Texte intégral
Vous savez que la France fait partie de la troïka depuis le début de la présidence portugaise et nos amis portugais nous demandent de participer le plus possible aux activités qui ont lieu sous leur présidence. C'est pour cela que M. Josselin est là pour la plupart des réunions entre l'Union européenne et les différents groupes des pays d'Amérique latine, et c'est dans ce cadre que je suis passé aujourd'hui, quelques heures simplement car j'aurai dû partir ce matin avec le Premier ministre en Israël et dans les territoires palestiniens mais j'ai fait ce crochet car il m'a semblé intéressant de participer à ce déjeuner qui m'a permis d'avoir des contacts avec plusieurs des ministres présents pour faire le point sur les relations bilatérales, les projets d'échanges de visites. Voilà dans quel esprit je suis passé et également pour soutenir l'excellent travail de la présidence portugaise.
Q - Avez-vous obtenu des contacts avec des responsables de l'Amérique latine ?
R - Oui, j'ai eu un entretien avec la ministre mexicaine, les ministres brésilien, argentin, chilien et d'autre part avec le ministre uruguayen qui était à côté de moi au déjeuner et avec M. Gama.
A chaque fois, cela m'a permis de rappeler notre position sur le Mercosur : nous sommes très favorables à cette démarche, nous pensons qu'il est important pour l'équilibre du monde en général et pour l'Amérique latine en particulier que ce pôle régional se renforce. Le Mercosur est une construction ambitieuse, il y a des obstacles qui tiennent aux disparités des économies, aux conséquences de la crise financière, mais il me semble constater une volonté politique chez les dirigeants pour avancer malgré tout et pour reprendre cette marche en avant. Je leur ai dit que nous approuvions tout ce qui permettra de fortifier cette démarche.
Q - Si on compare leur expérience de 9 ans avec l'expérience européenne, n'avez-vous pas l'impression qu'ils sont allés un peu trop vite sur le plan politique et pas assez solidement sur le plan économique ?
R - Je pense que l'on ne peut pas comparer l'Europe et le Mercosur, l'ASEAN ou autres. Chaque région a des caractéristiques particulières et l'histoire n'est pas la même. Le Brésil a une caractéristique un peu spéciale au sein du Mercosur. Il n'y a pas de pays en Europe qui soit comparable au Brésil. L'état de développement des économies n'est pas comparable à celui de l'Europe, donc les problèmes à résoudre ne sont pas les mêmes. Il faut être de toutes façons positif. Dans ce contexte qu'est cette région de l'Amérique latine, c'est une bonne démarche que d'essayer d'organiser, sur le plan économique, sur le plan commercial et plus si possible, un ensemble régional. C'est bien, nous le soutenons, je ne porte pas de jugement sur le rythme, je pense que les gouvernements de ces pays doivent faire le mieux possible.
S'ils considèrent qu'ils ont eu une approche trop utopique et trop rapide et qu'ils veulent passer par des étapes intermédiaires, c'est leur problème, nous respectons tout à fait leur choix. C'est à eux de s'organiser.
Q - Mais on a l'impression que les difficultés conjoncturelles qu'ils ont traversées où qu'ils sont encore en train de traverser fait surgir des doutes sur la viabilité du projet.
R - Il me semble que ce sont plutôt des interrogations sur le rythme mais pas sur la viabilité du projet ni sur son intérêt en soi. Je ne constate pas cela du tout, au contraire. Ceux que j'ai rencontrés m'ont paru tout à fait convaincus de l'intérêt, dans le monde global tel qu'il est, de l'intérêt d'une telle organisation. Simplement, la façon d'avancer, la vitesse, la manière de franchir les différents obstacles peuvent, évidemment, être abordés de façon plus réaliste. Mais, ce n'est pas forcément un mal, cela peut aboutir à une démarche qui soit plus sûre.
Q - Concernant la conversation avec les pays du Mercosur, c'est aussi une grande zone de production agricole, bientôt vont commencer les premiers contacts techniques avec l'Union européenne, ces ministres ont-ils exprimé des inquiétudes sur ces sujets ?
R - Les inquiétudes existaient à l'époque où nous n'avions pas pu fixer de calendrier de négociations. Il y avait une période durant laquelle la position française était caricaturée dans toute l'Amérique latine, dans la presse, comme si la France voulait empêcher les négociations d'aboutir alors que nous avons des intérêts légitimes à défendre dans le Mercosur, et il fallait trouver l'articulation entre les deux. La question agricole est sensible en Europe puisque nous la retrouvons tout le temps, dans les négociations entre nous, dans l'Agenda 2000, dans les négociations d'élargissement, dans les accords d'association, dans l'OMC. A propos du Mercosur, nous avons aussi des intérêts légitimes, nous avons besoin d'un calendrier pour nous adapter. Les concessions portent toujours sur le même sujet. Nous avions trouvé finalement un compromis bon pour tout le monde. Nous avions trouvé un calendrier et nous avions pu déterminer à quel moment allaient commencer les premières négociations. Nous avions obtenu que tout soit terminé après la conclusion du cycle OMC, ce qui était fondamental pour nous. Malheureusement, il y a eu l'échec de Seattle car cette réunion n'avait pas été suffisamment préparée. Mais, tout n'est pas figé, cela va repartir et le raisonnement reste donc valable. C'est une chronologie des négociations et une logique en même temps, il faut prendre les choses dans cet ordre. Pour nous, c'est le cadre de référence, ce qui fait que lorsque je parle aux ministres du Mercosur aujourd'hui, je ne trouve pas du tout le même climat qu'il y a un an.
