vous sur ce thème.
Mais je pense aussi à la décentralisation, autre grand projet de votre second mandat et qui sera précisément, j'en suis convaincu, à la fois une école de la démocratie et un levier du développement.
Demain, je serai à Mopti. J'y verrai la manière dont la décentralisation se traduit sur le terrain. Je me félicite aussi de pouvoir y rencontrer des représentants des coopérations décentralisées françaises, qui me sont si chères, d'autant que Mopti entretient des liens étroits avec ma Bretagne natale, notamment avec cette ville de Rennes qui se souvient avec émotion de la visite que le président Konare avait bien voulu y faire le 1er octobre dernier.
De mes visites régulières au Mali, je retiens l'image d'un pays qui progresse dans le souci constant de la paix, à l'intérieur de ses frontières et dans la région. Sans la paix, sans la démocratie, pas de développement durable. Notre coopération, étroite, multiforme, confiante, est au service de cet objectif.
Vive le Mali, vive la France, vive la coopération franco-malienne.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 février 2000)
Déclaration pour la clôture des travaux de la réunion de suivi de la commission mixte à Mopti le 11 :
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs,
La France et le Mali ont signé en juin 1998 - nous avons signé tous deux, Monsieur le Ministre - le premier accord de partenariat de la Zone de solidarité prioritaire. Cet accord a permis un renforcement du dialogue franco-malien sur les questions de coopération.
Durant trois jours et en présence, du côté français, du directeur général de la DGCID, vous avez procédé à une revue détaillée de notre coopération, pour examiner ensemble les progrès accomplis depuis juin 1998.
On m'a rapporté la qualité des échanges, caractérisés par l'engagement des uns et des autres. Vous avez, chacun à votre niveau, su sortir du discours et prendre des dispositions pour mieux ancrer le partenariat dans la réalité quotidienne, fondant ainsi une pratique renouvelée de notre coopération : transparence, confiance réciproque, écoute et respect mutuel... une véritable éthique du partenariat.
Qu'il me soit permis de remercier le ministre et son directeur de la coopération internationale, qui ont permis que cette réunion se tienne dans de bonnes conditions, malgré la brièveté des délais impartis pour sa préparation.
Un regret toutefois : que la dynamique du partenariat entre les sociétés civiles (associations comme collectivités) de nos deux pays n'ait pu s'exprimer parallèlement à cette réunion des administrations, comme elle l'avait fait lors de notre Commission mixte. J'ai été informé de la dynamique nouvelle créée dans ce domaine au Mali. Je m'en réjouis et souhaite que nous la renforcions toujours davantage, pour que la relation franco-malienne bénéficie pleinement des apports de tous ceux qui sont prêts à s'engager pour l'enrichir. Sachez que, pour ce qui le concerne, le service de coopération et d'action culturelle de notre ambassade ne ménagera pas ses efforts pour amplifier encore cette dynamique, à laquelle, permettez-moi de le dire, je sais qu'il a activement contribué.
Cette clôture des travaux est également l'occasion de réitérer l'engagement de la France à vos côtés. Je viens de procéder à la signature de trois conventions de financement qui concrétisent cet engagement. Celles-ci portent sur un montant total de 3,6 milliards de FCFA de crédits du Fonds d'Aide et de Coopération. Elles prévoient respectivement :
- une première participation de la coopération française au programme de développement sanitaire et social du Mali (PRODESS) pour 1,4 milliard de FCFA
- un appui à la filière livre (bibliothèques scolaires, de lecture publique et associatives) pour 1,2 milliard de FCFA.
- un appui aux administrations financières pour 1 milliard de FCFA
Par cette signature, je veux témoigner de la résolution de la France à accompagner le développement du Mali, au bénéfice de ses populations, de ses associations et collectivités territoriales, comme du renforcement des capacités de ses administrations.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 février 2000)
Déclaration à l'occasion de la réception à la résidence de France à Bamako le 11 :
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Maire du district,
Messieurs les Maires de Bamako,
Chers amis,
Permettez-moi tout d'abord de dire combien je suis sensible à l'accueil qu'une fois de plus les autorités de ce pays m'ont réservé pour le quatrième voyage que j'effectue au Mali depuis que je suis au gouvernement, voyage auquel j'ai pu cette fois associer mon épouse et mes enfants, ce qui, bien sûr, accroît mon plaisir à être ici. Permettez-moi aussi de vous remercier tous de l'honneur d'avoir répondu aussi massivement à l'invitation de notre ambassadeur, Christian Connan, et de son épouse.
Chacune de ces visites approfondit, je crois, le sens de la relation franco-malienne : en juin 1997, quelques jours après ma nomination, je représentais le gouvernement français à l'investiture du président Konare pour son second mandat présidentiel et lui disais la confiance et l'amitié de notre pays. En décembre de la même année, j'accompagnais notre Premier Ministre dans son premier voyage en Afrique, dont Bamako fut une étape importante. En mai 1998, nous engagions ici à Bamako un dialogue sur les migrations et le codéveloppement, en créant le Comité franco-malien sur les migrations.
