Interview de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, dans "Le Républicain lorrain" du 30 janvier 2004, sur les relations et la coopération militaire franco-américaines, la question d'un déploiement de forces de l'ONU en Côte d'Ivoire et l'amélioration de l'attractivité des réserves.

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Média : Le Républicain lorrain

Texte intégral

Q- Le Républicain Lorrain :
Quelle est, selon vous, la part du calcul électoral, de réalisme et d'intérêt bien compris dans la volonté affichée par les autorités américaines de tourner la page et de renouer avec la France ?
R- Michèle Alliot-Marie :
La proximité des élections américaines peut-être un élément favorable à ce rapprochement dans la mesure où il est difficile pour un président sortant de paraître brouillé avec le plus ancien et l'un de ses plus fidèles alliés. Cette considération est amplifiée par le fait qu'aujourd'hui nous sommes un partenaire très important des Etats-Unis, notamment dans la lutte contre le terrorisme, tant sur le plan du renseignement que de l'activité de nos forces spéciales.
La perspective électorale est une chose. L'observation pragmatique des réalités de défense en est une autre. N'oubliez pas que nous sommes pratiquement le seul pays européen à augmenter son budget de défense, contrairement à la Grande-Bretagne qui l'a réduit cette année. Nous sommes une des rares grandes puissances militaires au monde, avec une capacité reconnue dans le savoir-faire . Nous avons d'autre part une présence forte sur certains théâtres d'opération, notamment en Côte d'Ivoire et dans les Balkans. Et nous assurons une veille maritime dans la région du Golfe et de l'Océan Indien. Voilà des réalités qui, elles, sont des réalités permanentes.
Q- La garantie d'une présence française en Irak, après transfert de souveraineté le 30 juin aux autorités irakiennes, permettrait-elle de lever les réserves américaines sur un déploiement de Casque bleus en Côte d'Ivoire ?
R- Les deux sujets ne sont pas liés. Même si, sur les deux, l'approche est positive. En ce qui concerne la Côte d'Ivoire, l'analyse à laquelle j'ai procédé devant Condoleeza Rice, la conseillère du président Bush, lui a fait dire qu'effectivement elle était prête à soutenir l'idée de l'urgence que la France mettait en avant et, que par leur présence, les Casques bleus puissent soutenir le processus positif en train de se dérouler depuis quelques semaines. Mais à aucun moment il n'y a eu de parallèle avec l'Irak ni un quelconque élément de contrepartie.
Q- Quelle serait la nature de la participation française à la formation de la future armée, de police et de la gendarmerie irakiennes ?
R- Nous abordons cela dans le même état d'esprit qu'en Afghanistan, où nous travaillons avec les Américains sur la force militaire afghane et avec les Allemands sur la police. Ce que nous pensons faire en Irak, c'est procéder à cette formation en liaison avec les Allemands et éventuellement avec les Japonais qui, s'il y avait une action de ce type, souhaiteraient s'y associer.
Q- Balkans, Afghanistan, Côte d'Ivoire en plus de notre présence habituelle dans un certain nombre de pays africains : n'y a t-il pas tension sur les effectifs ?
R- Nos forces armées assurent sans difficulté majeure les engagements que vous évoquez. Nous aurions même, si besoin était, la possibilité de participer à une autre opération importante.
(.)
Q- Pourquoi les questions du château de Mercy et du boulevard de Trèves à Metz traînent-elles, alors qu'un accord semblait scellé avec la ville ?
R- L'accord d'acquisition des emprises de Mercy et du boulevard de Trèves par la communauté d'agglomération de Metz Moselle a été signé le 23 décembre 2003. Le boulevard de Trèves est dépollué et cessible immédiatement. L'emprise de Mercy ne pouvait être dépolluée qu'à la suite de l'accord. Celui-ci ayant été signé, l'expertise est en cours. Les résultats de l'audit paraîtront en avril 2004, et les travaux de dépollution sont prévus aux mois de juin et juillet 2004, sous l'égide du Génie.
Q- Comment le dossier des réservistes avance-t-il ?
R- J'ai décidé de faire de la réserve une priorité, afin de permettre aux armées qu'elles que soient les circonstances de disposer de tous les gens nécessaires. Pour cela j'ai dégagé des crédits car les réservistes sont payés exactement comme les soldats d'active. Et j'ai souhaité augmenter ces crédits ; de façon à pouvoir augmenter aussi les périodes d'activité des réservistes, tombées très bas. J'ai demandé aux états-majors de déterminer quels étaient les besoins et qu'éventuellement les réservistes puissent aussi aller sur les théâtres extérieurs, ce qui serait un élément d'attractivité extrêmement fort pour les intéressés. Un projet de loi sera proposé en 2004 pour rendre la réserve encore plus attractive, en particulier pour les entreprises.
(Source http://www.défense.gouv.fr, le 5 février 2004)