Q - Est-ce plus positif ?
R - Bien sûr, nous avons adopté le calendrier, quelle sera la chronologie des négociations, c'est notre perspective.
Q - On a l'impression que le dossier agricole domine en ce moment depuis l'échec de Seattle ? C'est un peu comme des clivages entre le nord et le sud.
R - C'est une remarque globale, la question agricole est très importante dans les échanges mais il n'y a pas que cela. Vous verrez que lorsque l'on arrivera à ce point dans la négociation entre l'Union européenne et le Mercosur, je peux vous dire que les autres dossiers vont être très difficiles. Le dossier agricole le sera aussi pour l'Union européenne mais les dossiers industrie et services surtout seront très difficiles pour les pays du Mercosur. C'est donc une erreur même du point de vue de ces pays de se focaliser sur la question agricole. La négociation a lieu dans les deux sens. Elle ne va pas dans une seule direction. Les négociations sont faites pour cela, pour constater les positions des uns et des autres, les contradictions que l'on essaie de dépasser, on trouve une dynamique et on avance.
Je ne parle pas de tous les sujets, sur la question Union européenne-Mercosur, nous avions un blocage, des attentes et des demandes du Mercosur. Nous avons trouvé une réponse, un calendrier, une chronologie, c'est notre cadre de travail.
Q - En quoi consiste le programme d'actions politiques ?
R - Ce qui a été lancé à Rio, c'est un vaste mouvement qui ne s'arrêtera plus.
Q - Concernant le Kosovo, y a-t-il du nouveau au sujet des discordances au sein de l'Union européenne ?
R - Il n'y a pas de discordances dans les positions européennes au Kosovo. Il y a à Mitrovica, une situation difficile qui n'est pas surprenante, que l'on pouvait attendre simplement parce que la moitié des Serbes qui ont réussi à rester au Kosovo sont concentrés dans cette zone. Par conséquent, il y a une tension entre les Kosovars albanophones et les Serbes. Il y a des extrémistes des deux côtés, ils essaient de faire exploser cette situation.
Q - En effet, j'ai bien entendu à la télévision où vous parliez d'extrémistes des deux côtés. M. Holbrooke ici, à Lisbonne a parlé des provocations serbes.
R - Oui, je m'exprime sur la base des rapports de la KFOR, je parle de provocations des deux côtés et c'est même un peu plus d'un côté que de l'autre, concernant les incidents récents. Dans le cas précis, comme la KFOR l'a montré, à propos de son enquête sur les " snipers ", cela permet de parler d'extrémistes des deux côtés. Il n'y a pas 36 réponses possibles, la seule réponse de la communauté internationale à travers la KFOR et la MINUK, c'est de tenir bon. Nous sommes là pour appliquer la résolution 1244 et nous ne sommes pas là pour nous laisser dicter une politique qui n'est pas la notre par un groupe ou par un autre.
Q - Cela ne vous inquiète pas que ces incidents surgissent à si peu de temps de la relève du commandement de l'OTAN par l'Eurocorps ?
R - Je pense que l'Eurocorps démontrera sa capacité. Les incidents naissent parce que la situation est difficile, on le sait, et si cela n'avait pas été si difficile, nous n'aurions pas été obligés de nous engager.
Q - Et vous ne pensez pas que les Kosovars peuvent l'interpréter d'une façon différente ?
R - Je me moque des interprétations, je sais comment est la situation et ce que l'on veut faire. Il faut imposer la sécurité des uns et des autres, la coexistence et préparer ensuite l'avenir du Kosovo, la première étape étant l'organisation d'élections locales dans de bonnes conditions. C'est peut-être cette perspective qui dérange les extrémistes mais notre ligne est claire, il faut faire appliquer la résolution 1244.
Q - On a rapporté du Conseil des ministres à Paris, que vous êtes pour durcir un peu le ton vis-à-vis de la Russie. Pensez-vous à quelque chose en particulier ?
R - Les mesures que la France avait à l'esprit ont été proposées à plusieurs reprises déjà lors de la réunion d'Istanbul de l'OSCE, lors du Conseil européen d'Helsinki. Je me suis exprimé à plusieurs reprises ces derniers jours, notamment après la reconquête de Grozny par l'armée russe. J'ai du m'exprimer cinq ou six fois déjà, au Conseil des ministres, j'ai récapitulé tout ce que j'avais dit qui est, je crois, bien connu.
Nous avons demandé avec beaucoup de conviction et de force aux Russes d'arrêter toutes les mesures de représailles contre les populations civiles qui ont déjà souffert atrocement dans cette guerre, d'accepter le libre accès en Tchétchénie pour les organisations internationales humanitaires, pour l'OSCE, pour les médias, de même que nous demandons, depuis plusieurs mois que soit recherchée une solution politique pour définir l'avenir de la Tchétchénie à l'intérieur de la fédération russe et pour répondre aux aspirations des Tchétchènes qui ne sont pas tous des terroristes. Voilà la position française qui est, je crois cohérente, forte, qui a été exprimée souvent et que j'ai récapitulée au Conseil des ministres. Il n'y avait pas d'élément nouveau sauf que nous sommes obligés de dire que les Russes ne répondent pas à nos appels, que c'est pour cette raison que les choses deviennent extrêmement préoccupantes.
Q - On en parlera à Lisbonne ?