J'avais de bonnes raisons de souhaiter revenir à Bamako : depuis le début de cette année le président Konare exerce la double présidence de la CEDEAO et de l'UEMOA, à laquelle il joindra bientôt celle du CILSS, et le Mali, pour la première fois depuis 1967, est entré au Conseil de sécurité des Nations unies. Il était donc naturel, il était même nécessaire, que le gouvernement français puisse aussi rapidement que possible nouer avec les autorités maliennes le dialogue sur ces sujets, tant ils rejoignent nos propres préoccupations : le processus d'intégration régionale dans un continent africain qui se recompose ; le présent et l'avenir de ce continent (la communauté internationale sait que les crises qu'on y vit ne se résoudront qu'avec les Africains eux-mêmes) ; le rôle que la France peut y tenir enfin au moment où elle s'apprête à prendre la présidence de l'Union européenne le 1er juillet prochain.
Est-il besoin d'ajouter qu'il était précieux pour moi de prendre le pouls de la vie politique malienne ? Je l'ai fait tout au long de la matinée en rencontrant l'ensemble des nombreuses familles politiques du pays. Je leur ai dit combien l'expérience malienne, dans une Afrique qui trop souvent encore tâtonne dans la recherche d'une vie démocratique apaisée, était pour la France un exemple à encourager et à faire partager, sans doute aussi à parfaire.
Nous savons la difficulté du dialogue politique, la difficulté aussi qu'il y a à élaborer des règles qui s'imposent pour qu'une communauté nationale soit assurée de la stabilité intérieure, d'un débat clair et loyal, de projets de société nécessairement concurrents mais librement choisis, aux échéances prévues, par les électeurs.
En proportion de ces efforts que nous saluons et que, je le répète, nous encourageons, le Mali connaît la paix, avec des règles qu'en 1991 le peuple malien a lui-même choisies. La perspective des élections de 2002 sera pour tous, je veux le croire, l'occasion de consolider la démocratie malienne. Et puisque, j'ai pu le constater, tous s'y disent prêts, il reste à mettre les actes en harmonie avec les intentions.
La démocratie est en effet le socle de la paix et du développement. C'est donc une valeur universelle qui ne se négocie pas. Mais elle se décline et s'approfondit par les peuples eux-mêmes. La France en est si persuadée qu'elle a défini en Afrique depuis bientôt trois ans une politique dépourvue de toute ambiguïté : fidèle à ses amis, qu'elle soutient par un dialogue politique constant, une coopération de partenaire à partenaire, et par l'influence que lui donne sa position dans les instances internationales et multilatérales, elle est leur avocat de tous les instants pour leur permettre d'approfondir chez eux les principes d'une vie publique qui soient respectueux du droit, de la démocratie, de la liberté, et propices au développement.
Mais elle a aussi de façon constante tout au long des derniers mois - et de façon plus explicite encore au cours des dernières semaines - démontré qu'elle ne voulait pas et ne voulait plus intervenir dans les affaires intérieures des autres, fussent-ils ses plus proches amis. Elle ne le veut plus parce que la responsabilité de chacun lui appartient en propre ; elle ne le veut plus parce que les solutions imposées de l'extérieur ne sont jamais durables ; elle ne le veut plus parce qu'elle se forme de l'Afrique l'image d'un continent qui aspire au respect, et que le respect ne s'acquiert que dans la responsabilité des peuples eux-mêmes.
Chacun peut voir que ce devoir de non-ingérence ne signifie évidemment pas non-indifférence : notre coopération bilatérale y trouve d'autant plus de sens qu'elle sert aux Etats et aux sociétés à approfondir les pratiques du droit et de la bonne gouvernance. Parallèlement, nous recherchons toutes les possibilités d'action pour que la paix et la sécurité du continent puissent bientôt reposer sur des capacités de défense forgées par les Africains eux-mêmes : le programme RECAMP, de renforcement des capacités de maintien de la paix, qui vise à créer des liens de fraternité, et de valeur entre armées africaines au service de la paix, en est le meilleur exemple.
Mesdames et Messieurs,
Le Mali a ouvert l'an 2000 en prenant d'importantes responsabilités régionales et internationales.
Nous savons qu'avec ce pays et son président, la CEDEAO et l'UEMOA, chevilles d'une sous-région qui aspire à la paix, au développement des échanges économiques, et à la prévention des crises, connaîtront une activité redoublée. Le président Konare m'a communiqué sa vision politique d'un puzzle régional qui a été trop éprouvé ces derniers temps par des crises profondes et douloureuses pour que nous n'en tirions pas avec lui la conséquence que c'est par une volonté politique forte, partagée, et des instruments de concertation diplomatique, économique, sociaux renforcés que les risques de déstabilisation pourront être prévenus.
