Déclaration de Mme Nicole Ameline, ministre de la parité et de l'égalité professionnelle, sur les quatre grands axes de l'action du ministère de la parité et de l'égalité professionnelle pour le premier semestre 2005, Paris le 13 janvier 2005.

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Texte intégral

L'action du ministère de la parité et de l'égalité professionnelle s'organisera autour de quatre axes :
I. L'ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE
Ce sera le thème fort des trois premiers mois, sous le signe des propos tenus par le Président de la République, lors de la cérémonie des voeux aux forces vives "Il faut plus d'égalité. L'an passé, j'avais appelé les partenaires sociaux à négocier sur l'égalité entre les femmes et les hommes dans l'entreprise. Un accord interprofessionnel a été conclu. Il pose des principes et des objectifs intéressants. Nous devons, ensemble, aller plus loin. C'est pourquoi je demande au Gouvernement de présenter sans tarder un projet de loi pour que les accords d'entreprise fixent des objectifs chiffrés, en vue de parvenir à l'égalité salariale dans un délai maximum de cinq ans."
Ce thème se situe également dans le cadre du contrat France 2005 porté par le Premier ministre, à la fois en termes d'emploi et d'égalité des chances, mais qui apparaît aussi en filigrane dans un grand nombre de chantiers de l'action gouvernementale pour 2005. A titre d'exemple : la question du travail des seniors (les femmes de plus de 50 ans sont particulièrement concernées), les dispositions visant à faciliter la transmission d'entreprise (les femmes vont jouer un rôle central dans la reprise d'entreprises).
Les enjeux
Parce que l'économie française a besoin de tous ses talents et que la diversité est facteur de richesse, parce que le retournement à venir du nombre d'actifs exige de recourir à ce potentiel féminin de main d'oeuvre qualifié, le travail des femmes, est un élément essentiel de performance économique et de cohésion sociale. Au XXIe siècle, les femmes travaillent et ce modèle français conciliant un fort taux d'activité des femmes et un taux de fécondité le plus élevé d'Europe est à préserver et à promouvoir. Plus les femmes travaillent, mieux elles travaillent et plus elles ont des enfants.
Les actions
1. La rédaction d'un projet de loi sur l'égalité salariale et professionnelle qui sera prochainement présenté au Conseil des ministres.
L'égalité salariale est la première condition de l'égalité professionnelle, la réussite d'une telle démarche conditionne l'attractivité des entreprises au moment où elles vont devoir compenser les départs à la retraite qui sont incontournables.
Au-delà de cette question des salaires, celle de l'accès à la formation professionnelle continue, à l'apprentissage et de l'accès aux postes à responsabilité, ainsi que la reconnaissance de la parentalité au sein des entreprises, déjà amorcée par la création du crédit d'impôt famille et le développement des crèches interentreprises seront pris en compte :
L'écart de rémunération est évalué par l'INSEE à 22 % ; mais, toutes choses égales par ailleurs, l'écart se réduit à 6 %. Les éléments d'explication tiennent à :
- une formation des femmes et une expérience moins valorisées que pour les hommes,
- un mode d'insertion professionnelle privilégiant de fait l'emploi des femmes en CDD et temps partiel : leur rémunération est donc structurellement inférieure,
- une présence forte dans les secteurs les moins rémunérateurs (par exemple textiles, emplois de service à la personne)
- enfin par un accès très restreint aux emplois de responsabilité.
2. Le label égalité
Le label égalité, marque distinctive des entreprises qui ont fait le choix d'intégrer la préoccupation de l'égalité dans la gestion des ressources humaines, la fourniture de services aux familles et la gestion des temps, a été lancé en juin 2004. Symbole de "l'exemplarité gagnante", ce label, décerné par un organisme d'accréditation, l'AFAQ, crée un élan vers la prise en compte de la diversité comme source d'enrichissement collectif.
Les premiers labels seront décernés en février prochain.
A noter qu'un répertoire des bonnes pratiques en matière d'égalité a été élaboré à destination des entreprises.
3. Le tour de France
Suite à la signature, à l'unanimité, en mars 2004 d'un accord national interprofessionnel sur l'égalité professionnelle, et dans le cadre de la poursuite du dialogue social avec les entreprises, a été engagé, avec l'ensemble des partenaires sociaux, un tour de France de l'égalité qui réunit tous les acteurs du monde économique. Cette pratique, sans précédent jusqu'alors, témoigne de la force de l'engagement pour l'égalité. Après Rennes, Orléans, Lille, Caen, il aura lieu à Strasbourg le 21 février, et à Paris le 10 mars.