R - La réunion de Lisbonne, c'est à M. Gama qu'il faut poser la question, est faite en priorité pour traiter des relations Union européenne-Russie, mais en marge il est évident que cette situation sera abordée aussi./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 février 2000)
Vous savez que la France fait partie de la troïka depuis le début de la présidence portugaise et nos amis portugais nous demandent de participer le plus possible aux activités qui ont lieu sous leur présidence. C'est pour cela que M. Josselin est là pour la plupart des réunions entre l'Union européenne et les différents groupes des pays d'Amérique latine, et c'est dans ce cadre que je suis passé aujourd'hui, quelques heures simplement car j'aurai dû partir ce matin avec le Premier ministre en Israël et dans les territoires palestiniens mais j'ai fait ce crochet car il m'a semblé intéressant de participer à ce déjeuner qui m'a permis d'avoir des contacts avec plusieurs des ministres présents pour faire le point sur les relations bilatérales, les projets d'échanges de visites. Voilà dans quel esprit je suis passé et également pour soutenir l'excellent travail de la présidence portugaise.
Q - Avez-vous obtenu des contacts avec des responsables de l'Amérique latine ?
R - Oui, j'ai eu un entretien avec la ministre mexicaine, les ministres brésilien, argentin, chilien et d'autre part avec le ministre uruguayen qui était à côté de moi au déjeuner et avec M. Gama.
A chaque fois, cela m'a permis de rappeler notre position sur le Mercosur : nous sommes très favorables à cette démarche, nous pensons qu'il est important pour l'équilibre du monde en général et pour l'Amérique latine en particulier que ce pôle régional se renforce. Le Mercosur est une construction ambitieuse, il y a des obstacles qui tiennent aux disparités des économies, aux conséquences de la crise financière, mais il me semble constater une volonté politique chez les dirigeants pour avancer malgré tout et pour reprendre cette marche en avant. Je leur ai dit que nous approuvions tout ce qui permettra de fortifier cette démarche.
Q - Si on compare leur expérience de 9 ans avec l'expérience européenne, n'avez-vous pas l'impression qu'ils sont allés un peu trop vite sur le plan politique et pas assez solidement sur le plan économique ?
R - Je pense que l'on ne peut pas comparer l'Europe et le Mercosur, l'ASEAN ou autres. Chaque région a des caractéristiques particulières et l'histoire n'est pas la même. Le Brésil a une caractéristique un peu spéciale au sein du Mercosur. Il n'y a pas de pays en Europe qui soit comparable au Brésil. L'état de développement des économies n'est pas comparable à celui de l'Europe, donc les problèmes à résoudre ne sont pas les mêmes. Il faut être de toutes façons positif. Dans ce contexte qu'est cette région de l'Amérique latine, c'est une bonne démarche que d'essayer d'organiser, sur le plan économique, sur le plan commercial et plus si possible, un ensemble régional. C'est bien, nous le soutenons, je ne porte pas de jugement sur le rythme, je pense que les gouvernements de ces pays doivent faire le mieux possible.
S'ils considèrent qu'ils ont eu une approche trop utopique et trop rapide et qu'ils veulent passer par des étapes intermédiaires, c'est leur problème, nous respectons tout à fait leur choix. C'est à eux de s'organiser.
Q - Mais on a l'impression que les difficultés conjoncturelles qu'ils ont traversées où qu'ils sont encore en train de traverser fait surgir des doutes sur la viabilité du projet.
R - Il me semble que ce sont plutôt des interrogations sur le rythme mais pas sur la viabilité du projet ni sur son intérêt en soi. Je ne constate pas cela du tout, au contraire. Ceux que j'ai rencontrés m'ont paru tout à fait convaincus de l'intérêt, dans le monde global tel qu'il est, de l'intérêt d'une telle organisation. Simplement, la façon d'avancer, la vitesse, la manière de franchir les différents obstacles peuvent, évidemment, être abordés de façon plus réaliste. Mais, ce n'est pas forcément un mal, cela peut aboutir à une démarche qui soit plus sûre.
Q - Concernant la conversation avec les pays du Mercosur, c'est aussi une grande zone de production agricole, bientôt vont commencer les premiers contacts techniques avec l'Union européenne, ces ministres ont-ils exprimé des inquiétudes sur ces sujets ?
R - Les inquiétudes existaient à l'époque où nous n'avions pas pu fixer de calendrier de négociations. Il y avait une période durant laquelle la position française était caricaturée dans toute l'Amérique latine, dans la presse, comme si la France voulait empêcher les négociations d'aboutir alors que nous avons des intérêts légitimes à défendre dans le Mercosur, et il fallait trouver l'articulation entre les deux. La question agricole est sensible en Europe puisque nous la retrouvons tout le temps, dans les négociations entre nous, dans l'Agenda 2000, dans les négociations d'élargissement, dans les accords d'association, dans l'OMC. A propos du Mercosur, nous avons aussi des intérêts légitimes, nous avons besoin d'un calendrier pour nous adapter. Les concessions portent toujours sur le même sujet. Nous avions trouvé finalement un compromis bon pour tout le monde. Nous avions trouvé un calendrier et nous avions pu déterminer à quel moment allaient commencer les premières négociations. Nous avions obtenu que tout soit terminé après la conclusion du cycle OMC, ce qui était fondamental pour nous. Malheureusement, il y a eu l'échec de Seattle car cette réunion n'avait pas été suffisamment préparée. Mais, tout n'est pas figé, cela va repartir et le raisonnement reste donc valable. C'est une chronologie des négociations et une logique en même temps, il faut prendre les choses dans cet ordre. Pour nous, c'est le cadre de référence, ce qui fait que lorsque je parle aux ministres du Mercosur aujourd'hui, je ne trouve pas du tout le même climat qu'il y a un an.
