Texte intégral
Mesdames, Messieurs, je voudrais tout d'abord vous remercier d'avoir répondu à l'invitation que, avec Patrick DEVEDJIAN, Jean-François COPÉ et François LOOS, nous vous avons adressée.
Nous nous retrouverons ainsi trois fois par an pour vous présenter les grands axes de notre politique économique, financière et industrielle. Ce sera également l'occasion d'en assurer le suivi et l'évaluation, car il n'est pas d'action publique qui vaille sans continuité ni transparence.
J'étais vendredi et samedi derniers à Londres pour la réunion du G7 Finances, où M. Alan GREENSPAN, dans une brillante démonstration, nous a expliqué que l'économie d'un pays dans le monde était comme un avion dans le ciel. La politique économique consisterait donc à gérer des turbulences et, pour ce faire, il faudrait s'en remettre à des mécanismes automatisés, car la main et le cerveau de l'homme n'y suffiraient pas.
Peut-être.
Mais n'oublions pas que, dans l'avion, il y a des passagers. N'oublions pas que la finalité de toute politique économique est d'abord humaine.
Il ne faut pas opposer l'économique et le social, mais les réconcilier. La solidarité ne peut être financée à crédit. C'est pourquoi il faut promouvoir encore et toujours la création de richesses, ce qui sera d'autant plus à notre portée que chacune et chacun trouvera sa place dans notre société.
Ce que je cherche à construire, c'est une société de solidarité et de liberté, deux objectifs au cur du contrat républicain. S'il fallait la nommer, je l'appellerais " soliberté ". C'est vrai au plan international ; nous l'avons fait à Londres en prenant des décisions concrètes en matière de dette et de développement, dans la ligne des propositions de Jacques CHIRAC. Nous allons mettre en place rapidement un dispositif pour l'achat en Afrique de traitements pour le Sida.
C'est ce que nous faisons aussi au plan national, depuis bientôt 3 ans, derrière Jean-Pierre RAFFARIN, et, pour cette année, notamment dans le cadre du contrat France 2005.
C'est aussi l'un des défis de notre époque de faire que la mondialisation soit un facteur de développement pour tous nos territoires. Jamais n'a été plus grande l'exigence de réconcilier le global et le local. Faire face aux délocalisations ou encore organiser des pôles de compétitivité, comme le fait le gouvernement, ne sont que deux des réponses à trouver pour répondre à ce défi. Il nous appartient donc de considérer la mondialisation de façon offensive.
Quand on considère la situation présente de notre économie, en ce début d'année 2005, tout tourne en réalité autour de trois mots : emploi, croissance, confiance. Ils se nourrissent mutuellement. Pas d'emploi sans croissance, pas de croissance sans confiance, pas de confiance sans emploi.
L'emploi, comme l'a dit le Premier ministre, est notre priorité n° 1, qui commande tous nos choix de politique économique et financière, de politique industrielle et de recherche. Pour la première fois depuis 4 ans, notre économie a recommencé à créer des emplois (30.000 l'année dernière). Ce n'est pas suffisant. Mais nous sommes sur la bonne voie pour 2005 ; avec Jean-Louis BORLOO, notre mobilisation est totale.
La croissance a été bonne l'année dernière, quand on la compare avec le reste de la zone euro. Mais cela ne doit pas nous satisfaire pour autant, bien évidemment.
Je garde le cap d'une croissance de 2,5 % pour 2005, même si chacun connaît les incertitudes liées à l'environnement international.
Mais je ne me satisfais pas d'une croissance potentielle bridée par une sorte de plafond invisible dû à notre incapacité à voir les choses en face et à traiter un certain nombre de blocages structurels de notre économie.
Cela fait en effet trop longtemps que nous n'avons plus véritablement confiance dans l'avenir. Pour la première fois depuis des siècles, les parents craignent pour l'avenir de leurs enfants. Comment ne pas le comprendre, dans un monde perçu comme menaçant ? Comment ne pas le comprendre avec un taux de chômage scandaleusement élevé, particulièrement pour les jeunes et les seniors ?
Pourtant, sans insulter ces peurs, je voudrais dire ici que le moment est venu de nous réveiller, de nous secouer, de cesser de regarder le verre toujours à moitié vide et de rester conscients de ce que nous sommes.
