Texte intégral
Mes chers camarades, ce référendum, nous l'avons demandé avec force, nous l'avons obtenu avec satisfaction et, pendant cette campagne, nous l'avons aimé et respecté avec scrupule. C'est d'ailleurs un débat que nous avons voulu amener dans le Parti il y a déjà bien longtemps, nous avons porté cette idée qu'on peut être amoureux de l'Europe, désirer qu'elle soit autrement, au prix parfois de lui dire et de dire non.
Et c'est une idée qui, le temps passant, sera une idée qui appartiendra à tous les socialistes européens car le moment, comme au moment de la fondation de la République, vient de la différenciation. Une fois l'objet construit, il nous revient à faire prévaloir nos orientations respectives, droite contre gauche, programme contre programme.
Dans ce référendum, nous avons voulu, chers camarades, respecter l'honnêteté intellectuelle du débat en travaillant le texte dans les profondeurs de ses conséquences. Nous avons voulu nous prémunir contre la personnalisation du débat, d'où qu'elle vienne. Et nous nous sommes refusés à toute tentation plébiscitaire étrangère à notre tradition démocratique.
Ce référendum, nous l'avions demandé, nous l'avons perdu et nous en respectons le résultat. Nous nous rangerons au choix majoritaire des militants, c'est là notre patriotisme de Parti à nous. Il n'y a là, chers camarades, nulle affaire de conscience, laquelle s'exprimera librement dans l'isoloir que la République met à notre disposition.
Il y a là une question de responsabilité politique à l'égard du Parti que des générations ont mis dans d'énergie à bâtir et que nous devons préserver dans la loyauté des membres qui le forment, dans l'unité qu'il doit toujours constituer face à nos adversaires.
J'en profite ici, pardonnez-moi d'être sincères, ceux qui ont reconnu notre sincérité et notre constance dans la critique de l'orientation excessivement libérale de la construction européenne, je rends aussi un hommage amical à ceux qui, bien qu'étant partisans du oui, ont reconnu souvent dans les débats fédéraux et de section, que nos arguments étaient justes et posaient des problèmes qu'on sait pour l'avenir de l'Europe et de la France.
Je remercie également ceux qui, comme nous, pensaient que nous étions dans un débat où nous savions au fond de nous-mêmes que tout le monde avait un peu raison et un peu tort à la fois ; et que le désir que nous avions nous-mêmes, de voter cette Constitution, que notre conscience empêchait d'approuver, s'équilibrait souvent par celle des camarades qui expliquaient qu'ils pouvaient ne pas voter ce texte tout en reconnaissant l'immensité des problèmes que cette Constitution posait à nous, socialistes.
Dans ce formidable dédoublement de notre personnalité collective, il y a, dans des proportions différentes, chers camarades, en chacun d'entre nous, un morceau de oui et un morceau de non.
D'ailleurs, la solution choisie par la totalité des militants laisse subsister des problèmes considérables qu'il va falloir affronter. Et c'est, chers camarades, côte à côte et non face à face que les camarades du oui et du non vont devoir précisément affronter ces problèmes : la crise sociale n'a aucune raison de cesser de s'approfondir après ce vote. La paralysie budgétaire de l'Union européenne, l'impossible solidarité avec les dix pays nouvellement entrants sur le plan budgétaire, la déstructuration budgétaire de l'Union européenne attendue entre, d'un côté, ceux qui ont des besoins énormes à financer, et ceux qui ne veulent plus payer, le rattrapage économique et social qui accroîtra inévitablement, et peut-être de façon plus spectaculaire qu'on ne le croit, la pression du dumping social et fiscal sur nos États providences, sur nos systèmes sociaux, sur la protection des salariés qui nous demanderont à nous tous des comptes. Et que répondrons-nous, chers camarades, à ces salariés, ces citoyens désorientés, convaincus que le politique est désormais impuissant, pas seulement sur le plan national, mais aussi certainement sur le plan européen, lorsque nous expliquerons que la Constitution européenne ne permet pas d'intervenir, pas tout de suite, peut-être un jour, plus tard ? Donnant ainsi un droit de veto à des pays dont les valeurs, dont les projets, sont aux antipodes des nôtres.