4. Le statut du "conjoint collaborateur"
Les conjoints (600 000 environ dont à peine un quart ont choisi un statut) sont quasi exclusivement des conjointes, se trouvent confrontées à l'absence de statut social et sont en situation de précarité dès qu'il arrive un "accident de la vie". Ainsi le projet préparé par mon collègue, Christian Jacob, permettra aux conjointes d'être protégées par un statut et d'avoir accès à des droits propres. Elles doivent pouvoir valider leur expérience professionnelle, ne pas être empêchées par des règlements professionnels de poursuivre l'activité de l'entreprise qu'elles doivent reprendre en charge, ni être empêchées par des clauses de circonstances de développer une nouvelle activité.
5. La formation initiale
Hier, en conseil des ministres, mon collègue François Fillon a présenté la loi d'orientation sur l'école. L'école est l'un des premiers lieux où se construit l'égalité hommes/femmes.
Dans le domaine des sciences, ce problème est crucial : une baisse de 10 000 bacheliers scientifiques par an est constatée, et ce déficit de scientifiques va se révéler critique face aux enjeux auxquels l'Europe se trouve confrontée. Les jeunes filles représentent 45 % des terminales "S" et 23 % des classes supérieures hors biologie.
A ma demande, les sujets suivants seront pris en compte dans la loi d'orientation sur l'école et le rapport annexé,
* diversification des choix d'orientation des jeunes filles et notamment vers les filières scientifiques et techniques, avec la fixation d'un objectif chiffré de progression,
* l'apprentissage du respect de l'autre et notamment de l'autre sexe pour lutter contre les violences scolaires et les stéréotypes sexistes. A cet égard, un travail de sensibilisation des éditeurs de manuels scolaires sera mené en 2005.
A noter que la question de la sensibilisation et de la formation des éducateurs et notamment des maîtres aux questions de l'égalité et de la mixité, sera traitée dans le cadre de la modification du cahier des charges des IUFM.
II. L'EUROPE ET LE MONDE
1. "Partenaires pour Pékin + 10"
Les défis sont aujourd'hui globaux, et les réponses doivent s'exprimer à l'échelle mondiale, condition de la stabilité et de la sécurité non seulement des pays en voie de développement, mais aussi des pays développés. Les rendez-vous internationaux prévus par les Nations-Unies en 2005 seront déterminants pour réaffirmer les engagements de la France quant à la promotion des droits des femmes dans le monde.
à l'occasion du dixième anniversaire de la Conférence mondiale des femmes à Pékin en 1995. La 49ème session de la Commission de la Condition de la Femme, fin février 2005, à New York, au siège des Nations Unies, réaffirmera toute la modernité de la " Plate-forme de Pékin" quant aux enjeux que traversent aujourd'hui les grands débats du XXIe siècle : lutte contre la féminisation de la pauvreté dans le monde, lutte contre les violences faites aux femmes, notamment dans les conflits armés, défense des droits reproductifs et accès aux services de santé, sauvegarde de notre planète et développement durable, accès à des emplois décents, garantie des droits civils de la personne humaine, représentativité des femmes dans les instances de décisions.
A l'occasion du bilan intermédiaire des "Objectifs du Millénaire pour le Développement" en septembre 2005, à New York, pour que la place des femmes dans le développement économique, social, durable, soit clairement identifiée : le thème de l'égalité des sexes et de sa prise en compte transversale dans l'ensemble des objectifs du millénaire et celui de la nécessaire autonomisation des femmes sont ainsi rappelés avec force. Mais il faut aller plus loin.
Aussi, dès le 14 octobre dernier, lancement de l'initiative "Partenaires Pour Pékin plus 10" aux Nations Unies.
Cette initiative consiste à sensibiliser plusieurs cercles de partenaires sur l'importance des échéances de 2005 pour les droits des femmes et à parvenir à une dynamique de rassemblement pour que les acquis et les valeurs fondamentales contenues dans la Plate-forme de Pékin soient réaffirmés avec force et inscrits dans une démarche d'avenir tant à l'occasion de la célébration du dixième anniversaire de la Conférence mondiale,début mars, qu'à l'occasion du bilan du Sommet du Millénaire portant sur le développement, en septembre.
De nombreux contacts ont été pris, tant au niveau de la francophonie qu'au niveau européen.
Une prochaine réunion des ministres de l'égalité de l'union européenne, au Luxembourg les 3 et 4 février prochain permettra de consolider le partenariat sur cette question.
