Texte intégral
Ce débat est un débat fondamental en ce sens qu'il porte sur la République, sur ses valeurs essentielles et sur les droits de la personne.
Notre République est laïque, en vertu d'un choix des Français, en vertu du pacte qui les unit. Cependant, il arrive qu'à l'étranger, on comprenne mal la signification de cette notion de laïcité. Je commencerai donc par poser que la laïcité n'est pas un combat : elle est le respect. De ce point de vue, et au risque de surprendre, je serais prêt à souscrire à la définition qu'en donne le pape Jean-Paul II, " la laïcité est le respect de toutes les croyances de la part de l'Etat, qui assure le libre exercice des activités spirituelles, cultuelles et caritatives des communautés de croyants ", étant entendu que sont concernées là toutes les religions, y compris l'islam, grande religion de France - et je veux redire ici ce que j'ai dit au Bureau du Conseil français du culte musulman : cette loi n'est pas une loi de combat contre l'islam.
Mais la laïcité, c'est aussi la séparation entre la sphère politique et la sphère religieuse. L'idée est ancienne - " rendons à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu "-, mais s'est cristallisée à la fin du XIXe et au début du XXe siècle à la faveur d'un rude conflit avec l'Eglise catholique, conflit heureusement révolu. Au XXIe siècle, elle nous fait obligation, à nouveau, de refuser tout mélange du politique et du religieux, toute conception théocratique du pouvoir politique, tout envahissement de la religion par des menées politiques
Or, ce n'est pas faire preuve de paranoïa que de dire que nous sommes aujourd'hui confrontés à la montée d'un fanatisme politico-religieux qui veut faire de la loi religieuse la loi civile et fonder sur la foi la légitimité du pouvoir politique. Cette conception est incompatible avec la République ! (Même mouvement) Elle conduit à des dérives inacceptables : antisémitisme, révisionnisme et négationnisme historiques, racisme, auxquelles nous devons donner un coup d'arrêt.
Cette loi n'y suffira pas, nous objecte-t-on, et c'est un fait. Mais ce n'est pas parce qu'elle ne sera pas suffisante qu'elle n'est pas nécessaire. Elle constitue en effet un signal, un symbole et elle s'applique à des lieux qu'il s'impose de protéger particulièrement car les enfants y forment leur conscience, leur esprit critique, leur libre arbitre.
Cette loi vise un prosélytisme religieux dont la proximité avec le militantisme politique est avérée. Mais elle doit être appliquée dans un esprit de dialogue et d'apaisement car, je le répète, la laïcité n'est pas le combat, mais le respect. L'histoire de la loi de 1905, devenue loi de référence pour ceux mêmes qui l'avaient farouchement combattue, montre qu'une évolution est possible.
Une seconde valeur de la République est aujourd'hui mise en cause : l'égalité des sexes et la dignité de la femme. Nous avons tous entendu dans nos rues des femmes musulmanes protester contre une interdiction du voile où elles voient une stigmatisation. Mais il ne s'agit pas d'interdire le port du voile : seulement d'établir des espaces de neutralité et de paix où l'affirmation ostensible de l'appartenance religieuse ne peut trouver place. D'autre part, si l'on commence à écouter la rue, il faut tout entendre et, notamment, entendre ces femmes musulmanes qui demandaient : " Aidez-nous à résister aux pressions qu'on exerce sur nous lorsque nous refusons de nous voiler. Aidez-nous à partager les valeurs de la République ! ".La République ne peut rester sourde à cet appel, d'autant que notre réponse est attendue dans le monde. On nous a beaucoup répété que nous allions choquer le monde arabo-musulman mais, pour m'être rendu récemment dans le Maghreb, j'ai entendu beaucoup d'hommes et de femmes qui attendaient de nous un signal - surtout parmi ceux qui ont payé un lourd tribut au fanatisme religieux, comme en Algérie. Ces hommes et ces femmes comptent sur la France pour rappeler les grands principes des Lumières et le principe de laïcité.
Loi nécessaire mais non suffisante : notre action ne peut être purement défensive. Quelle crédibilité aurait notre discours sur la laïcité comme respect de toutes les convictions religieuses si, dans le même temps, nous laissions perdurer d'insupportables discriminations - dans le logement, dans l'emploi, dans les loisirs mêmes. Le délit de sale gueule existe dans notre société, hélas ! C'est pourquoi nous devons, en même temps que nous légiférons, mettre en place une haute autorité chargée d'assurer l'intégration et l'égalité républicaine des chances.
Ce texte a été préparé de manière exemplaire et je veux rendre hommage à la commission Stasi ainsi qu'à la mission parlementaire. Nous pouvons nous appuyer sur une vraie concertation, un dialogue. D'où une loi d'équilibre. Je formulerai donc un voeux pour conclure : puissions-nous, pour une fois, dépasser les clivages partisans ! Un vote massif constituerait le meilleur signal de cohésion et de détermination républicaine que nous puissions adresser à la nation tout entière !