Que répondrons-nous à ces salariés qui demandent chaque jour que la compétition économique entre les systèmes sociaux s'arrête, entre l'Est et l'Ouest ? Que dirons-nous lorsque nous leur dirons que cette Constitution que nous leur avons fait voter paralyse les processus d'harmonisation sociale et fiscale, en tout cas par maintenant et qu'il faudra attendre...
Qu'allons-nous dire à ceux qui, chers camarades, verront malgré ce texte le démantèlement des services publics se poursuivre, ces problèmes sont devant nous.
Et, je veux prendre ici au mot les partisans du oui qui ont eu raison d'expliquer, et nous les approuvions en notre for intérieur, qu'ils faisaient de leur approbation à cette Constitution une condition de la renégociation ultérieure du Traité.
Est-ce que le oui du Parti socialiste de France sera le oui qui exige la renégociation immédiate ? Est-ce que le oui du Parti socialiste de France sera le oui qui porte l'exigence du Traité social ? Est-ce que le oui du Parti socialiste sera le oui de combat pour la renégociation de ce texte s'il est approuvé ? Nous le souhaitons, nous le demandons au nom de ceux qui ont exprimé un non tout en étant, comme nous tous ici, désireux de poursuivre la construction européenne.
En cas d'échec, comme de succès, de la ratification dans d'autres pays de l'Union européenne, nous devons être tous ensemble aux avant-postes de l'exigence civique, démocratique et sociale. Cette demande fait partie des conditions de rassemblement de tous les socialistes européens. Et d'ailleurs, à ce titre, elle pose les conditions de la campagne que nous allons mener.
Elle ne peut pas être, François Hollande l'a dit, une campagne aux côtés de la droite. Notre Premier Secrétaire a, je crois, indiqué que, si le Président de la République instrumentalisait, à des fins de politique intérieure, la campagne, il n'était pas exclu que nous appelions à voter non. Nous voudrions que soit établi très vite, afin que nul n'en ignore, surtout au Palais de l'Élysée, le cahier des charges de ce non de représailles possible et qui pèsera sur les conditions dans lesquelles la droite se positionne dans cette affaire. Mais il faudra, chers camarades, bien assumer l'articulation entre le projet et la Constitution. Pour nous, ce texte ne peut être un référent contraignant du projet et au projet, qui risquerait d'ensevelir l'ensemble des produits que nous pourrions porter devant nos électeurs.
C'est bien d'abord le projet et ensuite la Constitution s'il faut la renégocier sur les points qui nous feraient entrer en contradiction avec nos aspirations et les contraintes de la Constitution européenne. Nous identifierons donc, au moment de la construction de notre projet, et tous ensemble, et pendant que se déroulera la campagne de ratification dans les 25 pays de l'Union européenne, les points de combat pour la renégociation du texte. Et ils seront d'ailleurs des éléments structurants de notre projet diplomatique européen au sein de l'Union dans les années qui viennent.
Ce sont des points d'exigence que nous aurons à faire connaître à nos partenaires socialistes européens, qu'ils soient dans les gouvernements ou dans les oppositions.
D'ailleurs, certains dirigeants politiques de ces pays doivent s'attendre à ce que nous leur rendions quelques visites au moment de leur campagne de ratification, afin que nous allions porter les points d'exigence de la diplomatie socialiste qui auront conditionné l'approbation des socialistes français à ce traité.
J'ai déjà réservé des billets de train pour aller au Danemark chez notre ami Rasmussen. Quant à Tony Blair, ma chambre d'hôtel est déjà prête à Londres. S'agissant de notre ami Zapatero, il se trouve que je parle un tout petit peu l'espagnol.
Part en Europe, chers camarades, nous porterons l'exigence de la rediscussion du Traité comme condition d'approbation de ce texte. Et nous en porterons, si vous nous le permettez, témoignage devant les peuples de gauche européens.
