Texte intégral
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Président des Affaires culturelles,
Monsieur le Président Philippe Adnot,
Monsieur le Directeur Général de l'Institut Pasteur,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais vous remercier, Monsieur le Président, d'avoir pris l'initiative de consacrer une journée de plus à la recherche dans le calendrier si chargé du Sénat. Après l'accueil l'automne dernier de la Fête de la Science, le Sénat démontre une fois de plus son grand intérêt pour la recherche et la science, son souci aussi d'être un lieu de rencontre et de dialogue entre le grand public et tous les acteurs de la recherche.
Cette démarche est légitime est salutaire. Nous avons besoin plus de dialogue entre les communautés de la recherche mais aussi avec nos concitoyens, pour réconcilier les Français avec leur recherche et surtout avec le progrès des sciences. La France doit tenir encore davantage son rang dans un environnement toujours plus dur et compétitif, où sont comparés en permanence les systèmes de recherche, de soutien à l'innovation, les laboratoires, les grandes institutions, les universités, les grands organismes de recherche, les chercheurs et les enseignants-chercheurs.
Nous sommes impliqués dans une bataille impitoyable, notamment depuis quelques années avec la mondialisation. Aujourd'hui plus que jamais, chacun est évalué dans le cadre de procédures, de standards internationaux qui parfois se traduisent par des classements mondiaux, des rankings d'universités ou d'organismes de recherche.
Un jour viendra sans doute où une université française jouera le rôle de l'Université de Shangaï, qui a eu l'idée de classer différentes universités du monde afin que les étudiants chinois souhaitant se rendre à l'étranger puissent savoir à quoi s'en tenir quant à l'efficacité et la qualité de la recherche menée. Ces indicateurs de performance montrent la dureté de la compétition scientifique et technologique dans le monde.
Je voudrais également remercier tous les organisateurs de " Tremplin Recherche ", en particulier le Président Philippe Adnot, pour qui la recherche et le développement technologique sont des valeurs importantes.
Cette journée prend un relief particulier cette année, où la recherche et le développement sont placés au coeur de la politique du Gouvernement et où une loi d'orientation et de programmation sur la recherche et l'innovation s'apprête à être votée.
La recherche doit être au coeur de la préoccupation des pouvoirs publics et de tous les grands acteurs de notre pays. Elle doit tenir une place plus importante dans les décisions budgétaires de l'Etat mais également dans la stratégie des entreprises. L'une des caractéristiques de notre système de recherche est le niveau d'investissement trop faible des entreprises dans la recherche. Pour atteindre les 3 % de PIB fixés par les critères de Lisbonne et de Barcelone, nous avons encore un long chemin à parcourir, non seulement pour la recherche publique en termes de mobilisations des moyens, mais surtout en termes d'investissement de toutes les entreprises. Certaines entreprises ont parfois tendance à préférer une financiarisation à court terme plutôt qu'un investissement à long terme dans la recherche et donc dans l'innovation.
Le Président de la République a annoncé que l'Etat allait consacrer six milliards d'euros supplémentaires pour la recherche ces trois prochaines années. Il s'agit je crois d'un signe très important, qui permettra de développer à la fois les moyens de la recherche et l'impact de la recherche sur l'ensemble de l'économie et de la société.
Il ne faut en aucune façon considérer le texte apparu sur certains écrans comme étant définitif. Il s'agit pour ainsi dire d'un brouillon ; nous discutons actuellement avec des représentants de la communauté scientifique afin de déterminer le meilleur moyen de mettre en place un système permettant réellement de dégager des priorités en matière de recherche par des moyens budgétaires qui soient interrompus. La recherche a aujourd'hui besoin de stabilité financière et budgétaire.
Au sein de cette loi, chaque domaine de recherche aura sa place, et tout particulièrement la recherche académique, qui représente aujourd'hui plus de 50 % de notre recherche publique. Nous oeuvrons pour que la recherche fondamentale et la recherche académique aient les moyens nécessaires pour rayonner, faire avancer la connaissance, et servir de base pour des applications, pour une valorisation. Dans le projet de loi que nous préparons, nos souhaitons donner à la recherche fondamentale une place plus visible, plus performante, en nous inspirant des meilleures pratiques des pays étrangers, des standards internationaux, pour donner un nouvel élan à la recherche française, qu'elle se fasse dans les laboratoires universitaires ou dans les laboratoires des grands organismes. Il est absolument nécessaire que l'Université retrouve un rôle majeur dans l'organisation de la recherche en France, qu'il s'agisse de recherche fondamentale ou d'application. Ces deux piliers doivent être aussi solides l'un que l'autre et sortir renforcés du vote de cette loi à la fin du premier semestre 2005.