(Source http://www.u-m-p.org, le 9 février 2004)
Notre République est laïque, en vertu d'un choix des Français, en vertu du pacte qui les unit. Cependant, il arrive qu'à l'étranger, on comprenne mal la signification de cette notion de laïcité. Je commencerai donc par poser que la laïcité n'est pas un combat : elle est le respect. De ce point de vue, et au risque de surprendre, je serais prêt à souscrire à la définition qu'en donne le pape Jean-Paul II, " la laïcité est le respect de toutes les croyances de la part de l'Etat, qui assure le libre exercice des activités spirituelles, cultuelles et caritatives des communautés de croyants ", étant entendu que sont concernées là toutes les religions, y compris l'islam, grande religion de France - et je veux redire ici ce que j'ai dit au Bureau du Conseil français du culte musulman : cette loi n'est pas une loi de combat contre l'islam.
Mais la laïcité, c'est aussi la séparation entre la sphère politique et la sphère religieuse. L'idée est ancienne - " rendons à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu "-, mais s'est cristallisée à la fin du XIXe et au début du XXe siècle à la faveur d'un rude conflit avec l'Eglise catholique, conflit heureusement révolu. Au XXIe siècle, elle nous fait obligation, à nouveau, de refuser tout mélange du politique et du religieux, toute conception théocratique du pouvoir politique, tout envahissement de la religion par des menées politiques
Or, ce n'est pas faire preuve de paranoïa que de dire que nous sommes aujourd'hui confrontés à la montée d'un fanatisme politico-religieux qui veut faire de la loi religieuse la loi civile et fonder sur la foi la légitimité du pouvoir politique. Cette conception est incompatible avec la République ! (Même mouvement) Elle conduit à des dérives inacceptables : antisémitisme, révisionnisme et négationnisme historiques, racisme, auxquelles nous devons donner un coup d'arrêt.
Cette loi n'y suffira pas, nous objecte-t-on, et c'est un fait. Mais ce n'est pas parce qu'elle ne sera pas suffisante qu'elle n'est pas nécessaire. Elle constitue en effet un signal, un symbole et elle s'applique à des lieux qu'il s'impose de protéger particulièrement car les enfants y forment leur conscience, leur esprit critique, leur libre arbitre.
Cette loi vise un prosélytisme religieux dont la proximité avec le militantisme politique est avérée. Mais elle doit être appliquée dans un esprit de dialogue et d'apaisement car, je le répète, la laïcité n'est pas le combat, mais le respect. L'histoire de la loi de 1905, devenue loi de référence pour ceux mêmes qui l'avaient farouchement combattue, montre qu'une évolution est possible.
Une seconde valeur de la République est aujourd'hui mise en cause : l'égalité des sexes et la dignité de la femme. Nous avons tous entendu dans nos rues des femmes musulmanes protester contre une interdiction du voile où elles voient une stigmatisation. Mais il ne s'agit pas d'interdire le port du voile : seulement d'établir des espaces de neutralité et de paix où l'affirmation ostensible de l'appartenance religieuse ne peut trouver place. D'autre part, si l'on commence à écouter la rue, il faut tout entendre et, notamment, entendre ces femmes musulmanes qui demandaient : " Aidez-nous à résister aux pressions qu'on exerce sur nous lorsque nous refusons de nous voiler. Aidez-nous à partager les valeurs de la République ! ".La République ne peut rester sourde à cet appel, d'autant que notre réponse est attendue dans le monde. On nous a beaucoup répété que nous allions choquer le monde arabo-musulman mais, pour m'être rendu récemment dans le Maghreb, j'ai entendu beaucoup d'hommes et de femmes qui attendaient de nous un signal - surtout parmi ceux qui ont payé un lourd tribut au fanatisme religieux, comme en Algérie. Ces hommes et ces femmes comptent sur la France pour rappeler les grands principes des Lumières et le principe de laïcité.
Loi nécessaire mais non suffisante : notre action ne peut être purement défensive. Quelle crédibilité aurait notre discours sur la laïcité comme respect de toutes les convictions religieuses si, dans le même temps, nous laissions perdurer d'insupportables discriminations - dans le logement, dans l'emploi, dans les loisirs mêmes. Le délit de sale gueule existe dans notre société, hélas ! C'est pourquoi nous devons, en même temps que nous légiférons, mettre en place une haute autorité chargée d'assurer l'intégration et l'égalité républicaine des chances.
Ce texte a été préparé de manière exemplaire et je veux rendre hommage à la commission Stasi ainsi qu'à la mission parlementaire. Nous pouvons nous appuyer sur une vraie concertation, un dialogue. D'où une loi d'équilibre. Je formulerai donc un voeux pour conclure : puissions-nous, pour une fois, dépasser les clivages partisans ! Un vote massif constituerait le meilleur signal de cohésion et de détermination républicaine que nous puissions adresser à la nation tout entière !
(Source http://www.u-m-p.org, le 9 février 2004)