Texte intégral
(Déclaration de D. de Villepin lors du point de presse conjoint avec Igor Ivanov, à Moscou, le 23 janvier 2004) :
(...)
Merci, Igor,
Je crois que les trois mots-clés dans la relation entre la Russie et la France sont l'amitié, parce que c'est une relation ancienne fondée sur l'histoire, la géographie et la culture entre nos deux peuples. C'est aussi la confiance et la multiplication des rencontres au plus haut niveau - le président Poutine, le président Chirac, les ministres - les visites et les déplacements, et nous aurons l'occasion de nous rencontrer souvent au cours des prochains mois. C'est aussi la volonté. Nous avons la volonté de travailler ensemble au service d'un nouvel ordre international et c'est ce qui justifie la dynamique de nos relations sur le plan politique, sur le plan économique, sur le plan diplomatique et stratégique. Il y a donc une mobilisation de nos deux pays d'autant plus forte que nous voulons que les relations entre l'Union européenne et la Russie se renforcent.
A l'heure de l'élargissement de l'Union européenne à dix nouveaux Etats, il est très important que l'Europe et la Russie soient mobilisées pour franchir une nouvelle étape dans leurs relations. Et nous voulons aussi, en ce qui nous concerne, que ce partenariat soit le plus global possible : qu'il s'agisse des questions de sécurité, de la lutte contre le terrorisme, la lutte contre la prolifération, la gestion des crises régionales, ou qu'il s'agisse d'économie où nous sommes mobilisés avec nos entreprises qui veulent développer leurs investissements. J'ai eu l'occasion de le constater en rencontrant les entreprises françaises ce matin. Que l'on songe à l'industrie aéronautique, au domaine spatial, à l'énergie ou au secteur agro-alimentaire, il y a une diversité de l'action et de la présence françaises. Qu'il s'agisse enfin de coopération, là encore, dans des domaines très divers : le droit, l'enseignement, les sciences, bien sûr, la langue française, ou dans les domaines très divers où nous voulons multiplier nos champs de coopération.
Q - (Question sur la Tchétchénie.)
R - Si ce que vous voulez dire c'est que la France souhaite que tout soit fait pour rechercher une solution, je crois que nous nous sommes compris, c'est ce que j'ai essayé de dire ce matin, avec la conviction très forte, que pour la diplomatie française, il n'y a pas de solution sécuritaire dans quelque crise que ce soit. C'est pour cela que nous pensons que le processus politique, effectivement, constitue la seule possibilité. Alors, il est bien évident que ce processus politique est difficile, long, qu'il nécessite d'être encouragé et accompagné et qu'il y a, bien évidemment, dans la crise tchétchène - et j'ai essayé ce matin d'en montrer la complexité, la diversité et les composantes -, comme dans toute crise, des drames humains. Il est important d'être mobilisé pour faire en sorte que le règlement le plus rapide, la prise en compte de cette souffrance, soient totalement appréciés et que l'on puisse tout faire pour la soulager. Je crois que c'est là, effectivement, une nécessité. Nous sommes convaincus que c'est seulement dans la voie du dialogue politique, d'un processus politique qui doit continuer de se développer, aller jusqu'à son terme, que peut se trouver une solution. Nous connaissons tous les situations qui sont liées à ce type de crises. Et je crois qu'il est important, effectivement, de continuer d'être mobilisés.
Q - (Question sur le problème palestinien.)
R - En ce qui concerne la partie de votre question sur le Proche-Orient, bien sûr je partage totalement ce que vient de dire Igor Ivanov sur la nécessité de tout faire pour redonner une force au processus de paix grâce à la Feuille de route, éclairée par une perspective ouverte aussi par les accords de Genève. En ce qui concerne la construction du mur, vous connaissez la position de la France, il est question de principes bien sûr, il est question de tracé aussi, puisque cela préempte toute négociation de paix, et donc interfère avec le processus de paix que nous voulons soutenir. En ce qui concerne la position de la France, que nous pourrions être amenés à adopter devant la Cour internationale de justice, vous savez qu'il y a une concertation très étroite qui est en cours entre partenaires européens et nous aurons l'occasion d'évoquer cette question lundi entre ministres lors du Conseil Affaires générales.