Q - Est-ce plus positif ?
R - Bien sûr, nous avons adopté le calendrier, quelle sera la chronologie des négociations, c'est notre perspective.
Q - On a l'impression que le dossier agricole domine en ce moment depuis l'échec de Seattle ? C'est un peu comme des clivages entre le nord et le sud.
R - C'est une remarque globale, la question agricole est très importante dans les échanges mais il n'y a pas que cela. Vous verrez que lorsque l'on arrivera à ce point dans la négociation entre l'Union européenne et le Mercosur, je peux vous dire que les autres dossiers vont être très difficiles. Le dossier agricole le sera aussi pour l'Union européenne mais les dossiers industrie et services surtout seront très difficiles pour les pays du Mercosur. C'est donc une erreur même du point de vue de ces pays de se focaliser sur la question agricole. La négociation a lieu dans les deux sens. Elle ne va pas dans une seule direction. Les négociations sont faites pour cela, pour constater les positions des uns et des autres, les contradictions que l'on essaie de dépasser, on trouve une dynamique et on avance.
Je ne parle pas de tous les sujets, sur la question Union européenne-Mercosur, nous avions un blocage, des attentes et des demandes du Mercosur. Nous avons trouvé une réponse, un calendrier, une chronologie, c'est notre cadre de travail.
Q - En quoi consiste le programme d'actions politiques ?
R - Ce qui a été lancé à Rio, c'est un vaste mouvement qui ne s'arrêtera plus.
Q - Concernant le Kosovo, y a-t-il du nouveau au sujet des discordances au sein de l'Union européenne ?
R - Il n'y a pas de discordances dans les positions européennes au Kosovo. Il y a à Mitrovica, une situation difficile qui n'est pas surprenante, que l'on pouvait attendre simplement parce que la moitié des Serbes qui ont réussi à rester au Kosovo sont concentrés dans cette zone. Par conséquent, il y a une tension entre les Kosovars albanophones et les Serbes. Il y a des extrémistes des deux côtés, ils essaient de faire exploser cette situation.
Q - En effet, j'ai bien entendu à la télévision où vous parliez d'extrémistes des deux côtés. M. Holbrooke ici, à Lisbonne a parlé des provocations serbes.
R - Oui, je m'exprime sur la base des rapports de la KFOR, je parle de provocations des deux côtés et c'est même un peu plus d'un côté que de l'autre, concernant les incidents récents. Dans le cas précis, comme la KFOR l'a montré, à propos de son enquête sur les " snipers ", cela permet de parler d'extrémistes des deux côtés. Il n'y a pas 36 réponses possibles, la seule réponse de la communauté internationale à travers la KFOR et la MINUK, c'est de tenir bon. Nous sommes là pour appliquer la résolution 1244 et nous ne sommes pas là pour nous laisser dicter une politique qui n'est pas la notre par un groupe ou par un autre.
Q - Cela ne vous inquiète pas que ces incidents surgissent à si peu de temps de la relève du commandement de l'OTAN par l'Eurocorps ?
R - Je pense que l'Eurocorps démontrera sa capacité. Les incidents naissent parce que la situation est difficile, on le sait, et si cela n'avait pas été si difficile, nous n'aurions pas été obligés de nous engager.
Q - Et vous ne pensez pas que les Kosovars peuvent l'interpréter d'une façon différente ?
R - Je me moque des interprétations, je sais comment est la situation et ce que l'on veut faire. Il faut imposer la sécurité des uns et des autres, la coexistence et préparer ensuite l'avenir du Kosovo, la première étape étant l'organisation d'élections locales dans de bonnes conditions. C'est peut-être cette perspective qui dérange les extrémistes mais notre ligne est claire, il faut faire appliquer la résolution 1244.
Q - On a rapporté du Conseil des ministres à Paris, que vous êtes pour durcir un peu le ton vis-à-vis de la Russie. Pensez-vous à quelque chose en particulier ?
R - Les mesures que la France avait à l'esprit ont été proposées à plusieurs reprises déjà lors de la réunion d'Istanbul de l'OSCE, lors du Conseil européen d'Helsinki. Je me suis exprimé à plusieurs reprises ces derniers jours, notamment après la reconquête de Grozny par l'armée russe. J'ai du m'exprimer cinq ou six fois déjà, au Conseil des ministres, j'ai récapitulé tout ce que j'avais dit qui est, je crois, bien connu.
Nous avons demandé avec beaucoup de conviction et de force aux Russes d'arrêter toutes les mesures de représailles contre les populations civiles qui ont déjà souffert atrocement dans cette guerre, d'accepter le libre accès en Tchétchénie pour les organisations internationales humanitaires, pour l'OSCE, pour les médias, de même que nous demandons, depuis plusieurs mois que soit recherchée une solution politique pour définir l'avenir de la Tchétchénie à l'intérieur de la fédération russe et pour répondre aux aspirations des Tchétchènes qui ne sont pas tous des terroristes. Voilà la position française qui est, je crois cohérente, forte, qui a été exprimée souvent et que j'ai récapitulée au Conseil des ministres. Il n'y avait pas d'élément nouveau sauf que nous sommes obligés de dire que les Russes ne répondent pas à nos appels, que c'est pour cette raison que les choses deviennent extrêmement préoccupantes.
