Texte intégral
J'ai plusieurs raisons d'être heureux d'être là.
La première de ces raisons, c'est que vous avez eu la gentillesse de prendre sur votre temps, de sacrifier une soirée pour une réflexion civique d'intérêt général.
La deuxième raison, c'est que les enjeux dont nous allons parler ensemble sont très importants, et qu'il n'y a rien de plus intéressant, de plus juste, que de voir un peuple de citoyens s'interroger sur le destin, la route qu'il va choisir.
La troisième raison, c'est que je suis entouré de mes amis. Je les salue à mon tour. Ils sont partie prenante du combat que nous menons tous les jours depuis des mois à l'Assemblée nationale, au Sénat et au Parlement européen : Jean-Marie Vanlerenberghe, sénateur d'Arras, Jean-Louis Bourlanges, député européen, Olivier Henno, Francis Vercarmer que je tiens à saluer particulièrement - on n'est pas dans sa circonscription, mais très proches ; je connais bien la géographie du Nord et je sais que Hem et Wasquehal ne sont pas si éloignés que cela et qu'on peut donc les jumeler -. Je suis très heureux que Valérie Létard soit là, très heureux que les responsables de la fédération du Nord nous aient accompagnés, les groupes au Conseil général, à la Communauté urbaine de Lille, ainsi que les conseillers régionaux - ils ont été menés au combat et au succès par Valérie Létard.
Mais j'ai une raison un peu particulière d'être heureux d'être à Wasquehal, c'est que Gérard Vignoble est là, dans la forme qui est la sienne, et que j'ai beaucoup d'affection et d'admiration pour le député-maire de Wasquehal. C'est une affection et une admiration anciennes, parce qu'il a été de tous les combats que nous avons menés et conduits ensemble. Il était à l'époque un jeune et brillant parlementaire ayant gagné un combat difficile, avec un parcours politique original. Mais après, il y a eu l'épreuve que l'homme a rencontrée. L'homme politique c'est une chose, et l'homme c'est encore autre chose. Et j'ai beaucoup d'admiration pour la manière dont Gérard Vignoble a supporté le choc de la vie, et puis livré la bataille, et puis gagné la bataille jusqu'au point d'être réélu député, au terme de ce combat personnel. Les combats politiques sont une chose, les combats personnels en sont une autre. Cela ne montre pas seulement des convictions, que tous nous avons, mais cela montre quel est le métal dont l'homme est forgé - ou la femme - quand ils rencontrent des épreuves de cet ordre. Il n'y a pas de meilleur endroit pour le dire que la salle des fêtes de Wasquehal.
La règle du jeu est celle-ci : je vais faire une introduction ultracourte, et après je vous donne la parole. Il me semble que c'est ainsi que nous devrions mener la si difficile campagne électorale que nous avons devant nous. Choix essentiel pour la France, 29 mai 2005, choix essentiel pour l'Europe, crucial, vital pour l'ensemble de l'Europe. Nous allons, nous les Français, décider de l'avenir de l'Europe tout seuls. Naturellement, on aurait pu imaginer qu'il y ait un seul référendum sur l'ensemble du territoire européen, et je n'aurais aucune crainte sur son issue. D'ailleurs, beaucoup de ceux qui disent non aujourd'hui n'auraient pas dit non si tous les citoyens européens avaient voté ensemble. C'est parce que le combat européen se teinte de politique intérieure que beaucoup de décisions, d'orientations parmi les leaders politiques, ont été prises.
Nous allons avoir un choix crucial au nom de tous les citoyens européens. Ce choix, il est aujourd'hui, vous le savez, discuté et menacé. Il y a encore quelques semaines, les sondages nous annonçaient 70 % de oui. Je m'empresse de dire, certains d'entre vous le savent, je n'ai jamais cru à ces sondages. Et aujourd'hui, c'est le contraire, on voit un déséquilibre au profit du non, avec beaucoup, une immense majorité de Français qui s'interrogent.