Q - (Question sur l'Irak.)
R - Nous avons bien sûr d'abord abordé la question difficile de la stabilisation et de la reconstruction de l'Irak, partant d'une situation qui est celle aujourd'hui d'un vide politique dans ce pays. A partir de la résolution 1511 et de l'accord du 15 novembre, il y a un processus politique qui a été défini. Il est important de le préciser et de le mettre en oeuvre pour pouvoir arriver d'ici au 30 juin de cette année à la pleine souveraineté de l'Irak et à un gouvernement irakien souverain. Il est important, dans cette phase du processus, que les Nations unies puissent jouer tout leur rôle et c'est pour cela que nous soutenons l'idée d'un envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, et que nous soutenons par ailleurs les initiatives prises par le Secrétaire général de l'ONU, qu'il s'agisse de la réunion du 19 janvier avec les forces de la coalition et le Conseil du gouvernement intérimaire, qu'il s'agisse de la réunion d'un groupe de contact avec les représentants de la région et de la communauté internationale. En liaison avec le gouvernement irakien formé, donc, à la fin du mois de juin, nous pensons que le rôle des Nations unies sera amené à s'intensifier. Et c'est pour cela que nous avons évoqué - puisque c'est un projet que nous partageons et que nous soutenons , la Russie et la France - nous soutenons l'idée d'une conférence internationale qui pourrait permettre de rallier l'ensemble des pays de la région, l'ensemble des pays de la communauté internationale, pour traiter toutes les questions difficiles qu'il s'agisse des questions frontalières, des questions des échanges humains, des échanges économiques, des questions de sécurité, terrorisme, prolifération, si importantes dans cette région. En liaison avec le gouvernement irakien qui sera formé, nous avons marqué notre disponibilité à répondre aux besoins qui pourraient s'exprimer dans le domaine de la sécurité concernant la formation de la police, de la gendarmerie ou des forces de sécurité. Nous sommes disponibles, et nous souhaitons, bien évidemment, pouvoir le faire avec un gouvernement irakien souverain qui sera amené le moment venu à dire comment il conçoit la sécurité de l'Irak.
Q - (Question sur la déclaration de M. Powell sur le soutien de la Syrie au Hezbollah.)
R - Je ne serai pas à Moscou au même moment que M. Powell, mais j'aurai beaucoup d'autres occasions de lui parler de cela. Et je peux vous dire que c'est un sujet que nous avons eu l'occasion d'aborder très fréquemment au cours des dernier mois.
Q - (Question sur la loi sur la laïcité.)
R - La France a une vocation. Une vocation ancienne. C'est le pays de la démocratie, des Droits de l'Homme et de la tolérance. Notre République française s'est construite autour d'un principe fort qui est le principe de la laïcité, principe de neutralité, qui n'est pas un principe de méfiance vis-à-vis des croyances et des religions, mais, au contraire, un principe très fort de tolérance. Alors aujourd'hui, nous éprouvons le besoin, face aux difficultés, de réaffirmer et de préciser ce principe à travers une loi, un projet de loi sur la laïcité. Il faut comprendre et je l'ai expliqué partout où je suis allé, il y a quelques jours dans le Golfe. J'ai eu l'occasion de m'entretenir sur votre chaîne, Al Jazira. Je l'ai donc fait dans le Golfe, je le fais aujourd'hui à Moscou. Je crois qu'il est important d'éviter les malentendus ou les incompréhensions sur un sujet aussi important. Cette loi n'est pas dirigée contre une minorité ou une communauté, cette loi veut réaffirmer le principe de laïcité et puisqu'il y a une émotion particulière, que vous avez mentionnée, qui a pu s'exprimer ici et là dans certains pays du monde arabo-musulman, il faut le dire clairement, ce n'est pas une loi qui vise à interdire le voile islamique. C'est une loi qui a pour objectif, dans le cadre de l'école publique en France, de dire qu'aucun signe religieux ostensible ne sera accepté, je le redis, dans le cadre de l'école publique. La France est un pays d'ouverture, nous sommes fidèles à nos valeurs et nous entendons bien sûr, dans ce cadre, que cette loi soit respectueuse de toutes les croyances, de toute religion. Il ne s'agit pas d'une loi dirigée contre une communauté ou l'islam, mais bien au contraire, d'une loi qui a vocation en France, compte tenu de ce principe de laïcité, de permettre à cette tolérance, à ce respect, de pouvoir s'exprimer.