C'est là, chers camarades, la garantie que nous resterons unie et combatifs pour vaincre la droite française, occuper l'espace laissé vacant à gauche, et poursuivre ensemble la construction de l'Europe politique, démocratique et sociale.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 6 décembre 2004)
Et c'est une idée qui, le temps passant, sera une idée qui appartiendra à tous les socialistes européens car le moment, comme au moment de la fondation de la République, vient de la différenciation. Une fois l'objet construit, il nous revient à faire prévaloir nos orientations respectives, droite contre gauche, programme contre programme.
Dans ce référendum, nous avons voulu, chers camarades, respecter l'honnêteté intellectuelle du débat en travaillant le texte dans les profondeurs de ses conséquences. Nous avons voulu nous prémunir contre la personnalisation du débat, d'où qu'elle vienne. Et nous nous sommes refusés à toute tentation plébiscitaire étrangère à notre tradition démocratique.
Ce référendum, nous l'avions demandé, nous l'avons perdu et nous en respectons le résultat. Nous nous rangerons au choix majoritaire des militants, c'est là notre patriotisme de Parti à nous. Il n'y a là, chers camarades, nulle affaire de conscience, laquelle s'exprimera librement dans l'isoloir que la République met à notre disposition.
Il y a là une question de responsabilité politique à l'égard du Parti que des générations ont mis dans d'énergie à bâtir et que nous devons préserver dans la loyauté des membres qui le forment, dans l'unité qu'il doit toujours constituer face à nos adversaires.
J'en profite ici, pardonnez-moi d'être sincères, ceux qui ont reconnu notre sincérité et notre constance dans la critique de l'orientation excessivement libérale de la construction européenne, je rends aussi un hommage amical à ceux qui, bien qu'étant partisans du oui, ont reconnu souvent dans les débats fédéraux et de section, que nos arguments étaient justes et posaient des problèmes qu'on sait pour l'avenir de l'Europe et de la France.
Je remercie également ceux qui, comme nous, pensaient que nous étions dans un débat où nous savions au fond de nous-mêmes que tout le monde avait un peu raison et un peu tort à la fois ; et que le désir que nous avions nous-mêmes, de voter cette Constitution, que notre conscience empêchait d'approuver, s'équilibrait souvent par celle des camarades qui expliquaient qu'ils pouvaient ne pas voter ce texte tout en reconnaissant l'immensité des problèmes que cette Constitution posait à nous, socialistes.
Dans ce formidable dédoublement de notre personnalité collective, il y a, dans des proportions différentes, chers camarades, en chacun d'entre nous, un morceau de oui et un morceau de non.
D'ailleurs, la solution choisie par la totalité des militants laisse subsister des problèmes considérables qu'il va falloir affronter. Et c'est, chers camarades, côte à côte et non face à face que les camarades du oui et du non vont devoir précisément affronter ces problèmes : la crise sociale n'a aucune raison de cesser de s'approfondir après ce vote. La paralysie budgétaire de l'Union européenne, l'impossible solidarité avec les dix pays nouvellement entrants sur le plan budgétaire, la déstructuration budgétaire de l'Union européenne attendue entre, d'un côté, ceux qui ont des besoins énormes à financer, et ceux qui ne veulent plus payer, le rattrapage économique et social qui accroîtra inévitablement, et peut-être de façon plus spectaculaire qu'on ne le croit, la pression du dumping social et fiscal sur nos États providences, sur nos systèmes sociaux, sur la protection des salariés qui nous demanderont à nous tous des comptes. Et que répondrons-nous, chers camarades, à ces salariés, ces citoyens désorientés, convaincus que le politique est désormais impuissant, pas seulement sur le plan national, mais aussi certainement sur le plan européen, lorsque nous expliquerons que la Constitution européenne ne permet pas d'intervenir, pas tout de suite, peut-être un jour, plus tard ? Donnant ainsi un droit de veto à des pays dont les valeurs, dont les projets, sont aux antipodes des nôtres.