Et l'attitude que les responsables politiques vont avoir dans cette campagne électorale est très importante. Je ne souhaite pas que ce soit une campagne bâtie à partir de mots d'ordre politiques et partisans. Je ne souhaite pas que ce soit la France d'en haut qui délivre des oukases à la France d'en bas. Je ne souhaite pas qu'il y ait une attitude condescendante de ceux qui savent par rapport à ceux qui ne sauraient pas. Je pense que lorsqu'un peuple se pose des questions au point qu'il est partagé à 50-50 et peut-être davantage, il faut prendre ces questions au sérieux. Et je propose que l'UDF conduise la campagne électorale avec ce mot d'ordre simple : nous allons répondre, sans en esquiver aucune, à toutes les questions qui se posent. Nous allons apporter notre réponse, sans en esquiver aucune, à toutes les peurs qui s'expriment. Car lorsqu'une crainte est en train de naître, lorsqu'une peur se fait entendre, il n'y a qu'une manière de l'équilibrer, c'est d'allumer la lumière et de regarder de près exactement tous les éléments de la situation, d'apporter toutes les réponses auxquelles les citoyens ont droit. Et donc je vous propose que, dans trois minutes, vous ayez la parole et que vous traduisiez toutes vos questions, toutes vos demandes d'explication, toutes vos inquiétudes et celles de ceux qui vous entourent et que vous entendez tous les jours, dans votre famille, dans votre vie professionnelle ou de voisinage. Que nous n'esquivions aucune des questions que les Français se posent, aucune des peurs qui s'expriment, et que nous apportions simplement la réponse la plus objective possible.
Et selon moi, éclairer, donner les réponses, fournir les éléments objectifs suffit à emporter la décision des citoyens, tant la question européenne posée par le référendum me paraît quant à moi évidente. Je vous donne mes éléments de réponse, en deux minutes, aux questions principales qui se posent.
Au fond, dans ce référendum, vont se poser trois questions principales. La première question, c'est : est-ce que nous, Français, nous avons besoin de l'Europe unie ? Et je vous invite à regarder la planète. Si vous tournez votre regard vers l'Ouest, c'est la puissance américaine que vous allez découvrir. Si vous tournez votre regard vers l'Est, c'est la puissance chinoise. Puissances - certains diraient " empires " - à la fois le nombre du côté de la Chine, la richesse du côté des Etats-Unis, l'influence, la force que cela suppose. Si nous restons séparés en 25 pays jouant chacun leurs cartes, défendant chacun leurs intérêts, chacun pour soi, nous serons marginalisés. En face de la puissance américaine et en face de la puissance chinoise, nous faut-il une Europe unie ? Ma réponse est oui. Et si nous répondons non le 29 mai, est-ce que l'Europe sera plus unie ou moins unie ? Ma conviction et la vôtre, c'est qu'évidemment tout le monde ressentira que l'Europe est moins unie, et que tous ceux qui nous regardent, sur le sol européen et ailleurs, en tireront une conclusion simple. Imaginez ce qu'on dira aux Etats-Unis, imaginez ce que penseront l'administration, le gouvernement et le président des Etats-Unis. Ils diront : voilà, les Français ont répondu non, au moins on est débarrassés d'un souci, l'Europe n'existera pas.