(Source http :www.diplomatie.gouv.fr, le 27 janvier 2004)
(Extraits de l'interview à NTV, à Moscou le 23 janvier 2004) :
Les relations entre la Russie et la France sont très anciennes et fondées sur l'Histoire. Ce sont des relations aussi fondées sur la confiance. Il y a un dynamisme de la relation politique : multiplication des entretiens au plus haut niveau entre le président Poutine et le président Chirac, entre Igor Ivanov et moi-même, entre l'ensemble des ministres. Nous avons un conseil de coopération sur les questions de sécurité, qui est un outil pour évoquer l'ensemble des grands problèmes de sécurité et d'intérêt national russe et français. Nous avons aussi une relation marquée par la volonté, regardez nos relations économiques : je rencontrais ce matin les grands industriels français implantés en Russie. Les perspectives d'échanges, qu'il s'agisse de l'industrie, du commerce, des services, dans tous les domaines font des progrès tout à fait considérables. Et sur le plan diplomatique, nous multiplions aussi les actions en commun. Qu'il s'agisse des grandes crises : l'Irak, le Proche-Orient, qu'il s'agisse des grands défis : le terrorisme, les questions de prolifération, il y a une volonté de la Russie et de la France de travailler ensemble. Nous coopérons dans le domaine aéronautique, dans le domaine spatial, pensez à Soyouz, dans le domaine du développement scientifique et technique, dans les domaines universitaire et culturel. Vous voyez les très nombreux champs de coopération privilégiés qui existent aujourd'hui entre nos deux pays. Oui, il y a bien une ambition entre la Russie et la France. A l'heure de l'élargissement - dix nouveaux entrants dans l'Union européenne - bien sûr, cette volonté de rapprochement entre l'Union européenne et la Russie, prend un nouveau sens. Il est d'autant plus important de rapprocher les points de vue, de resserrer les liens et c'est pourquoi nous voulons relever ce défi, qu'il s'agisse de la libre circulation entre l'Union européenne et la Russie, qu'il s'agisse de la concertation sur les grands dossiers diplomatiques ou de l'action commune sur un certain nombre de crises, qu'il s'agisse d'initiatives que nous pouvons prendre ensemble, Europe et Russie.
Q - Dans quel domaine vous êtes, disons, le moins satisfait. Qu'est-ce que vous voudriez améliorer si évidemment certaines choses ne sont pas suffisamment peaufinées ?
R - Vous savez, nous vivons dans un monde marqué par l'instabilité, marqué par l'imprévisibilité, par l'inquiétude et le danger. On le voit face à la menace terroriste, face au danger de la prolifération, à la montée des crises régionales. Et notre monde est non seulement frappé par l'urgence mais l'est également par l'interdépendance. Toutes les crises sont reliées entre elles. Et il y a donc une profonde solidarité qui existe aujourd'hui entre la France et la Russie et qui justifie notre effort pour l'unité de la communauté internationale. Pour être efficaces, il faut être unis. Pour être unis, il faut être légitimes. Et donc, il y a véritablement une volonté de travailler ensemble aujourd'hui dans tous les domaines.
Q - Quels sont vos principaux entretiens avec votre collègue russe ?
R - Nous avons abordé l'ensemble des questions bilatérales qui nous concernent. Nous avons un grand nombre d'échanges qui sont prévus pour l'année 2004 dans tous les domaines : coopération politique, économique, culturelle. Il y a aussi, bien sûr, les sujets d'intérêts communs, les grandes échéances. Nous avons, sur l'Irak, une situation difficile, un processus politique. Nous partageons la même conviction de la nécessité d'une conférence internationale en Irak qui devrait se dérouler, dès lors qu'il y aurait un gouvernement irakien souverain au 1er juillet de cette année. Nous partageons la conviction également de la nécessité d'initiatives sur le Proche Orient. C'est une crise majeure. Nous avons besoin de redonner vie au Processus de paix, à la Feuille de route, et pour cela, les Russes et les Français veulent se mobiliser. Dans d'autres domaines, la prolifération par exemple, sur la crise iranienne, nous voulons agir ensemble pour essayer justement d'avancer dans le même but. Donc, vous le voyez, quels que soient les sujets, il y a une volonté commune du côté de la Russie et de la France de lever les obstacles. Je pense qu'entre nos deux pays, il y a aujourd'hui une unité de conviction, une confiance très forte, le sentiment qu'ensemble nous pouvons véritablement faire bouger les choses.