Enfin, le Forum Social de Porto Alegre, du 27 au 31 janvier 2005, sera l'occasion de rencontrer toutes les principales ONG qui oeuvrent dans le champ de l'égalité pour les faire adhérer à la dynamique de rassemblement "Partenaires pour Pékin + 10".
2. L'Europe : un engagement dans la campagne d'information et de mobilisation des femmes dans le cadre du referendum sur le Traité constitutionnel.
La valeur de l'égalité entre les femmes et les hommes est consacrée dans le Traité comme valeur de l'Union, ce qui confirme le rôle déterminant et volontariste de l'Europe dans les politiques d'égalité.
- Car, l'Europe, ce sont des normes qui protègent, notamment par de nombreuses directives qui garantissent l'égalité de traitement sur le marché du travail ;
- Car, l'Europe, ce sont des politiques de convergence qui, en matière de lutte pour l'inclusion, de retraites, de formation et de recherche.
- Car, l'Europe, c'est de multiples financements dédiés spécifiquement à la prise en compte des femmes dans les politiques publiques : fonds structurels et notamment le FSE comprenant un objectif 5 dédié aux actions de promotion des femmes dans l'emploi, cinquième programme en faveur de l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, programme DAPHNE pour lutter contre les violences faites aux femmes ;
- Car, l'Europe, ce sont aussi des réseaux puissants de femmes ainsi que des structures dédiées à leur promotion. A noter le Lobby européen des femmes mais aussi le futur Institut du Genre.
A la veille d'un enjeu européen essentiel, la mobilisation en faveur du Traité doit donc inclure une action forte pour et avec les femmes, qui seront, elles aussi, des relais d'opinions majeurs, dans les familles et auprès des jeunes, afin de faire connaître les atouts et les enjeux essentiels du Traité.
Dans cette perspective, au cours du premier semestre 2005, se tiendra un grand rassemblement "1000 femmes pour l'Europe", pour rassembler tous les talents féminins, français et européens, qui oeuvrent quotidiennement pour les femmes et pour l'Europe.
III. CITOYENNETÉ RÉPUBLICAINE
1. Les violences
C'est là un combat central de mon ministère auquel j'ai voulu donner une dimension nouvelle avec le plan d'action " 10 mesures pour l'autonomie des femmes " que j'ai présenté en Conseil des ministres à l'occasion du 25 novembre dernier, journée internationale pour l'élimination de la violence faite aux femmes. Au-delà d'une légitime compassion, il s'agit d'aider la femme victime de violences conjugales à retrouver son autonomie, à se reconstruire. Elle décidera plus facilement de briser son enfermement si elle sait comment franchir l'ensemble des obstacles consécutifs à la rupture. A partir de janvier 2005 la mesure d'éviction du conjoint violent est effective.
Ce plan apporte des réponses de proximité en termes d'hébergement, d'informations sur les aides financières, de droits au chômage indemnisé, de soins et d'accès en justice. Parallèlement la sécurité des victimes sera améliorée par des mesures juridiques mais aussi des outils de sécurisation.
Les associations, qui sont un vecteur essentiel de l'accueil et de l'accompagnement des femmes victimes, bénéficieront d'un soutien financier particulièrement conséquent. Une augmentation de 20 % des subventions est prévue.
Enfin, la prévention sera renforcée, dès l'école par la sensibilisation des élèves aux violences sexistes et à la mixité scolaire comme mode d'apprentissage de l'égalité et du respect de l'autre.
2. Les femmes de l'immigration
Le respect de soi, de l'autre, est l'armature de chacun de mes dossiers puisqu'il est l'un des piliers de la réalisation de l'égalité entre les hommes et les femmes, l'objectif général de mes missions.
C'est pourquoi la démarche de la valorisation de la personne, de l'individu comme sujet de droit nous permettra d'atteindre le but poursuivi. En 2005, cette égalité ne devrait pas être un privilège réservé. Les femmes immigrées, ou issues de l'immigration et leurs filles vivent pourtant la double discrimination liée au sexe et à l'origine.
Un groupe de travail co-présidé par Dominique PERBEN, Ministre de la justice prend donc en charge depuis septembre 2004 la question des mariages forcés, des mutilations sexuelles féminines mais aussi les moyens de favoriser les parcours de réussite et d'assurer aux femmes de l'immigration le plein exercice de la citoyenneté.
Il convient de valoriser les femmes de l'immigration parce qu'elles représentent un remarquable gisement de talents.
