Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Au moment où me revient l'honneur de clôturer vos travaux, je voudrais rappeler les principales raisons qui ont amené la Présidence française à organiser ce colloque sur "l'économie du livre dans l'espace européen". Le livre, objet culturel par excellence, est l'un des socles sur lesquels se fondent nos identités et s'exprime notre diversité. Depuis des siècles, il est l'un des supports privilégiés de la création, de l'échange, du débat artistique, intellectuel et littéraire dans le monde. Notre histoire européenne commune a été, elle-même, ponctuée par la publication d'oeuvres majeures qui en ont changé le cours politique, social ou religieux.
Aujourd'hui, le livre est devenu la première industrie culturelle, une industrie de contenus génératrice d'emplois, reposant sur le professionnalisme de l'ensemble des acteurs d'une chaîne aux maillons, à la fois, fragiles et nécessairement solidaires. Avec plusieurs millions de titres disponibles dans l'Union européenne, avec un fort mouvement d'exportation comme de cessions de droits, le livre constitue un formidable outil de développement économique.
Ce beau portrait du livre ne doit pas nous faire oublier ceux, qu'hélas, il ne concerne pas, car ils ne savent pas lire. Une de nos priorités politiques s'adresse à eux.
Nous assistons aujourd'hui à de profondes mutations technologiques qui viennent modifier la demande, l'offre et, plus généralement, l'organisation des métiers du livre, de sa production à sa diffusion. De nombreux intervenants ont souligné au cours de ces deux journées, que le numérique et Internet rendent possibles de nouvelles formes de distribution et de création. Le livre électronique nous ouvre désormais des horizons que nul ne soupçonnait, il y a seulement quelques années. Internet permet également le développement du commerce de livres en ligne.
Chacun d'entre nous, dès lors qu'il dispose d'un accès, peut désormais se procurer l'ouvrage qu'il recherche dans l'ensemble de la galaxie bibliographique mondiale. D'où les inquiétudes légitimes qu'éprouvent les acteurs de la diffusion traditionnelle. Plusieurs intervenants ont toutefois exprimé leur conviction que si le commerce en ligne était une chance supplémentaire pour la diffusion du livre, il ne constituait pas une alternative à la librairie de proximité dont nous savons tous le rôle majeur qu'elle joue dans la promotion et la diffusion du livre.
L'Union européenne est bien évidemment concernée par ces mutations. Notre droit européen doit évoluer à court terme pour en tenir compte. Dans ce contexte de grands changements, les pouvoirs publics ont l'obligation d'anticiper. Ceux-ci entendent que leurs politiques nationales soient respectées et non pas contournées. C'est la raison pour laquelle les conséquences liées au développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication rendent une réglementation européenne d'autant plus nécessaire.
Chacun des membres de l'Union européenne, chacun d'entre nous, souhaite préserver la diversité culturelle dont le livre est l'un des garants et des promoteurs. A ce double titre, nous nous devons de le préserver des effets d'une dérégulation sauvage. Je me réjouis de ce que votre séminaire y ait vu une grande priorité.
Le mode de fixation du prix de vente du livre constitue, à l'évidence, l'un des instruments de la régulation dans nos Etats. Dix pays sur quinze, membres de l'Union, disposent de systèmes de prix unique du livre, que ces systèmes soient d'origine législative ou contractuelle. Nous devons en tant que communauté, nous donner les moyens de les préserver. Tel a été le message que vous avez clairement fait entendre au cours de ces deux journées.
Les thématiques, correspondant aux quatre ateliers d'hier après-midi et de ce matin, ont donné lieu aux excellentes synthèses que viennent de nous présenter les rapporteurs de ces ateliers. J'en retiens quelques lignes de force pour notre action future.
La singularité de l'économie du livre tient d'abord à ses mécanismes de péréquation, qui garantissent la diversité de la production éditoriale. Elle tient aussi à ces recherches permanentes de solidarité et d'équilibre au sein de la chaîne du livre. Le nombre et la variété des références comme la recherche d'une juste rémunération des acteurs de la chaîne du livre, sont autant d'exigences qui doivent s'imposer à nous pour nous permettre de conduire des politiques bien construites en la matière.
Nos librairies qui sont depuis cinq siècles des lieux de commerce au sens le plus large du terme sont, cela va de soi, indispensables à la bonne diffusion du livre. Elles sont également des agents essentiels de l'animation culturelle de nos régions. Le commerce électronique est un vecteur supplémentaire de la diffusion du livre. Les libraires, pour le bien des lecteurs, doivent y trouver leur place.