Q - La libre circulation des personnes entre l'Union européenne et la Russie est-elle dans vos perspectives ?
R - Tout à fait. Et je crois que c'est véritablement à cela que nous devons travailler. Le Sommet de l'année dernière de Saint-Pétersbourg a marqué une étape considérable dans les relations entre l'Union européenne et la Russie. Nous souhaitons faciliter les relations entre l'Europe et la Russie. Et vous savez que sur un plan bilatéral, Moscou et Paris travaillent directement ensemble pour essayer d'identifier justement le moyen d'aller plus vite. Qu'il s'agisse des "chercheurs", qu'il s'agisse des hommes d'affaires, qu'il s'agisse des étudiants, nous voulons faciliter les relations entre la Russie et la France, entre la Russie et l'Europe. Il faut, bien sûr, que ce travail puisse se faire dans de bonnes conditions, étape par étape, mais c'est bien l'ambition commune que nous avons de faciliter la libre circulation, de faire en sorte que le rapprochement des hommes, des femmes, de l'ensemble de nos deux communautés puissent nous permettre de bâtir un nouvel esprit de l'Europe, un nouvel esprit du continent.
Q - Pour le citoyen lambda, comment cela va-t-il se passer ?
R - Justement, c'est la nécessité d'avancer, d'ouvrir la voie et je crois qu'il est important de marquer l'ambition d'avoir un certain nombre d'étapes : concernant les étudiants, les "chercheurs", les hommes d'affaires. Ces étapes permettent justement d'avancer et à partir de là, je suis convaincu que notre objectif d'ouverture entre nos deux mondes, entre l'Europe, la Russie, permettra justement de lever l'ensemble des obstacles.
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(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 janvier 2004)
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Merci, Igor,
Je crois que les trois mots-clés dans la relation entre la Russie et la France sont l'amitié, parce que c'est une relation ancienne fondée sur l'histoire, la géographie et la culture entre nos deux peuples. C'est aussi la confiance et la multiplication des rencontres au plus haut niveau - le président Poutine, le président Chirac, les ministres - les visites et les déplacements, et nous aurons l'occasion de nous rencontrer souvent au cours des prochains mois. C'est aussi la volonté. Nous avons la volonté de travailler ensemble au service d'un nouvel ordre international et c'est ce qui justifie la dynamique de nos relations sur le plan politique, sur le plan économique, sur le plan diplomatique et stratégique. Il y a donc une mobilisation de nos deux pays d'autant plus forte que nous voulons que les relations entre l'Union européenne et la Russie se renforcent.
A l'heure de l'élargissement de l'Union européenne à dix nouveaux Etats, il est très important que l'Europe et la Russie soient mobilisées pour franchir une nouvelle étape dans leurs relations. Et nous voulons aussi, en ce qui nous concerne, que ce partenariat soit le plus global possible : qu'il s'agisse des questions de sécurité, de la lutte contre le terrorisme, la lutte contre la prolifération, la gestion des crises régionales, ou qu'il s'agisse d'économie où nous sommes mobilisés avec nos entreprises qui veulent développer leurs investissements. J'ai eu l'occasion de le constater en rencontrant les entreprises françaises ce matin. Que l'on songe à l'industrie aéronautique, au domaine spatial, à l'énergie ou au secteur agro-alimentaire, il y a une diversité de l'action et de la présence françaises. Qu'il s'agisse enfin de coopération, là encore, dans des domaines très divers : le droit, l'enseignement, les sciences, bien sûr, la langue française, ou dans les domaines très divers où nous voulons multiplier nos champs de coopération.
Q - (Question sur la Tchétchénie.)