Q - On en parlera à Lisbonne ?
R - La réunion de Lisbonne, c'est à M. Gama qu'il faut poser la question, est faite en priorité pour traiter des relations Union européenne-Russie, mais en marge il est évident que cette situation sera abordée aussi.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 février 2000)
Q - Avez-vous obtenu des contacts avec des responsables de l'Amérique latine ?
R - Oui, j'ai eu un entretien avec la ministre mexicaine, les ministres brésilien, argentin, chilien et d'autre part avec le ministre uruguayen qui était à côté de moi au déjeuner et avec M. Gama.
A chaque fois, cela m'a permis de rappeler notre position sur le Mercosur : nous sommes très favorables à cette démarche, nous pensons qu'il est important pour l'équilibre du monde en général et pour l'Amérique latine en particulier que ce pôle régional se renforce. Le Mercosur est une construction ambitieuse, il y a des obstacles qui tiennent aux disparités des économies, aux conséquences de la crise financière, mais il me semble constater une volonté politique chez les dirigeants pour avancer malgré tout et pour reprendre cette marche en avant. Je leur ai dit que nous approuvions tout ce qui permettra de fortifier cette démarche.
Q - Si on compare leur expérience de 9 ans avec l'expérience européenne, n'avez-vous pas l'impression qu'ils sont allés un peu trop vite sur le plan politique et pas assez solidement sur le plan économique ?
R - Je pense que l'on ne peut pas comparer l'Europe et le Mercosur, l'ASEAN ou autres. Chaque région a des caractéristiques particulières et l'histoire n'est pas la même. Le Brésil a une caractéristique un peu spéciale au sein du Mercosur. Il n'y a pas de pays en Europe qui soit comparable au Brésil. L'état de développement des économies n'est pas comparable à celui de l'Europe, donc les problèmes à résoudre ne sont pas les mêmes. Il faut être de toutes façons positif. Dans ce contexte qu'est cette région de l'Amérique latine, c'est une bonne démarche que d'essayer d'organiser, sur le plan économique, sur le plan commercial et plus si possible, un ensemble régional. C'est bien, nous le soutenons, je ne porte pas de jugement sur le rythme, je pense que les gouvernements de ces pays doivent faire le mieux possible.
S'ils considèrent qu'ils ont eu une approche trop utopique et trop rapide et qu'ils veulent passer par des étapes intermédiaires, c'est leur problème, nous respectons tout à fait leur choix. C'est à eux de s'organiser.
Q - Mais on a l'impression que les difficultés conjoncturelles qu'ils ont traversées où qu'ils sont encore en train de traverser fait surgir des doutes sur la viabilité du projet.
R - Il me semble que ce sont plutôt des interrogations sur le rythme mais pas sur la viabilité du projet ni sur son intérêt en soi. Je ne constate pas cela du tout, au contraire. Ceux que j'ai rencontrés m'ont paru tout à fait convaincus de l'intérêt, dans le monde global tel qu'il est, de l'intérêt d'une telle organisation. Simplement, la façon d'avancer, la vitesse, la manière de franchir les différents obstacles peuvent, évidemment, être abordés de façon plus réaliste. Mais, ce n'est pas forcément un mal, cela peut aboutir à une démarche qui soit plus sûre.
Q - Concernant la conversation avec les pays du Mercosur, c'est aussi une grande zone de production agricole, bientôt vont commencer les premiers contacts techniques avec l'Union européenne, ces ministres ont-ils exprimé des inquiétudes sur ces sujets ?
R - Les inquiétudes existaient à l'époque où nous n'avions pas pu fixer de calendrier de négociations. Il y avait une période durant laquelle la position française était caricaturée dans toute l'Amérique latine, dans la presse, comme si la France voulait empêcher les négociations d'aboutir alors que nous avons des intérêts légitimes à défendre dans le Mercosur, et il fallait trouver l'articulation entre les deux. La question agricole est sensible en Europe puisque nous la retrouvons tout le temps, dans les négociations entre nous, dans l'Agenda 2000, dans les négociations d'élargissement, dans les accords d'association, dans l'OMC. A propos du Mercosur, nous avons aussi des intérêts légitimes, nous avons besoin d'un calendrier pour nous adapter. Les concessions portent toujours sur le même sujet. Nous avions trouvé finalement un compromis bon pour tout le monde. Nous avions trouvé un calendrier et nous avions pu déterminer à quel moment allaient commencer les premières négociations. Nous avions obtenu que tout soit terminé après la conclusion du cycle OMC, ce qui était fondamental pour nous. Malheureusement, il y a eu l'échec de Seattle car cette réunion n'avait pas été suffisamment préparée. Mais, tout n'est pas figé, cela va repartir et le raisonnement reste donc valable. C'est une chronologie des négociations et une logique en même temps, il faut prendre les choses dans cet ordre. Pour nous, c'est le cadre de référence, ce qui fait que lorsque je parle aux ministres du Mercosur aujourd'hui, je ne trouve pas du tout le même climat qu'il y a un an.
Q - Est-ce plus positif ?
R - Bien sûr, nous avons adopté le calendrier, quelle sera la chronologie des négociations, c'est notre perspective.
Q - On a l'impression que le dossier agricole domine en ce moment depuis l'échec de Seattle ? C'est un peu comme des clivages entre le nord et le sud.