Nous sommes un des plus beaux pays du monde. Les Français, ces dernières années, ces dernières décennies, ont accompli des choses formidables. C'est grâce à eux que nous sommes le cinquième exportateur mondial, le quatrième exportateur de services et le troisième pays d'accueil d'investissements directs étrangers. Notre système de protection sociale est l'un des meilleurs du monde.
Depuis 2002, le gouvernement de Jean-Pierre RAFFARIN a mis fin à l'immobilisme qui menaçait nos destinées collectives. Depuis deux mois, je mesure également tout ce qu'il reste à faire. Mais nous ne pourrons le faire, mais nous ne le ferons qu'en nous retroussant les manches, en reprenant confiance en nous-mêmes. C'est cette bataille de la confiance qu'il nous faut gagner. Je considère que c'est ma mission première.
Pour la gagner, il faut se départir de toute idéologie. Interrogeons-nous sur les succès de la Grande-Bretagne, du Danemark ou de la Suède. Regardons les choses en face, disons-les ! Soyons pragmatiques et sans tabou, et faisons !
Car ce qui compte avant tout, c'est la bataille pour l'emploi.
Nous allons maintenant, tous les quatre, vous présenter notre programme de travail pour les prochains mois. Certaines mesures sont d'application immédiate, d'autres précisent l'orientation d'un certain nombre de choix qui seront faits à l'occasion de la loi de finances. D'autres, enfin, s'inscrivent davantage sur des chantiers à moyen terme.
Elles sont articulées autour de 4 objectifs :
- soutenir le pouvoir d'achat, la consommation et l'emploi,
- renforcer nos entreprises pour les emplois d'aujourd'hui et de demain,
- nous attaquer aux blocages qui verrouillent notre économie,
- mettre nos finances publiques au service de la croissance.
Le soutien du pouvoir d'achat, de la consommation et de l'emploi est notre première priorité. S'agissant de la baisse d'impôts, je sais bien que l'on entendra des critiques. Mais je voudrais réaffirmer ici avec force que baisser les impôts, c'est bon pour le pouvoir d'achat, c'est bon pour la croissance.
Le chemin accompli depuis 2002 est déjà considérable. L'impôt sur le revenu a diminué globalement de 6,4 Mdeuros, grâce à la baisse générale du barème et à diverses mesures ciblées, dont la prime pour l'emploi. Nous avons ainsi rendu des sommes importantes aux Français, qui sont consommées ou investies au profit de la croissance et de l'emploi. Cette baisse générale a également permis de passer sous les 50 % du barème, chiffre très important pour l'attractivité de notre pays.
Je voudrais redire ici que nous allons poursuivre cet effort au profit de nos concitoyens.
Je souhaite élargir les options du gouvernement concernant la baisse de l'impôt sur le revenu en 2006 et 2007. C'est pourquoi, avec Jean-François COPÉ, nous avons demandé d'étudier les mesures ayant un effet encore plus puissant en faveur de la consommation et du pouvoir d'achat.
Nous présenterons au Premier ministre, dans les prochains mois, un éventail de propositions en faveur des classes moyennes et des actifs, comme par exemple des baisses plus concentrées sur les premières tranches du barème, ou encore l'amélioration de la prise en compte des frais professionnels des salariés.
Renforcer la consommation, c'est aussi la poursuite d'une mesure adoptée l'été dernier par mon prédécesseur, la possibilité de donner jusqu'à 20.000 euros en franchise de droit. Le dispositif devait se terminer en mai. J'ai décidé de le reconduire et de le renforcer dans des conditions que vous détaillera Jean-François COPÉ tout à l'heure.
Enfin, j'ai décidé des mesures importantes pour la trésorerie des entreprises. Les remboursements de TVA, tout d'abord, seront accélérés. Nous mettons actuellement plusieurs semaines, voire plusieurs mois, à rembourser quelque 30 Md euros de crédit de TVA aux entreprises. Dès 2005, je m'engage à ce que 80 % de ces remboursements soient réalisés en moins d'un mois. Il ne s'agit que d'une première étape qui sera renforcée en 2006.