Que répondrons-nous à ces salariés qui demandent chaque jour que la compétition économique entre les systèmes sociaux s'arrête, entre l'Est et l'Ouest ? Que dirons-nous lorsque nous leur dirons que cette Constitution que nous leur avons fait voter paralyse les processus d'harmonisation sociale et fiscale, en tout cas par maintenant et qu'il faudra attendre...
Qu'allons-nous dire à ceux qui, chers camarades, verront malgré ce texte le démantèlement des services publics se poursuivre, ces problèmes sont devant nous.
Et, je veux prendre ici au mot les partisans du oui qui ont eu raison d'expliquer, et nous les approuvions en notre for intérieur, qu'ils faisaient de leur approbation à cette Constitution une condition de la renégociation ultérieure du Traité.
Est-ce que le oui du Parti socialiste de France sera le oui qui exige la renégociation immédiate ? Est-ce que le oui du Parti socialiste de France sera le oui qui porte l'exigence du Traité social ? Est-ce que le oui du Parti socialiste sera le oui de combat pour la renégociation de ce texte s'il est approuvé ? Nous le souhaitons, nous le demandons au nom de ceux qui ont exprimé un non tout en étant, comme nous tous ici, désireux de poursuivre la construction européenne.
En cas d'échec, comme de succès, de la ratification dans d'autres pays de l'Union européenne, nous devons être tous ensemble aux avant-postes de l'exigence civique, démocratique et sociale. Cette demande fait partie des conditions de rassemblement de tous les socialistes européens. Et d'ailleurs, à ce titre, elle pose les conditions de la campagne que nous allons mener.
Elle ne peut pas être, François Hollande l'a dit, une campagne aux côtés de la droite. Notre Premier Secrétaire a, je crois, indiqué que, si le Président de la République instrumentalisait, à des fins de politique intérieure, la campagne, il n'était pas exclu que nous appelions à voter non. Nous voudrions que soit établi très vite, afin que nul n'en ignore, surtout au Palais de l'Élysée, le cahier des charges de ce non de représailles possible et qui pèsera sur les conditions dans lesquelles la droite se positionne dans cette affaire. Mais il faudra, chers camarades, bien assumer l'articulation entre le projet et la Constitution. Pour nous, ce texte ne peut être un référent contraignant du projet et au projet, qui risquerait d'ensevelir l'ensemble des produits que nous pourrions porter devant nos électeurs.
C'est bien d'abord le projet et ensuite la Constitution s'il faut la renégocier sur les points qui nous feraient entrer en contradiction avec nos aspirations et les contraintes de la Constitution européenne. Nous identifierons donc, au moment de la construction de notre projet, et tous ensemble, et pendant que se déroulera la campagne de ratification dans les 25 pays de l'Union européenne, les points de combat pour la renégociation du texte. Et ils seront d'ailleurs des éléments structurants de notre projet diplomatique européen au sein de l'Union dans les années qui viennent.
Ce sont des points d'exigence que nous aurons à faire connaître à nos partenaires socialistes européens, qu'ils soient dans les gouvernements ou dans les oppositions.
D'ailleurs, certains dirigeants politiques de ces pays doivent s'attendre à ce que nous leur rendions quelques visites au moment de leur campagne de ratification, afin que nous allions porter les points d'exigence de la diplomatie socialiste qui auront conditionné l'approbation des socialistes français à ce traité.
J'ai déjà réservé des billets de train pour aller au Danemark chez notre ami Rasmussen. Quant à Tony Blair, ma chambre d'hôtel est déjà prête à Londres. S'agissant de notre ami Zapatero, il se trouve que je parle un tout petit peu l'espagnol.
Part en Europe, chers camarades, nous porterons l'exigence de la rediscussion du Traité comme condition d'approbation de ce texte. Et nous en porterons, si vous nous le permettez, témoignage devant les peuples de gauche européens.
C'est là, chers camarades, la garantie que nous resterons unie et combatifs pour vaincre la droite française, occuper l'espace laissé vacant à gauche, et poursuivre ensemble la construction de l'Europe politique, démocratique et sociale.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 6 décembre 2004)