R - C'est une remarque globale, la question agricole est très importante dans les échanges mais il n'y a pas que cela. Vous verrez que lorsque l'on arrivera à ce point dans la négociation entre l'Union européenne et le Mercosur, je peux vous dire que les autres dossiers vont être très difficiles. Le dossier agricole le sera aussi pour l'Union européenne mais les dossiers industrie et services surtout seront très difficiles pour les pays du Mercosur. C'est donc une erreur même du point de vue de ces pays de se focaliser sur la question agricole. La négociation a lieu dans les deux sens. Elle ne va pas dans une seule direction. Les négociations sont faites pour cela, pour constater les positions des uns et des autres, les contradictions que l'on essaie de dépasser, on trouve une dynamique et on avance.
Je ne parle pas de tous les sujets, sur la question Union européenne-Mercosur, nous avions un blocage, des attentes et des demandes du Mercosur. Nous avons trouvé une réponse, un calendrier, une chronologie, c'est notre cadre de travail.
Q - En quoi consiste le programme d'actions politiques ?
R - Ce qui a été lancé à Rio, c'est un vaste mouvement qui ne s'arrêtera plus.
Q - Concernant le Kosovo, y a-t-il du nouveau au sujet des discordances au sein de l'Union européenne ?
R - Il n'y a pas de discordances dans les positions européennes au Kosovo. Il y a à Mitrovica, une situation difficile qui n'est pas surprenante, que l'on pouvait attendre simplement parce que la moitié des Serbes qui ont réussi à rester au Kosovo sont concentrés dans cette zone. Par conséquent, il y a une tension entre les Kosovars albanophones et les Serbes. Il y a des extrémistes des deux côtés, ils essaient de faire exploser cette situation.
Q - En effet, j'ai bien entendu à la télévision où vous parliez d'extrémistes des deux côtés. M. Holbrooke ici, à Lisbonne a parlé des provocations serbes.
R - Oui, je m'exprime sur la base des rapports de la KFOR, je parle de provocations des deux côtés et c'est même un peu plus d'un côté que de l'autre, concernant les incidents récents. Dans le cas précis, comme la KFOR l'a montré, à propos de son enquête sur les " snipers ", cela permet de parler d'extrémistes des deux côtés. Il n'y a pas 36 réponses possibles, la seule réponse de la communauté internationale à travers la KFOR et la MINUK, c'est de tenir bon. Nous sommes là pour appliquer la résolution 1244 et nous ne sommes pas là pour nous laisser dicter une politique qui n'est pas la notre par un groupe ou par un autre.
Q - Cela ne vous inquiète pas que ces incidents surgissent à si peu de temps de la relève du commandement de l'OTAN par l'Eurocorps ?
R - Je pense que l'Eurocorps démontrera sa capacité. Les incidents naissent parce que la situation est difficile, on le sait, et si cela n'avait pas été si difficile, nous n'aurions pas été obligés de nous engager.
Q - Et vous ne pensez pas que les Kosovars peuvent l'interpréter d'une façon différente ?
R - Je me moque des interprétations, je sais comment est la situation et ce que l'on veut faire. Il faut imposer la sécurité des uns et des autres, la coexistence et préparer ensuite l'avenir du Kosovo, la première étape étant l'organisation d'élections locales dans de bonnes conditions. C'est peut-être cette perspective qui dérange les extrémistes mais notre ligne est claire, il faut faire appliquer la résolution 1244.
Q - On a rapporté du Conseil des ministres à Paris, que vous êtes pour durcir un peu le ton vis-à-vis de la Russie. Pensez-vous à quelque chose en particulier ?
R - Les mesures que la France avait à l'esprit ont été proposées à plusieurs reprises déjà lors de la réunion d'Istanbul de l'OSCE, lors du Conseil européen d'Helsinki. Je me suis exprimé à plusieurs reprises ces derniers jours, notamment après la reconquête de Grozny par l'armée russe. J'ai du m'exprimer cinq ou six fois déjà, au Conseil des ministres, j'ai récapitulé tout ce que j'avais dit qui est, je crois, bien connu.
Nous avons demandé avec beaucoup de conviction et de force aux Russes d'arrêter toutes les mesures de représailles contre les populations civiles qui ont déjà souffert atrocement dans cette guerre, d'accepter le libre accès en Tchétchénie pour les organisations internationales humanitaires, pour l'OSCE, pour les médias, de même que nous demandons, depuis plusieurs mois que soit recherchée une solution politique pour définir l'avenir de la Tchétchénie à l'intérieur de la fédération russe et pour répondre aux aspirations des Tchétchènes qui ne sont pas tous des terroristes. Voilà la position française qui est, je crois cohérente, forte, qui a été exprimée souvent et que j'ai récapitulée au Conseil des ministres. Il n'y avait pas d'élément nouveau sauf que nous sommes obligés de dire que les Russes ne répondent pas à nos appels, que c'est pour cette raison que les choses deviennent extrêmement préoccupantes.
Q - On en parlera à Lisbonne ?