Il est d'usage aujourd'hui, de parler de nouvelle économie et, par conséquent, d'une nouvelle économie du livre. La question de l'édition électronique renvoie à de nombreuses interrogations.
Le droit d'auteur, le statut des uvres, la place et le rôle de chacun des acteurs de la chaîne du livre, l'appropriation des oeuvres par le lecteur, mais aussi les décisions qu'il nous faut prendre, en termes juridiques et économiques, sont au cur des travaux de ces deux jours. Nous allons les poursuivre au sein de l'Europe dans les mois qui viennent.
Le développement du numérique et d'Internet, comme toutes les innovations majeures, soulève des inquiétudes légitimes. Mais les professionnels du livre comprennent aussi que ces nouvelles technologies peuvent les aider dans l'accomplissement de leurs métiers et qu'elles sont porteuses d'espoir pour la démocratisation du livre et de la lecture. Pour peu, naturellement, que tous les acteurs de la chaîne du livre, privés et publics, fassent preuve ensemble de vigilance, de clairvoyance et de détermination.
Chacun de nos Etats dispose d'un cadre juridique et réglementaire qu'il a bâti progressivement. L'européanisation des marchés, les évolutions des modes de production et de diffusion du livre, sont autant d'éléments sur lesquels il faut que l'Union européenne développe sa réflexion.
Il nous faudra arriver rapidement à mettre en uvre, à l'échelle communautaire, des dispositifs qui, tout en évitant l'écueil du conservatisme, soient respectueux des positions de chacun des Etats membres.
La Présidence française entend proposer au Conseil des Ministres de la culture du 23 novembre prochain des conclusions nourries par les travaux de notre colloque.
Au terme de vos réflexions, il me semble que l'on peut retenir :
* l'idée, unanimement affirmée, que les politiques du livre ont un lien essentiel avec la diversité culturelle. Tous nos pays y sont attachés ; il sera important de le rappeler.
* que ces politiques relèvent avant tout de la volonté des gouvernements nationaux. Chacun le sait, toute politique de régulation européenne concernant le livre s'inscrit dans un contexte où les décisions sont fortement ressenties comme relevant de la subsidiarité, c'est à dire, de la compétence des Etats.
* qu'il appartient à la Commission européenne l'application effective de ces réglementations en tenant compte du caractère spécifique de l'économie du livre au regard des règles européennes de la concurrence. Cette garantie devrait jouer, qu'il s'agisse du commerce électronique ou de la circulation des livres dans les zones linguistiques homogènes.
Vous avez souhaité, enfin, que la dynamique de notre rencontre puisse se poursuivre au-delà de ces deux journées passionnantes. Dans ces périodes de particulières incertitudes, un effort accru de vigilance s'impose. Tous les points de vue doivent s'exprimer. La richesse de notre rencontre vient de la réunion, pour une fois, de tous les métiers du livre.
Je prends bonne note de votre proposition que le réseau que nous venons de constituer, tous ensemble, à Strasbourg, devienne pérenne. Si vous en étiez d'accord, nous pourrions créer sur la toile un groupe permanent d'échanges composé de l'ensemble des participants de ce colloque. Un animateur aurait la responsabilité de faire vivre un forum traitant des questions que nous avons abordées au cours de ces deux journées. Pour conclure, je voudrais vous remercier tous, professionnels du livre, universitaires et représentants des administrations pour la richesse de votre participation.
Un merci spécial aux intervenants, aux animateurs et rapporteurs des ateliers, et à leurs interprètes, sans qui ce colloque n'aurait pas été ce terreau fertile sur lequel nous souhaitons continuer de cultiver nos échanges futurs.
Nos remerciements vont aussi aux représentants du Parlement européen et à ceux de la Commission. Qu'ils soient remerciés pour le concours qu'ils ont apporté à notre colloque.
Enfin, permettez-moi d'exprimer, en votre nom, notre reconnaissance à la ville de Strasbourg, siège du Parlement européen, et à son maire qui nous y a magnifiquement accueillis.
Depuis près de six siècles, la Ville de Strasbourg est intimement liée à l'histoire du livre. Je suis convaincu que nous venons, ensemble, à un moment crucial, d'en inscrire une nouvelle page.