Deuxième question : si nous avons besoin de l'Europe unie, quels changements devons-nous apporter à l'Europe ? Et ce que tant de Français, et d'Européens, pensent depuis des années et des années, c'est que cette Europe, si l'on veut qu'elle soit ce qu'on attend d'elle, il faut qu'elle se démocratise. C'est-à-dire : au lieu d'être une affaire pour les experts, pour les diplomates, pour les gouvernements, à laquelle personne d'autre que les experts ne comprend rien. Il y a de grands experts, y compris dans cette salle, et tous vos regards se tournent vers Jean-Louis Bourlanges, vous avez bien raison - quand on dit expert européen en France, une lumière s'allume, Jean-Louis Bourlanges ! Mais pour le citoyen, jusqu'à maintenant, il y avait le sentiment que ce n'était pas son affaire, et quelquefois il enrageait que cela ne fût point son affaire. Notre idée depuis longtemps, c'est celle-là : si l'Europe est unie, si elle devient une voix qui parle aussi fort que la voix américaine ou que la voix chinoise, alors il faut que le citoyen ait son mot à dire sur son avenir, que femmes et hommes, familles, jeunes et plus tard ayant des enfants et plus tard ayant des petits-enfants, il faut que chacun puisse dire son mot sur l'avenir de l'Europe. Si c'est cela, si l'on veut une démocratisation de l'Europe, alors il faut une Constitution. Parce que, comme vous l'avez appris dans les livres d'Histoire, chaque fois qu'un pays, qu'un ensemble politique veut donner du pouvoir aux citoyens, il commence par une chose simple : il écrit une Constitution. Et cette Constitution, il se trouve que le texte qu'on nous présente va nous apporter des chances que, hier, nous n'avions pas, des dirigeants qu'enfin on connaîtra, à qui on pourra demander des comptes, les soutenir s'ils vont dans le bon sens, les chahuter s'ils ne vont pas dans le bon sens. Ils procèderont du suffrage universel : ce sont les députés européens, par exemple, qui éliront le président de la Commission européenne. Il y aura un président pour l'Union, et pas un qui change tous les six mois et qui a autre chose à faire dans son propre pays, comme c'est le cas actuellement. Les citoyens auront des droits, y compris qu'ils n'ont pas en France, par exemple le droit de proposer une loi, avec un certain nombre de signatures, droit que nous n'avons toujours pas dans notre propre pays. Enfin on aura de la transparence dans les décisions européennes, au lieu d'être prises, comme maintenant, dans un cénacle dont personne ne sait quels sont les raisons, les tenants, les aboutissants, les discussions qui y président. Ce sera comme une Assemblée dans un pays démocratique. Les ministres, quand ils délibèrent, délibèreront en public, et on saura ce qu'ils ont décidé, comme le Parlement européen délibère en public. Bref, on aura une transparence qu'on n'a pas jusqu'à ce jour, des droits du citoyen qu'on n'a pas jusqu'à ce jour. Donc si à la question : faut-il une Europe unie ? on répond oui, faut-il que cette Europe donne plus de place aux citoyens ? on répond oui, faut-il une Constitution ? la réponse est évidemment oui.
Voilà les deux questions principales qui doivent occuper la réflexion des Français dans les semaines qui viennent. Il y en a une troisième, à propos de laquelle un mensonge est en train d'être répandu, que nous n'avons pas le droit de laisser se répandre. C'est : que se passe-t-il si on répond non ? Les gens qui veulent un non, pour des raison d'intérêt politique, ou d'intérêt plus partisan, ces gens ont bien vu le piège. Ils disent : rassurez-vous, si on vote non, il ne se passera rien, c'est sans conséquences, c'est sans importance et c'est surtout sans gravité. Ceci n'est pas vrai. Je mets au défi les partisans du non, ceux qui mènent la campagne, de trouver un responsable d'un autre pays européen, qui vienne chez nous devant nos meetings ou une caméra de télévision et qui dise : si la France dit non, c'est sans importance et sans conséquences. Je les mets au défi d'en trouver un. Il y a 25 pays européens, il y a 25 gouvernements dans l'Union, il y a 25 chefs de partis socialistes, de partis de droite, de partis du centre, je les mets au défi d'en trouver un présentable, et qui vienne chez nous pour dire : si la France vote non, il ne se passera rien, c'est sans importance. Ils n'en trouveront pas un. Parce que si la France vote non, le projet est par terre. On a connu cela il y a cinquante ans, pour ceux qui ont lu l'Histoire ou qui en ont le souvenir. Il y a cinquante ans, la France avait imaginé qu'on pouvait faire une défense européenne. C'était la Communauté européenne de défense, la CED. Elle a écrit le projet, elle a convaincu les autres pays européens. Et puis, une fois que les autres pays européens ont voté, ont ratifié, on est venu devant le Parlement français, le Parlement a dit non. C'était en 1954, nous sommes en 2005. Cinquante et un ans après, il n'y a toujours pas de défense européenne.