L'éclatement, la dispersion et les cloisonnements ont montré leurs limites. Nous voulons aujourd'hui une recherche plus unie entre les grands organismes et les universités, mais aussi, lorsque cela est possible, entre le public et le privé, entre les scientifiques et les citoyens.
Nous souhaitons également plus de transparence dans l'attribution des moyens financiers et dans l'évaluation, une sélection des meilleurs chercheurs et des meilleurs projets impartiale, une véritable stratégie nationale élaborée dans la concertation, à l'écoute des citoyens. Tel est notre projet pour la recherche.
Cette ambition n'est pas incompatible avec le renforcement d'une recherche plus immédiatement en phase avec les attentes économiques et sociales, qu'elles soient conduites par le public ou par le privé. Ce type de recherche mérite lui aussi toute notre attention. Pasteur est le meilleur exemple de ce lien existant entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Ses travaux conduits pour améliorer la fabrication de la bière ont contribué à des découvertes essentielles pour l'humanité. Les applications que nous pouvons attendre en matière de santé, de transport, de mise à disposition d'information, sont gigantesques et représentent un formidable outil de développement pour notre pays. Il me semble donc tout à fait essentiel que l'ensemble de la communauté scientifique soit convaincu des liens mutuellement féconds existant entre toutes les formes de recherche.
En ce qui concerne plus spécifiquement la recherche appliquée, l'innovation et la valorisation, un réel effort a été accompli depuis la fin des années 90, avec entre autres la loi sur l'innovation, les CPI, les incubateurs ou les fonds d'amorçage. Ainsi, depuis leur création, les seize fonds d'amorçage gérés par la Caisse des Dépôts et Consignations ont participé au lancement de 165 entreprises, dont une cinquantaine dans les sciences de la vie. Il est intéressant de noter que 50 % des entreprises concernées sont passées par un incubateur public, que 50 % d'entre elles sont issues de la recherche publique et que les organismes publics de recherche abondent le capital des fonds d'amorçage à hauteur de 34 millions d'euros, ce qui témoigne de leur implication en matière de valorisation de la recherche.
Autre résultat encourageant, le concours d'aide à la création d'entreprises innovantes a conduit depuis son origine à la création de 682 entreprises, les 1 400 lauréats des six premières éditions ayant reçu près de 150 millions d'euros.
Enfin, le bilan 2004 des projets incubés par les 29 incubateurs labellisés par le Ministère indique qu'au moins 650 entreprises ont bénéficié de ce dispositif ; elles comptent en moyenne cinq emplois chacune.
Ce sont là de bons résultats, mais nous sommes conscients des progrès encore à accomplir. En matière de dépôts de brevets, la France accuse un retard important par rapport à ses concurrents, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé. L'Allemagne dépose deux fois plus de brevets européens par habitant que la France, et nos indices sont en régression constante dans ce domaine. Nous pesons désormais moins de 7 % des brevets européens déposés.
Déposer un brevet ne suffit pas : encore faut-il savoir le valoriser. Pour inciter les chercheurs des établissements publics de recherche à déposer des brevets mais aussi à les valoriser, le Gouvernement a, dans le cadre du plan innovation, mis en place une prime au brevet. Elle s'élève à 3 000 euros et est accordée à un ou plusieurs chercheurs d'un établissement public à l'origine du dépôt d'un brevet. Pour limiter les effets d'aubaine, 80 % de la prime ne sont versés qu'une fois le brevet valorisé. J'espère que nous mesurerons rapidement les effets positifs de ce dispositif.
Au-delà de ces dispositions incitatives franco-françaises, il est indéniable qu'une harmonisation européenne des procédures représente également un enjeu essentiel. L'objectif est de réduire les coûts et les risques des brevets de façon à rester compétitifs face à nos grands concurrents que sont les Etats-Unis et le Japon.