(source http://www.culture.gouv.fr, le 3 octobre 2000)
Chers amis,
Au moment où me revient l'honneur de clôturer vos travaux, je voudrais rappeler les principales raisons qui ont amené la Présidence française à organiser ce colloque sur "l'économie du livre dans l'espace européen". Le livre, objet culturel par excellence, est l'un des socles sur lesquels se fondent nos identités et s'exprime notre diversité. Depuis des siècles, il est l'un des supports privilégiés de la création, de l'échange, du débat artistique, intellectuel et littéraire dans le monde. Notre histoire européenne commune a été, elle-même, ponctuée par la publication d'oeuvres majeures qui en ont changé le cours politique, social ou religieux.
Aujourd'hui, le livre est devenu la première industrie culturelle, une industrie de contenus génératrice d'emplois, reposant sur le professionnalisme de l'ensemble des acteurs d'une chaîne aux maillons, à la fois, fragiles et nécessairement solidaires. Avec plusieurs millions de titres disponibles dans l'Union européenne, avec un fort mouvement d'exportation comme de cessions de droits, le livre constitue un formidable outil de développement économique.
Ce beau portrait du livre ne doit pas nous faire oublier ceux, qu'hélas, il ne concerne pas, car ils ne savent pas lire. Une de nos priorités politiques s'adresse à eux.
Nous assistons aujourd'hui à de profondes mutations technologiques qui viennent modifier la demande, l'offre et, plus généralement, l'organisation des métiers du livre, de sa production à sa diffusion. De nombreux intervenants ont souligné au cours de ces deux journées, que le numérique et Internet rendent possibles de nouvelles formes de distribution et de création. Le livre électronique nous ouvre désormais des horizons que nul ne soupçonnait, il y a seulement quelques années. Internet permet également le développement du commerce de livres en ligne.
Chacun d'entre nous, dès lors qu'il dispose d'un accès, peut désormais se procurer l'ouvrage qu'il recherche dans l'ensemble de la galaxie bibliographique mondiale. D'où les inquiétudes légitimes qu'éprouvent les acteurs de la diffusion traditionnelle. Plusieurs intervenants ont toutefois exprimé leur conviction que si le commerce en ligne était une chance supplémentaire pour la diffusion du livre, il ne constituait pas une alternative à la librairie de proximité dont nous savons tous le rôle majeur qu'elle joue dans la promotion et la diffusion du livre.
L'Union européenne est bien évidemment concernée par ces mutations. Notre droit européen doit évoluer à court terme pour en tenir compte. Dans ce contexte de grands changements, les pouvoirs publics ont l'obligation d'anticiper. Ceux-ci entendent que leurs politiques nationales soient respectées et non pas contournées. C'est la raison pour laquelle les conséquences liées au développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication rendent une réglementation européenne d'autant plus nécessaire.
Chacun des membres de l'Union européenne, chacun d'entre nous, souhaite préserver la diversité culturelle dont le livre est l'un des garants et des promoteurs. A ce double titre, nous nous devons de le préserver des effets d'une dérégulation sauvage. Je me réjouis de ce que votre séminaire y ait vu une grande priorité.
Le mode de fixation du prix de vente du livre constitue, à l'évidence, l'un des instruments de la régulation dans nos Etats. Dix pays sur quinze, membres de l'Union, disposent de systèmes de prix unique du livre, que ces systèmes soient d'origine législative ou contractuelle. Nous devons en tant que communauté, nous donner les moyens de les préserver. Tel a été le message que vous avez clairement fait entendre au cours de ces deux journées.
Les thématiques, correspondant aux quatre ateliers d'hier après-midi et de ce matin, ont donné lieu aux excellentes synthèses que viennent de nous présenter les rapporteurs de ces ateliers. J'en retiens quelques lignes de force pour notre action future.
La singularité de l'économie du livre tient d'abord à ses mécanismes de péréquation, qui garantissent la diversité de la production éditoriale. Elle tient aussi à ces recherches permanentes de solidarité et d'équilibre au sein de la chaîne du livre. Le nombre et la variété des références comme la recherche d'une juste rémunération des acteurs de la chaîne du livre, sont autant d'exigences qui doivent s'imposer à nous pour nous permettre de conduire des politiques bien construites en la matière.
Nos librairies qui sont depuis cinq siècles des lieux de commerce au sens le plus large du terme sont, cela va de soi, indispensables à la bonne diffusion du livre. Elles sont également des agents essentiels de l'animation culturelle de nos régions. Le commerce électronique est un vecteur supplémentaire de la diffusion du livre. Les libraires, pour le bien des lecteurs, doivent y trouver leur place.