R - La réunion de Lisbonne, c'est à M. Gama qu'il faut poser la question, est faite en priorité pour traiter des relations Union européenne-Russie, mais en marge il est évident que cette situation sera abordée aussi./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 février 2000)
Vous savez que la France fait partie de la troïka depuis le début de la présidence portugaise et nos amis portugais nous demandent de participer le plus possible aux activités qui ont lieu sous leur présidence. C'est pour cela que M. Josselin est là pour la plupart des réunions entre l'Union européenne et les différents groupes des pays d'Amérique latine, et c'est dans ce cadre que je suis passé aujourd'hui, quelques heures simplement car j'aurai dû partir ce matin avec le Premier ministre en Israël et dans les territoires palestiniens mais j'ai fait ce crochet car il m'a semblé intéressant de participer à ce déjeuner qui m'a permis d'avoir des contacts avec plusieurs des ministres présents pour faire le point sur les relations bilatérales, les projets d'échanges de visites. Voilà dans quel esprit je suis passé et également pour soutenir l'excellent travail de la présidence portugaise.
Q - Avez-vous obtenu des contacts avec des responsables de l'Amérique latine ?
R - Oui, j'ai eu un entretien avec la ministre mexicaine, les ministres brésilien, argentin, chilien et d'autre part avec le ministre uruguayen qui était à côté de moi au déjeuner et avec M. Gama.
A chaque fois, cela m'a permis de rappeler notre position sur le Mercosur : nous sommes très favorables à cette démarche, nous pensons qu'il est important pour l'équilibre du monde en général et pour l'Amérique latine en particulier que ce pôle régional se renforce. Le Mercosur est une construction ambitieuse, il y a des obstacles qui tiennent aux disparités des économies, aux conséquences de la crise financière, mais il me semble constater une volonté politique chez les dirigeants pour avancer malgré tout et pour reprendre cette marche en avant. Je leur ai dit que nous approuvions tout ce qui permettra de fortifier cette démarche.
Q - Si on compare leur expérience de 9 ans avec l'expérience européenne, n'avez-vous pas l'impression qu'ils sont allés un peu trop vite sur le plan politique et pas assez solidement sur le plan économique ?
R - Je pense que l'on ne peut pas comparer l'Europe et le Mercosur, l'ASEAN ou autres. Chaque région a des caractéristiques particulières et l'histoire n'est pas la même. Le Brésil a une caractéristique un peu spéciale au sein du Mercosur. Il n'y a pas de pays en Europe qui soit comparable au Brésil. L'état de développement des économies n'est pas comparable à celui de l'Europe, donc les problèmes à résoudre ne sont pas les mêmes. Il faut être de toutes façons positif. Dans ce contexte qu'est cette région de l'Amérique latine, c'est une bonne démarche que d'essayer d'organiser, sur le plan économique, sur le plan commercial et plus si possible, un ensemble régional. C'est bien, nous le soutenons, je ne porte pas de jugement sur le rythme, je pense que les gouvernements de ces pays doivent faire le mieux possible.
S'ils considèrent qu'ils ont eu une approche trop utopique et trop rapide et qu'ils veulent passer par des étapes intermédiaires, c'est leur problème, nous respectons tout à fait leur choix. C'est à eux de s'organiser.
Q - Mais on a l'impression que les difficultés conjoncturelles qu'ils ont traversées où qu'ils sont encore en train de traverser fait surgir des doutes sur la viabilité du projet.
R - Il me semble que ce sont plutôt des interrogations sur le rythme mais pas sur la viabilité du projet ni sur son intérêt en soi. Je ne constate pas cela du tout, au contraire. Ceux que j'ai rencontrés m'ont paru tout à fait convaincus de l'intérêt, dans le monde global tel qu'il est, de l'intérêt d'une telle organisation. Simplement, la façon d'avancer, la vitesse, la manière de franchir les différents obstacles peuvent, évidemment, être abordés de façon plus réaliste. Mais, ce n'est pas forcément un mal, cela peut aboutir à une démarche qui soit plus sûre.
Q - Concernant la conversation avec les pays du Mercosur, c'est aussi une grande zone de production agricole, bientôt vont commencer les premiers contacts techniques avec l'Union européenne, ces ministres ont-ils exprimé des inquiétudes sur ces sujets ?
R - Les inquiétudes existaient à l'époque où nous n'avions pas pu fixer de calendrier de négociations. Il y avait une période durant laquelle la position française était caricaturée dans toute l'Amérique latine, dans la presse, comme si la France voulait empêcher les négociations d'aboutir alors que nous avons des intérêts légitimes à défendre dans le Mercosur, et il fallait trouver l'articulation entre les deux. La question agricole est sensible en Europe puisque nous la retrouvons tout le temps, dans les négociations entre nous, dans l'Agenda 2000, dans les négociations d'élargissement, dans les accords d'association, dans l'OMC. A propos du Mercosur, nous avons aussi des intérêts légitimes, nous avons besoin d'un calendrier pour nous adapter. Les concessions portent toujours sur le même sujet. Nous avions trouvé finalement un compromis bon pour tout le monde. Nous avions trouvé un calendrier et nous avions pu déterminer à quel moment allaient commencer les premières négociations. Nous avions obtenu que tout soit terminé après la conclusion du cycle OMC, ce qui était fondamental pour nous. Malheureusement, il y a eu l'échec de Seattle car cette réunion n'avait pas été suffisamment préparée. Mais, tout n'est pas figé, cela va repartir et le raisonnement reste donc valable. C'est une chronologie des négociations et une logique en même temps, il faut prendre les choses dans cet ordre. Pour nous, c'est le cadre de référence, ce qui fait que lorsque je parle aux ministres du Mercosur aujourd'hui, je ne trouve pas du tout le même climat qu'il y a un an.
Q - Est-ce plus positif ?