J'ai décidé, par ailleurs, une innovation fiscale majeure. Dès le second semestre de cette année, les entreprises pourront déduire de leurs impôts les montants de leurs créances fiscales. C'est une vraie première et une avancée importante -je crois- pour les entreprises, notamment les plus petites, dont la trésorerie est souvent fragile.
Mais, pour remporter cette bataille de l'emploi, il faut également utiliser pleinement les baisses de prélèvements ciblées sur le coût du travail.
Il est vrai que, malgré la hausse du SMIC, notre marché de l'emploi reste aujourd'hui trop peu incitatif au niveau des premiers salaires. La différence entre les revenus du travail et les revenus tirés de la solidarité nationale est insuffisante. Par exemple, une personne au RMI qui reprend une activité à mi-temps payée au SMIC ne gagne à peine plus qu'un euro supplémentaire par heure travaillée par rapport à sa situation antérieure.
Je souhaite, pour ma part, que tout soit fait pour que le travail paye vraiment plus que l'assistance. A cette fin, nous continuerons d'augmenter le montant de la prime pour l'emploi et nous travaillons à des améliorations importantes afin d'en renforcer l'efficacité pour ceux qui reprennent un emploi.
Plusieurs pistes sont à l'étude, que Jean-François vous exposera tout à l'heure.
Le deuxième axe, c'est bien évidemment assurer le développement des services à la personne, qui constitue un très important gisement d'emplois. Le Premier ministre a fixé des objectifs dans le contrat 2005.
Avec Jean-Louis BORLOO, nous travaillons sur ce sujet. J'explore actuellement l'intérêt des différents mécanismes qui permettraient aux ménages actifs, qui ont des revenus modestes et qui ne bénéficient pas ou très peu de la réduction d'impôts actuelle, de recourir à ce type de service. Ce sujet sera prochainement arbitré par le Premier ministre.
Enfin, s'agissant du coût du travail, je voudrais préciser ce matin que l'exonération des charges au niveau du SMIC, que le Président de la République a annoncée le 4 janvier, nous conduira à porter le taux d'allégement à 28 % contre 26 % actuellement.
Le pouvoir d'achat, c'est bien évidemment aussi le renforcement de la concurrence au profit du consommateur. Là, je voudrais évoquer devant vous plusieurs chantiers.
Le premier est bien évidemment la réforme de la loi Galland. Nous y travaillons d'arrache-pied avec Christian JACOB, nous voulons absolument, dans cette réforme qui sera annoncée dans quelques semaines, que le consommateur s'y retrouve pour son pouvoir d'achat dans le cadre d'une concurrence plus équilibrée.
Le deuxième chantier est la mise en oeuvre concrète des engagements pris par les banques pour renforcer la transparence de leurs tarifs et pour améliorer l'accès de tous les Français à un compte bancaire qui fonctionne véritablement.
Je réunirai les banques prochainement pour dresser avec elles un bilan d'étape de leurs engagements.
Enfin, le troisième axe est la rémunération des comptes courants. J'ai décidé d'autoriser le plus rapidement possible cette rémunération, dès le début du mois de mars. Nous veillerons à ce que la concurrence et la transparence puissent jouer pleinement dans le secteur bancaire.
Il nous faut également combler un retard que nous avons dans notre pays par rapport à nos voisins dans le domaine des prêts à la consommation.
En effet, le crédit est aussi un facteur de croissance et de libération des projets. Il nous faut, dans notre pays, une approche plus positive du crédit ; j'ai donc décidé d'engager une concertation avec les associations de consommateurs et les établissements de crédit pour développer, de manière responsable, le crédit à la consommation.
Je souhaite aussi que les ménages puissent mieux mobiliser leurs actifs et de manière moins onéreuse pour emprunter et consommer. De nouveaux produits en matière de crédits hypothécaires, comme l'hypothèque rechargeable et le viager hypothécaire, verront le jour avant fin 2005, grâce à un travail mené étroitement avec Dominique PERBEN.
Je demanderai prochainement au Parlement de nous autoriser à préparer, par ordonnance, le régime juridique de ces nouveaux produits.