R - Si ce que vous voulez dire c'est que la France souhaite que tout soit fait pour rechercher une solution, je crois que nous nous sommes compris, c'est ce que j'ai essayé de dire ce matin, avec la conviction très forte, que pour la diplomatie française, il n'y a pas de solution sécuritaire dans quelque crise que ce soit. C'est pour cela que nous pensons que le processus politique, effectivement, constitue la seule possibilité. Alors, il est bien évident que ce processus politique est difficile, long, qu'il nécessite d'être encouragé et accompagné et qu'il y a, bien évidemment, dans la crise tchétchène - et j'ai essayé ce matin d'en montrer la complexité, la diversité et les composantes -, comme dans toute crise, des drames humains. Il est important d'être mobilisé pour faire en sorte que le règlement le plus rapide, la prise en compte de cette souffrance, soient totalement appréciés et que l'on puisse tout faire pour la soulager. Je crois que c'est là, effectivement, une nécessité. Nous sommes convaincus que c'est seulement dans la voie du dialogue politique, d'un processus politique qui doit continuer de se développer, aller jusqu'à son terme, que peut se trouver une solution. Nous connaissons tous les situations qui sont liées à ce type de crises. Et je crois qu'il est important, effectivement, de continuer d'être mobilisés.
Q - (Question sur le problème palestinien.)
R - En ce qui concerne la partie de votre question sur le Proche-Orient, bien sûr je partage totalement ce que vient de dire Igor Ivanov sur la nécessité de tout faire pour redonner une force au processus de paix grâce à la Feuille de route, éclairée par une perspective ouverte aussi par les accords de Genève. En ce qui concerne la construction du mur, vous connaissez la position de la France, il est question de principes bien sûr, il est question de tracé aussi, puisque cela préempte toute négociation de paix, et donc interfère avec le processus de paix que nous voulons soutenir. En ce qui concerne la position de la France, que nous pourrions être amenés à adopter devant la Cour internationale de justice, vous savez qu'il y a une concertation très étroite qui est en cours entre partenaires européens et nous aurons l'occasion d'évoquer cette question lundi entre ministres lors du Conseil Affaires générales.
Q - (Question sur l'Irak.)
R - Nous avons bien sûr d'abord abordé la question difficile de la stabilisation et de la reconstruction de l'Irak, partant d'une situation qui est celle aujourd'hui d'un vide politique dans ce pays. A partir de la résolution 1511 et de l'accord du 15 novembre, il y a un processus politique qui a été défini. Il est important de le préciser et de le mettre en oeuvre pour pouvoir arriver d'ici au 30 juin de cette année à la pleine souveraineté de l'Irak et à un gouvernement irakien souverain. Il est important, dans cette phase du processus, que les Nations unies puissent jouer tout leur rôle et c'est pour cela que nous soutenons l'idée d'un envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, et que nous soutenons par ailleurs les initiatives prises par le Secrétaire général de l'ONU, qu'il s'agisse de la réunion du 19 janvier avec les forces de la coalition et le Conseil du gouvernement intérimaire, qu'il s'agisse de la réunion d'un groupe de contact avec les représentants de la région et de la communauté internationale. En liaison avec le gouvernement irakien formé, donc, à la fin du mois de juin, nous pensons que le rôle des Nations unies sera amené à s'intensifier. Et c'est pour cela que nous avons évoqué - puisque c'est un projet que nous partageons et que nous soutenons , la Russie et la France - nous soutenons l'idée d'une conférence internationale qui pourrait permettre de rallier l'ensemble des pays de la région, l'ensemble des pays de la communauté internationale, pour traiter toutes les questions difficiles qu'il s'agisse des questions frontalières, des questions des échanges humains, des échanges économiques, des questions de sécurité, terrorisme, prolifération, si importantes dans cette région. En liaison avec le gouvernement irakien qui sera formé, nous avons marqué notre disponibilité à répondre aux besoins qui pourraient s'exprimer dans le domaine de la sécurité concernant la formation de la police, de la gendarmerie ou des forces de sécurité. Nous sommes disponibles, et nous souhaitons, bien évidemment, pouvoir le faire avec un gouvernement irakien souverain qui sera amené le moment venu à dire comment il conçoit la sécurité de l'Irak.
Q - (Question sur la déclaration de M. Powell sur le soutien de la Syrie au Hezbollah.)
