Déclaration de Mme Marie-Josée Roig, ministre déléguée à l'intérieur, sur la présentation du rapport sur la mise en oeuvre de la loi du 6 juin 2000 relative à la parité, Paris le 23 février 2005.

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Circonstance : ésentation du rapport sur la mise en oeuvre de la loi du 6 juin 2000 relative à la parité au Ministère de la Parité et de l'Egalité professionnelle, à Paris le 23 février 2005

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Je suis heureuse de présenter avec Nicole Ameline, au nom de Dominique de Villepin et en mon nom, le rapport du Gouvernement au Parlement sur la mise en uvre de la loi du 6 juin 2000 relative à l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats et aux fonctions électives, c'est-à-dire la loi sur la parité.
La législation sur la parité entre les femmes et les hommes aux élections politiques est désormais bien établie. Elle est devenue courante, normale pour ainsi dire. A tel point d'ailleurs que l'on en oublierait presque combien cette législation est récente. En six ans que de chemin parcouru.
Les fondations ont, en effet, été jetées par la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 qui a modifié deux articles de la Constitution :
- l'article 3 complété du quatrième alinéa suivant : " La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives " ;
- l'article 4 qui précise désormais que les partis et groupements politiques " contribuent à la mise en uvre du principe énoncé à l'article 3 dans les conditions déterminées par la loi ".
Deux étapes ont jalonné la traduction concrète de cette réforme de la Constitution : dans un premier temps la loi du 6 juin 2000, dans un second temps les apports des réformes votées en 2003.
1. La loi du 6 juin 2000
L'ordonnance du 21 avril 1944 avait reconnu le droit de vote aux femmes. Pour autant, les pouvoirs publics n'avaient pas souhaité prévoir d'autres dispositions, le libre exercice des droits civiques devant permettre aux femmes de participer pleinement à la vie politique.
Mais après l'enthousiasme de la Libération, il faut bien reconnaître que la proportion de femmes élues avait tendance à diminuer dans les assemblées parlementaires ou à progresser très lentement aux élections locales.
Cette situation n'était pas satisfaisante alors même que les femmes étaient de plus en plus au cur des grands changements de la société française, à savoir la poussée des activités tertiaires, le développement du salariat et la démocratisation de l'enseignement.
Un décalage se développait entre les femmes et le monde politique à tel point que durant les années 1990 de multiples projets ont vu le jour afin d'assurer une représentation plus importante des femmes.
C'est dans ce contexte que la loi du 6 juin 2000 a introduit la parité au sein des candidatures aux élections politiques.
A cet égard, on notera que le législateur n'a pas entrepris une réforme des différents modes d'élection pour parvenir à cette fin. Au contraire, il a expressément manifesté sa volonté de respecter les modes de scrutin existants.
Les scrutins de liste à la représentation proportionnelle, qui supposent la présentation de listes complètes et bloquées, étaient bien évidemment les plus adaptés aux nouvelles mesures.
Ainsi l'alternance stricte des candidats des deux sexes a été exigée dans les listes déposées aux élections européennes et aux élections sénatoriales dans les départements concernés.
Quant aux élections régionales et aux élections municipales dans les communes d'au moins 3.500 habitants, c'est par groupe de six candidats que la parité a été prescrite.
S'agissant des élections au scrutin uninominal, c'est-à-dire les élections cantonales et législatives ainsi que les élections sénatoriales dans les départements intéressés, les débats parlementaires avaient permis de mettre en valeur le caractère parfois délicat de toute mesure obligatoire.
On ne pouvait en effet ignorer la permanence de forts liens personnels et territoriaux entre les élus et les électeurs.
Le législateur s'est donc orienté vers des mesures incitatives au moyen de la loi du 11 mars 1988 sur la transparence financière de la vie politique.
Ainsi, une première fraction de l'aide publique est versée par l'Etat aux partis politiques ayant présenté au moins 50 candidats en métropole lors du premier tour des élections législatives sous réserve qu'ils recueillent un certain pourcentage d'audience.