En matière de crédits, je voudrais évoquer également la situation particulière des étudiants qui ont souvent des difficultés importantes pour y accéder. Avec François FILLON, nous expertisons conjointement deux pistes dont nous allons parler avec les associations et les syndicats d'étudiants dans les prochaines semaines : tout d'abord, un mécanisme pour débloquer le prêt aux étudiants en étudiant des formules de garantie pour réduire le risque pour les prêteurs, par ailleurs, permettre aux étudiants de déduire de leur premier revenu d'activité les intérêts de prêts qui auraient été souscrits pendant leurs études.
Dernier élément de ce premier pilier sur le pouvoir d'achat, l'emploi et la croissance, c'est bien évidemment la question du logement.
Le logement représente aujourd'hui 27 % des dépenses des ménages. C'est donc très important pour le pouvoir d'achat. Nous avons fait des efforts très importants pour l'accession à la propriété, notamment en étendant le bénéfice du prêt à taux 0 de 120 000 à 240 000 foyers. Cette mesure, entrée en vigueur le 1er février, représente une aide de l'Etat de 1,4 milliards d' par an pendant 5 ans.
Avec Jean-Louis BORLOO et Marc-Philippe DAUBRESSE, nous voulons faciliter l'accès locatif à travers deux canaux : fluidifier la mise sur le marché de logements vacants et rassurer les propriétaires en organisant, avec les assureurs, une réflexion pour dynamiser le recours aux assurances contre les impayés.
Ensuite, revoir sereinement et dans la plus large concertation les modalités d'indexation des loyers. En effet, l'indexation actuelle sur le coût de la construction n'est pas satisfaisante. Vous conviendrez avec moi que les frais d'entretien d'une habitation locative ne découlent pas du seul coût de la construction, surtout quand il y a un boom et des blocages comme maintenant dans l'industrie du bâtiment et des travaux publics.
Depuis plusieurs années, cet indice connaît une progression annuelle très forte qui se répercute sur les loyers, c'est ce sujet que nous allons prendre en main.
Telle est la première série de mesures à court ou moyen terme pour le pouvoir d'achat, la croissance et l'emploi.
Je voudrais maintenir dire quelques éléments avant que Patrick DEVEDJIAN ne complète sur notre ambition industrielle.
Je crois vraiment qu'il n'y a pas de fatalité à une France sans usine, de la même manière que nous devons être fiers de défendre une politique agricole active, il faut être fier de défendre une politique industrielle ambitieuse. Notre pays n'a pas vocation, à terme, à n'être qu'un musée dans lequel on mangerait bien avec seulement des emplois de service très qualifiés et polyglottes ou très faiblement qualifiés. Une économie, c'est un tout, il faut réserver une énergie égale à tous nos secteurs d'activité économique.
Récemment, Jean-Louis BEFFA a remis un rapport extrêmement important, sa mission d'ailleurs est prolongée pour étudier la mise en oeuvre de ces propositions, mais je voudrais à ce stade faire quelques réflexions.
La première est de rappeler que l'industrie, c'est 27 % de la population active dans notre pays, 85 % des dépenses de recherche et de développement des entreprises privées.
C'est aussi un débouché très important pour les services puisque le boom des services est en grande partie lié à l'externalisation de certaines tâches que l'on a connues dans l'industrie. L'industrie, c'est important, il faut se mobiliser pleinement.
Il est vrai, Patrick DEVEDJIAN le détaillera dans quelques instants, le rôle de l'Etat pour une stratégie industrielle n'est pas le même en 2005 qu'il ne l'était dans les années 70. C'est d'ailleurs ce que tout le monde comprend. J'ai été frappé par le bon accueil qui a été réservé au plan européen par les propositions du Président de la République dans ses voeux aux forces vives le 4 janvier dernier.
Je crois qu'il nous revient d'être très vigilants sur la localisation des centres de décisions, sur l'ensemble de l'environnement de l'industrie de notre pays, notamment pour les industries électro-intensives de la politique tarifaire qui est menée dans le secteur énergétique.
Pour sortir des généralités, si je puis dire, il convient d'être extrêmement concret.
Depuis qu'il est à Bercy, Patrick DEVEDJIAN a déjà engagé un travail très important avec un certain nombre de secteurs industriels : le textile, la chimie, les industries de santé ; il faut aller plus loin. Dans les mois qui viennent, nous allons mettre en place des groupes de travail sectoriels pour avancer sur tous ces sujets.