La création d'une entreprise technologique est une autre façon de valoriser les résultats de la recherche. Jusqu'à la fin des années 90, la création d'une entreprise technologique ne représentait qu'une très faible proportion des actions de valorisation, les pouvoirs publics se limitant souvent à inciter les établissements publics de recherche à faire du transfert de technologie par concession de licence. En 1999, la loi a donné la possibilité à des chercheurs du secteur public de participer à la création d'entreprises technologiques issues des résultats de leur recherche. Ce faisant, l'Etat a non seulement favorisé la création d'entreprises, mais il a aussi contribué à rapprocher deux mondes qui ne se connaissaient pas suffisamment. Le bilan que l'on peut en faire après cinq années est bon. Ainsi, plus de 450 chercheurs ont bénéficié des dispositions de la loi sur l'innovation et la recherche. Mais c'est tout autant le changement culturel que l'on commence à percevoir qui constitue sans doute le résultat le plus appréciable.
Nous avons toutefois noté quelques freins à la totale efficacité du dispositif. Ces freins seront levés dans le cadre de la prochaine loi d'orientation et de programmation sur la recherche, notamment en ce qui concerne le taux de participation maximum que les chercheurs peuvent détenir au capital de la société créée, qui pourrait passer de 15 à 30 %.
Les start-up parviennent pour leur part rarement à dépasser le stade critique de la vingtaine de millions d'euros de chiffre d'affaires. Dans ce domaine, nous ne souffrons pas la comparaison avec les Etats-Unis, ses Google et ses Cisco. Les 25 plus grandes entreprises françaises existaient déjà en 1960 alors que 19 des 25 plus grandes entreprises américaines sont nées depuis.
Après un an de mise en oeuvre, le dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes a conduit à des résultats encourageants. 791 JEI s'étaient déclarées au 30 novembre 2004, représentant plus de 4 000 salariés, pour la plupart fortement qualifiés. D'ores et déjà, plus de 1 000 entreprises ont fait appel à ce dispositif pour un montant d'exonération dépassant les 35 millions d'euros.
D'autres voies d'amélioration sont envisageables. Je ne doute pas notamment que les questions de maturité technologique des projets ainsi que les difficultés d'accès au capital ou au marché des grands comptes soient évoquées lors des tables rondes de notre journée. Il y a là aussi des progrès notables à accomplir.
Il convient aussi de favoriser la mutualisation et la professionnalisation des structures de valorisation des établissements publics de recherche, des universités et des organismes. Nous avons en particulier décidé de rendre systématique le mandataire unique lorsque les équipes dépendant de plusieurs établissements sont impliquées dans un même projet de transfert.
Nous souhaitons également inciter les regroupements de structures de valorisation, en particulier dans les Pôles de Recherche et d'Enseignement Supérieur que la loi devrait mettre en place. Il convient enfin de donner à ces structures tous les moyens de fonctionner correctement quelle que soit leur forme juridique.
Pour terminer, je voudrais insister sur l'importance d'une recherche technologique conduite en partenariat entre un laboratoire publique et une entreprise. Elle est encore trop peu développée en France ; elle est pourtant tout à fait propice à la diffusion d'innovations technologiques. C'est pourquoi nous soutiendrons le développement d'un réseau de structures publiques de recherche qui placent la recherche technologique au centre de leurs préoccupations. Nous nous inspirons des modèles qui ont fait leur preuve dans d'autres pays d'Europe comme l'Allemagne ou les Pays-Bas. Ces instituts, que nous baptiserons Carnot, ne seront bien entendu pas créés ex nihilo, mais s'appuieront sur l'existant en le rendant plus performant et plus visible. Là encore, il s'agira d'une démarche expérimentale et volontariste reposant sur la volonté effective des acteurs.
Toutes ces actions participent d'un même objectif : rendre notre potentiel public de recherche plus visible et plus accessible, et lui donner toutes ses chances dans la compétition internationale, ce qui contribuera à faire de la France l'un des pays les plus attractifs pour faire de la recherche et pour innover en Europe et dans le monde, que l'on soit étudiant, chercheur, investisseur ou entreprise. Ceci constitue un objectif que tous les acteurs du système français de recherche et d'innovation, publics et privés, devraient avoir à coeur de partager.
Je vous remercie.