R - Je ne serai pas à Moscou au même moment que M. Powell, mais j'aurai beaucoup d'autres occasions de lui parler de cela. Et je peux vous dire que c'est un sujet que nous avons eu l'occasion d'aborder très fréquemment au cours des dernier mois.
Q - (Question sur la loi sur la laïcité.)
R - La France a une vocation. Une vocation ancienne. C'est le pays de la démocratie, des Droits de l'Homme et de la tolérance. Notre République française s'est construite autour d'un principe fort qui est le principe de la laïcité, principe de neutralité, qui n'est pas un principe de méfiance vis-à-vis des croyances et des religions, mais, au contraire, un principe très fort de tolérance. Alors aujourd'hui, nous éprouvons le besoin, face aux difficultés, de réaffirmer et de préciser ce principe à travers une loi, un projet de loi sur la laïcité. Il faut comprendre et je l'ai expliqué partout où je suis allé, il y a quelques jours dans le Golfe. J'ai eu l'occasion de m'entretenir sur votre chaîne, Al Jazira. Je l'ai donc fait dans le Golfe, je le fais aujourd'hui à Moscou. Je crois qu'il est important d'éviter les malentendus ou les incompréhensions sur un sujet aussi important. Cette loi n'est pas dirigée contre une minorité ou une communauté, cette loi veut réaffirmer le principe de laïcité et puisqu'il y a une émotion particulière, que vous avez mentionnée, qui a pu s'exprimer ici et là dans certains pays du monde arabo-musulman, il faut le dire clairement, ce n'est pas une loi qui vise à interdire le voile islamique. C'est une loi qui a pour objectif, dans le cadre de l'école publique en France, de dire qu'aucun signe religieux ostensible ne sera accepté, je le redis, dans le cadre de l'école publique. La France est un pays d'ouverture, nous sommes fidèles à nos valeurs et nous entendons bien sûr, dans ce cadre, que cette loi soit respectueuse de toutes les croyances, de toute religion. Il ne s'agit pas d'une loi dirigée contre une communauté ou l'islam, mais bien au contraire, d'une loi qui a vocation en France, compte tenu de ce principe de laïcité, de permettre à cette tolérance, à ce respect, de pouvoir s'exprimer.
(Source http :www.diplomatie.gouv.fr, le 27 janvier 2004)
(Extraits de l'interview à NTV, à Moscou le 23 janvier 2004) :
Les relations entre la Russie et la France sont très anciennes et fondées sur l'Histoire. Ce sont des relations aussi fondées sur la confiance. Il y a un dynamisme de la relation politique : multiplication des entretiens au plus haut niveau entre le président Poutine et le président Chirac, entre Igor Ivanov et moi-même, entre l'ensemble des ministres. Nous avons un conseil de coopération sur les questions de sécurité, qui est un outil pour évoquer l'ensemble des grands problèmes de sécurité et d'intérêt national russe et français. Nous avons aussi une relation marquée par la volonté, regardez nos relations économiques : je rencontrais ce matin les grands industriels français implantés en Russie. Les perspectives d'échanges, qu'il s'agisse de l'industrie, du commerce, des services, dans tous les domaines font des progrès tout à fait considérables. Et sur le plan diplomatique, nous multiplions aussi les actions en commun. Qu'il s'agisse des grandes crises : l'Irak, le Proche-Orient, qu'il s'agisse des grands défis : le terrorisme, les questions de prolifération, il y a une volonté de la Russie et de la France de travailler ensemble. Nous coopérons dans le domaine aéronautique, dans le domaine spatial, pensez à Soyouz, dans le domaine du développement scientifique et technique, dans les domaines universitaire et culturel. Vous voyez les très nombreux champs de coopération privilégiés qui existent aujourd'hui entre nos deux pays. Oui, il y a bien une ambition entre la Russie et la France. A l'heure de l'élargissement - dix nouveaux entrants dans l'Union européenne - bien sûr, cette volonté de rapprochement entre l'Union européenne et la Russie, prend un nouveau sens. Il est d'autant plus important de rapprocher les points de vue, de resserrer les liens et c'est pourquoi nous voulons relever ce défi, qu'il s'agisse de la libre circulation entre l'Union européenne et la Russie, qu'il s'agisse de la concertation sur les grands dossiers diplomatiques ou de l'action commune sur un certain nombre de crises, qu'il s'agisse d'initiatives que nous pouvons prendre ensemble, Europe et Russie.