Le deuxième grand sujet est la recherche. Cette Agence pour l'innovation industrielle proposée par Jean-Louis BEFFA verra le jour dans sa traduction législative dans la loi GAYMARD/JACOB que nous sommes en train de préparer et qui sera examinée au Parlement avant l'été.
Cette Agence devra particulièrement développer les partenariats publics et privés qui, comme chacun le sait, sont extrêmement importants dans ce domaine.
Enfin, dernier outil extrêmement important : le crédit impôt recherche. Avec Patrick DEVEDJIAN, nous avons mis à l'étude l'intérêt d'augmenter la part volume de ce crédit impôt recherche qui pourrait être portée de 5 à 10 %. Cela fera l'objet de décisions dans le cadre des arbitrages budgétaires pour la loi de Finances pour 2006 par le Premier ministre.
Je voudrais dire également un mot sur l'ouverture du capital de nos entreprises publiques.
Ces ouvertures de capital s'intègrent dans le cadre de stratégies de développement ambitieuses pour ces entreprises et leurs salariés que j'accompagnerai sans réserve.
La compétitivité de notre économie repose aussi sur celle de nos grands champions industriels de l'énergie, des transports, de l'aéronautique comme l'a illustré récemment Airbus.
Nous avons l'ambition d'aider nos entreprises publiques à s'adapter pour réussir dans un monde concurrentiel. Il faut aussi leur en donner les moyens, ce sera une part essentielle de notre action en 2005.
D'ici, début avril, la société des Autoroutes du Nord et de l'Est de la France sera mise en bourse. D'autres ouvertures de capital suivront cette année pour nos entreprises avec la nécessité de leur donner les moyens nécessaires pour leur développement.
Si les conditions sont réunies, nous pourrons introduire en bourse Gaz de France d'ici l'été, Areva d'ici la fin de l'été et EDF d'ici la fin de l'année.
Cette stratégie globale pour nos entreprises s'entend dans un cadre mondialisé. Notre économie ne profite pas aujourd'hui suffisamment de la croissance mondiale. Nous devons faire plus et mieux, car 1 milliard d' d'exportations supplémentaires génère 15 000 emplois nouveaux. François LOOS reviendra dans un instant en détail sur notre plan.
A ce stade, je voudrais dire deux choses.
Nous avons décidé une mesure indispensable pour soutenir de l'effort de prospection à l'étranger des équipes commerciales de nos entreprises par un statut fiscal qui permettra la déduction de l'impôt sur le revenu de la fraction du salaire correspondant aux périodes passées à l'étranger au-delà de 120 jours.
Le deuxième aspect sur lequel je voudrais insister est bien évidemment le chantier de l'attractivité de la France. Hier, le Premier ministre a présidé le Conseil de l'attractivité ; les investissements étrangers en France ont créé 30 000 emplois l'an dernier, c'est notamment pour ces raisons que j'ai proposé hier au Premier ministre plusieurs mesures pour attirer chez nous en priorité les centres de décisions et les centres de recherche et développement ainsi que les impatriés correspondants.
Nous améliorons le régime fiscal des impatriés en diminuant de 10 à 5 ans la condition de non-domiciliation fiscale antérieure en France. De même, les centres de recherche et de développement pourront bénéficier d'un nouveau régime fiscal inspiré de celui des quartiers-généraux.
Troisième pilier de notre action : la nécessité de s'attaquer aux blocages qui freinent le dynamisme de notre économie, car nos entreprises, nos emplois et notre croissance ont besoin que l'on " déverrouille " un certain nombre de ces blocages.
J'aborderai principalement trois sujets. Le premier, vous le connaissez bien, il s'agit du financement de notre économie, de nos entreprises et de l'épargne. Le paysage que nous connaissons a été historiquement façonné par les Pouvoirs Publics. Nous venons récemment encore de le modifier avec la création du PERP et du PERCO.
Je crois que le moment est venu de mettre davantage de cohérence au service d'un financement adapté de l'économie d'aujourd'hui. L'épargne, placée en produit de taux, reste prépondérante et, finalement, cela joue au détriment des ménages qui ont une épargne à faible rendement et de nos entreprises qui ne trouvent pas toujours les financements dont elles ont besoin en France et vont souvent le chercher à l'étranger.