(Source http://www.senat.fr, le 4 avril 2005)
Monsieur le Président des Affaires culturelles,
Monsieur le Président Philippe Adnot,
Monsieur le Directeur Général de l'Institut Pasteur,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais vous remercier, Monsieur le Président, d'avoir pris l'initiative de consacrer une journée de plus à la recherche dans le calendrier si chargé du Sénat. Après l'accueil l'automne dernier de la Fête de la Science, le Sénat démontre une fois de plus son grand intérêt pour la recherche et la science, son souci aussi d'être un lieu de rencontre et de dialogue entre le grand public et tous les acteurs de la recherche.
Cette démarche est légitime est salutaire. Nous avons besoin plus de dialogue entre les communautés de la recherche mais aussi avec nos concitoyens, pour réconcilier les Français avec leur recherche et surtout avec le progrès des sciences. La France doit tenir encore davantage son rang dans un environnement toujours plus dur et compétitif, où sont comparés en permanence les systèmes de recherche, de soutien à l'innovation, les laboratoires, les grandes institutions, les universités, les grands organismes de recherche, les chercheurs et les enseignants-chercheurs.
Nous sommes impliqués dans une bataille impitoyable, notamment depuis quelques années avec la mondialisation. Aujourd'hui plus que jamais, chacun est évalué dans le cadre de procédures, de standards internationaux qui parfois se traduisent par des classements mondiaux, des rankings d'universités ou d'organismes de recherche.
Un jour viendra sans doute où une université française jouera le rôle de l'Université de Shangaï, qui a eu l'idée de classer différentes universités du monde afin que les étudiants chinois souhaitant se rendre à l'étranger puissent savoir à quoi s'en tenir quant à l'efficacité et la qualité de la recherche menée. Ces indicateurs de performance montrent la dureté de la compétition scientifique et technologique dans le monde.
Je voudrais également remercier tous les organisateurs de " Tremplin Recherche ", en particulier le Président Philippe Adnot, pour qui la recherche et le développement technologique sont des valeurs importantes.
Cette journée prend un relief particulier cette année, où la recherche et le développement sont placés au coeur de la politique du Gouvernement et où une loi d'orientation et de programmation sur la recherche et l'innovation s'apprête à être votée.
La recherche doit être au coeur de la préoccupation des pouvoirs publics et de tous les grands acteurs de notre pays. Elle doit tenir une place plus importante dans les décisions budgétaires de l'Etat mais également dans la stratégie des entreprises. L'une des caractéristiques de notre système de recherche est le niveau d'investissement trop faible des entreprises dans la recherche. Pour atteindre les 3 % de PIB fixés par les critères de Lisbonne et de Barcelone, nous avons encore un long chemin à parcourir, non seulement pour la recherche publique en termes de mobilisations des moyens, mais surtout en termes d'investissement de toutes les entreprises. Certaines entreprises ont parfois tendance à préférer une financiarisation à court terme plutôt qu'un investissement à long terme dans la recherche et donc dans l'innovation.
Le Président de la République a annoncé que l'Etat allait consacrer six milliards d'euros supplémentaires pour la recherche ces trois prochaines années. Il s'agit je crois d'un signe très important, qui permettra de développer à la fois les moyens de la recherche et l'impact de la recherche sur l'ensemble de l'économie et de la société.
Il ne faut en aucune façon considérer le texte apparu sur certains écrans comme étant définitif. Il s'agit pour ainsi dire d'un brouillon ; nous discutons actuellement avec des représentants de la communauté scientifique afin de déterminer le meilleur moyen de mettre en place un système permettant réellement de dégager des priorités en matière de recherche par des moyens budgétaires qui soient interrompus. La recherche a aujourd'hui besoin de stabilité financière et budgétaire.
Au sein de cette loi, chaque domaine de recherche aura sa place, et tout particulièrement la recherche académique, qui représente aujourd'hui plus de 50 % de notre recherche publique. Nous oeuvrons pour que la recherche fondamentale et la recherche académique aient les moyens nécessaires pour rayonner, faire avancer la connaissance, et servir de base pour des applications, pour une valorisation. Dans le projet de loi que nous préparons, nos souhaitons donner à la recherche fondamentale une place plus visible, plus performante, en nous inspirant des meilleures pratiques des pays étrangers, des standards internationaux, pour donner un nouvel élan à la recherche française, qu'elle se fasse dans les laboratoires universitaires ou dans les laboratoires des grands organismes. Il est absolument nécessaire que l'Université retrouve un rôle majeur dans l'organisation de la recherche en France, qu'il s'agisse de recherche fondamentale ou d'application. Ces deux piliers doivent être aussi solides l'un que l'autre et sortir renforcés du vote de cette loi à la fin du premier semestre 2005.