R - Bien sûr, nous avons adopté le calendrier, quelle sera la chronologie des négociations, c'est notre perspective.
Q - On a l'impression que le dossier agricole domine en ce moment depuis l'échec de Seattle ? C'est un peu comme des clivages entre le nord et le sud.
R - C'est une remarque globale, la question agricole est très importante dans les échanges mais il n'y a pas que cela. Vous verrez que lorsque l'on arrivera à ce point dans la négociation entre l'Union européenne et le Mercosur, je peux vous dire que les autres dossiers vont être très difficiles. Le dossier agricole le sera aussi pour l'Union européenne mais les dossiers industrie et services surtout seront très difficiles pour les pays du Mercosur. C'est donc une erreur même du point de vue de ces pays de se focaliser sur la question agricole. La négociation a lieu dans les deux sens. Elle ne va pas dans une seule direction. Les négociations sont faites pour cela, pour constater les positions des uns et des autres, les contradictions que l'on essaie de dépasser, on trouve une dynamique et on avance.
Je ne parle pas de tous les sujets, sur la question Union européenne-Mercosur, nous avions un blocage, des attentes et des demandes du Mercosur. Nous avons trouvé une réponse, un calendrier, une chronologie, c'est notre cadre de travail.
Q - En quoi consiste le programme d'actions politiques ?
R - Ce qui a été lancé à Rio, c'est un vaste mouvement qui ne s'arrêtera plus.
Q - Concernant le Kosovo, y a-t-il du nouveau au sujet des discordances au sein de l'Union européenne ?
R - Il n'y a pas de discordances dans les positions européennes au Kosovo. Il y a à Mitrovica, une situation difficile qui n'est pas surprenante, que l'on pouvait attendre simplement parce que la moitié des Serbes qui ont réussi à rester au Kosovo sont concentrés dans cette zone. Par conséquent, il y a une tension entre les Kosovars albanophones et les Serbes. Il y a des extrémistes des deux côtés, ils essaient de faire exploser cette situation.
Q - En effet, j'ai bien entendu à la télévision où vous parliez d'extrémistes des deux côtés. M. Holbrooke ici, à Lisbonne a parlé des provocations serbes.
R - Oui, je m'exprime sur la base des rapports de la KFOR, je parle de provocations des deux côtés et c'est même un peu plus d'un côté que de l'autre, concernant les incidents récents. Dans le cas précis, comme la KFOR l'a montré, à propos de son enquête sur les " snipers ", cela permet de parler d'extrémistes des deux côtés. Il n'y a pas 36 réponses possibles, la seule réponse de la communauté internationale à travers la KFOR et la MINUK, c'est de tenir bon. Nous sommes là pour appliquer la résolution 1244 et nous ne sommes pas là pour nous laisser dicter une politique qui n'est pas la notre par un groupe ou par un autre.
Q - Cela ne vous inquiète pas que ces incidents surgissent à si peu de temps de la relève du commandement de l'OTAN par l'Eurocorps ?
R - Je pense que l'Eurocorps démontrera sa capacité. Les incidents naissent parce que la situation est difficile, on le sait, et si cela n'avait pas été si difficile, nous n'aurions pas été obligés de nous engager.
Q - Et vous ne pensez pas que les Kosovars peuvent l'interpréter d'une façon différente ?
R - Je me moque des interprétations, je sais comment est la situation et ce que l'on veut faire. Il faut imposer la sécurité des uns et des autres, la coexistence et préparer ensuite l'avenir du Kosovo, la première étape étant l'organisation d'élections locales dans de bonnes conditions. C'est peut-être cette perspective qui dérange les extrémistes mais notre ligne est claire, il faut faire appliquer la résolution 1244.
Q - On a rapporté du Conseil des ministres à Paris, que vous êtes pour durcir un peu le ton vis-à-vis de la Russie. Pensez-vous à quelque chose en particulier ?
R - Les mesures que la France avait à l'esprit ont été proposées à plusieurs reprises déjà lors de la réunion d'Istanbul de l'OSCE, lors du Conseil européen d'Helsinki. Je me suis exprimé à plusieurs reprises ces derniers jours, notamment après la reconquête de Grozny par l'armée russe. J'ai du m'exprimer cinq ou six fois déjà, au Conseil des ministres, j'ai récapitulé tout ce que j'avais dit qui est, je crois, bien connu.
Nous avons demandé avec beaucoup de conviction et de force aux Russes d'arrêter toutes les mesures de représailles contre les populations civiles qui ont déjà souffert atrocement dans cette guerre, d'accepter le libre accès en Tchétchénie pour les organisations internationales humanitaires, pour l'OSCE, pour les médias, de même que nous demandons, depuis plusieurs mois que soit recherchée une solution politique pour définir l'avenir de la Tchétchénie à l'intérieur de la fédération russe et pour répondre aux aspirations des Tchétchènes qui ne sont pas tous des terroristes. Voilà la position française qui est, je crois cohérente, forte, qui a été exprimée souvent et que j'ai récapitulée au Conseil des ministres. Il n'y avait pas d'élément nouveau sauf que nous sommes obligés de dire que les Russes ne répondent pas à nos appels, que c'est pour cette raison que les choses deviennent extrêmement préoccupantes.
Q - On en parlera à Lisbonne ?
R - La réunion de Lisbonne, c'est à M. Gama qu'il faut poser la question, est faite en priorité pour traiter des relations Union européenne-Russie, mais en marge il est évident que cette situation sera abordée aussi.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 février 2000)