C'est pourquoi nous travaillons d'ores et déjà à faire en sorte que la détention de titres d'une entreprise pendant au moins 15 ans ne soit pas défavorisée par rapport à d'autres formes d'investissement. Toutefois, au-delà, il me semble indispensable d'engager une réflexion approfondie, sereine et utile pour moderniser le financement de notre économie.
J'ai donc demandé à M. René BARBIER DE LA SERRE de me faire des propositions de réforme, sans tabou, d'ici la fin de l'été, en veillant à organiser, très en amont, les Commissions des Finances des deux assemblées qui ont, sur ce sujet, mené des réflexions de longue date.
Le deuxième axe est la libération du crédit pour le développement des petites et moyennes entreprises. Depuis 2 ans, nous avons créé un excellent climat pour la création d'entreprises : +12 en 2003, +12,5 en 2004 ; tout cela est bien, mais, maintenant, il faut assurer leur financement et leur développement.
Avec Christian JACOB, nous proposerons dans la loi qui portera nos noms un certain nombre de mesures. Aujourd'hui, je voudrais particulièrement insister sur deux mesures.
La première est ce que l'on appelle le soutien abusif. Il faut absolument clarifier les règles de ce soutien abusif. Nous y travaillons avec Dominique PERBEN, car chacun sait bien aujourd'hui que l'incertitude juridique sur le soutien abusif est une des causes de la frilosité d'un certain nombre d'établissements bancaires vis-à-vis des PME. Nous voulons donc, avec Dominique PERBEN, clarifier le plus rapidement possible ce sujet.
Le second sujet très important est le déverrouillage de l'accès à la bourse pour nos PME. Les informations exigées d'elles pour l'introduction en bourse sont hors de proportion par rapport à leur taille et aux risques qu'elles feraient peser. On peut comprendre que des règles existent pour des entreprises dont la capitalisation représente plusieurs milliards d'euros. Pour une PME, à l'évidence, ces règles sont beaucoup trop contraignantes.
Je souhaite donc que nous bâtissions un régime juridique adapté au nouveau marché organisé ALTERNEXT pour qu'il devienne demain la porte d'entrée des PME à la bourse de Paris.
Le troisième grand sujet, ce sont les questions liées à l'emploi et à la réglementation du travail. Nous sommes sur des sujets minés. Chacun a bien conscience d'un certain nombre de verrous qui existent dans notre économie, dans notre droit du travail, dans nos relations du travail. Beaucoup même reconnaissent tout cela en privé, mais dès qu'une caméra ou un micro se tend, très souvent, la langue de bois revient.
Je sais que ce sont des sujets difficiles. Parler du contrat de travail, des seuils, des conditions de travail, de la protection de l'emploi et de la précarité du travail demande du temps et du dialogue. Il ne s'agit pas de dire qu'il y a telle solution miracle ; il ne s'agit pas de désigner du doigt tel ou tel acteur ; il s'agit tout simplement de mettre tout le monde autour de la table pour faire progresser collectivement ces sujets.
J'ai la conviction que ce que nous avons réussi à faire, avec le Conseil d'orientation sur les retraites, nous devons pouvoir et savoir le faire avec un Conseil d'orientation pour l'emploi.
Avec Jean-Louis BORLOO, nous avons fait des propositions au Premier ministre qui prendra ses décisions le moment venu. J'ai évoqué ce sujet avec les partenaires sociaux que j'ai reçus ces dernières semaines. Je crois qu'il faut maintenant y aller. On ne peut plus ne pas regarder en face un certain nombre de blocages dans notre économie, ne plus faire comme si nous n'avions pas un taux de chômage qui est le double de certains pays européens qui ont trouvé des formules intéressantes. C'est pourquoi je mets beaucoup d'énergie, avec Jean-Louis BORLOO, sur ce sujet.
Je voudrais dire un dernier mot sur ce quatrième pilier qui est, en réalité, le soubassement de tout le reste, à savoir la maîtrise des finances publiques. Je serai bref, Jean-François y reviendra. J'aimerais faire un certain nombre d'observations.