Le 8 mars prochain sera une magnifique occasion de s'interroger sur les valeurs républicaines que nous voulons partager : égalité, respect, justice pour toutes et tous en cette année où sera célébré le centenaire de la loi qui a instauré la laïcité comme le socle républicain de notre citoyenneté.
La laïcité nous conforte dans l'acceptation de l'autre : avec ses origines, son passé, sa religion, son sexe. C'est la somme de toutes ces différences qui, dès l'école, enseigne la solidarité et assure un présent et un futur plus ouverts à l'Europe et au monde.
Parallèlement, les liens avec les pays du Maghreb ont été renforcés.
La France a amené Nicole Ameline à mettre en place un groupe de travail franco-marocain afin d'accompagner les applications de la réforme du code de la Famille.
Un voyage en Algérie a été programmé pour mars 2005
3. La lutte contre le sexisme
La loi réprimant le propos sexistes
Le 22 décembre dernier, les femmes ont vécu un moment historique, attendu depuis trente ans, avec le vote de la loi, créant la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE), et des amendements gouvernementaux relatifs à la répression des propos discriminatoires à raison du sexe et de l'orientation sexuelle.
Instaurer, comme en matière de racisme, la répression des injures, des diffamations et des provocations à la discrimination, à la haine et à la violence sexistes démontre, là encore, l'engagement du gouvernement à défendre le respect de la dignité de la personne humaine.
Désormais, les femmes et les associations des droits des femmes pourront s'élever avec succès contre les paroles ou les messages violents à leur endroit.
Toutes les formes de violence dont aucune n'est admissible sont désormais répréhensibles. Ce texte, dont il faut souligner le caractère novateur, va entraîner nécessairement une prise de conscience, un changement des mentalités dans le sens d'une meilleure approche de l'égalité.
Le travail plus particulier de l'image des femmes dans la publicité
Les différentes formes de violences exercées le plus souvent par des hommes et contre des femmes traduisent une vision et une conception inégalitaire et passéiste des rôles respectifs des hommes et des femmes. Et c'est bien là que la question de la publicité sexiste se pose avec toute son acuité, car la représentation faite des femmes dans les visuels et les slogans publicitaires imprègne chacun d'entre nous. La publicité est un reflet de notre société, dont elle a parfois tendance à anticiper ou à exagérer les tendances et les évolutions.
Une réflexion et une concertation ont été engagées avec les professionnels de la publicité peu après mon entrée en fonctions. Ces professionnels se sont montrés dès le départ très responsables et très désireux de faire avancer l'égalité hommes femmes dans la publicité. Grâce à leur participation, cette démarche a abouti à la signature d'une déclaration commune avec le Bureau de Vérification de la Publicité le 27 novembre 2003.
Cette déclaration commune prévoyait notamment l'ouverture d'un espace de libre expression sur le thème de la publicité sexiste.
La concertation avec les professionnels se poursuit et un bilan des observations reçues sera présenté dans les prochaines semaines.
Le 18 janvier prochain, une réunion avec le Bureau de Vérification de la Publicité sera organisée. A cette occasion, sera présenté le rapport public sur l'espace public de débat sur la publicité sexiste.
4. Les femmes et le sida
Au niveau mondial, 40 millions de personnes ont le virus du sida dont désormais près de la moitié là encore, sont des femmes. En France, on a constaté cette même progression au féminin puisqu'il y a dix ans, elles ne constituaient que 20 % des cas.
C'est pourquoi, je participerai activement à ce combat contre le sida qui a été déclaré Grande cause nationale pour 2005 par le Premier Ministre. Seule une grande mobilisation générale sera de nature à combattre les assauts de cette épidémie et c'est en promouvant, là aussi, une pédagogie de la responsabilité que les femmes seront mieux armées pour obtenir de leur partenaire des rapports sexuels protégés.
IV. LA PARITÉ POLITIQUE
Bilan sur la loi du 6 juin 2000 et lancement de la charte de la parité politique
Dans quelques mois, nous célèbrerons le cinquième anniversaire de la loi du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.
Depuis son adoption, toutes les instances ont été renouvelées, au niveau national comme au niveau local. Le moment est donc venu d'établir un bilan et c'est pourquoi, le 2 février prochain, un rapport complet sur l'application de cette loi sera présenté.
Dans le prolongement du rapport, j'ai l'intention de rendre public un projet de charte de la parité, au sujet duquel j'auditionnerai les responsables des partis politiques.



(Source http://www.social.gouv.fr, le 1er mars 2005)