Texte intégral
Complexe et parfois confuse, la campagne référendaire pourrait être plus simple si l'on prenait la peine d'envisager avec honnêteté et responsabilité les termes exacts du débat. Qu'est-ce qui est en jeu le 29 mai ? Notre appartenance à l'Europe ? Tout le monde s'accorde à dire que non. Le gouvernement ? Encore moins. La Constitution européenne ? Oui.
De quoi s'agit-il ? D'un texte qui reprend, en les simplifiant, l'ensemble des traités européens en introduisant des nouveautés essentielles qui sont l'enjeu réel du référendum. La question est donc claire. Oui ou non, acceptons-nous ces nouveautés ? Mais encore faudrait-il que le débat s'engage sur ces éléments car les partisans du non les occultent assez habilement. La raison est assez évidente : la Constitution européenne ne comporte que des progrès et aucun recul.
Parmi l'ensemble des avancées contenues dans le texte, douze progrès majeurs se dégagent qui, au total, témoignent du passage à une nouvelle Europe, une Europe plus politique :
1) Un poids renforcé dans les décisions de l'Union pour les Etats les plus peuplés, comme la France et l'Allemagne, grâce à la nouvelle définition de la majorité qualifiée (article I-25). Le poids de la France passe, dans les décisions au Conseil, de 8 % actuellement à 13 % du total des droits de vote. Ensemble, la France et l'Allemagne passent de 17 % à 30 % des voix. Par ailleurs, les six pays fondateurs de l'Europe constitueront 47 % du total des voix, alors qu'ils n'en représentent que 33 % dans le système actuel.
2) La création d'un président du Conseil européen stable, à la suggestion de la France. A la tête de ce conseil des chefs d'Etat et de gouvernement, il disposera d'un mandat de deux ans et demi, au lieu de six mois dans le système actuel, ce qui lui permettra d'avoir une vision cohérente des actions de l'Union (article I-22) et d'agir dans la durée.
3) Le vote à la majorité devient la règle (article I-25 alinéa 3), ce qui permettra à l'Union d'être plus efficace. Vingt domaines nouveaux passent ainsi de l'unanimité à la majorité, dans des domaines majeurs comme, par exemple, le contrôle aux frontières ou la coordination des politiques économiques.
4) L'instauration d'un droit d'initiative populaire (article I-47), qui permet à un million de citoyens de participer directement à la vie démocratique de l'Union.
5) Le renforcement du rôle du Parlement européen (article I-20), à travers, notamment, la généralisation de la "codécision" (article I-34), qui place sur un pied d'égalité Conseil des ministres et Parlement européen, et l'élection du président de la Commission en fonction de la majorité politique issue des élections au Parlement (article I-27).
6) Le contrôle accru des Parlements nationaux sur l'activité de l'Union et plus particulièrement sur le respect par l'Union de son champ de compétence. Il s'agit de garantir que l'Europe n'intervient que si son action apporte une vraie valeur ajoutée par rapport à l'action des Etats membres ou des collectivités territoriales (article I-11 ; protocoles numéros 1 et 2).
7) La protection des services publics (article III-122), qui ne sont plus définis par exception aux règles de la concurrence mais reconnus comme étant l'instrument incontournable de la cohésion sociale et territoriale.
8) La prise en compte des exigences sociales dans la mise en oeuvre de toutes les politiques de l'Union européenne (clause sociale horizontale : article III-117).
9) Le renforcement de la capacité d'action de l'Union pour lutter contre la grande criminalité transfrontière (article III-271), le terrorisme, l'exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic de drogue...
10) La création d'un ministre européen des Affaires étrangères pour mieux faire entendre la voix de l'Europe dans le monde (article I-28), dont l'action sera appuyée sur un service diplomatique européen (article III-296), outil de la politique étrangère commune. Chaque Etat gardera sa liberté de choix si une position commune n'est pas atteinte.
11) Le renforcement de l'Europe de la défense, à travers en particulier la clause de défense mutuelle, au cas où un Etat membre serait l'objet d'une agression armée sur son territoire (article I-41 alinéa 7), et par la mise en place de l'Agence européenne de l'armement.
12) L'instauration d'une "clause de solidarité" entre les Etats européens, en cas d'attaque terroriste ou de catastrophe naturelle (articles I-43 ; III-329).
Comment imaginer, sincèrement, que l'on renonce à ces progrès réels et à quelques autres ? Le traité constitutionnel ajoute. Il ne retranche rien.
Un mot, enfin, de l'affirmation selon laquelle un non français conduirait immédiatement à une nouvelle négociation européenne. Pour qui prend-on nos partenaires et nos voisins ? Comment imaginer que la France obtienne la renégociation d'un texte qu'elle a très largement inspiré, sur lequel elle a mobilisé tous ses efforts pour convaincre nos partenaires ? Sur quelles bases une discussion pourrait-elle s'engager ? Comment concevoir qu'un élan puisse naître d'un cartel des non où se retrouvent à la fois des partisans de l'Europe et des adversaires déclarés de l'Union, des responsables politiques qui exigent davantage du traité et d'autres qui, au contraire, trouvent que la Constitution est trop envahissante ?