Je crois que l'Europe peut surmonter le fait qu'un pays dise non, mais pas le fait que la France dise non, pas le fait que l'Allemagne dise non, pas le fait que les plus importants des pays fondateurs disent non. Et c'est pourquoi ils ne trouveront aucun responsable présentable pour venir parler aux Français et dire : votre vote, s'il est négatif, est anodin et bénin, il n'aura pas de conséquences. Ils n'en trouveront pas.
Cette responsabilité si lourde, c'est chacun des Français qui va avoir à la prendre . Au vu d'un certain nombre de questions, nous avons l'intention de mener campagne sans faiblir, sur tous les débats où l'on nous invitera, sur tous les champs de bataille électorale où nous pourrons participer. Nous défendrons une conviction qui est la nôtre depuis l'origine, puisque c'est, par chance historique, notre famille politique qui a bâti le projet européen. Mais nous le ferons en répondant aux questions et aux objections qui sont celles de chacun des citoyens quand il essaye de se former son jugement.
Et c'est à quoi maintenant je vous invite. Autant de questions que vous voudrez, autant de réponses que nous pourrons apporter. Dites, exprimez ce que vous entendez autour de vous, parce que c'est à partir de là que va se faire la matière de ce choix profond, personnel. J'ai l'habitude de dire qu'un référendum, c'est formidable parce que chacun des citoyens se trouve, au moment de voter, dans la même situation que le président de la République au moment de décider d'une orientation ou de signer un traité. Chacun d'entre vous, dont la voix peut peser comme celle d'un décideur suprême. Au fond, c'est le plus grand acte de confiance qu'on puisse faire en direction d'un peuple de citoyens. C'est ce que nous avons bien l'intention d'être : citoyens, c'est-à-dire responsables. Je suis heureux de la campagne électorale que nous allons vivre ensemble. Je suis heureux que nous la commencions ce soir ensemble à Wasquehal, et je vous donne la parole pour les questions que vous entendez, ou que vous ressentez, dans la préparation du scrutin du 29 mai.
Je vous remercie.
(Source http://www.udf-europe.net, le 18 avril 2005)
La première de ces raisons, c'est que vous avez eu la gentillesse de prendre sur votre temps, de sacrifier une soirée pour une réflexion civique d'intérêt général.
La deuxième raison, c'est que les enjeux dont nous allons parler ensemble sont très importants, et qu'il n'y a rien de plus intéressant, de plus juste, que de voir un peuple de citoyens s'interroger sur le destin, la route qu'il va choisir.
La troisième raison, c'est que je suis entouré de mes amis. Je les salue à mon tour. Ils sont partie prenante du combat que nous menons tous les jours depuis des mois à l'Assemblée nationale, au Sénat et au Parlement européen : Jean-Marie Vanlerenberghe, sénateur d'Arras, Jean-Louis Bourlanges, député européen, Olivier Henno, Francis Vercarmer que je tiens à saluer particulièrement - on n'est pas dans sa circonscription, mais très proches ; je connais bien la géographie du Nord et je sais que Hem et Wasquehal ne sont pas si éloignés que cela et qu'on peut donc les jumeler -. Je suis très heureux que Valérie Létard soit là, très heureux que les responsables de la fédération du Nord nous aient accompagnés, les groupes au Conseil général, à la Communauté urbaine de Lille, ainsi que les conseillers régionaux - ils ont été menés au combat et au succès par Valérie Létard.
Mais j'ai une raison un peu particulière d'être heureux d'être à Wasquehal, c'est que Gérard Vignoble est là, dans la forme qui est la sienne, et que j'ai beaucoup d'affection et d'admiration pour le député-maire de Wasquehal. C'est une affection et une admiration anciennes, parce qu'il a été de tous les combats que nous avons menés et conduits ensemble. Il était à l'époque un jeune et brillant parlementaire ayant gagné un combat difficile, avec un parcours politique original. Mais après, il y a eu l'épreuve que l'homme a rencontrée. L'homme politique c'est une chose, et l'homme c'est encore autre chose. Et j'ai beaucoup d'admiration pour la manière dont Gérard Vignoble a supporté le choc de la vie, et puis livré la bataille, et puis gagné la bataille jusqu'au point d'être réélu député, au terme de ce combat personnel. Les combats politiques sont une chose, les combats personnels en sont une autre. Cela ne montre pas seulement des convictions, que tous nous avons, mais cela montre quel est le métal dont l'homme est forgé - ou la femme - quand ils rencontrent des épreuves de cet ordre. Il n'y a pas de meilleur endroit pour le dire que la salle des fêtes de Wasquehal.