La nécessité de maîtriser nos finances publiques n'est pas une obsession comptable imposée par l'Europe, même si, hier soir, nous étions à Matignon avec le Conseil d'analyse économique pour parler du Pacte de stabilité et de croissance avec Jean-Claude JUNKER. Il s'agit tout simplement d'une règle de bon sens quand on considère qu'un enfant qui naît a sur sa tête entre 16 000 et 17 000 de dettes et que, depuis 1981, notre stock de dette publique est passé de 22 % de notre richesse à 65 %.
Réduire notre déficit, poursuivre la baisse des prélèvements obligatoires, rendre plus efficace la dépense publique, telle est la politique que mène Jean-Pierre RAFFARIN depuis 2002. Cette politique n'est pas seulement celle du Gouvernement, elle est, en réalité, celle de tous les Français, pour tous les Français.
Quand on exerce une responsabilité, que l'on soit ministre ou maire, on entend très souvent: " Monsieur le Ministre, Monsieur le Maire, le compte n'y est pas. " Le compte n'y est jamais et il n'y sera jamais. Faire croire à nos compatriotes que la solution à tous problèmes réside essentiellement dans l'accroissement des dépenses publiques est une tromperie, une menterie. Je crois qu'il faut dire les choses telles qu'elles sont. Nous avons déjà en France un niveau très élevé de dépenses publiques, si nous continuons sur cette tendance, nous allons dans le mur.
Depuis 2002, nous avons fait de très sérieux efforts. Je suis très heureux qu'en 2005 la Commission européenne ait validé notre objectif de 3 %. Je voudrais redire ici que nous resterons calés sur cet objectif de 3 % du déficit en 2005 en exécution.
Ceci étant, quand on parle de déficit public, on a trois sujets : l'Etat, la sécurité sociale et les collectivités locales.
S'agissant de l'Etat, comme vous le savez, l'année prochaine, les dépenses de l'Etat ne progresseront pas plus vite que l'inflation et nous continuerons dans cette voie-là. Tel est ce qu'a écrit le Premier ministre dans ses lettres de cadrage.
S'agissant de la protection sociale, il s'agit d'un sujet qui dépend de chacun d'entre nous dans nos comportements individuels. Il faut que chacun d'entre nous ait bien conscience que la sécurité sociale est un bien extrêmement précieux. Il s'agit sans doute du bien le plus précieux que nous ayons. Si on tire trop sur la corde, il ne faut pas s'étonner que de grandes difficultés puissent se produire.
De ce point de vue-là, la réforme que met en uvre Philippe DOUSTE-BLAZY crée enfin un certain nombre d'instruments de gouvernance pour un pilotage plus fin des dépenses d'assurance-maladie. Les premiers résultats sont d'ailleurs encourageants.
Il y a enfin les finances locales. Ces dernières semaines, il y a eu une polémique. J'aimerais rappeler les choses de manière extrêmement claire. Pour 2005, les dépenses transférées aux régions ne représentent que 3 % des dépenses dédites régions. Ces dépenses sont compensées à l'euro près. S'agissant des dépenses de personnel, les personnels mis à disposition des collectivités décentralisées, des régions en l'occurrence, seront payés par l'Etat jusqu'en 2008.
Que les Présidents de conseils régionaux socialistes décident de mener une politique, c'est tout à leur honneur, mais il faut qu'ils l'assument fiscalement devant leurs électeurs. Toutefois, s'agissant de la décentralisation et des transferts de compétences, l'Etat sera irréprochable sur les compensations financières. Il le sera d'autant plus que la constitution lui impose de le faire ; c'est d'ailleurs nous qui avons modifié la constitution dans ce sens au début de cette législature.
Je disais au début de mon propos qu'il n'est pas d'action publique durable qui vaille sans continuité, sans évaluation, sans transparence. Nous tiendrons donc les Français informés régulièrement de l'état d'avancement de chacun de ces dossiers. C'est l'engagement que nous prenons aujourd'hui. Avec Jean-François COPÉ, Patrick DEVEDJIAN et François LOOS, nous savons qu'il nous reste beaucoup à faire. Nous sommes là pour cela et je puis vous dire que nous avons du coeur à l'ouvrage.
Je vais maintenant passer la parole à Jean-François COPÉ. Ensuite, Patrick DEVEDJIAN interviendra et François LOOS conclura.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 10 février 2005)