Q - Dans quel domaine vous êtes, disons, le moins satisfait. Qu'est-ce que vous voudriez améliorer si évidemment certaines choses ne sont pas suffisamment peaufinées ?
R - Vous savez, nous vivons dans un monde marqué par l'instabilité, marqué par l'imprévisibilité, par l'inquiétude et le danger. On le voit face à la menace terroriste, face au danger de la prolifération, à la montée des crises régionales. Et notre monde est non seulement frappé par l'urgence mais l'est également par l'interdépendance. Toutes les crises sont reliées entre elles. Et il y a donc une profonde solidarité qui existe aujourd'hui entre la France et la Russie et qui justifie notre effort pour l'unité de la communauté internationale. Pour être efficaces, il faut être unis. Pour être unis, il faut être légitimes. Et donc, il y a véritablement une volonté de travailler ensemble aujourd'hui dans tous les domaines.
Q - Quels sont vos principaux entretiens avec votre collègue russe ?
R - Nous avons abordé l'ensemble des questions bilatérales qui nous concernent. Nous avons un grand nombre d'échanges qui sont prévus pour l'année 2004 dans tous les domaines : coopération politique, économique, culturelle. Il y a aussi, bien sûr, les sujets d'intérêts communs, les grandes échéances. Nous avons, sur l'Irak, une situation difficile, un processus politique. Nous partageons la même conviction de la nécessité d'une conférence internationale en Irak qui devrait se dérouler, dès lors qu'il y aurait un gouvernement irakien souverain au 1er juillet de cette année. Nous partageons la conviction également de la nécessité d'initiatives sur le Proche Orient. C'est une crise majeure. Nous avons besoin de redonner vie au Processus de paix, à la Feuille de route, et pour cela, les Russes et les Français veulent se mobiliser. Dans d'autres domaines, la prolifération par exemple, sur la crise iranienne, nous voulons agir ensemble pour essayer justement d'avancer dans le même but. Donc, vous le voyez, quels que soient les sujets, il y a une volonté commune du côté de la Russie et de la France de lever les obstacles. Je pense qu'entre nos deux pays, il y a aujourd'hui une unité de conviction, une confiance très forte, le sentiment qu'ensemble nous pouvons véritablement faire bouger les choses.
Q - La libre circulation des personnes entre l'Union européenne et la Russie est-elle dans vos perspectives ?
R - Tout à fait. Et je crois que c'est véritablement à cela que nous devons travailler. Le Sommet de l'année dernière de Saint-Pétersbourg a marqué une étape considérable dans les relations entre l'Union européenne et la Russie. Nous souhaitons faciliter les relations entre l'Europe et la Russie. Et vous savez que sur un plan bilatéral, Moscou et Paris travaillent directement ensemble pour essayer d'identifier justement le moyen d'aller plus vite. Qu'il s'agisse des "chercheurs", qu'il s'agisse des hommes d'affaires, qu'il s'agisse des étudiants, nous voulons faciliter les relations entre la Russie et la France, entre la Russie et l'Europe. Il faut, bien sûr, que ce travail puisse se faire dans de bonnes conditions, étape par étape, mais c'est bien l'ambition commune que nous avons de faciliter la libre circulation, de faire en sorte que le rapprochement des hommes, des femmes, de l'ensemble de nos deux communautés puissent nous permettre de bâtir un nouvel esprit de l'Europe, un nouvel esprit du continent.
Q - Pour le citoyen lambda, comment cela va-t-il se passer ?
R - Justement, c'est la nécessité d'avancer, d'ouvrir la voie et je crois qu'il est important de marquer l'ambition d'avoir un certain nombre d'étapes : concernant les étudiants, les "chercheurs", les hommes d'affaires. Ces étapes permettent justement d'avancer et à partir de là, je suis convaincu que notre objectif d'ouverture entre nos deux mondes, entre l'Europe, la Russie, permettra justement de lever l'ensemble des obstacles.
(...)
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 janvier 2004)