La règle du jeu est celle-ci : je vais faire une introduction ultracourte, et après je vous donne la parole. Il me semble que c'est ainsi que nous devrions mener la si difficile campagne électorale que nous avons devant nous. Choix essentiel pour la France, 29 mai 2005, choix essentiel pour l'Europe, crucial, vital pour l'ensemble de l'Europe. Nous allons, nous les Français, décider de l'avenir de l'Europe tout seuls. Naturellement, on aurait pu imaginer qu'il y ait un seul référendum sur l'ensemble du territoire européen, et je n'aurais aucune crainte sur son issue. D'ailleurs, beaucoup de ceux qui disent non aujourd'hui n'auraient pas dit non si tous les citoyens européens avaient voté ensemble. C'est parce que le combat européen se teinte de politique intérieure que beaucoup de décisions, d'orientations parmi les leaders politiques, ont été prises.
Nous allons avoir un choix crucial au nom de tous les citoyens européens. Ce choix, il est aujourd'hui, vous le savez, discuté et menacé. Il y a encore quelques semaines, les sondages nous annonçaient 70 % de oui. Je m'empresse de dire, certains d'entre vous le savent, je n'ai jamais cru à ces sondages. Et aujourd'hui, c'est le contraire, on voit un déséquilibre au profit du non, avec beaucoup, une immense majorité de Français qui s'interrogent.
Et l'attitude que les responsables politiques vont avoir dans cette campagne électorale est très importante. Je ne souhaite pas que ce soit une campagne bâtie à partir de mots d'ordre politiques et partisans. Je ne souhaite pas que ce soit la France d'en haut qui délivre des oukases à la France d'en bas. Je ne souhaite pas qu'il y ait une attitude condescendante de ceux qui savent par rapport à ceux qui ne sauraient pas. Je pense que lorsqu'un peuple se pose des questions au point qu'il est partagé à 50-50 et peut-être davantage, il faut prendre ces questions au sérieux. Et je propose que l'UDF conduise la campagne électorale avec ce mot d'ordre simple : nous allons répondre, sans en esquiver aucune, à toutes les questions qui se posent. Nous allons apporter notre réponse, sans en esquiver aucune, à toutes les peurs qui s'expriment. Car lorsqu'une crainte est en train de naître, lorsqu'une peur se fait entendre, il n'y a qu'une manière de l'équilibrer, c'est d'allumer la lumière et de regarder de près exactement tous les éléments de la situation, d'apporter toutes les réponses auxquelles les citoyens ont droit. Et donc je vous propose que, dans trois minutes, vous ayez la parole et que vous traduisiez toutes vos questions, toutes vos demandes d'explication, toutes vos inquiétudes et celles de ceux qui vous entourent et que vous entendez tous les jours, dans votre famille, dans votre vie professionnelle ou de voisinage. Que nous n'esquivions aucune des questions que les Français se posent, aucune des peurs qui s'expriment, et que nous apportions simplement la réponse la plus objective possible.
Et selon moi, éclairer, donner les réponses, fournir les éléments objectifs suffit à emporter la décision des citoyens, tant la question européenne posée par le référendum me paraît quant à moi évidente. Je vous donne mes éléments de réponse, en deux minutes, aux questions principales qui se posent.
