Déclaration de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères, lors d'un point de presse conjoint avec M. Silvan Shalom, ministre israélien des affaires étrangères, sur les relations franco-israéliennes, le dialogue israélo-palestinien et l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais, M. Rafik Hariri, à Paris le 14 février 2005.

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Circonstance : Visite en France de M. Silvan Shalom, ministre israélien des affaires étrangères, à Paris le 14 février 2005

Texte intégral

Mesdames et Messieurs, bonjour, merci de votre attention et de votre patience.
Je suis sincèrement heureux de retrouver Silvan Shalom, mon collègue et ami, avec lequel j'ai entrepris, il y a maintenant quelques mois, un dialogue très direct, très franc, très constructif, pour renforcer encore les relations entre nos deux gouvernements, entre nos deux pays, les sociétés de nos deux pays. C'est d'ailleurs précisément cette mission qu'avait reçue un groupe de travail de haut niveau présidé par deux personnalités importantes, incontestables, l'ambassadeur Yehouda Lancry et le professeur Khayat, que je veux remercier officiellement pour le travail qu'ils ont fait et que nous allons continuer, en l'amplifiant, pour renforcer encore les relations entre nos deux pays.
Nous avons eu, avec Silvan Shalom, beaucoup d'occasions de nous retrouver : au mois d'octobre dernier, lorsque j'ai fait une vraie visite bilatérale en Israël pendant trois jours ; à New York, récemment encore, à l'occasion de cette session exceptionnelle des Nations unies où nous étions ensemble pour la commémoration de la libération des camps de concentration. J'étais aux côtés du président de la République à Auschwitz, quelques jours plus tard, où nous avons eu un entretien très important avec le président Katzav et la semaine dernière, lundi, j'ai eu l'occasion de retrouver le ministre des Affaires étrangères, et de rencontrer le Premier ministre Ariel Sharon.
Nous nous trouvons à la veille d'une rencontre, que nous jugeons les uns et les autres extrêmement importante : la reprise du dialogue direct entre Israéliens et Palestiniens est la première condition de la paix que nous recherchons entre l'Etat d'Israël et le futur Etat palestinien. La rencontre à Charm el-Cheikh ouvre des perspectives et, bien sûr, il est très important que le fil de ce dialogue soit consolidé, maintenu, avec tous les gestes réciproques dont il a besoin pour se consolider et aboutir.
J'ai redit à Silvan Shalom le soutien que la France apporte au plan de retrait de Gaza du Premier ministre, M. Sharon, qui est un objectif courageux, et qui est, pour nous, la première étape de la mise en oeuvre de la Feuille de route. L'objectif que nous recherchons, auquel nous sommes prêts à contribuer en tant que Français, en tant qu'Européens, reste le même, il est fixé par la Feuille de route, c'est celui de l'existence deux Etats, l'Etat d'Israël vivant en sécurité - et je veux redire ici que nous ne transigerons jamais avec la sécurité d'Israël - et l'Etat palestinien, indépendant, viable et démocratique.
C'est aussi le sens de la visite que j'ai faite lundi soir pour rencontrer le président Mahmoud Abbas et mardi matin à Gaza.
Merci Silvan de cette visite nouvelle et nous allons, tout à l'heure, inaugurer la nouvelle ambassade d'Israël à Paris. Je suis heureux d'accompagner le ministre israélien pour cette belle inauguration.
Q - Avez-vous une réaction concernant la mort de M. Hariri ?
Auriez-vous une explication, une réponse aux critiques qui vous ont été adressées sur la politique étrangère de la France par M. Cukierman il y a deux jours ?
R - Il y a quelques instants, le président de la République a exprimé l'indignation que nous ressentons, l'horreur de cet attentat, au coeur de Beyrouth, qui a coûté la vie à l'ancien Premier ministre, M. Hariri, et à plusieurs autres personnes. Il a eu l'occasion de présenter les condoléances que nous adressons à Mme Hariri, à toutes les familles qui sont endeuillées et au peuple libanais.
Bien sûr, cet assassinat touche une personnalité très importante - très importante pour le Liban et pour cette région - et nous avons souhaité que toutes les responsabilités, où qu'elles se trouvent, soient déterminées sur les raisons et les causes de cet assassinat.
Ensuite, vous m'interrogez sur les déclarations samedi de M. Cukierman. Je n'ai pas envie de polémiquer avec M. Cukierman. Franchement, je préfère l'action et les résultats. Le seul commentaire que je peux faire est de dire que, pour tous ceux qui suivent l'action de la France au Proche-Orient, depuis plusieurs années, ces commentaires de M. Cukierman sont inexacts ; il n'y a pas d'incompatibilité entre ce que nous faisons, aux côtés des autres Européens, pour aider au processus de paix entre Israéliens et Palestiniens d'un côté, et notre détermination totale, celle que le président de la République Jacques Chirac a encore réaffirmée ce matin en recevant M. Shalom dans son bureau, à lutter contre l'antisémitisme et toutes les formes de racisme. Il n'y a pas d'incompatibilité et donc les propos qui ont été tenus ne sont pas exacts.
Pour tous ceux qui conduisent cette politique, pour tous ceux qui la servent - je pense à nos diplomates - sur place, dans la région et ici, à Paris, ces propos sont injustes. L'effort entrepris depuis trois ans - que j'ai évoqué tout à l'heure - pour animer, pour consolider les relations entre nos deux sociétés, israélienne et française, porte des fruits, des résultats concrets et nous allons continuer. C'est cela qui compte, c'est cela qui m'importe ; ce qui m'importe, ce sont les commentaires positifs qu'a faits tout à l'heure Silvan Shalom sur cette action.
Et si je devais ajouter un dernier commentaire, je dirai que, pour le ministre que je suis, ce qu'a dit M. Cukierman serait presque décourageant.

Q - (A propos des motifs de l'assassinat de M. Hariri)
R - Le moment viendra de déterminer les responsabilités de cette tragédie de Beyrouth, de l'assassinat de Rafic Hariri et de plusieurs des personnes qui se trouvaient avec lui. Ce qui est visé, c'est probablement le processus démocratique, le processus politique qui doit être engagé dans ce pays. Mais je ne peux pas faire d'autres commentaires à ce stade, sauf exprimer - comme l'a fait le président de la République - l'émotion que nous ressentons, l'indignation et le souci que toutes les responsabilités soient dégagées.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 février 2005)