L'éclatement, la dispersion et les cloisonnements ont montré leurs limites. Nous voulons aujourd'hui une recherche plus unie entre les grands organismes et les universités, mais aussi, lorsque cela est possible, entre le public et le privé, entre les scientifiques et les citoyens.
Nous souhaitons également plus de transparence dans l'attribution des moyens financiers et dans l'évaluation, une sélection des meilleurs chercheurs et des meilleurs projets impartiale, une véritable stratégie nationale élaborée dans la concertation, à l'écoute des citoyens. Tel est notre projet pour la recherche.
Cette ambition n'est pas incompatible avec le renforcement d'une recherche plus immédiatement en phase avec les attentes économiques et sociales, qu'elles soient conduites par le public ou par le privé. Ce type de recherche mérite lui aussi toute notre attention. Pasteur est le meilleur exemple de ce lien existant entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Ses travaux conduits pour améliorer la fabrication de la bière ont contribué à des découvertes essentielles pour l'humanité. Les applications que nous pouvons attendre en matière de santé, de transport, de mise à disposition d'information, sont gigantesques et représentent un formidable outil de développement pour notre pays. Il me semble donc tout à fait essentiel que l'ensemble de la communauté scientifique soit convaincu des liens mutuellement féconds existant entre toutes les formes de recherche.
En ce qui concerne plus spécifiquement la recherche appliquée, l'innovation et la valorisation, un réel effort a été accompli depuis la fin des années 90, avec entre autres la loi sur l'innovation, les CPI, les incubateurs ou les fonds d'amorçage. Ainsi, depuis leur création, les seize fonds d'amorçage gérés par la Caisse des Dépôts et Consignations ont participé au lancement de 165 entreprises, dont une cinquantaine dans les sciences de la vie. Il est intéressant de noter que 50 % des entreprises concernées sont passées par un incubateur public, que 50 % d'entre elles sont issues de la recherche publique et que les organismes publics de recherche abondent le capital des fonds d'amorçage à hauteur de 34 millions d'euros, ce qui témoigne de leur implication en matière de valorisation de la recherche.
Autre résultat encourageant, le concours d'aide à la création d'entreprises innovantes a conduit depuis son origine à la création de 682 entreprises, les 1 400 lauréats des six premières éditions ayant reçu près de 150 millions d'euros.
Enfin, le bilan 2004 des projets incubés par les 29 incubateurs labellisés par le Ministère indique qu'au moins 650 entreprises ont bénéficié de ce dispositif ; elles comptent en moyenne cinq emplois chacune.
Ce sont là de bons résultats, mais nous sommes conscients des progrès encore à accomplir. En matière de dépôts de brevets, la France accuse un retard important par rapport à ses concurrents, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé. L'Allemagne dépose deux fois plus de brevets européens par habitant que la France, et nos indices sont en régression constante dans ce domaine. Nous pesons désormais moins de 7 % des brevets européens déposés.
Déposer un brevet ne suffit pas : encore faut-il savoir le valoriser. Pour inciter les chercheurs des établissements publics de recherche à déposer des brevets mais aussi à les valoriser, le Gouvernement a, dans le cadre du plan innovation, mis en place une prime au brevet. Elle s'élève à 3 000 euros et est accordée à un ou plusieurs chercheurs d'un établissement public à l'origine du dépôt d'un brevet. Pour limiter les effets d'aubaine, 80 % de la prime ne sont versés qu'une fois le brevet valorisé. J'espère que nous mesurerons rapidement les effets positifs de ce dispositif.
Au-delà de ces dispositions incitatives franco-françaises, il est indéniable qu'une harmonisation européenne des procédures représente également un enjeu essentiel. L'objectif est de réduire les coûts et les risques des brevets de façon à rester compétitifs face à nos grands concurrents que sont les Etats-Unis et le Japon.