Au fond, dans ce référendum, vont se poser trois questions principales. La première question, c'est : est-ce que nous, Français, nous avons besoin de l'Europe unie ? Et je vous invite à regarder la planète. Si vous tournez votre regard vers l'Ouest, c'est la puissance américaine que vous allez découvrir. Si vous tournez votre regard vers l'Est, c'est la puissance chinoise. Puissances - certains diraient " empires " - à la fois le nombre du côté de la Chine, la richesse du côté des Etats-Unis, l'influence, la force que cela suppose. Si nous restons séparés en 25 pays jouant chacun leurs cartes, défendant chacun leurs intérêts, chacun pour soi, nous serons marginalisés. En face de la puissance américaine et en face de la puissance chinoise, nous faut-il une Europe unie ? Ma réponse est oui. Et si nous répondons non le 29 mai, est-ce que l'Europe sera plus unie ou moins unie ? Ma conviction et la vôtre, c'est qu'évidemment tout le monde ressentira que l'Europe est moins unie, et que tous ceux qui nous regardent, sur le sol européen et ailleurs, en tireront une conclusion simple. Imaginez ce qu'on dira aux Etats-Unis, imaginez ce que penseront l'administration, le gouvernement et le président des Etats-Unis. Ils diront : voilà, les Français ont répondu non, au moins on est débarrassés d'un souci, l'Europe n'existera pas.
Deuxième question : si nous avons besoin de l'Europe unie, quels changements devons-nous apporter à l'Europe ? Et ce que tant de Français, et d'Européens, pensent depuis des années et des années, c'est que cette Europe, si l'on veut qu'elle soit ce qu'on attend d'elle, il faut qu'elle se démocratise. C'est-à-dire : au lieu d'être une affaire pour les experts, pour les diplomates, pour les gouvernements, à laquelle personne d'autre que les experts ne comprend rien. Il y a de grands experts, y compris dans cette salle, et tous vos regards se tournent vers Jean-Louis Bourlanges, vous avez bien raison - quand on dit expert européen en France, une lumière s'allume, Jean-Louis Bourlanges ! Mais pour le citoyen, jusqu'à maintenant, il y avait le sentiment que ce n'était pas son affaire, et quelquefois il enrageait que cela ne fût point son affaire. Notre idée depuis longtemps, c'est celle-là : si l'Europe est unie, si elle devient une voix qui parle aussi fort que la voix américaine ou que la voix chinoise, alors il faut que le citoyen ait son mot à dire sur son avenir, que femmes et hommes, familles, jeunes et plus tard ayant des enfants et plus tard ayant des petits-enfants, il faut que chacun puisse dire son mot sur l'avenir de l'Europe. Si c'est cela, si l'on veut une démocratisation de l'Europe, alors il faut une Constitution. Parce que, comme vous l'avez appris dans les livres d'Histoire, chaque fois qu'un pays, qu'un ensemble politique veut donner du pouvoir aux citoyens, il commence par une chose simple : il écrit une Constitution. Et cette Constitution, il se trouve que le texte qu'on nous présente va nous apporter des chances que, hier, nous n'avions pas, des dirigeants qu'enfin on connaîtra, à qui on pourra demander des comptes, les soutenir s'ils vont dans le bon sens, les chahuter s'ils ne vont pas dans le bon sens. Ils procèderont du suffrage universel : ce sont les députés européens, par exemple, qui éliront le président de la Commission européenne. Il y aura un président pour l'Union, et pas un qui change tous les six mois et qui a autre chose à faire dans son propre pays, comme c'est le cas actuellement. Les citoyens auront des droits, y compris qu'ils n'ont pas en France, par exemple le droit de proposer une loi, avec un certain nombre de signatures, droit que nous n'avons toujours pas dans notre propre pays. Enfin on aura de la transparence dans les décisions européennes, au lieu d'être prises, comme maintenant, dans un cénacle dont personne ne sait quels sont les raisons, les tenants, les aboutissants, les discussions qui y président. Ce sera comme une Assemblée dans un pays démocratique. Les ministres, quand ils délibèrent, délibèreront en public, et on saura ce qu'ils ont décidé, comme le Parlement européen délibère en public. Bref, on aura une transparence qu'on n'a pas jusqu'à ce jour, des droits du citoyen qu'on n'a pas jusqu'à ce jour. Donc si à la question : faut-il une Europe unie ? on répond oui, faut-il que cette Europe donne plus de place aux citoyens ? on répond oui, faut-il une Constitution ? la réponse est évidemment oui.