Parallèlement, une sanction financière a été prévue pour les partis ne présentant pas 50 % de candidats de chaque sexe à 2 % près. Dans ce cas, le montant de la dotation est réduit dans une proportion égale à la moitié de l'écart entre les pourcentages de candidats de chaque sexe.
Concrètement, prenons l'exemple d'un parti investissant seulement 40 % de femmes, sa dotation serait amputée de 10 % (écart de 20 divisé par 2).
Voilà largement résumées les grandes lignes de la loi du 6 juin 2000 qui a été appliquée dès les élections municipales et sénatoriales de 2001 ainsi qu'aux élections législatives de 2002.
Quel a été son impact sur ces trois scrutins ? On peut, sans exagérer, parler de très net progrès.
Les élections municipales de mars 2001 se sont soldées par un succès avec un pourcentage de conseillères municipales quasiment égal à la moitié des sièges dans les communes d'au moins 3.500 habitants (27 % en 1995, 47,5 % en 2001).
Dans les petites communes pourtant non concernées par la législation, la proportion de femmes a également augmenté selon un effet d'entraînement (21 % en 1995, 30,1 % en 2001).
Les élections sénatoriales de septembre 2001 ont également permis une augmentation du nombre de femmes élues au sein de la Haute assemblée, la législation s'appliquant alors aux départements dotés d'au moins trois sièges (4,9 % en 1992, 21,6 % en 2001).
En revanche, la proportion de femmes élues aux élections législatives de juin 2002 est restée modeste (10,9 % en 1997, 12,3 % en 2002).
2. Les apports des réformes votées en 2003
La majorité élue en 2002 a eu à cur d'améliorer le socle législatif existant mais surtout d'aller plus loin encore avec l'adoption de la loi du 11 avril 2003.
A l'occasion de l'adoption de la loi du 11 avril 2003, le Parlement a eu l'occasion de parachever ce qui avait été entrepris.
Les députés européens étant élus dorénavant dans le cadre de circonscriptions regroupant plusieurs régions, la loi a confirmé la présentation de listes par alternance stricte.
Les conseillers régionaux étant désignés sur la base de listes régionales composées de sections départementales, la loi a apporté là encore un progrès en exigeant l'alternance au sein des sections départementales au lieu des groupes de six candidats.
Cet ordre de présentation des listes a également été étendu aux élections à l'Assemblée de Corse par la loi du 18 décembre 2003.
Enfin, la réforme sénatoriale du 30 juillet 2003 a maintenu le principe de la parité dans les départements pourvus à la proportionnelle, celle-ci s'appliquant à compter de quatre sièges.
Sur ce point, le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de préciser que l'objectif d'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives n'avait pas pour objet et ne saurait avoir pour effet de priver le législateur de la faculté de fixer le régime électoral des assemblées (décision du 24 juillet 2003).
Cette observation se situe dans la logique de la loi du 6 juin 2000 qui intégrait la parité dans le mode d'élection et non l'inverse.
Les scrutins qui ont suivi et auxquels s'appliquaient pour la première fois les dispositions relatives à la parité ont permis d'apprécier la justesse des choix du Gouvernement et la formidable modernisation de la vie politique que représente la parité.
Les résultats sont là : le pourcentage de conseillères régionales est passé de 27,5 % à 47,6 %. Celui des députés européens s'est rapprochée de la moitié avec 43,5 % contre 41 % précédemment. Quant aux sénatrices de la série C, leur proportion est passée de 7,8 % à 24,2 %.
Ces différentes mesures sont propres à la technique électorale. Elles ne sauraient avoir réponse à tout même si elles ont permis d'accentuer la représentation des femmes. De toute évidence, elles ne peuvent se substituer à la responsabilité qui incombe aux partis politiques comme la Constitution le rappelle judicieusement. Elles démontrent cependant que la volonté politique permet de faire bouger les habitudes, de rompre des modes de pensée ou des situations acquises.
La parité est un enjeu considérable de changement à tous les échelons de la vie politique à laquelle Dominique de Villepin et moi-même sommes particulièrement attachés.
Le travail n'est cependant pas achevé. Ce rapport énonce des pistes de travail intéressantes que le ministère de l'Intérieur ne manquera pas d'expertiser au cours des prochains mois.
Vous comprendrez qu'en tant que femme, qu'en tant que maire d'Avignon, qu'en tant que ministre de la République, j'ai pris beaucoup de plaisir à vous faire part de ces nouvelles avancées des frontières de la parité.
Je vous remercie de votre attention.


(Source http://www.interieur.gouv.fr, le 2 mars 2005)