Oui, nous sommes à un moment clé de notre histoire : ou bien les nations européennes franchissent, à travers la Constitution, l'étape décisive qui leur permettra ensemble de se faire respecter ; ou bien, divisées, elles sont condamnées à l'impuissance, au déclin et, je le crains, à la subordination. Je ne me résoudrai jamais à l'idée d'une Europe sans influence, ou sous influence.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 mai 2005)
De quoi s'agit-il ? D'un texte qui reprend, en les simplifiant, l'ensemble des traités européens en introduisant des nouveautés essentielles qui sont l'enjeu réel du référendum. La question est donc claire. Oui ou non, acceptons-nous ces nouveautés ? Mais encore faudrait-il que le débat s'engage sur ces éléments car les partisans du non les occultent assez habilement. La raison est assez évidente : la Constitution européenne ne comporte que des progrès et aucun recul.
Parmi l'ensemble des avancées contenues dans le texte, douze progrès majeurs se dégagent qui, au total, témoignent du passage à une nouvelle Europe, une Europe plus politique :
1) Un poids renforcé dans les décisions de l'Union pour les Etats les plus peuplés, comme la France et l'Allemagne, grâce à la nouvelle définition de la majorité qualifiée (article I-25). Le poids de la France passe, dans les décisions au Conseil, de 8 % actuellement à 13 % du total des droits de vote. Ensemble, la France et l'Allemagne passent de 17 % à 30 % des voix. Par ailleurs, les six pays fondateurs de l'Europe constitueront 47 % du total des voix, alors qu'ils n'en représentent que 33 % dans le système actuel.
2) La création d'un président du Conseil européen stable, à la suggestion de la France. A la tête de ce conseil des chefs d'Etat et de gouvernement, il disposera d'un mandat de deux ans et demi, au lieu de six mois dans le système actuel, ce qui lui permettra d'avoir une vision cohérente des actions de l'Union (article I-22) et d'agir dans la durée.
3) Le vote à la majorité devient la règle (article I-25 alinéa 3), ce qui permettra à l'Union d'être plus efficace. Vingt domaines nouveaux passent ainsi de l'unanimité à la majorité, dans des domaines majeurs comme, par exemple, le contrôle aux frontières ou la coordination des politiques économiques.
4) L'instauration d'un droit d'initiative populaire (article I-47), qui permet à un million de citoyens de participer directement à la vie démocratique de l'Union.
5) Le renforcement du rôle du Parlement européen (article I-20), à travers, notamment, la généralisation de la "codécision" (article I-34), qui place sur un pied d'égalité Conseil des ministres et Parlement européen, et l'élection du président de la Commission en fonction de la majorité politique issue des élections au Parlement (article I-27).
6) Le contrôle accru des Parlements nationaux sur l'activité de l'Union et plus particulièrement sur le respect par l'Union de son champ de compétence. Il s'agit de garantir que l'Europe n'intervient que si son action apporte une vraie valeur ajoutée par rapport à l'action des Etats membres ou des collectivités territoriales (article I-11 ; protocoles numéros 1 et 2).
7) La protection des services publics (article III-122), qui ne sont plus définis par exception aux règles de la concurrence mais reconnus comme étant l'instrument incontournable de la cohésion sociale et territoriale.
8) La prise en compte des exigences sociales dans la mise en oeuvre de toutes les politiques de l'Union européenne (clause sociale horizontale : article III-117).
9) Le renforcement de la capacité d'action de l'Union pour lutter contre la grande criminalité transfrontière (article III-271), le terrorisme, l'exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic de drogue...
10) La création d'un ministre européen des Affaires étrangères pour mieux faire entendre la voix de l'Europe dans le monde (article I-28), dont l'action sera appuyée sur un service diplomatique européen (article III-296), outil de la politique étrangère commune. Chaque Etat gardera sa liberté de choix si une position commune n'est pas atteinte.
11) Le renforcement de l'Europe de la défense, à travers en particulier la clause de défense mutuelle, au cas où un Etat membre serait l'objet d'une agression armée sur son territoire (article I-41 alinéa 7), et par la mise en place de l'Agence européenne de l'armement.
12) L'instauration d'une "clause de solidarité" entre les Etats européens, en cas d'attaque terroriste ou de catastrophe naturelle (articles I-43 ; III-329).
Comment imaginer, sincèrement, que l'on renonce à ces progrès réels et à quelques autres ? Le traité constitutionnel ajoute. Il ne retranche rien.
Un mot, enfin, de l'affirmation selon laquelle un non français conduirait immédiatement à une nouvelle négociation européenne. Pour qui prend-on nos partenaires et nos voisins ? Comment imaginer que la France obtienne la renégociation d'un texte qu'elle a très largement inspiré, sur lequel elle a mobilisé tous ses efforts pour convaincre nos partenaires ? Sur quelles bases une discussion pourrait-elle s'engager ? Comment concevoir qu'un élan puisse naître d'un cartel des non où se retrouvent à la fois des partisans de l'Europe et des adversaires déclarés de l'Union, des responsables politiques qui exigent davantage du traité et d'autres qui, au contraire, trouvent que la Constitution est trop envahissante ?
Oui, nous sommes à un moment clé de notre histoire : ou bien les nations européennes franchissent, à travers la Constitution, l'étape décisive qui leur permettra ensemble de se faire respecter ; ou bien, divisées, elles sont condamnées à l'impuissance, au déclin et, je le crains, à la subordination. Je ne me résoudrai jamais à l'idée d'une Europe sans influence, ou sous influence.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 mai 2005)