Voilà les deux questions principales qui doivent occuper la réflexion des Français dans les semaines qui viennent. Il y en a une troisième, à propos de laquelle un mensonge est en train d'être répandu, que nous n'avons pas le droit de laisser se répandre. C'est : que se passe-t-il si on répond non ? Les gens qui veulent un non, pour des raison d'intérêt politique, ou d'intérêt plus partisan, ces gens ont bien vu le piège. Ils disent : rassurez-vous, si on vote non, il ne se passera rien, c'est sans conséquences, c'est sans importance et c'est surtout sans gravité. Ceci n'est pas vrai. Je mets au défi les partisans du non, ceux qui mènent la campagne, de trouver un responsable d'un autre pays européen, qui vienne chez nous devant nos meetings ou une caméra de télévision et qui dise : si la France dit non, c'est sans importance et sans conséquences. Je les mets au défi d'en trouver un. Il y a 25 pays européens, il y a 25 gouvernements dans l'Union, il y a 25 chefs de partis socialistes, de partis de droite, de partis du centre, je les mets au défi d'en trouver un présentable, et qui vienne chez nous pour dire : si la France vote non, il ne se passera rien, c'est sans importance. Ils n'en trouveront pas un. Parce que si la France vote non, le projet est par terre. On a connu cela il y a cinquante ans, pour ceux qui ont lu l'Histoire ou qui en ont le souvenir. Il y a cinquante ans, la France avait imaginé qu'on pouvait faire une défense européenne. C'était la Communauté européenne de défense, la CED. Elle a écrit le projet, elle a convaincu les autres pays européens. Et puis, une fois que les autres pays européens ont voté, ont ratifié, on est venu devant le Parlement français, le Parlement a dit non. C'était en 1954, nous sommes en 2005. Cinquante et un ans après, il n'y a toujours pas de défense européenne.
Je crois que l'Europe peut surmonter le fait qu'un pays dise non, mais pas le fait que la France dise non, pas le fait que l'Allemagne dise non, pas le fait que les plus importants des pays fondateurs disent non. Et c'est pourquoi ils ne trouveront aucun responsable présentable pour venir parler aux Français et dire : votre vote, s'il est négatif, est anodin et bénin, il n'aura pas de conséquences. Ils n'en trouveront pas.
Cette responsabilité si lourde, c'est chacun des Français qui va avoir à la prendre . Au vu d'un certain nombre de questions, nous avons l'intention de mener campagne sans faiblir, sur tous les débats où l'on nous invitera, sur tous les champs de bataille électorale où nous pourrons participer. Nous défendrons une conviction qui est la nôtre depuis l'origine, puisque c'est, par chance historique, notre famille politique qui a bâti le projet européen. Mais nous le ferons en répondant aux questions et aux objections qui sont celles de chacun des citoyens quand il essaye de se former son jugement.
Et c'est à quoi maintenant je vous invite. Autant de questions que vous voudrez, autant de réponses que nous pourrons apporter. Dites, exprimez ce que vous entendez autour de vous, parce que c'est à partir de là que va se faire la matière de ce choix profond, personnel. J'ai l'habitude de dire qu'un référendum, c'est formidable parce que chacun des citoyens se trouve, au moment de voter, dans la même situation que le président de la République au moment de décider d'une orientation ou de signer un traité. Chacun d'entre vous, dont la voix peut peser comme celle d'un décideur suprême. Au fond, c'est le plus grand acte de confiance qu'on puisse faire en direction d'un peuple de citoyens. C'est ce que nous avons bien l'intention d'être : citoyens, c'est-à-dire responsables. Je suis heureux de la campagne électorale que nous allons vivre ensemble. Je suis heureux que nous la commencions ce soir ensemble à Wasquehal, et je vous donne la parole pour les questions que vous entendez, ou que vous ressentez, dans la préparation du scrutin du 29 mai.
Je vous remercie.
(Source http://www.udf-europe.net, le 18 avril 2005)