Dans notre monde global, les solidarités régionales, étayées par le partage des cultures, d'intérêts et du développement, sont le véritable atout des peuples. Profondément attachée à l'Europe, dont elle sait pour elle-même les avantages qui l'emportent (oh combien !) sur les inconvénients, la France ne dit pas autre chose à l'Afrique et se réjouit de la détermination qu'elle trouve chez un partenaire comme le Mali. Et nous apprécions déjà cette forme de diplomatie ouverte, directe, humaine qu'y déploie le président Konare, et qui rencontre le meilleur écho dans la région. En partageant sa vision des choses, la France, qui s'est tant impliquée dans l'intégration économique régionale, souhaite que les outils dont disposent déjà les Etats membres de l'UEMOA puissent aider à rapprocher les pays qui composent la CEDEAO, qui compte des Etats aussi considérables que le Nigeria ou le Ghana.
Nul doute qu'au Conseil de sécurité, où nous nous réjouissons que le Mali siège, pour deux ans, l'Afrique et les pays en développement compteront avec lui une voix forte et des propositions constructives et utiles pour la communauté internationale.
En abordant ces importantes questions, je souhaite pour finir partager avec vous deux réflexions, au centre de la diplomatie et de la coopération françaises telles que le gouvernement les ont infléchies :
- la première tient à la relation privilégiée qui unit l'Europe et l'Afrique. La France souhaite l'approfondir, la diversifier et l'adapter aux besoins de ce continent. Nous venons d'achever l'importante négociation UE/ACP de Bruxelles, qui scelle un nouveau partenariat encourageant le processus d'intégration régionale, mais aussi une sorte de contrat entre les deux parties sur le respect de la bonne gouvernance, de la démocratie et désormais du refus de la corruption, si désastreuse pour le développement.
Chargé au sein du gouvernement de cette importante mission, je peux indiquer que la France y a joué un rôle actif, et sur les principes, et sur les moyens que l'Union européenne y affectera au travers du fonds européen de développement. En y contribuant pour près d'un quart, c'est un engagement fort que la France a pris et qui, s'adressant aux ACP, s'adresse vous le savez d'abord à l'Afrique.
- ma seconde réflexion tient à la question très sensible des échanges humains entre nos deux pays. Car, si importante que soit notre coopération, la relation franco-malienne ne s'y résume pas. J'y porte, soyez en assuré, comme tout le gouvernement, un grand intérêt.
Je pense naturellement à la question des visas, et plus fondamentalement, à celle de l'immigration, dont je viens de m'entretenir avec le ministre des Affaires étrangères et des Maliens de l'Extérieur, M. Modibo Sidibe.
S'agissant des visas, je souhaiterais aller à l'encontre d'une idée fausse : la France pratiquerait une politique très restrictive en matière de visas, elle ne les accorderait, en quelque sorte, qu'au compte-gouttes. Or, en 1999, notre consulat a délivré 14 000 visas, contre 12 000 l'année précédente. Sur les quatre derniers mois de l'année - c'est-à-dire depuis que la nouvelle politique mise en oeuvre par la nouvelle équipe de l'ambassade et du consulat produit son plein effet -, on en est à un rythme annuel de 18 000 visas délivrés. J'ajoute que plus de 4700 Maliens bénéficient d'un visa de circulation qui leur permet d'aller et venir en France, aussi souvent qu'ils le désirent, sans aucune formalité. Un chiffre est plus significatif encore peut être : celui du pourcentage des refus. Si l'on excepte les refus pour fraudes manifestes, hélas assez fréquents, il faut bien le dire, le taux de refus est inférieur à 5 %.
Prochainement, vous le savez, en avril, commencera la construction d'un nouveau consulat général, qui sera achevé en fin d'année. Les conditions d'accueil en seront considérablement améliorées, et aussi - je tiens à le souligner - les conditions de travail du personnel. Nous allons également - je le dis en passant - rénover entièrement le bâtiment actuel de l'ambassade.
Ce que nous voulons, en fait, c'est favoriser les mouvements et la mobilité qui servent à enrichir et approfondir les liens entre nos deux pays. La France ne peut accueillir tous ceux qui cherchent des conditions d'existence que le sous-développement de leur pays, de leur région, ne leur offre pas. D'ailleurs, si aucune limite n'était mise à l'immigration, les immigrés eux-mêmes ne trouveraient plus en France ce qu'ils y recherchent, et nous ne pourrions leur offrir des conditions de vie décentes. C'est pourquoi il faut des règles, que partagent aussi les Européens, et jeudi dernier à Bruxelles les pays ACP en sont eux-mêmes convenus.
Prochainement, nous réunirons le Comité franco-malien sur les migrations, au sein duquel nous voulons débattre conjointement de ces problèmes.
Mesdames et Messieurs, chers amis,
En vous réunissant aujourd'hui, je voulais vous dire combien nous fondons d'espoir sur le développement du Mali et sur sa stabilité, combien ils nous engagent à rechercher dans notre coopération des solutions adaptées aux enjeux économiques, humains et sociaux de ce pays. Ce développement est celui des Maliens eux-mêmes. La communauté française au Mali, chefs d'entreprise, associations et ONG, enseignants, diplomates, experts dans tous les domaines qui contribuent à l'essor économique et social du pays, sont à vos côtés, avec un dévouement et un attachement pour le Mali dont je veux personnellement les remercier. L'accueil que leur réserve ce pays est, je le sais, le meilleur témoignage de sa gratitude.
Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 février 2000)