La création d'une entreprise technologique est une autre façon de valoriser les résultats de la recherche. Jusqu'à la fin des années 90, la création d'une entreprise technologique ne représentait qu'une très faible proportion des actions de valorisation, les pouvoirs publics se limitant souvent à inciter les établissements publics de recherche à faire du transfert de technologie par concession de licence. En 1999, la loi a donné la possibilité à des chercheurs du secteur public de participer à la création d'entreprises technologiques issues des résultats de leur recherche. Ce faisant, l'Etat a non seulement favorisé la création d'entreprises, mais il a aussi contribué à rapprocher deux mondes qui ne se connaissaient pas suffisamment. Le bilan que l'on peut en faire après cinq années est bon. Ainsi, plus de 450 chercheurs ont bénéficié des dispositions de la loi sur l'innovation et la recherche. Mais c'est tout autant le changement culturel que l'on commence à percevoir qui constitue sans doute le résultat le plus appréciable.
Nous avons toutefois noté quelques freins à la totale efficacité du dispositif. Ces freins seront levés dans le cadre de la prochaine loi d'orientation et de programmation sur la recherche, notamment en ce qui concerne le taux de participation maximum que les chercheurs peuvent détenir au capital de la société créée, qui pourrait passer de 15 à 30 %.
Les start-up parviennent pour leur part rarement à dépasser le stade critique de la vingtaine de millions d'euros de chiffre d'affaires. Dans ce domaine, nous ne souffrons pas la comparaison avec les Etats-Unis, ses Google et ses Cisco. Les 25 plus grandes entreprises françaises existaient déjà en 1960 alors que 19 des 25 plus grandes entreprises américaines sont nées depuis.
Après un an de mise en oeuvre, le dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes a conduit à des résultats encourageants. 791 JEI s'étaient déclarées au 30 novembre 2004, représentant plus de 4 000 salariés, pour la plupart fortement qualifiés. D'ores et déjà, plus de 1 000 entreprises ont fait appel à ce dispositif pour un montant d'exonération dépassant les 35 millions d'euros.
D'autres voies d'amélioration sont envisageables. Je ne doute pas notamment que les questions de maturité technologique des projets ainsi que les difficultés d'accès au capital ou au marché des grands comptes soient évoquées lors des tables rondes de notre journée. Il y a là aussi des progrès notables à accomplir.
Il convient aussi de favoriser la mutualisation et la professionnalisation des structures de valorisation des établissements publics de recherche, des universités et des organismes. Nous avons en particulier décidé de rendre systématique le mandataire unique lorsque les équipes dépendant de plusieurs établissements sont impliquées dans un même projet de transfert.
Nous souhaitons également inciter les regroupements de structures de valorisation, en particulier dans les Pôles de Recherche et d'Enseignement Supérieur que la loi devrait mettre en place. Il convient enfin de donner à ces structures tous les moyens de fonctionner correctement quelle que soit leur forme juridique.
Pour terminer, je voudrais insister sur l'importance d'une recherche technologique conduite en partenariat entre un laboratoire publique et une entreprise. Elle est encore trop peu développée en France ; elle est pourtant tout à fait propice à la diffusion d'innovations technologiques. C'est pourquoi nous soutiendrons le développement d'un réseau de structures publiques de recherche qui placent la recherche technologique au centre de leurs préoccupations. Nous nous inspirons des modèles qui ont fait leur preuve dans d'autres pays d'Europe comme l'Allemagne ou les Pays-Bas. Ces instituts, que nous baptiserons Carnot, ne seront bien entendu pas créés ex nihilo, mais s'appuieront sur l'existant en le rendant plus performant et plus visible. Là encore, il s'agira d'une démarche expérimentale et volontariste reposant sur la volonté effective des acteurs.
Toutes ces actions participent d'un même objectif : rendre notre potentiel public de recherche plus visible et plus accessible, et lui donner toutes ses chances dans la compétition internationale, ce qui contribuera à faire de la France l'un des pays les plus attractifs pour faire de la recherche et pour innover en Europe et dans le monde, que l'on soit étudiant, chercheur, investisseur ou entreprise. Ceci constitue un objectif que tous les acteurs du système français de recherche et d'innovation, publics et privés, devraient avoir à coeur de partager.
Je vous remercie.
(Source http://www.senat.fr, le 4 avril 2005)