Il est d'usage aujourd'hui, de parler de nouvelle économie et, par conséquent, d'une nouvelle économie du livre. La question de l'édition électronique renvoie à de nombreuses interrogations.
Le droit d'auteur, le statut des uvres, la place et le rôle de chacun des acteurs de la chaîne du livre, l'appropriation des oeuvres par le lecteur, mais aussi les décisions qu'il nous faut prendre, en termes juridiques et économiques, sont au cur des travaux de ces deux jours. Nous allons les poursuivre au sein de l'Europe dans les mois qui viennent.
Le développement du numérique et d'Internet, comme toutes les innovations majeures, soulève des inquiétudes légitimes. Mais les professionnels du livre comprennent aussi que ces nouvelles technologies peuvent les aider dans l'accomplissement de leurs métiers et qu'elles sont porteuses d'espoir pour la démocratisation du livre et de la lecture. Pour peu, naturellement, que tous les acteurs de la chaîne du livre, privés et publics, fassent preuve ensemble de vigilance, de clairvoyance et de détermination.
Chacun de nos Etats dispose d'un cadre juridique et réglementaire qu'il a bâti progressivement. L'européanisation des marchés, les évolutions des modes de production et de diffusion du livre, sont autant d'éléments sur lesquels il faut que l'Union européenne développe sa réflexion.
Il nous faudra arriver rapidement à mettre en uvre, à l'échelle communautaire, des dispositifs qui, tout en évitant l'écueil du conservatisme, soient respectueux des positions de chacun des Etats membres.
La Présidence française entend proposer au Conseil des Ministres de la culture du 23 novembre prochain des conclusions nourries par les travaux de notre colloque.
Au terme de vos réflexions, il me semble que l'on peut retenir :
* l'idée, unanimement affirmée, que les politiques du livre ont un lien essentiel avec la diversité culturelle. Tous nos pays y sont attachés ; il sera important de le rappeler.
* que ces politiques relèvent avant tout de la volonté des gouvernements nationaux. Chacun le sait, toute politique de régulation européenne concernant le livre s'inscrit dans un contexte où les décisions sont fortement ressenties comme relevant de la subsidiarité, c'est à dire, de la compétence des Etats.
* qu'il appartient à la Commission européenne l'application effective de ces réglementations en tenant compte du caractère spécifique de l'économie du livre au regard des règles européennes de la concurrence. Cette garantie devrait jouer, qu'il s'agisse du commerce électronique ou de la circulation des livres dans les zones linguistiques homogènes.
Vous avez souhaité, enfin, que la dynamique de notre rencontre puisse se poursuivre au-delà de ces deux journées passionnantes. Dans ces périodes de particulières incertitudes, un effort accru de vigilance s'impose. Tous les points de vue doivent s'exprimer. La richesse de notre rencontre vient de la réunion, pour une fois, de tous les métiers du livre.
Je prends bonne note de votre proposition que le réseau que nous venons de constituer, tous ensemble, à Strasbourg, devienne pérenne. Si vous en étiez d'accord, nous pourrions créer sur la toile un groupe permanent d'échanges composé de l'ensemble des participants de ce colloque. Un animateur aurait la responsabilité de faire vivre un forum traitant des questions que nous avons abordées au cours de ces deux journées. Pour conclure, je voudrais vous remercier tous, professionnels du livre, universitaires et représentants des administrations pour la richesse de votre participation.
Un merci spécial aux intervenants, aux animateurs et rapporteurs des ateliers, et à leurs interprètes, sans qui ce colloque n'aurait pas été ce terreau fertile sur lequel nous souhaitons continuer de cultiver nos échanges futurs.
Nos remerciements vont aussi aux représentants du Parlement européen et à ceux de la Commission. Qu'ils soient remerciés pour le concours qu'ils ont apporté à notre colloque.
Enfin, permettez-moi d'exprimer, en votre nom, notre reconnaissance à la ville de Strasbourg, siège du Parlement européen, et à son maire qui nous y a magnifiquement accueillis.
Depuis près de six siècles, la Ville de Strasbourg est intimement liée à l'histoire du livre. Je suis convaincu que nous venons, ensemble, à un moment crucial, d'en inscrire une nouvelle page.
(source http://www.culture.gouv.fr, le 3 octobre 2000)